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Annie Ernaux : « On ne sort pas du désir dans la chanson »

Pour l’écrivaine Prix Nobel, qui présente une exposition photo à la MEP à Paris, la musique est supérieure à l’écriture, elle offre de tout revivre à l’infini.

La femme au gant par Dolorès Marat (Collection MEP)
Détail de « La femme au gant » par Dolorès Marat (Collection MEP, Paris)

« Je suis traversée par les gens, leur existence, comme une putain ».

Cette phrase, essentielle dans l’œuvre d’Annie Ernaux, est extraite du Journal du dehors (Gallimard), texte plutôt que roman, collecte de moments glanés dans les transports en commun, les supermarchés, les rues d’une ville nouvelle, Cergy-Pontoise, et publié en 1993.

C’est à partir de ce texte qu’est née l’exposition Extérieurs, que propose la MEP jusqu’au 26 mai 2024. Constituée de photographies extraites de la collection de cette maison sélectionnées par Lou Stoppard, le parcours proposé au premier étage met en relation des extraits du Journal du dehors, occupant parfois un pan entier de murs comme le ferait une œuvre plastique, et des photographies en couleur ou en noir et blanc qui n’illustrent pas les textes, mais les complètent, les questionnent, les reflètent. Continuer la lecture de « Annie Ernaux : « On ne sort pas du désir dans la chanson » »

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Stranger Teens #9 : « Mala Vida » par La Mano Negra

Tout l’été, les morceaux qui ont sauvé notre adolescence.

Cette année-là, j’entre en seconde. Je n’en peux plus de mon adolescence, mon appareil dentaire, mes lunettes, mon mètre 55 qui ne décolle pas, mes seins désespérément plats et surtout le reste, ma mère à la dérive, mon père parti au loin et cette solitude qui occupe toute la place.
J’entre en seconde donc, dans un nouveau lycée plus éloigné de chez moi, un grand bâtiment ancien très beau, aux innombrables couloirs dont l’étroitesse nous permet de nous frôler les uns aux autres sans avoir à trouver une excuse pour le faire. Manque de bol, j’atterris dans une classe que je déteste, composée en grande partie de matheux, parmi lesquels je me sens si peu à ma place, moi qui ne fais que lire, écrire des poèmes dépressifs dans des carnets et écouter The Cure dans mon walkman à la récré. Continuer la lecture de « Stranger Teens #9 : « Mala Vida » par La Mano Negra »

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Dry Cleaning dans le TGV Chambéry-Challes-Les-Eaux / Paris Gare de Lyon

Un disque, un train.

Photo : Lisa Balavoine
[Chambéry]

 

Le train s’ébroue dans une ligne de basse. Pas de bol, je suis dans le sens inverse de la marche et je crains d’avoir mal au cœur si j’écris pendant le trajet. Ces derniers temps, j’ai souvent la sensation d’être encore toute petite, quand le moindre transport me rendait malade. Je ne sais pas si, au niveau équilibre, on peut être, avoir été, ne plus être, redevenir. Ceci dit, l’album ne dure que quarante minutes, alors ça devrait aller, il me faut plus de temps pour commencer à perdre pied. Continuer la lecture de « Dry Cleaning dans le TGV Chambéry-Challes-Les-Eaux / Paris Gare de Lyon »

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« Vies et morts de John Lennon » de Hugues Blineau (Mediapop Editions)

Vies et morts de John Lennon de Hugues Blineau mediapop editions
« Vies et morts de John Lennon » de Hugues Blineau (mediapop editions) / Photo : LB


« Premières lueurs du jour.

Effet retard pour ceux qui n’ont pas appris la nouvelle. Ceux qui ne se sentiront pas concernés, et puis ceux qui réagiront spontanément, par des pleurs ou des cris. »

John Lennon est mort le 8 décembre 1980. Je ne m’en souviens pas, cela ne m’a pas marquée. Je vivais alors avec ma mère qui n’écoutait pas les Beatles et, par la suite, je ne les ai guère écoutés moi non plus. Je me souviens vaguement que certaines de mes amies de lycée le trouvaient beau, aimaient ses chansons ou portaient des lunettes de la même forme que les siennes. Rien de cela pour ma part, j’aurais sans doute été du camp des non concernés.

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Gisèle Pape, Caillou (Finalistes)

Gisèle PapeC’est la lumière qui éblouit d’abord, un Soleil Blanc qui emplit tout l’espace et s’étire entre l’oreille et le monde. C’est la lumière d’un petit matin clair, le silence posé sur un bord de route où Gisèle Pape amasse des cailloux qu’elle sème, comme une petite Poucette, pour retrouver son chemin, ou plutôt ce qu’elle nomme dans le titre qui ouvre l’album, Le Chant des Pistes. Partout la terre qui se frotte à l’humanité, la terre malmenée par les hommes et les rêves qu’on piétine, des sujets empreints de gravité et traités avec une légèreté qui n’est qu’apparente, car tout est noir dès qu’on éteint la lumière. Continuer la lecture de « Gisèle Pape, Caillou (Finalistes) »

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07. Monarchie

En deux jours, un texte sur chaque chanson du nouvel album de Chevalrex, “Providence” (Vietnam)

A la fin tu es las de ce monde ancien.

Parce que,

tu le sais,

tout finit.

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01. Au Crépuscule

En deux jours, un texte sur chaque chanson du nouvel album de Chevalrex, « Providence » (Vietnam)

C’est le début.
Le début de la nuit ou le début du jour.
Le début de l’histoire et le début du disque.
C’est le début et rien n’a encore été dit, rien n’a encore pris forme.
Tout est calme, le temps prend son temps et l’air réchauffe les corps.
Au loin, on entend le bruit d’une sirène.
Un chant, une prophétie, une voix nouvelle. Continuer la lecture de « 01. Au Crépuscule »

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A propos de « Sometimes » de Guy Blakeslee

Guy Blakeslee
Guy Blakeslee

Nous ne sommes que le 6 janvier et déjà le monde semble partir en vrille. L’Écosse où doit repartir ma fille est reconfinée et il semblerait qu’on remette ça nous aussi dans les semaines à venir. On annonce quotidiennement le nombre de vaccinations dans les différents pays du globe et, comme à l’Eurovision, nous arrivons derniers. Ce soir, les partisans de Trump, galvanisés par la parole folle de leur idole, ont envahi le Capitole. Les images qui inondent les réseaux sociaux sont ahurissantes, partout des casquettes rouges et des types aux allures débiles qui se prennent en photo dans le siège du président du Congrès. Cette année ne marque encore que six jours au compteur et déjà j’ai envie d’en voir le bout, de tout effacer, de faire un grand reset, please, ça ne peut pas déjà ressembler à ça, on a assez donné. Fucking Dry January. Juste avant d’éteindre l’ordinateur sur lequel je m’échine à tenter d’écrire quelques lignes, je tombe sur une chanson, par hasard. Continuer la lecture de « A propos de « Sometimes » de Guy Blakeslee »