Selectorama : Christophe Conte

Christophe Conte
Christophe Conte / Photo : Astrid Karoual


A la parution du premier tome de l’Anti discothèque idéale en 2015, Christophe Conte, qui doit probablement me surestimer un chouia, m’avait gentiment confié que j’y ferais peut être éventuellement 2/3 découvertes. Comprendre que notre attachement aux causes perdues longtemps introuvables était parfois discordant mais pour l’essentiel, similaire. Et de Sagittarius à Linda Perhacs en passant par Felt ou Swell Maps, j’y retrouvais effectivement une bonne partie de mes classiques intimes. Pour ce deuxième volume, on peut dire que le désormais chroniqueur de Libération s’est surpassé parce qu’il met effectivement en avant, dans une écriture allègre et généreuse, plusieurs disques (je vous laisse deviner lesquels, tiens) dont je n’avais JAMAIS entendu parler. Mais des hollandais new wave de Flue au désormais classiques comme l’indispensable If Only I Could remember My Name de David Crosby tout en passant par des marottes largement partagées en ces pages (Plush) il arrive encore à tracer les lignes qui révèlent une histoire discordante mais néanmoins partagée. Le Selectorama qui suit le prouve plus qu’habilement.


01. John Bromley, Natural Born Loser (1969)

Avec une pochette ridicule qui le ferait aisément passer pour un Henri Dès hippie et ce titre qui annonçait la couleur, le Mancunien précédemment aperçu au sein The Three People fut l’un des grands perdants de l’Angleterre pop de la fin des sixties. Accompagné pourtant par les excellents Fleurs de Lys sur son unique album, ce mélodiste délicat aurait pu en raconter à Donovan, mais finalement non.

02. Fickle Pickle, Saturday (1970)

Le Supergroupe de la lose, composé d’ex-membres de The Smoke, Red Dirt et Orange Bicycle, qui avait repris à l’identique Maybe I’m Amazed de McCartney avant de se lancer dans un premier (et unique) album qui ne sortira qu’en Hollande. Pochette salement atroce mais programme joyeux, baroque et Vaudevillesque, qui possède ces moments de grâce comme sur ce titre qui ressemble à du Jeff Lynne.

03. Jack Nitzsche, Who Say What To Who (1974)

Les chanceux qui feront l’acquisition de l’édition limitée du livre (couverture bleue) auront droit en cadeau au CD exclusif de cet album du grand Jack Nitszche mis à la poubelle à l’époque par Reprise Records. Un monument décadent avec notamment ce morceau fou qui commence comme du Little Feat et se termine comme du Ravel.

04. Pierre Vassiliu, Le Vent Souffle Où Il Veut Quand Il Veut (1975)

L’album Voyage, sorti juste après le tube pour lequel on connait Pierre Vassiliu, Qui c’est celui-là, fut un bide monumental. Il faut donc redécouvrir cette bamboche à bord d’un train, qui comprend quelques titres assez salés (Caroline de Haas pourrait appeler à la lapidation post-mortem du Pierre Le Carabin), et puis cette longue suite qui n’est pas sans évoquer Polnareff.

05. Peter Ivers, You Used To be Steve Wonder (1976)

Protégé de Van Dyke Parks et auteur de la chanson In Heaven pour Eraserhead, ce Californien a fini en 1983 le crâne fracassé à son domicile de Laurel Canyon. Crime non élucidé, tout comme le fait que cette chanson géniale, issue de son second album, n’ait jamais fait frémir les ondes de l’époque.

06. Human Switchboard, Who’s Landing In My Hangar ? (1981)

Excellent trio de Cleveland relocalisé à New York, signé chez IRS, mais qui n’aura pas marqué les esprits avec son unique album. Leur son irrigué par l’orgue Farfisa de Myrna Marcarian et les guitares de Robert Pfeifer ressemble parfois à du Yo La Tengo avant l’heure, et ce morceau aurait dû logiquement faire un petit hit underground à l’époque.

07. The Necessaries, More Real (1982)

L’une des multiples formations dans lesquelles passa l’ombre du génie Arthur Russell, ici dans un contre-emploi étonnant avec ce disque brillant de power-pop où se distinguent également d’anciens Modern Lovers et Red Crayola. Encouragé par John Cale, le leader Ed Tomney avait recruté cette dream-team et proposé à Russell de passer une tête. Il fera mieux que ça, en amenant et en chantant cette compo bouleversante.

08. Tara Cross, Rain Sprouts (1988)

Un disque sorti sur un label obscur de Nancy mais signé d’une Américaine de New York dont l’œuvre entière mérite le détour, dans un registre expérimental et proto-électronique qui vire parfois comme ici au gothique dans les pas de Nico. Un peu paumée dans le ventre mou des eighties, Tara Cross abandonnera bientôt la musique pour devenir coiffeuse.

09. Humphreys & Keen, Point Of No Return (2005)

Un des disques découverts pendant la rédaction du livre alors que je cherchais sans doute autre chose. Je connaissais les néo-zélandais de Able Tasmans mais pas cet album de ses deux têtes pensantes, Graeme Humphreys et Peter Keen. Il fut enregistré alors que Keen s’apprêtait à passer deux ans au fond des océans à bord d’un navire de recherches. D’où ce titre un peu anxieux, très orchestré, qui rappelle les plus beaux moments des Nits.

10. Summer Fiction, Dirty Blonde (2015)

L’album s’appelle Himalaya est c’est en effet un sommet, gravi à deux par le dénommé Bill Ricchini, Américain de Brooklyn, et le grand B.C. Camplight qui l’hébergea pour l’occasion à Manchester. On y retrouve tout le nuancier de la pop sensible des années 80, des échos des Smiths et de Aztec Camera, et aussi en remontant dans le temps celui des Beach Boys de 20/20 sur ce titre.


volume 2 L'Anti-discothèque idéale Christophe ConteL’Anti-discothèque idéale, volume 2 de Christophe Conte est disponible demain vendredi 21 mai chez GM éditions.

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