Ici, la musique est placée au centre. De l’image, du récit, d’un peu tout. Comment pourrait-il, d’ailleurs, en être autrement. Au tournant du siècle, Mark Kidel a donc filmé pour le compte de la BBC Robert Wyatt en studio, interprétant en compagnie de sept autres musiciens – et de Paul Weller, en plus, à la slide pour le dernier morceau – cinq extraits de son répertoire : Sea Song (1974), Gharbzadegi (1986), September The Ninth (1997), Left On Man (1991) et Free Will & Testament (1997). Pas de coupe, pas d’artifice de montage : simplement quelques gros plans plus appuyés sur le regard du maître qui, les yeux grands ouverts – il ne les cligne que fort peu, c’est saisissant – scrute on ne sait trop quoi. Un texte ancien qu’il aurait pu oublier, l’inspiration du moment qui pointe à l’horizon, la beauté fugitive qui nait sans cesse du plaisir du jeu collectif, malgré tout. Sans doute un peu de tout cela. Continuer la lecture de « « Free Will And Testament – The Robert Wyatt Story » de Mark Kidel (2003) »
Catégories mardi oldie
Ministry, With Sympathy (Arista, 1983)
Al Jourgensen, tête pensante de Ministry est un sacré numéro. À plus d’une reprise, il a mis au ban le tout premier album de son groupe : With Sympathy. Il fut un temps où le musicien refusait même de signer les exemplaires que ses fans lui apportaient, à moins de lui donner 1000$. Publié en 1983 sur la major Arista, l’album n’est pourtant pas ce vilain petit canard duquel nous devons absolument détourner le regard. Pour certains, il s’agirait même du meilleur album de sa carrière. Sans forcément aller jusque là (quoique…), reconnaissons à ce With Sympathy de vraies qualités, mais revenons un peu plus en détail sur sa genèse. Continuer la lecture de « Ministry, With Sympathy (Arista, 1983) »
Catégories chronique nouveauté
Alvilda, C’est Déjà L’heure (Static Shock)
« J’vois un vide que j’comprends pas »
La cellule de groupe entièrement (ou quasi) féminine est décidément bien ancrée dans l’histoire du rock et des musiques des marges, pour la plus grande joie des grands et des petits. Considérés avec bienveillance, parfois avec un brin de condescendance par la concurrence masculine, les groupes de filles trouvent souvent un accueil chaleureux du côté des fans (hommes et femmes) énamourés pour plusieurs raisons. Vrai ou pas, elles sont souvent nimbées d’une sorte d’innocence originelle, débarrassées des poses débiles et guerrières, combats de coq à la clé, des mascus de service. Continuer la lecture de « Alvilda, C’est Déjà L’heure (Static Shock) »
Catégories chronique nouveauté
EggS, Crafted Achievement (Howlin’ Banana Records / Prefect Records)
Que faire quand, à bout de souffle, on a écouté la quasi totalité des disques des Guided By Voices ? Se lancer à corps perdu dans les méandres de Crafted Achievment, le nouveau et second long format des EggS. En 2022, il avait fallu moins de deux écoutes de leur premier album (A Glitter Year) pour conclure que ces chantres des anti-héros des années 90 avaient tout bon. Avec des morceaux comme Old Fashioned Virtue ou Daily Hell, ce groupe français reprenait le flambeau des stakhanovistes américains de Dayton et rendait un peu de fierté aux orphelins de David Berman. C’était urgent, touchant sans être désuet, c’était pour ainsi dire un premier album parfait. Quid de la suite ? Les EggS ont-ils versé dans la compromission ? Vont-ils trahir leurs idéaux ? Ont-ils prévu de faire des reprises de Taylor Swift sur leur nouvel album ? Continuer la lecture de « EggS, Crafted Achievement (Howlin’ Banana Records / Prefect Records) »
Catégories selectorama
Selectorama : Memorials
Memorials est un ovni. Leur musique, issue d’expérimentations sur un enregistreur Reel to Reel, a beau être à la limite de l’avant-garde avec des morceaux presque tous différents, leur mélange de folk, de psychédélisme et de kraut est pourtant d’une grande cohérence. A l’image de leurs mélodies foutraques, pleines de surprises, mais qui restent gravées quasi instantanément dans votre esprit. Il n’est pas étonnant que Stereolab leur ait offert de les accompagner en tournée. Ils en sont d’ailleurs ressortis avec le surnom “Stereolab’s evil twin”. Verity Susman et Matthew Simms, respectivement anciens membres d’Electrelane et de Wire ont chacun sélectionné les cinq titres qui les obsèdent depuis quelques semaines. A l’image de leur épatant premier album, Memorial Waterslide, nous avons envie de nous perdre avec eux dans ce Selectorama d’une grande diversité. Continuer la lecture de « Selectorama : Memorials »
Catégories billet d’humeur, mardi oldie
Être en P.L.S. avec « H.M.S. Fable » de Shack
Pour tout être à fait honnête, nous n’avions pas vraiment prévu de parler de Shack et des rééditions de H.M.S. Fable (1999) et de … Here’s Tom With The Weather (2003). Tout a été écrit sur la carrière des frères Head, ex-Pale Fountains. Une photographie de Mick et de son frère John tenant le vinyle de H.M.S. Fable dans leurs mains a changé irrémédiablement la donne. Et si… Et si… John pouvait revenir aux affaires. Écrasé par la figure de son frère aîné, John Head a tout encaissé et a claqué la porte laissant à son frère le rôle du héros à la carrière solo au final assez heureuse. Ce billet d’humeur ne doit son existence qu’à une envie. À savoir celle de voir John Head publier son premier disque solo. Continuer la lecture de « Être en P.L.S. avec « H.M.S. Fable » de Shack »
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LA PLAYLIST DES NOUVEAUTÉS D’OCTOBRE 2024
On ne compte plus les artistes et groupes passés par cette exercice mensuel chez section26, auquel participe l’ensemble de la rédaction. Ce mois-ci, on ouvre avec Panda Bear, qui a eu l’idée lumineuse de faire appel à l’auteure du triple album Diamond Jubilee, qui a fait une quasi-unanimité chez nous ce printemps dernier, et vient tout juste de sortir en vinyl chez l’illustre label Superior Viaduct : l’obscure et fascinante Cindy Lee. Rien que pour cela, appuyez sur play et laissez défiler les perles.
Écoutez cette playlist sur votre plateforme favorite : YouTube, Deezer ou Spotify.
NDLR : les playlists créées sur les plateformes ne comportent pas l’intégralité des titres de la sélection commentée ci-dessous.
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Catégories chronique nouveauté
Sinaïve, Pop Moderne (Antimatière / SuperStructure)
« L’adolescence est terminée. » (Convergence)
« J’ai fait tant de saisons pour enfin éclore » (Elégie)
L’adolescence est, dit-on souvent, le moment passionnant de la véritable rencontre. Sur ce premier album, produit d’une lente gestation de six années et jalonnée de sept Ep’s dont avait suivi l’évolution avec passion et attention, le tandem Calvin Keller et Alicia Lovich (ainsi que Séverin Hutt à la basse) sont donc parvenus au premier terme d’un parcours qu’on leur souhaite encore long. Et c’est émouvant. Pas tellement parce qu’on continuerait ici de déceler les lueurs de ces flambeaux musicaux qui ont illuminé nos jeunesses, brillamment brandis par un groupe dont quelques décennies et une bonne génération nous séparent désormais. Continuer la lecture de « Sinaïve, Pop Moderne (Antimatière / SuperStructure) »
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Selectorama : eat-girls
Catégories mardi oldie
The Quick, Mondo Deco (Mercury, 1976)
Avant l’explosion commerciale de la powerpop à la fin des années 70 (The Knack, The Romantics, The Cars, Shoes), les groupes ont navigué à vue, souvent sous les radars du grand public. C’est notamment le cas des Californiens de The Quick : Mondo Deco (1976), leur unique album, avait pourtant l’envergure d’un classique. Les Young Republicans (leur premier blase) se forment autour de Danny Wilde (chant, guitare rythmique), Steven Hufsteter (guitare et principal compositeur), Billy Bizeau (claviers), Ian Ainsworth (basse) et Danny Benair (batterie), et la formation est repérée par Kim Fowley. Fort d’une carrière déjà riche depuis les années 60 (The Hollywood Argyles, B. Bumble and the Stingers…), le producteur lunatique connaît alors un second souffle (voir même une tempête) avec les Runaways. Les Young Republicans, devenus entre temps The Quick, signent chez Mercury et sont envoyés en studio, en compagnie de Kim Fowley et d’Earle Mankey, ancien membre d’Halfnelson/Sparks, une des influences principales de la formation. Continuer la lecture de « The Quick, Mondo Deco (Mercury, 1976) »
Catégories chronique nouveauté
Reymour, NoLand (Knekelhuis)
Selon une source sûre, Reymour a attiré 400 personnes à Petit Bain il y a quelques jours. Pas mal pour un duo pas loin d’être inconnu, véhiculant une image de musiciens de peu, lo-fi comme on dit. Passionnant de s’arrêter sur ce binôme, Lou Savary et Luc Bersier qui ont grandi en Suisse, se sont installés à Bruxelles, ont sorti une première cassette sur un label de Berlin et trouvé refuge pour Leviosa (2021) et NoLand chez la maison de disques d’Amsterdam Knekelhuis. Pour un album appelé NoLand qu’on pourrait traduire par SansTerre, ou PasDePays, effectivement ces jeunes gens ne s’embarrassent pas de frontières, et tant mieux. Continuer la lecture de « Reymour, NoLand (Knekelhuis) »
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Graham Gouldman : « Il n’y a que deux sortes de chansons : les bonnes et les mauvaises »
Dans son autobiographie, Wild Tales (2013), Graham Nash raconte, avec un ton d’incrédulité, que les décennies ne sont pas parvenu à atténuer cette rencontre, en 1965. A la demande insistante de leur ex-manager Michael Cohen, lui-même tanné de près par une de ses voisines dont le fils, prétend-elle, se pique d’écrire des chansons, les Hollies au complet acceptent, non sans réticence, de rendre visite à ce gosse juif de dix-neuf ans dans les beaux quartiers de Manchester, bien décidés balayer ses prétentions d’un revers dédaigneux. Sans se démonter, le gamin en question leur joue coup sur coup trois de ses créations des dernières semaines : Bus Stop d’abord, Look Through Any Window ensuite. Les Hollies s’empressent d’acheter, bouche-bée. Et enfin No Milk Today, qu’il a déjà promis à un autre groupe du coin, pour faire bonne mesure. Figure aussi discrète que majeure de la pop de l’ère classique, Graham Gouldman a poursuivi sa longue route ensuite, enchaînant les succès pour les autres – Hollies, Yardbirds, Ohio Express : la liste est aussi interminable qu’impressionnante – et pour lui, au sein de 10CC puis de Wax. Depuis un peu plus d’une décennie, il a également enrichi ce patrimoine personnel pléthorique de quelques albums solo – I Have Notes, le troisième en douze ans est sorti sans bruit cet été – qui prouvent qu’il n’a rien perdu de son enthousiasme ni de son savoir-faire. Continuer la lecture de « Graham Gouldman : « Il n’y a que deux sortes de chansons : les bonnes et les mauvaises » »
Catégories selectorama
Selectorama : Adrien Kanter
Il en est des musiciens qui arrivent à construire une bulle d’élévation spirituelle autour de leurs œuvres. On sent qu’ils investissent dans leur façon de jouer, de composer, de produire plus qu’une simple envie de façade sociale ou de désir de succès. C’est le cas d’Adrien Kanter dont la musique de voyageur outsider semble rejoindre, par des méandres insaisissables, teutons planants, jazzmen libres ou guitaristes prog britannico-lysergiques. Dans ce rock spatial qu’il cultive dorénavant en accord avec la nature de sa Savoie d’accueil (où on le voit monter à cheval sur les superbes photos presse), on a envie de se perdre comme dans une cérémonie de révélation (on pense à un bol de peyotl dans un film perdu de Jodorowsky, ou au piment hallucinogène d’un épisode des Simpson) angoissante, parfois accueillante, parfois reposante, toujours remuante. Dans cet ensemble homogène quasiment instrumental, entre les incantations à on ne sait quel divinité, on se voit obligés de construire nos propres repères et de suivre l’avancée du disque « comme une marche en montagne » extatique, exigeante physiquement, mentalement toujours surprenante. De toute façon, nous, dès qu’on entend du saxophone qui serpente dans de la reverb, on est charmé. C’est l’âge. En attendant de récupérer de ce trip inattendu, Section26 a demandé à Cowboy Kanter ce qui le nourrissait en ce moment. Continuer la lecture de « Selectorama : Adrien Kanter »
Catégories chronique nouveauté
Nick Lowe & Los Straitjackets, Indoor Safari (Yep Roc)
Dans les mesures finales de Jet Pac Boomerang, l’une des chansons de son nouvel album – le premier depuis une grosse dizaine d’années – Nick Lowe se permet de glisser une citation des Beatles en guise de conclusion. Quelques notes et peu de mots extraits de Please Please Me – « Last night I said these words to my girl. » Pour le fringant jeune homme de soixante-quinze ans, l’histoire musicale semble bien s’être arrêtée au moment où la chanson se termine. En s’acoquinant avec Los Straitjackets, une bande de rockers rétro venus de Nashville et arborant des masques de catcheurs mexicains, l’ex-gendre de Johnny Cash tourne résolument le dos à toute prétention à la modernité pour prolonger sur disque les plaisirs simples et ludiques régulièrement éprouvés sur scène en compagnie du groupe : une célébration joyeuse et formellement irréprochable des musiques populaires américaines solidement connectées à leurs racines et encore préservées des contrecoups de la British Invasion. Continuer la lecture de « Nick Lowe & Los Straitjackets, Indoor Safari (Yep Roc) »
Catégories avant-première
Eggs, la bonne pioche
Il y a certains groupes qu’on est fiers d’avoir accompagnés depuis leurs débuts. Eh non, il ne s’agit pas toujours de ces hérauts de la pop moderne au crépuscule de leur carrière, mais bien de petits groupes français proches de nous, qui ont émergé ces dernières années, souvent freinés par la pandémie. En Attendant Ana, Sinaïve ou encore Eggs sont de ceux-là, sur qui nous misons à long terme. Ces derniers partaient d’un quatuor qui s’est largement étoffé depuis leurs débuts, puisque Charles Daneau et le noyau dur de membres originels (Leo Deville, Grégoire Bayart et Manolo Freitas, rejoints par Rémi Studer à la batterie) aiment s’entourer de contributeurs occasionnels ou non, comme Erica Ashleson (SCHØØL, Special Friend, Dog Park), Come Ranjard, Cyprien Vandenbussche, et toujours le tandem d’inséparables Margaux Bouchaudon et Camille Fréchou (En Attendant Ana) qui viennent chacun apporter une touche de plus à leur œuvre collective. Alors non, l’idée n’est pas de finir en orchestre symphonique, bien au contraire. At The End Of The Road est le second single de Crafted Achievement, leur deuxième album prévu pour le 1er novembre, toujours chez Howlin’ Banana et Prefect Records, et révèle une certaine maitrise à réaliser des clips bouts-de-ficelle aussi attachants que leur jangle pop enjouée et mélancolique. Continuer la lecture de « Eggs, la bonne pioche »
Catégories mardi oldie
Redd Kross, Phaseshifter, (This Way Up/Mercury, 1993)
Laissez-moi vous parler d’un temps que les moins de trente-cinq ans ne peuvent pas franchement se représenter. Un temps où UN SEUL disque pouvait rester introuvable assez longtemps. Une époque, bénie ou non, où le combustible d’un FANtasme pouvait rester à vif à rougeoyer assez longtemps. Un temps où la quête était probablement plus importante que son objet. Et l’objet, le grand secret, en l’occurrence ce n’est pas ce disque mais bien le précédent album de Redd Kross, Third Eye, paru chez Atlantic (une major, un comble) en 1990. On a eu beau faire quelques belles maraudes (en France, dans l’espace Schengen, en région et au Royaume Uni), impossible de mettre la main sur Third Eye, le disque d’un groupe qui alors, dans notre petit cercle d’initiés, jouit d’une encore plus grande renommée cool que, au hasard, les Beastie Boys. C’est rigoureusement exagéré (les rappeurs du Bronx n’ont pas vraiment encore tout à fait regagné leurs galons dans la sphère indie) mais ça vous donne une assez belle idée du charisme rétrospectif et toutefois intact de Redd Kross. Bisque bisque rage mais pas si grave, au niveau CEE (les îles britanniques y sont encore) nous avons The Pooh Sticks sous la main, un groupe gallois excessif qui prône également un retour glamour aux bonnes vieilles valeurs du, lâchons les chiens, classic rock. Comme chez les Américains, le détournement et l’ironie ne se départissent jamais d’un respect profond et inaltérable. Continuer la lecture de « Redd Kross, Phaseshifter, (This Way Up/Mercury, 1993) »
Catégories chronique nouveauté
Dummy, Free Energy (Trouble In Mind)
Après deux EPs en 2020, Dummy publiait l’année suivante Mandatory Enjoyment, un premier album remarqué. Dummy s’y emparait, entre autre, de l’héritage de Stereolab, le revigorant d’une frénésie rare, proposant un rock hypnotique, nerveux et électrique. Trois ans plus tard, nous sommes ravis de retrouver les Californiens, autour de la promesse d’une Free Energy, toujours chez la solide maison de disque Trouble In Mind (En Attendant Ana, Melenas, The Tubs, Klaus Johann Grobe etc.). Joe Trainor, Emma Maatman, Alex Ewell et Nathan O’Dell reviennent gonflés à bloc. Là où Dummy aurait pu se contenter de faire fructifier les idées du précédent, les quatre musiciens ont expérimenté et se sont mis en danger. Continuer la lecture de « Dummy, Free Energy (Trouble In Mind) »
Catégories interview
Uni Boys : « La power pop ne doit pas être un modèle dont il faut respecter scrupuleusement les règles »
Attablés à la terrasse d’un bistrot, les Uni Boys au quasi-complet – Reza Matin, co-leader et guitariste, a du prématurément abandonner ses camarades pour rejoindre en tournée The Lemon Twigs dont il est également le batteur et le bassiste – semblent goûter sans réserve aux plaisirs estivaux de leur escapade parisienne. La prononciation est encore un peu hésitante à l’heure de commander une tournée de « Kir Royal » mais la descente est impeccable. Noah Nash (guitariste et chanteur), Michael Cipolletti (basse) et Artie Fitch (batterie) paraissent avoir oublié pour quelques jours leur Los Angeles natal ainsi que les corvées attenantes aux jobs alimentaires qu’ils ont encore contraints d’occuper. Manifestement, le fait d’avoir enregistré coup sur coup deux des albums de rock mélodique et densément électrifié les plus remarquables et les plus rafraichissants de la décennie en cours ne garantit même plus à ces jeunes aussi talentueux que passionnés de pouvoir vivre décemment de leur art. Dont acte. Il n’en demeure pas moins que ces dignes héritiers locaux des Nerves d’antan méritent amplement qu’on prête une oreille attentive à leurs tubes flamboyants. Et qu’on s’intéresse un peu à leur parcours – encore bref mais plein de promesses à tenir. Comme chantaient The Who, ces kids sont dac. Continuer la lecture de « Uni Boys : « La power pop ne doit pas être un modèle dont il faut respecter scrupuleusement les règles » »
Catégories Chronique en léger différé
Redd Kross, Redd Kross (In The Red)
J’ai écouté le futur des frères D’Addario et il s’appelle Redd Kross. Blague – et référence springsteenienne – à part, c’est une source d’étonnement et de même de perplexité qui n’est pas prête de se tarir. Pourtant, force est de constater qu’au beau milieu des foules qui s’extasient légitimement sur les performances virtuoses de The Lemon Twigs, l’évocation du nom de Redd Kross ne suscite, très souvent, qu’une indifférence embarrassée ou un haussement d’épaule qui dissimule tant bien que mal l’ignorance ou l’absence d’intérêt. Des frangins longilignes – un guitariste et un bassiste – qui secouent leurs tignasses impeccablement échevelées, attifés de panoplies rétros témoignant ostensiblement d’une maîtrise irréprochable des codes pop sous-culturels et qui brassent, par chansons de trois minutes interposées, soixante années de références musicales ? Ça ne sonne la cloche de personne ? Eh bien non, manifestement. Ou de pas grand monde. Continuer la lecture de « Redd Kross, Redd Kross (In The Red) »
Catégories chronique nouveauté, selectorama
Selectorama : Mayfly Two
Mayfly Two, c’est d’abord l’occasion de retrouver avec joie Anne Bacheley, légende discrète de la pop française anglophone des années 2000. A la tête d’une petite œuvre fais-le-toi-même plus ou moins difficile à trouver (des CDR, des œuvres numériques), elle a eu le privilège de figurer dans des listes de recommandations de Stephen Pastel himself. Bien sûr que les Pastels figurent en bonne position dans les influences de la dame, mais Anne est avant tout une âme libre qui se fiche de tout carcan et de toute étiquette. Elle écrit et compose parce qu’elle en ressent le besoin, le reste n’est pas son problème. Plutôt solitaire musicalement jusqu’ici, elle semble avoir trouvé en Chris Fox (from Dundee, 100 km au nord d’Edimbourg) un alter ego musical avec qui elle partage sa passion pour la musique et cet alias de Mayfly Two. Continuer la lecture de « Selectorama : Mayfly Two »
Catégories chronique nouveauté
Michèle Bokanowski, Cirque (Kythibong Records)
La parution il y a deux ans de Rhapsodia / Battements solaires dans la géniale série Recollection GRM nous avait convaincu du caractère décisif du travail de Michèle Bokanowski. Son passage au festival Présences électroniques aussi, avec Deuxième chambre d’inquiétude, une pièce au minimalisme peu commun. Car il faut reconnaître au parcours de Michèle Bokanowski une exigence et une cohérence à l’image de la virtuosité de son traitement du matériau électro-acoustique : profondeur et richesse des textures côtoient sophistication des timbres, et portent à leur point le plus haut une pratique du montage et de la manipulation des objets sonores. Continuer la lecture de « Michèle Bokanowski, Cirque (Kythibong Records) »
Catégories avant-première
La première seconde du reste de la vie de Sinaïve
Sans doute que Calvin Keller, tête penseuse et organe central créatif du désormais trio Sinaïve a du penser à ceux qui appuieront sur play pour écouter le premier album de son groupe, et ce dès la première seconde. On s’était déjà répandu en éloges sur l’inspiration pop et noise du groupe, depuis un certain temps déjà. Et d’un EP à l’autre (sept au total depuis 2018, si on compte leur cassette de reprises), ils n’avaient presque pas fait défaut. (SuperStructure) Superstar est donc le premier titre de ce premier disque. Et il démarre comme un avertissement. Continuer la lecture de « La première seconde du reste de la vie de Sinaïve »
Catégories mardi oldie
Tequila, Rock and Roll (Zaphiro, 1979)
Les Madrilènes de Tequila traversent les époques et les pays. Leur musique appartient aux années 70 mais annonce les années 80, tandis que ses membres rassemblent l’Argentine, l’Espagne et leurs histoires respectives. En 1976, Ariel Rot et Alejo Stivel débarquent dans notre bonne vieille Europe. Cette année là, Isabel Perón est renversée par un coup d’état. Les deux jeunes musiciens fuit la dictature militaire (1976-1983) et rejoignent un pays fraîchement démocratique : l’Espagne. L’année précédente (1975), Franco décède. À la surprise générale, son successeur, le roi Juan Carlos 1er, accompagne l’Espagne dans une transition démocratique. Ce changement bouleverse la scène culturelle et musicale ibérique. Il donnera lieu, aux débuts des années 80, à la mythique movida Madrileña.
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Catégories billet d’humeur
« Avez-vous peur ? »
Dans ces moments tragiques, d’apocalypse pour le pays de ma naissance et ses habitants, la seule chose que je sache faire depuis le lieu où je suis c’est continuer à travailler, et écrire ici, en disant les sentiments et les réflexions et les fragments de pensée : car la pensée n’est plus, à propos du Liban et ce que la guerre infinie fait de nous, que fragmentée, irrésolue, indicible dans sa totalité. Car la totalité n’existe plus vraiment : lorsque la réalité, là-bas, est celle des bombardements et des combats, il ne reste rien à quoi se raccrocher. Ce qui m’a toujours extirpé de la violence, ce sont les lectures, enfant, les disques, ensuite. J’essaie de le dire ici. Et parfois certains résonnent avec le monde comme celui-ci : un seul morceau, emprunté à Muslimgauze et à Ssiege, mixant les deux via le duo Time is Away. Que reste-t-il ? Continuer la lecture de « « Avez-vous peur ? » »
Catégories interview
Matthew Caws (Nada Surf) : « Les chansons sont un espace de sécurité totale »
Pendant longtemps, bon nombre des groupes que nous chérissions étaient ceux avec lesquels nous avions grandi. Désormais, il y a ceux avec lesquels nous choisissons de vieillir. Parfois, ce sont les mêmes. Mais pas toujours. En musique comme en amour, la nuance est d’importance. A la simple continuation nostalgique des émois de jeunesse, dont l’intensité initiale suffit parfois à retarder la dissipation inévitable, il faut parvenir à substituer une autre source d’enchantement. Moins bouillonnante, sans doute. De celle qui puisse survivre à la dissipation des attentes illusoires de la nouveauté radicale, d’un chef d’œuvre susceptible de rebattre l’ensemble des cartes usées aux encornures d’un jeu distribué il y a plusieurs décennies. Les albums de Nada Surf se suivent, plus ou moins régulièrement. Ils se ressemblent aussi, souvent, et ça n’est pourtant jamais un motif de déception. Le sillon creusé avec persévérance par Matthew Caws et ses camarades est suffisamment profond et fertile pour y replonger à chaque occasion. Comme tous ses prédécesseurs sans exception, Moon Mirror contient sa douzaine d’excellentes chansons, alternant entre accélérations powerpop électrisées et ballades méditatives. Comme à chaque fois, l’impression s’impose d’entendre se renouer les fils d’une conversation intime avec l’un des auteurs les plus touchants dans les évocations honnêtes de ses fragilités. Continuer la lecture de « Matthew Caws (Nada Surf) : « Les chansons sont un espace de sécurité totale » »
Catégories selectorama
Selectorama : Diode
Depuis quelques années – on ne va pas s’en plaindre – un petit club de groupes américains ont su redonner du lustre au post-punk, constituant un nouveau sous-courant que quelques obsédés de la catégorisation ont nommé egg punk. Leurs noms ? Lithics, Snõõper ou encore Diode, pour ne nommer que les plus intéressants d’entre eux. S’abreuvant aux meilleures sources, ils ont notamment emprunté à Devo une certaine raideur rythmique mécanique ainsi que cette façon de chanter toute robotique qui a fait la gloire du quintette de Milwaukee. Ils se distinguent néanmoins de leurs illustres mentors par une production plus brute et sans chichis, plus caractéristique du punk pur sucre. Mais chez Diode, on apprécie particulièrement l’usage de synthés vintage et minimalistes, qui ajoute une dimension presque pop à l’ensemble. On ne
résiste pas non plus à la voix de furie de la charismatique Kiana (KT dans ce Selecto) qui apporte un grain de folie très réjouissant à la musique des Californiens. On recommandera à ceux qui découvriraient Diode aujourd’hui d’aller jeter une oreille aux excellents morceaux que sont Tomothy, Ugly, ou la formidable Card Dealer, meilleur titre de 2, leur dernier disque sorti cette année sur le très estimable label Under The Gun Records. Kiana, Theo et Vinny se sont prêtés au jeu du Selectorama, et le moins qu’on puisse dire, c’est qu’on s’attendait pas à y trouver le dernier morceau ! Continuer la lecture de « Selectorama : Diode »
Catégories interview
Fat Dog : « On ne veut surtout pas tomber dans la routine »
Si à une certaine époque la rumeur sur un nouveau groupe se faisait via la presse musicale, Fat Dog semble avoir bâti sa réputation sur ses prestations scéniques endiablées. Avec seulement trois titres electro-rock publiés au moment de cette interview, leurs concerts parisiens, briochins et berruyers avaient déjà marqué les esprits. Retranscrire cette énergie et cette folie sur disque sans décevoir a visiblement préoccupé plus que de raison Joe Love, le leader du groupe qui cache ses insécurités derrière une attitude de slacker. Ils y sont parvenus sur WOOF, avec l’aide du producteur James Ford (Depeche Mode, Arctic Monkeys, Fontaines D.C.) qui a réussi à canaliser les ambitions et les égarements d’un groupe bien plus exigeant et sérieux qu’il n’en a l’air. La preuve via cet entretien où il presque a fallu ramer pour que les personnalités se dévoilent et pour obtenir des informations sur l’album. Continuer la lecture de « Fat Dog : « On ne veut surtout pas tomber dans la routine » »
Catégories selectorama
Selectorama : Ian Svenonius
Ian Svenonius n’est pas du genre à se reposer sur ses lauriers. Depuis plus de 35 ans, avec pas moins de 20 albums sortis sous différentes bannières – Nation of Ulysses, Cupid Car Club, Weird War, The Make-Up, Chain and the Gang etc. – et des milliers de concerts à travers le monde, le dandy rocker de Washington D.C. n’a eu de cesse de donner de sa personne. Le voici de retour avec le savoureux nouveau single Black Gold, extrait de l’album Charge Of The Love Brigade, à paraître dans les semaines qui viennent sous l’avatar d’Escape-ism. Je parle de retour mais depuis 2017, Escape-ism a été omniprésent, sortant tout de même 4 albums coup sur coup – notamment le remarquable The Lost Record – ainsi que l’admirable single Rebel Outlaw en février dernier, qu’on a écouté et réécouté compulsivement depuis. Svenonius avait même eu l’humour culotté de faire presser en vinyle The Silent Record – désormais épuisé –, disque entièrement silencieux, sorte de version musicale du Carré blanc sur fond blanc de Kasimir Malevitch. John Cage aurait certainement apprécié ! En 2017, Svenonius s’était également offert le plaisir de publier un livre désopilant ; Stratégies occultes pour monter un groupe de rock, ouvrage dans lequel on avait retrouvé tout l’esprit facétieux de ses délectables interviews. Continuer la lecture de « Selectorama : Ian Svenonius »
Catégories interview
Deeper : « Aujourd’hui, c’est presque une insulte d’être qualifié de post-punk »
Deeper, ça a d’abord été pour moi une révélation sur scène, en novembre dernier à la Boule Noire. « C’est trop bien, non ? », « Il chante un peu comme Robert Smith, tu trouves pas ? » ; je cherchais confirmation autour de moi. J’avais assez apprécié ce que j’avais écouté pour avoir la curiosité d’aller au concert, mais je n’avais pas imaginé être aussi impressionnée. Parce que Deeper, c’est un peu générique comme nom, des nouveaux groupes de post-punk il y en a plein, et puis on ne sait pas trop à quoi ils ressemblent, ces gars-là. C’est qu’ils jouent de cette musique pressée, à guitares aiguisées et motifs répétés à laquelle il est si tentant de mettre une étiquette. C’est peut-être cette voix qui fait la différence en trahissant – pour le meilleur – la sensibilité mélodique du groupe ; il y a en tout cas, aux premières résonances de chaque titre, cette efficacité immédiate et cette pensée : « Ah non, c’est elle ma préférée ». Au micro, c’est Nic Gohl, chanteur et guitariste, leader par défaut d’un quatuor dans lequel aucun ne prend plus de place que l’autre ou ne cherche à paraître différent de ce qu’il est. Continuer la lecture de « Deeper : « Aujourd’hui, c’est presque une insulte d’être qualifié de post-punk » »
Catégories mardi oldie
Los Planetas, Pop (RCA, 1996)
Il faut être quelque peu hardi pour nommer son disque Pop… Los Planetas s’autorisent cette fantaisie en 1996 pour leur deuxième album. Pourtant, tout reste à faire ou presque pour les Espagnols au mitan des années 90. Le groupe se forme quelques années plus tôt à l’Université de Grenade. Juan Rodríguez (Jota) étudiant en sociologie y rencontre Florent Muñoz, lui en cursus de droit. Les deux partagent un amour viscéral pour le Velvet Underground, mais aussi The Church et la littérature beatnik (Kerouac). Ils gravent plusieurs démos et se font remarquer dans des concours de groupes non signés (Diaro Pop, Disco Grande, Rock de Lux). RCA prend contact avec eux à l’époque, cependant la major est précédée dans les faits par le label madrilène culte Elefant (Family, Le Mans, La Casa Azul…). Continuer la lecture de « Los Planetas, Pop (RCA, 1996) »
Catégories interview
Meyverlin : « On est sortis de notre zone de confort »
Meyverlin est de retour avec un deuxième album, Therefore, sorti sur le label Too Good To Be True. Notre précédente rencontre datait de la fin de l’année 2021 suite à la sortie de Daily Events. Ce petit miracle de pop était né de la fusion entre trois mondes musicaux a priori très éloignés, d’un trait d’union habilement dessiné entre trois régions du globe (Paris, Lexington et Auxerre). La spontanéité, le côté récréatif et une complicité autant artistique qu’amicale furent les éléments fondateurs, un cahier des charges implicite du premier album de ce trio pas comme les autres. Les chansons avaient été écrites et composées dans une sorte d’urgence, sans véritable plan préconçu ni arrière-pensée. Trois ans plus tard, on a retrouvé Philippe Lavergne (Les Freluquets, Qu4tre, Herzfeld, Bassmati…), Thierry Haliniak (My Raining Stars) et Gilles Ramey à Paris pour qu’ils nous racontent la genèse de ce nouvel album sorti au printemps dernier. Continuer la lecture de « Meyverlin : « On est sortis de notre zone de confort » »
Catégories selectorama
Selectorama : Demain Les Flammes
Depuis qu’il est adolescent, Nathan Goslhem a toujours gravité dans le monde du punk, adorait éditer des écrits – fanzines comme romans – narrant cette contre-culture. Une passion toujours fidèle pour les marges. Vers 2016, il publie de façon bénévole des revues éclectiques et radicales sous le nom de Demain Les Flammes, une aventure solitaire sur le papier, mais autour de laquelle gravitent des personnes motivées pour la traduction, l’illustration, la mise en ligne et l’impression. « L’idée des revues était de proposer des sommaires sur des sujets très précis, mais sans approche de spécialiste. L’ambition était de varier les formats (récits, entretiens, BD, reportages photo…), mais des trucs de fond, qui ne périment pas, et qui peuvent être lus à peu près par tout le monde, tant qu’il y a une forme de curiosité pour les contre-cultures ou considérées comme telles. » Jeune, Nathan a lu Double Duce de Aaron Cometbus, musicien et écrivain punk Américain dans sa version originale, il en a compris l’essentiel, un brûlot bordélique et fougueux. Ce fût donc une évidence de pouvoir donner de la visibilité à ses livres, qui commençaient timidement à être traduits en français. Continuer la lecture de « Selectorama : Demain Les Flammes »
Catégories billet d’humeur
Pour l’interdiction des reformations de groupes
« Oasis : les frères Gallagher alimentent la rumeur d’une reformation du groupe. » Même Le Monde s’est fendu d’un article en ligne. La presse anglaise, de son côté, en a fait ses gros titres. Le retour quasi-messianique du groupe de Manchester s’apparente déjà à une campagne de promo bien huilée. Les réseaux sociaux ont amplifié, y compris dans l’indignation, le tsunami provoqué par l’annonce d’une date énigmatique, pour l’instant apocryphe. Emmanuel Macron aurait du leur demander conseil pour l’annonce de son prochain ministre. Continuer la lecture de « Pour l’interdiction des reformations de groupes »
Catégories chronique réédition, mardi oldie
Mark Lanegan, Bubblegum XX (2004, rééd. Beggars Arkive)
Cinquième album de Mark Lanegan, Bubblegum (2004) est une rupture dans la discographie de l’ex-Screaming Trees. La carrière solo de Mark Lanegan commença au final comme un accident. Enregistrant des reprises avec Kurt Cobain et Kris Novoselic, Lanegan sortit en catimini en 1990 The Winding Sheet grâce à une avance de Sub Pop. Ce disque est sec comme un coup de trique et décharné à l’extrême. Mais sans s’en rendre compte, Mark Lanegan venait de débuter une nouvelle carrière avec évidemment de nouveaux ennuis. L’enregistrement du disque suivant, Whiskey for the Holy Ghost (1994), dura des années et fut un cauchemar pour le label ainsi que pour les ingénieurs du son qui osaient s’approcher de la console. Sur ce disque, comme sur les trois suivants, Lanegan traçait sa voie bordée par les ombres de Jeffrey Lee Pierce et de Johnny Cash. Ce dernier, séduit par l’âme noire de ce grand échalas, lui proposa d’ouvrir pour lui lors d’une de ses tournées américaines. Johnny Cash, le Gun Club… Toutes ces références vont être mises en arrière plan avec Bubblegum. Lanegan casse son jouet (une habitude) pour se créer une nouvelle identité. Continuer la lecture de « Mark Lanegan, Bubblegum XX (2004, rééd. Beggars Arkive) »
Catégories interview
Fontaines D.C. : « Nous n’avons plus besoin de nous freiner »
Avec Romance, leur quatrième album, Fontaines D.C. risque de passer du statut de formation importante à celui de groupe qui va marquer son époque. Plus varié musicalement, avec un son énorme et surtout moins monotone, on sent une ambition à la fois liée à l’envie de ne pas s’endormir sur ses lauriers et à une volonté de passer au stade supérieur. En plus de leurs talents d’écriture, ils se sont donnés les moyens d’y parvenir en changeant de label (exit Partisan, bonjour XL), en abandonnant leur producteur historique pour James Ford (Depeche Mode, Arctic Monkeys, etc) et en changeant de look. Le pari est réussi car le groupe garde une identité très forte et, malgré des titres plus pop, rien ne sent le calcul. Cela se confirme lors de notre rencontre avec Conor Deegan III dans les locaux de sa maison de disques. Disponible, réfléchi et même amical une fois l’interview terminée, il nous raconte la genèse de ce nouvel album qui semble les avoir libérés du poids d’une routine qui aurait pu s’installer. Continuer la lecture de « Fontaines D.C. : « Nous n’avons plus besoin de nous freiner » »
Catégories selectorama
Selectorama : Cassie Ramone
C’était il y a bientôt 15 ans déjà. Nous étions sur la fin de la première décennie des années 2000, inaugurée par le retour en force des groupes de rock comme The Strokes, The White Stripes, Yeah Yeah Yeahs, Black Rebel Motorcycle Club et autres Art Brut. En 2008, alors que Jay Reatard débutait en force sa carrière solo et que Crystal Stilts, Dum Dum Girls et Brilliant Colors n’allaient pas tarder à entrer à leur tour dans l’arène, sortait le premier album décapant des Vivian Girls, trio pop/punk/garage basé à Brooklyn. Le savant mélange de grosses guitares à de savoureuses mélodies harmonisées façon Shangri-Las bourgeonnant comme des roses au milieu des orties, évoquait beaucoup Black Tambourine, l’incontournable groupe de Mike Schulman. Malgré le passage du temps, des titres comme Damaged, Going Insane ou comme l’excellente Where Do You Run demeurent toujours aussi percutants et réjouissants. On n’a pas non plus oublié des perles comme I Can’t Get Over You – dont la partie vocale finale me serre à chaque fois le cœur – ou The Desert, qu’on trouve sur Everything Goes Wrong, le deuxième des quatre disques qu’auront sorti les new-yorkaises entre 2008 et 2019. Continuer la lecture de « Selectorama : Cassie Ramone »
Catégories mardi oldie
Sagittarius, Present Tense (Columbia, 1968)
La compilation Nuggets (1972) est généralement considérée comme fondatrice dans la définition du garage-rock pourtant, entre autres merveilles, un trésor de sunshine pop s’y cache. En 1967, la radio américaine diffuse My World Fell Down de Sagittarius. Reprise d’une chanson des Britanniques de The Ivy League, la titre produit par Gary Usher, collaborateur des Beach Boys et The Byrds, obtient un modeste succès commercial (une soixante-dixième place) aux États-Unis. S’il propose initialement la composition au duo Chad & Jeremy, ces derniers la refusent, obligeant Usher à s’y coller avec un groupe de son invention : Sagittarius. Un an plus tard, Columbia donne au producteur l’opportunité de poursuivre l’expérience le long d’un album. Ce sera le magistral Present Tense. Continuer la lecture de « Sagittarius, Present Tense (Columbia, 1968) »
Catégories chronique nouveauté
Brigitte Calls Me Baby, The Future Is Our Way Out (ATO Records / PIAS)
Brigitte Calls Me Baby ont-ils la capacité de séduire le fan lambda de rock alternatif américain ? La réponse est évidemment oui. Le déhanché de Wes Leavins et les refrains devraient rapidement faire leur petit effet. Concernant les fans européens, les scribes de la RPM canal historique et les fanatiques de Morrissey, la réponse est quant à elle beaucoup moins sûre. Une rapide écoute pourrait ranger le disque entre le premier Menswear et une compilation de Gene. Il faut pourtant laisser sa chance au produit. Et se la jouer à l’américaine en ne connaissant aucun groupe de la deuxième division d’honneur anglaise des années 90 tout en faisant l’impasse sur les débuts de la carrière du Moz. Continuer la lecture de « Brigitte Calls Me Baby, The Future Is Our Way Out (ATO Records / PIAS) »
Catégories mardi oldie
Yargo, Bodybeat (Bodybeat, 1987)
Il y a des disques achetés il y a longtemps qui vous suivent toute la vie, presque clandestinement, sans faire plus de bruit qu’ils n’en ont fait à leur sortie. On avait inventé le mot « culte » pour ce genre d’œuvre, mais à l’heure de la malle à disques géante qu’est devenu l’internet, c’est juste le mot désigné pour un truc perdu dans la masse. Pour ne pas faire de révisionnisme, Bodybeat a quand même bénéficié d’un peu de lumière, de son ¼ d’heure de gloire en France – attention, le groupe avait joué sa carte de next big thing à la maison, avec couv du NME et tout – puisqu’il est parvenu jusqu’à moi, à la Fnac de Belfort et que le groupe de Manchester a joué aux Transmusicales, a eu son entretien dans les Inrocks bimestriels (et peut-être une apparition dans Best) et a même bénéficié de passages à la télé de papa (Décibels, mon amour). Manchester, ouais, juste avant que la ville ne se transforme en Madchester, usine sous ecsta fabricant du survêt ou du jeans taille XXL, proposait déjà des choses aventureuses, on le sait, et Yargo n’en était pas la moindre. Avec son sens de la formule, JD Beauvallet résumait leur musique avec une simple addition : Joy Division + la soul. Continuer la lecture de « Yargo, Bodybeat (Bodybeat, 1987) »
Catégories sous surveillance
Sous Surveillance : Bingo Crépuscule
Depuis la fin des années 70, la région Hauts-de-France est un territoire où les groupes issus des scènes punk, cold et hardcore foisonnent. Après Bunker Strasse ou Guerre Froide dans les 80’s, jusqu’à leurs descendants Traitre, Arsou, Utopie ou Douche Froide actuellement. Il faut dire que le terreau est propice, région sacrifiée et dénigrée depuis tant d’années, l’espoir que portaient les mines ou l’industrie longtemps fleuron national fut vite effacé par la montée en flèche du chômage et de la précarité qui ont pu favoriser l’arrivée du R haine et de sa politique abjecte, maintenant malheureusement implantée. Mais souvent, ou s’ancre ce climat anxiogène, subsistent ou naissent des poches de résistance, et c’est le cas ici. Continuer la lecture de « Sous Surveillance : Bingo Crépuscule »
Catégories post live
Melenas de cœur
Le quatuor de Pampelune en session live filmée aux Vinzelles à Volvic par Sébastien Faits-Divers
“Sensation intense de bien-être, d’optimisme”. C’est l’une des deux définitions que donne le Larousse du nom commun féminin, euphorie. Euphorie, c’est le mot qui s’est imposé à toutes celles et ceux qui s’étaient donnés rendez-vous le 30 mars dernier aux Vinzelles, à Volvic. Un samedi soir qui ne fut pas tout à fait semblable aux autres pour le public présent – avec badge et fanzine à la clé pour les premiers arrivés, entre autres –, un public constitué de béotiens et de connaisseurs, tous conquis par la pop élastique des quatre jeunes filles de Pampelune, hypnotisés par les visuels qui semblaient rebondir sur les rythmiques acrobatiques, les notes de synthés analogiques et les mélodies ultrachics. Pendant une heure et sans rappel – comme les plus grands (Felt, Stone Roses, Mary Chain, à peu près au hasard) -, elles ont pioché dans leurs trois albums, joué leurs hits parfaits – Bang, en plein dans le mille –, repris Eisbär dans la langue de Cervantes et surtout fait, comme rarement il m’a été donné de voir, l’unanimité d’une foule devenue sentimentale, insouciante, un sourire collé aux lèvres et des étoiles dans les yeux. C’était je crois un moment rare. Continuer la lecture de « Melenas de cœur »
Catégories mardi oldie
Basement Jaxx, Rooty (XL Recordings, 2001)
L’explosion commerciale de la musique électronique ponctue la fin des années 90 et le début de la décennie suivante. Musique underground pour les clubs, longtemps absente des radios et chambres adolescentes, puis en quelques années, les Daft Punk, Stardust, Fatboy Slim, Chemical Brothers ou The Prodigy changent sérieusement la donne. Dans ce tintamarre vibrant, Basement Jaxx dégainent deux classiques en 1999 et 2001 : Remedy et Rooty. Avec le duo britannique, la house music n’a jamais été aussi débraillée et aguichante. Felix Buxton et Simon Ratcliffe ne cherchent en effet guère l’approbation de leurs pairs mais misent sur l’efficacité et leurs mélodies pop. Continuer la lecture de « Basement Jaxx, Rooty (XL Recordings, 2001) »
Catégories sous surveillance
Sous surveillance : Violence Gratuite
Qui ?
Violaine Le Fur, une artiste transdisciplinaire, a étudié à la Sorbonne (histoire de l’art et archéologie) et poursuivi son cursus dans des écoles d’art (Villa Arson de Nice, La Cambre de Bruxelles) : elle y apprend beaucoup de choses, se forge une culture générale et conceptuelle, mais ne trouve pas sa place, se fait renvoyer ou prend la poudre d’escampette. Elle y fait l’expérience des rapports de classe, de domination et y constate aussi bien chez les professeurs que parmi ses camarades un certain formatage, un certain cynisme, quand ça n’est pas de la violence, symbolique ou autre, et du mépris pour les expressions populaires. « C’était il y a plus de 10 ans, et heureusement, les choses sont en train de changer depuis, les mentalités évoluent, et la parole se déploie heureusement grâce à la pensée décoloniale et féministe », nous précise-t-elle. Continuer la lecture de « Sous surveillance : Violence Gratuite »
Catégories chronique nouveauté
Deux disques expérimentaux sortis chez L’Eau des Fleurs
On pourrait établir une généalogie des musiques expérimentales en France à partir de quelques moments ou séquences emblématiques : le tournant des années 1960-1970 avec l’hybridation free-jazz/psych-kraut/early-electro (Heldon, Jean-Jacques Birgé, Red Noise, etc ; merci Le Souffle Continu !), le moment punk/post-punk et ses expérimentations early-indus (Metal Urbain, Pacific 231, Art & Technique, Déficit des Années Antérieures, le label Sordide Sentimental, etc.) ou encore la période 1990-2000 qui voit fusionner post-rock, free-noise et Extreme Computer Music (Le Syndicat, Sister Iodine, etc.). Avec des lieux emblématiques comme les Établissements Phonographiques de l’Est ou Les Instants Chavirés, les disquaires Wave et Bimbo Tower ou encore la librairie Un Regard Moderne. Continuer la lecture de « Deux disques expérimentaux sortis chez L’Eau des Fleurs »
Catégories mardi oldie
Eddy Current Suppression Ring, Primary Colours (Aarght! / Goner, 2008)
Mastered by Mikey Young, qui n’a pas un disque avec cette mention dans sa collection ? Depuis une quinzaine d’années, l’Australien travaille avec tout le monde, par exemple : Vintage Crop, Klaus Johann Grobe, Lewsberg, Exek, Charlene Darling, The Frowning Clouds, EggS, Ultimate Painting ou The Shifters… Au départ de ce bouillonnement artistique, il y avait un groupe, Eddy Current Suppression Ring. Dans les années 2000, la formation de Melbourne propose une musique punk viscérale et singulière. En l’espace de quatre ans, Mikey Young accompagné de son frère Danny ainsi que de Brad Barry et Brendan Huntley, publient trois albums magistraux. D’Eddy Current Suppression Ring (2006) à Rush To Relax (2010), le groupe australien pose ainsi les bases d’un son qui en a touché plus d’un à travers la planète. Continuer la lecture de « Eddy Current Suppression Ring, Primary Colours (Aarght! / Goner, 2008) »
Catégories playlist
LA PLAYLIST DES NOUVEAUTÉS DE JUILLET 2024
Chassons donc les nuages de ces derniers mois avec cette playlist qui conjugue toutes les secousses qui nous animent, avec des légendes immortelles (Brian Eno, Primal Scream –même si…-, The The, Kim Deal), des hérauts de l’internationale indie (Field Music, A Certain Ratio, Alan Sparhawk de Low), des revenants réapparus d’on ne sait où (Cassie Ramone des Vivian Girls, Redd Kross, The Softies) et une belle brochette de nouveaux venus ou pas-là-depuis-longtemps (Dummy, Being Dead, Best Bets). Et savourons les rayons régérérants de la belle saison en les écoutant. (TS)
Écoutez cette playlist sur votre plateforme favorite : YouTube, Deezer ou Spotify.
NDLR : la playlist Youtube ne comporte pas l’intégralité des titres de la sélection commentée ci-dessous.
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Catégories sous surveillance
Sous surveillance : Klein
Qui ?
Benjamin Porraz endosse le nom de jeune fille de sa mère, Klein, et place sur la carte, sans image, sans enrobage, sa musique instrumentale qu’il veut disponible pour l’autoradio, pour la maison. Quand il a du temps, il compose et s’enregistre où il peut, tout seul, en multi instrumentiste, jouant du logiciel Logic, un instrument à part entière. Depuis ses 11 ans, il en a 32 aujourd’hui, il joue aussi de la guitare. Au lycée, il fréquente le Gibus, joue avec ses groupes de copains au moment où sa génération réinvente le rock à Paris, en jeans serrés et blouson de cuir, « une bonne école ». Après le bac, il fait une école de cinéma (ESRA, Paris, XVe) pour devenir ingé son et à partir de là, tout s’enchaîne : le groupe sérieux et «pro » (Agua Roja, avec Clément Roussel, rencontré pendant ses études et la chanteuse November Ultra), puis le contrat avec la grosse maison de disques et le split, comme un parcours initiatique classique. Sûr de ne pas avoir envie de trainer dans les studios et par goût des voyages (« il y a un côté partir à l’aventure que j’aime beaucoup »), il sera guitariste professionnel, spécialité scènes, pour accompagner Clara Luciani ou Jain. Klein aime le rock allemand, Neu!, Ash Ra Tempel, Amon Düül, reconnaît aussi les Cocteau Twins, Beak, GUM… « Au final, ce ne sont pas des choses que j’écoute le plus, mais elles m’ont marqué et j’y reviens régulièrement ». Actuellement, il se sent proche des albums instrumentaux de la canadienne Mélissa Fortin (« un coup de cœur ») issue du groupe Bon Enfant, quelqu’un qui semble partager ce même goût de l’instrumental imagé Continuer la lecture de « Sous surveillance : Klein »
Catégories mardi oldie
Los Negativos, Piknik Caleidoscópico (Victoria, 1986)
En publiant la compilation Nuggets en 1972, Lenny Kaye ne se doutait pas qu’une dizaine d’années plus tard de nombreux musiciens s’en revendiqueraient à travers le monde. Dans les années 80, une partie du monde underground vibre au son du garage et du psychédélisme. Partout la résistance s’organise. La culture compilation (Back from The Grave, Pebbles, Rubble, Perfumed Garden, etc.) explose tandis qu’un peu partout à travers le monde de jeunes gens prennent les guitares et enfilent leurs boots (talon cubain). Aux États-Unis, cette appétence pour les années soixante se manifeste autant à travers du british rhythm & blues puriste (The Crawdaddys), de la powerpop aux inflexions merseybeat (The Last) qu’une magnifique scène Paisley Underground (Rain Parade, The Bangles, Long Ryders etc.). Mais l’Europe n’est pas en reste. Continuer la lecture de « Los Negativos, Piknik Caleidoscópico (Victoria, 1986) »
Catégories post live
Terminal 1 : décollage immédiat
On a beau vivre plusieurs vies, elles ne sont pas imperméables… Il n’y a pas d’étanchéité absolue – encore moins aujourd’hui qu’il y a une dizaine d’années. Encore moins lorsque la musique y occupe à chaque fois une place de choix. Pour beaucoup de gens qui ont vécu de l’intérieur les années charnières 1990 – 2000 – n’y voir aucun mérite, au delà du privilège de l’âge et de la date de naissance (le lieu peut aussi avoir son importance) –, l’événement qui s’est tenu ce mercredi 17 juillet sur le toit du Terminal 1 pour fêter les cinquante ans de l’aéroport de Roissy était une sorte d’aboutissement – comme un rêve devenu réalité, et encore, fallait-il déjà avoir fait rêve aussi grand.
Catégories sous surveillance
Sous surveillance : Tiffanie de Falaise
Qui ?
Tiffanie, c’est son prénom et Falaise, c’est le village de Normandie où elle est née. Trentenaire et déjà plusieurs vies : un BTS (« en arts appliqués »), une école en cinéma, celle de la Cité à Saint-Denis, puis une signature en 2017 sur une major, avec l’histoire maintenant classique : sur des rails, contrat de trois albums, équipe dédiée à fond sur la pochette, les photos, le premier disque est en boîte et badaboum, le directeur artistique s’en va et les rêves de la jeune chanteuse avec. Mais Tiffanie n’en fait pas une maladie, elle en a souffert bien sûr, mais la page est tournée, et – le plus important – les bandes sont toujours sa propriété. Continuer la lecture de « Sous surveillance : Tiffanie de Falaise »
Catégories interview
Those Pretty Wrongs (Luther Russell + Jody Stephens) : « J’essaie vraiment de ne pas me reposer sur ce que j’ai pu faire il y a très longtemps. »
Il aurait pu, sans qu’on lui en tienne rigueur, se contenter d’être le dernier des quatre. Le survivant. Le conservateur d’un patrimoine suffisamment riche pour continuer d’irriguer une bonne partie de la musique qui nourrit nos vies. Alex Chilton, Chris Bell et Andy Hummel ont disparu : à l’ombre des studios Ardent au sein desquels il a conservé ses fonctions officielles, Jody Stephens entretient seul le culte vivace de Big Star, comme en témoignent encore les concerts commémoratifs organisés cette année pour célébrer les cinquante ans de Radio City (1974). Il aurait pu, et pourtant, depuis dix ans, il s’est également mis en tête d’ajouter une nouvelle page, plus personnelle, à la légende. Continuer la lecture de « Those Pretty Wrongs (Luther Russell + Jody Stephens) : « J’essaie vraiment de ne pas me reposer sur ce que j’ai pu faire il y a très longtemps. » »
Catégories sous surveillance
Sous surveillance : Dear Pola
Qui ?
Mary Daste écrit des chansons depuis l’âge de 10 ans, depuis donc deux décennies et des galets. S’il s’agit d’une apparition récente, le métier de la chose folk est chevillé au corps autodidacte, mûri en solitude artistique de fait et de goût. Une guitare, une voix, et le XXIe siècle : le studio de chambre. Au long des étagères, de la poésie, et Woolf, Plath, Kerouac, Cohen, et l’anglais donc en évidence, en pratique cruciale, en rideau que le vent agite. Continuer la lecture de « Sous surveillance : Dear Pola »
Catégories selectorama
Selectorama : R. E. Seraphin
Pour son second album Fool’s Mate, Ray Seraphin confirme et prolonge les belles promesses déjà saluées en ces colonnes il y a quatre ans. Membre désormais éminent de la scène indie californienne, il témoigne d’une érudition impressionnante sans pour autant sombrer dans le pastiche révérencieux. Du bruit, des mélodies et du style : on retrouve ces mêmes ingrédients dans la sélection proposée. Continuer la lecture de « Selectorama : R. E. Seraphin »
Catégories chronique nouveauté
Johnny Cash, Songwriter (Universal)
Et bien celui-là, on ne l’avait pas vu venir… Retrouvées de manière inopinée par son fils John Carter Cash, une dizaine de démos de Johnny Cash refont aujourd’hui surface et composent le disque posthume Songwriter. Sont-elles d’un meilleur niveau que les chansons de The Mystery of Life, son « dernier disque » avant l’ère Rick Rubin ? La réponse est affirmative. Sont-elles d’un meilleur niveau que les chansons d’American Recordings publiées le 26 avril 1994 ? La réponse est négative. Continuer la lecture de « Johnny Cash, Songwriter (Universal) »
Catégories interview
Sur la route avec Lush, raconté par Phil King et Emma Anderson
Je me souviens très bien de la première fois que j’ai vu Lush en concert. C’était dans la moiteur d’un été londonien, en plein mois d’aout de l’année 1990. Le groupe avait eu le droit à un encadré dans les pages “news” du NME – ou du Melody Maker – pour annoncer sous le pseudonyme de Hush un “concert secret” – qui ne l’était donc plus tellement –, la veille de sa participation à la garden party organisée par The Cure. Comme Phil King pour sa première fois, je ne me souviens plus vraiment des chansons jouées ce soir-là, mais très précisément de la présence de Lawrence dans la salle (et bien évidemment, je m’étais dit que c’était bon signe) avant de découvrir quelque temps plus tard que le groupe de première partie n’était autre que Moose… En revanche, je me souviens nettement mieux des autres fois où j’ai pu voir Lush sur scène, à la Cigale pour le festival des Inrocks 1991 – la fameuse soirée des noms de groupes en une syllabe –, au Bataclan pour la tournée Spooky, au New Morning en septembre 1994 – d’autant que Spring avait assuré la première partie –, au Divan du Monde et à Benicassim en 1996. Je ne pouvais qu’ignorer bien sûr que sous le soleil de la Costa del Azahar, ce serait la dernière fois que je verrai Lush en concert – et l’avant-dernière que je prendrai un polaroid du batteur Chris Acland, qui était venu passer après coup quelques jours de vacances en Bretagne et au festival de la Route du Rock. Avant de se donner la mort deux mois plus tard…
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Catégories chronique nouveauté
Bulie Jordeaux, Visions (Grande Rousse Disques & Womb)
« Elle te fixe, elle te traque, elle te guette »
Si je devais donner une idée de ce qui se passe en France en matière de courants musicaux, écrire un état des lieux, je choisirais bien d’envelopper des artistes sous une même étiquette, avec tout ce que ça comporte comme biais et raccourcis. J’essaierais de trouver un nom un peu ronflant : je vous parlais de biais, alors j’irais piocher dans la culture des anime et des manga japonais de mon époque avec les magical girls, ces petites filles qui grâce à une baguette magique, une amulette, se transforment en super-héroïnes avec des pouvoirs magiques. Enfin, c’est ce qu’il me reste comme souvenirs. Continuer la lecture de « Bulie Jordeaux, Visions (Grande Rousse Disques & Womb) »
Catégories sunday archive
L’édito de mai 2002, à l’entre deux tours.
Ces paroles signées Thomas Boulard (Luke) ont été publiées en tant qu’édito du numéro 61 de la revue pop moderne, sortie à l’entre deux tours de la présidentielle de mai 2002, où s’étaient affrontés Jacques Chirac et Jean-Marie Le Pen. History repeating comme disaient Shirley Bassey et les Propellerheads. Continuer la lecture de « L’édito de mai 2002, à l’entre deux tours. »
Catégories borne d'écoute
Une bonne cuite au Vin de Sprite
J’ai croisé Vin de Sprite il y a quelques mois, au Diamant d’or à Strasbourg. La soirée peu fréquentée n’en était pas moins de celles qui vous laissent quelque chose d’impérissable : pendue aux lèvres de Donatien Toma Ndani Djemelas – au chant et au clavier – la petite foule d’une dizaine de personnes semblait hypnotisée par cette énorme voix à la fois puissante et hésitante. Accompagné ce soir-là par deux amis (percussions et claviers) et par Antoine Loyer à la guitare et au chant, Donatien, ultra concentré, ailleurs et bien là à la fois, nous racontait ses histoires écrites à plusieurs mains lors d’ateliers collectifs, des histoires de voitures, d’animaux et plein d’autres mystères, écriture collage, écriture collision, chant libre, expression directe. Continuer la lecture de « Une bonne cuite au Vin de Sprite »
Catégories selectorama
Selectorama : Nervous Twitch
Voici déjà trois ans ici-même, nous avions chanté les louages de Nervous Twitch, trio pop originaire de Leeds, toujours en (sur)activité et en pleine forme. Alors qu’ils viennent de boucler une tournée française de quatre dates, dont une à Paris dans le cadre de l’indispensable Paris Popfest, le groupe emmené par la chanteuse et bassiste Erin Van Rumble enchaîne actuellement les concerts en terre d’Albion pour défendre son tout nouveau disque Odd Socks, compilation de titres inédits. En 2022, les trois compères étaient déjà revenus en force avec Some People Never Change, sur lesquels on retrouve le tube History of the Wild West, le très pixiesien Forgive Yourself – qu’on croirait chanté par Joan Jett – où l’excellente You Never Let Me Down, qui rappelle les ballades enfantines que chérissaient jadis les Television Personalities, ou encore la touchante Like A Snowball. Continuer la lecture de « Selectorama : Nervous Twitch »
Catégories sous surveillance
Sous surveillance : Concordski
Qui ?
Concordski, c’était le petit nom moqueur donné à l’avion Tupolev, dont la légende voulait qu’il soit copié sur le fameux Concorde. Si Eugénie Leber l’a endossé, c’est un peu par malice et surtout comme un hommage à des racines russes, familiales et lointaines, perdues dans les limbes de l’histoire. Après une formation académique au piano, plusieurs expériences de bassiste dans diverses formations depuis 2011 (« Quand les copains montaient des groupes, ils étaient contents d’avoir une fille à la basse ») et un déménagement, elle s’est mise à écrire et à composer seule. Continuer la lecture de « Sous surveillance : Concordski »
Catégories borne d'écoute
L’art pop desaxé des belges Another Dancer
Bruit Direct Disques est un label ami et dans la lignée de SDZ Records, qui ont tous deux bon nombre de points en commun : l’amour de la musique obscure, la diversité des sorties, un goût prononcé pour l’Australie et la furieuse envie de faire sortir de l’œuf des talents cachés. Guy, le maître à bord, est allé cette fois fureter du côté du plat pays, car Bruxelles foisonne d’artistes et groupes. On peut noter ces temps-ci Milk TV, Rodolphe Coster, Megabasse ou encore Giulio Erasmus. Dans ce bouillon de culture alternative, Another Dancer vient d’éclore, un groupe qui mélange influences art rock d’antan et timbre moderne. Voix adolescentes, guitares lointaines, effets bricolés et refrain éclatant composent cette belle chanson pop. Un morceau qui semble désarticulé mais se synchronise parfaitement. Voici leur tout premier single Overfriendly Dogs (vidéo réalisée par Margo Mot), en avant-goût de leur album I Try To Be A Dancer, qui sortira le 10 Septembre prochain chez Bruit Direct Disques et Aguirre Records. On ne manquera surement pas de vous tenir au courant sur les infos ou de potentielles dates à venir.
Continuer la lecture de « L’art pop desaxé des belges Another Dancer »
Catégories mardi oldie
Chico Magnetic Band, Id. (Disques Vogue, 1971)
Au début des années 70, la vénérable maison de disques Vogue (Jacques Dutronc, Françoise Hardy, Martin Circus etc.) accueille de sacrés hurluberlus. Le Chico Magnetic Band ne passe pas inaperçu en concert. Chico, en plus de chanter dans un anglais erratique, fait exploser des pétards judicieusement placés sur son casque quand il ne prend pas son bain sur scène… Ce goût pour le happening et la bravade, le groupe le développe lentement mais sûrement à la fin des années 60 en trainant dans la scène lyonnaise. Chico, de son vrai nom Mahmoud Ayari, né en Tunisie, s’éprend d’abord de soul et rhythm & blues avant d’avoir une révélation avec Jimi Hendrix. Continuer la lecture de « Chico Magnetic Band, Id. (Disques Vogue, 1971) »
Catégories chronique nouveauté
Pierre Ponge, Comme une (Boom Boom Tchak)
« Non jamais l’amour n’est sublime,
mais je préfère que rien ne finisse«
Je crois que c’est Stephen Pastel qui rappelait récemment* l’importance du mystère dans la musique. Ou plutôt, l’importance de ne pas chercher à trop en savoir, que finalement seule la musique compte, ce qu’elle nous procure en joie, en sensations, en émotions. Ça peut être paradoxal avec ce qu’on cherche ici, en construisant des ponts quotidiennement sous forme de critique et de dialogues avec les musiciens qui sont derrière les chansons qui nous plaisent, mais je comprends le point de vue. A une époque où le moindre clic nous ouvre des mondes infinis, maintenir à distance la ronde des informations, se préserver un tant soit peu, peut se révéler salvateur, surtout autour de groupes qui ne réclament pas une attention qui clignote comme un gyrophare, qui ne cherchent pas forcément les lumières. Continuer la lecture de « Pierre Ponge, Comme une (Boom Boom Tchak) »
Catégories playlist
LA PLAYLIST DES NOUVEAUTÉS DE JUIN 2024
Et voilà, l’été nous tombe sur la gueule, avec sa moiteur, sa torpeur et ses grands rayons qui brûlent. Malgré une attention un peu défaillante due à son arrivée, on tenait à vous partager cette playlist ce samedi matin en particulier, avec l’ombre de cette catastrophe électorale qui plane dangereusement au-dessus de nos têtes. Comme pour vous donner du courage pour éviter le pire. Alors quoi qu’il arrive, restons groupés, aimons-nous et résistons. En musique. (TS)
Écoutez cette playlist sur votre plateforme favorite : YouTube, Deezer ou Spotify.
NDLR : les playlists Deezer et Spotify ne comportent pas l’intégralité des titres de la sélection commentée ci-dessous.
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Catégories interview
Stephen Pastel : « J’ai toujours conservé une certaine naïveté dans mon approche de la musique. »
C’est l’histoire de la rencontre entre deux groupes. Un faux, un vrai. Dans son premier roman, This Is Memorial Device (2017), David Keenan recompose la biographie fictive d’un groupe culte écossais – Memorial Device, donc – en juxtaposant sous formes d’interviews inventées vingt-six points de vue complémentaires sur la trajectoire éphémère et négligée des apprentis héros du post-punk local. Sept ans plus tard, c’est un héros bien réel de la scène indie de Glasgow qui transpose en une série de fragments instrumentaux le récit épique d’une aventure inaboutie. Stephen Pastel – épaulé pour l’occasion par Gavin Thomson – ingénieur du son et membre épisodique des Pastels – s’est ainsi replongé dans ses propres souvenirs et dans ses archives les plus enfouies pour confectionner une bande-son où les fragments des démos archaïques côtoient les passages composés expressément pour l’occasion. Le collage constitue un album intéressant et un support approprié à l’évocation de quelques vieux souvenirs. Continuer la lecture de « Stephen Pastel : « J’ai toujours conservé une certaine naïveté dans mon approche de la musique. » »
Catégories selectorama
Selectorama : Violette Gauthier
Depuis quelque temps, j’ai pris rendez-vous chaque été avec Eau De Javel, un fanzine artisanal, qui parle en dessins et en mots de ces choses futilement indispensables – dans le désordre, musique, ciné, littérature, listes, idées farfelues… Il est entièrement imaginé et réalisé par Violette Gauthier (alias Lena Marcel), une jeune fille que je connais sans connaître (nous ne nous sommes jamais rencontrés – mais cela ne va plus tarder – sans que cela ne nous ait empêchés d’ergoter en privé sur des chansons, des réalisateurs, des livres et même de nous moquer à grands coups de « ahahahahah » et autres « hihihihihihi » de certains des nouveaux leaders de la culture tricolore ; et croyez-moi ou pas, on s’est bien poilés).
Catégories avant-première
Côme Ranjard est-il vraiment Intraterrestre ?
Nous découvrions fin avril, quatre ans après L’enfant casanier, le second EP de Côme Ranjard, que l’on a pu apercevoir également il y a peu aux côtés de Eggs sur scène. Quatre chansons printanières en français, témoignant dans la sophistication de leurs arrangements d’un réel souci du détail ; à l’image du titre éponyme, Intraterrestre. Un premier single que notre collègue Alexandre Gimenez-Fauvety qualifiait dans notre playlist mensuelle « d’intrigant », et il y a en effet dans ces accords de guitare, dans ces sonorités, un peu de cette atmosphère troublante perçue dans les Inédits 1970 d’Higelin ou, plus récemment, chez Julien Gasc. Continuer la lecture de « Côme Ranjard est-il vraiment Intraterrestre ? »
Catégories chronique réédition
Velocity Girl, UltraCopacetic – Copacetic Remixed and Expanded (Sub Pop)
Il faut savoir raison garder : les bonnes intentions ne font pas toujours les meilleurs disques ni les meilleures rééditions. Sub Pop annonce la réédition de Copacetic, le premier album des Velocity Girl qui, comme leur nom l’indique, étaient plus fans de Primal Scream que de groupes américains.
Publié en 1993, le premier album de ce groupe originaire de Washington DC est passé sous les radars de la presse européenne. Et… c’est tout à fait normal. Sorti la même année que Rid Of Me d’une certaine Pj Harvey ou que Debut de Bjork, Copacetic n’avait aucune chance de prendre l’ascendant sur la concurrence. Continuer la lecture de « Velocity Girl, UltraCopacetic – Copacetic Remixed and Expanded (Sub Pop) »
Catégories borne d'écoute
Michel Cloup kidnappé par Tiger Menja Zebra
Les Catalans de Tiger Menja Zebra nous envoient cette vidéo rude et drôle dans laquelle ils malmènent Michel Cloup. Association par dessus les Pyrénées entre activistes et amis du bruit, ça nous fait triper, parce que Michel Cloup y délivre un de ses meilleurs textes en toute décontraction, un texte rempli de phrases choc, inventaire en forme d’autodépréciation qui fait mouche et nous renvoie en miroir à tous nos travers, actualités, réseaux, ça casse, ça plie. On constate toujours avec joie, s’il fallait encore le rappeler, combien est important pour Michel Cloup ce travail de groupe, d’échange, de collaboration. L’énergie qu’il en tire et qui semble insatiable. L’interaction au cœur de son travail. D’ailleurs, Tiger Menja Zebra, c’est qui, tiens ? Groupuscule de Barcelone, ils pratiquent un électro punk rock bien branlé, déluge sonique, EBM concassée, énervée qui peut rappeler aux vieux l’Atari Teenage Riot d’Alec Empire. Grosse giclée d’énergie pure projetée sur les murs et transformée en grafitti sonores et revendicatifs, ça doit bien suer dans les caves de Catalogne. C’est impeccable, concis, riche, on a envie de jouer à Genius, allez, verbatim. Continuer la lecture de « Michel Cloup kidnappé par Tiger Menja Zebra »
Catégories mardi oldie
Margo Guryan, Words And Music (Numero Group)
« Take a picture/So we can remember. »
Il a toujours été question, dans cette histoire si particulière, de résister à l’oubli. Le seul album de Margo Guryan a été publié en 1968 et son titre même – Take A Picture, donc – semblait davantage résonner comme une invitation à figer l’écoulement inévitable du temps plutôt qu’à refléter quelques images marquantes d’une époque à côté de laquelle il flottait déjà résolument. Peu de promotion, pas de tournée ni de concerts : un an plus tard les quelques exemplaires mis en circulation s’échangeait péniblement dans les bacs à solde pour le prix dérisoire de trente-neuf cents. Quelques décennies plus tard, alors même que son autrice avait renoncé à toute activité discographique depuis bien longtemps pour se consacrer à l’enseignement de la musique, les hasards des rencontres impromptues et des redécouvertes enthousiastes lui ont offert une seconde vie, plus digne de son rang. Continuer la lecture de « Margo Guryan, Words And Music (Numero Group) »
Catégories chronique nouveauté
V/A, Cartelle vol. 2 (Cartelle Disques)
« Tout le monde fuit le hangar,
c’est sûrement pas le fruit du hasard »*
De Rennes, nous arrive, telle une carte postale toute colorée – une bien belle pochette signée Constance Legeay : c’est le deuxième volume des aventures de Cartelle, maison de disques dédiée au défrichage et à la mise en valeur d’un territoire musicale habité par des femmes, personnes transgenres ou non binaires. Le premier volume paru fin 2021 nous avait conquis, en rassemblant des musiciennes confirmées qui font notre bonheur ici depuis belle lurette : Lispector, Charlotte Leclerc ou Rose Mercie se présentaient en marraines évidentes de nouvelles venues bien plus que prometteuses. Continuer la lecture de « V/A, Cartelle vol. 2 (Cartelle Disques) »
Catégories sunday archive
Perry Blake & Françoise Hardy, un homme et une fan
Il y a 22 ans, nous avions eu l’idée de réunir pour la RPM Françoise Hardy et Perry Blake. Parce qu’elle avait déclaré sa flamme aux chansons de l’Irlandais – parce que Françoise Hardy était aussi comme ça, à l’affut des nouveautés, une attitude qui lui avait fait avouer sa passion pour The Jesus And Mary Chain ou l’avait conduite à chanter avec Blur – mais c’était aussi parce que Damon Albarn ressemblait comme presque deux gouttes d’eau à “Jacques jeune”. Sans doute aussi parce que c’était notre façon de pouvoir croiser le chemin de cette “Discrète”, auteure d’un de nos disques de chevet, La Question – mais aujourd’hui, je me demande si je lui avais avoué ça. Un peu plus d’une semaine après le départ définitif de Françoise Hardy, on a remis la main sur cette interview croisée réalisée il me semble dans le studio photo de Philippe Lévy – un compagnon de nombre d’aventures de ces années-là –, qui avait immortalisé la rencontre. Dans l’élégance d’un noir et blanc éternel. Continuer la lecture de « Perry Blake & Françoise Hardy, un homme et une fan »
Catégories billet d’humeur
Le don du disque
Question sacrilège, peut-on donner ses disques ? Ou plutôt les vinyles que nous avons offerts n’ont-ils finalement pas autant d’importance, voire davantage, y compris dans notre collection, que ceux qui passent encore sur notre MK II ? Certes, arriver à un certain âge ou un âge certain, les 33 tours alignés bien serrés dans les étagères Kallax blanches racontent forcément nos vies. Nous sommes de ces égarés qui n’ont pas réussi à marcher droit sans ces béquilles grésillant sous le diamant de la tête de lecture. Le véritable collectionneur ne devrait pouvoir s’en séparer pour rien au monde. Continuer la lecture de « Le don du disque »
Catégories borne d'écoute
La comédie de la vie par Nick Wheeldon
J’ai vu deux fois Nick en concert ces derniers temps. Ils ont eu lieu dans les mêmes parages, ceux de Rouen en Normandie. Le premier dans le salon d’une maison dans un petit quartier excentré. C’était un lundi soir, je ne m’attendais à rien. Nous étions partis assez motivés avec Viktor et Julien, en dégoupillant canette sur canette à bord du Van dans les virages de la descente de Darnetal. Le concert de Nick et son groupe a été incroyablement chaleureux, et en me retournant pour observer le visage des gens – très important, observer le visage des gens dans les concerts -, il m’a semblé qu’en un accord de guitare, il était parvenu à effacer la morosité saisonnière, dans cette pièce de vie familiale où tapis et canapés avaient été poussés de côté. Plus tard, les membres du groupe causaient musique et plaisantaient avec les spectateurs en fumant des cigarettes dans la cour. Continuer la lecture de « La comédie de la vie par Nick Wheeldon »
Catégories sous surveillance
Sous surveillance : Monsallier
Qui ?
Monsallier, c’est le nom propre de Julien Narcisse Monsallier, tout simplement. Il écrit et compose : « Je ne me sens pas musicien, j’ai un bagage technique proche du néant, mais j’arrive à trouver des mélodies entêtantes que je propose ensuite à des amis musiciens ». Il y a son frère Thibaut Monsallier qui est guitariste et qui joue du clavier, il y a aussi Lucas Valero qui est guitariste et bassiste. Antoine Mounier est à la production. Continuer la lecture de « Sous surveillance : Monsallier »
Catégories chronique nouveauté
Beak>, > > > > (Invada)
Les projets musicaux ultra-référencés, assumant leur inscription au sein d’un genre et de ses codes historiquement établis, ont ceci de particulier qu’ils évoluent sur une ligne de crête : à égale distance du maniérisme postmoderne et de la citation virtuose, l’écueil de l’érudition fétichiste et gratuite n’est jamais très loin. A ce titre, depuis une vingtaine d’années, l’héritage Kraut, au sens large, aura été très largement pillé, donnant naissance à une myriade de déclinaisons se situant sur ce point d’équilibre délicat. Continuer la lecture de « Beak>, > > > > (Invada) »
Catégories borne d'écoute
The Sheaves, de psyché échevelée à coup de poing punk
Toujours à l’affût de groupes ou d’artistes souterrains et capable de révéler tout leur talent, SDZ Records. Après avoir sorti les excellents albums des Anglais de Silicone Values et de la Néo Zélandaise Embedded Figures, le label français sortira fin à la fin du mois les américains The Sheaves. Fondé à Phoenix, une ville qui a vu naître les bruyants et furieux Destruction Unit et qui nous avait plus habitués aux sonorités psychédéliques traditionnelles. The Sheaves sont un savant mélange d’influences passées, The Fall, Swell Maps ou Half Japanese en tête ; donc plutôt de sonorités dissonantes et de mélodies minimalistes. Jugez en vous même par l’intermédiaire de ce live publié sur YouTube assez rare, car ils n’ont pas encore fait de tournée, même chez eux aux USA. Continuer la lecture de « The Sheaves, de psyché échevelée à coup de poing punk »
Catégories selectorama
Selectorama : Olivier Rocabois
Après quasiment trente ans de carrière et un CV pop aussi long que la Loire, Olivier Rocabois décidait en 2022 de se lancer en solo avec l’album Goes Too Far. Lorsque l’on parle d’un disque solo à ce niveau d’artisanat, au-delà de la composition, on parle d’une gestion de projet de A à Z : récolte de fonds, emprunt, trouver un studio d’enregistrement, organisation de tournées, et tutti quanti. Rocabois a tout porté à bout de bras avec une volonté de fer. Cela a payé, car il tenait neuf titres aux allures de classiques intemporels qui ont, enfin, éveillé la curiosité des médias et élargi son cercle de fans. Ce qui nous amène aujourd’hui à la sortie de The Afternoon of our Lives qui, loin d’être une redite de Goes Too Far, confirme que l’on peut continuer évoluer musicalement, être exigeant, mais surtout ambitieux à un âge où certains ont déjà tout laissé tomber par lassitude. Continuer la lecture de « Selectorama : Olivier Rocabois »
Catégories mardi oldie
Pinback, Blue Screen Life (Ace Fu, 2001)
Sorti la même année (2001) que The Argument de Fugazi, Blue Screen Life de Pinback, bien que très différent, appartient à ce même terroir indépendant nord-américain. Nous sommes au début des années 2000, à l’ère des post (hardcore, rock) et de l’emo (canal historique), l’indie-rock étatsunien vibre et expérimente. Pinback se nourrit de ce contexte et l’insuffle dans leur musique pop aussi délicate qu’innocemment ambitieuse. Quand le groupe sort son premier album en 1999, les deux musiciens n’en sont pas à leur coup d’essai. Membres de l’active scène underground de San Diego, Armistead Burwell Smith IV et Rob Crow ont joué notamment dans Three Mile Pilot (pour le premier) et Heavy Vegetable. Continuer la lecture de « Pinback, Blue Screen Life (Ace Fu, 2001) »
Catégories chronique nouveauté
The Pearlfishers, Making Tapes For Girls (Marina)
Le temps file : vingt-sept ans depuis la première rencontre, cinq ans depuis les dernières retrouvailles. A chaque fois, on redécouvre David Scott très exactement à l’endroit où on l’avait quitté. Parfois, il n’en faut pas davantage pour procurer cette forme de réconfort bienfaisante en constatant qu’il est possible de maintenir une continuité de l’existence qui résiste à l’entropie et au chaos. Comme son titre l’indique sans détour, Making Tapes For Girls est un album nostalgique entièrement consacré à la passion musicale et à son omniprésence vitale pour tous ceux qui la partagent, à vingt ans comme à soixante. Non pas parce qu’elle constituerait un refuge érudit hors du monde mais, au contraire, parce qu’elle ne cesse d’imprégner les rencontres, les émotions les plus intimes et les souvenirs les plus précieux. On peut presque tout raconter d’une vie en la condensant quelques disques et autant d’engouements marquants et durables. Continuer la lecture de « The Pearlfishers, Making Tapes For Girls (Marina) »
Catégories post live
À la poursuite des spectres
Les australiens Exek sont passés par Paris hier soir, au cœur de leur tournée européenne.
Mains dans les poches, corps pris dans la réverbération, rythme élastique, casquette vissée sur une tête qui, dans l’ombre, évoque quelque chose de Bez, le danseur légendaire des Happy Mondays… la voix, pourtant, renvoie vers un autre : par moments, l’impression est forte d’entendre le fantôme raide de Mark E Smith, l’âme portée disparue de The Fall. Réminiscences anglaises, donc, mais formation australienne : ce soir Exek joue à Paris, Petit Bain, bateau sur les quais en dessous de la Bibliothèque François Mitterrand. Continuer la lecture de « À la poursuite des spectres »
Catégories sous surveillance
Sous surveillance : Le Cœur des Garçons
Qui ?
Alexandra (chanteuse)
À la base, je viens des scènes de musique grind, métal, hardcore, donc au début j’étais hurleuse dans un groupe de grind. J’ai eu envie d’un projet plus rock chanté en français. La rencontre avec Seb a été le déclic et la décision de jouer ensemble est partie de notre passion commune pour les Thugs. Puis, je suis allée chercher Guillaume qui m’intriguait et que j’avais envie de mieux connaître et enfin Carole, que je connais de longue date. J’étais convaincue que c’était le bon combo. Continuer la lecture de « Sous surveillance : Le Cœur des Garçons »
Catégories selectorama
Selectorama : Warietta
Il y a des démons du passé, des cadavres décomposés dans le placard de la musique du messin Guillaume Marietta. De projets (A.H. KRAKEN, The Feeling of Love) nés dans le joug de La Grande Triple Alliance Internationale de l’Est, dont il a témoigné l’an passé à travers un documentaire percutant comme une balle dans le cœur, jusqu’à ce Handkuss Jesus paru ce mois, au nom d’artiste à propos en ces temps armés : Warietta. Un disque où ses mélopées graves / aigues, autant Bowie que Murphy, soulignent une fois encore le talent fou de songwriter du dandy dépité et dérangeant. Aussi synthétique que profondément rock (Si le rock voulait encore dire quelque chose, dit-il), la cartouche goth / wave jamais loin, ce nouvel album lacère nos derniers espoirs envers ce monde nauséabond avec flamboyance et noirceur. Excellente raison pour demander à ce personnage précieux et érudit quelques références de plus. Continuer la lecture de « Selectorama : Warietta »