Catégories chronique nouveautéÉtiquettes , , ,

Camille Bénâtre, Dommage (Hidden Bay / Idol)

« Je n’étais qu’à l’ombre de toi,
l’ombre de moi
»

Dans les interstices du métier de chansonnier se glissent régulièrement des personnalités discrètes animées par la passion, et l’amour du travail bien fait. La musique, non comme un chemin vers la reconnaissance ou le succès – s’il arrive, on ne dira pas non, mais plus comme un défi personnel. Camille Bénâtre qui définit lui-même, dans l’entretien donné à l’arrière-magasin il y a quelques semaines, ce « petit artisanat », semble fait de ce bois dont sont faites ses guitares : acoustiques, ou légèrement électriques, elles dominent Dommage, un bel album de songwriter dans une tradition intime que l’on tendrait de Paul Simon à Lilac Time par exemple ou par ici du côté de Maxime Le Forestier, Yves Simon ou Julien Baer. Continuer la lecture de « Camille Bénâtre, Dommage (Hidden Bay / Idol) »

Catégories chronique nouveautéÉtiquettes , , , ,

Gilles Poizat, Trouvé Perdu (La République des Granges / Carton Records)

« La première fois que je vous ai vue,
je me suis trouvé, je me suis trouvé,
et perdu, et perdu, et perdu » 

Quand la musique tient à une sorte de révélation, ou disons qu’elle se révèle sans besoin d’autre chose que d’elle-même. A l’heure où l’on demande aux musiciens d’assurer leur promotion à travers une omniprésence sur les réseaux, de produire la théorie et le mode d’emploi qui vont avec leurs productions, de se construire une image si ce n’est un look (ce mot des années 80) pour se faire remarquer, que certains s’y prêtent à contrecœur ou avec beaucoup d’allant, d’autres semblent ne pas trop s’intéresser à la question. C’est le cas de Gilles Poizat qui déboule sans crier gare avec une proposition radicale, mais tout à fait amicale. Continuer la lecture de « Gilles Poizat, Trouvé Perdu (La République des Granges / Carton Records) »

Catégories chronique nouveautéÉtiquettes , , ,

Gwendoline, C’est à moi ça (Born Bad Records)

« Merci la Ville, je m’ennuierai plus jamais »

Un premier rendez-vous manqué :  Gwendoline est à l’affiche d’une soirée pas loin de chez moi, je m’y rends, je regarde le premier groupe puis m’enfuis pour me rendre un peu plus loin pour voir les Oi Boys enflammer la plaine des Bouchers. Peu inspiré par le patronyme des Brestois qui me rappelait juste ce film d’aventure vaguement SM et un peu guez de Just Jaeckin avec Zabou (salut la génération Starfix), j’ai préféré opter pour l’autre duo, donc. Second rendez-vous : l’hiver dernier, Gwendoline se produit à nouveau près de chez moi, et je me dis que c’est un signe, je vais rattraper le temps perdu. Enfin perdu, pas pour tout le monde, puisqu’ils ont depuis enchaîné des centaines de dates dans toute la France, se sont construit un public acquis à leur cause, et ont signé chez Born Bad, excusez du peu. J’allais voir ce que je j’allais voir. Continuer la lecture de « Gwendoline, C’est à moi ça (Born Bad Records) »

Catégories chronique nouveautéÉtiquettes , , ,

Satellite Jockey… Plays Music ! (Another Record)

unnamed(1)

« Descend la route jusqu’au crucifix« 

Là où d’autres semblent chercher l’inspiration outre Manche / Atlantique, quitte à marier un peu de force leurs influences musicales avec notre idiome exotique – et souvent, ça fonctionne – Satellite Jockey se cherche plus dans les recoins du patrimoine européen des années 1960 à 1980 : ses intermèdes un peu space pour la télévision, des accroches de génériques pour les émissions enfantines ou des chansons oubliées de bandes originales de films chelous (ce genre). Dans une sorte de psychédélisme domestique, assagi mais pas moins rêveur, le groupe travaille les timbres en jouant sur les contrastes de leurs sonorités acoustiques / électriques / électroniques, toujours au service d’une écriture simple et efficace. Car le savoir faire de Satellite Jockey ne trouve son aboutissement que dans l’exploration de la mélodie. Ou comment garder la foi en ce territoire plus ou moins abandonné ces temps-ci au profit du rythme, de la palabre et de l’image. Continuer la lecture de « Satellite Jockey… Plays Music ! (Another Record) »

Catégories mardi oldieÉtiquettes , , , , ,

Stone face à Charden, Fuzz-ci, fuzz-ça ! (1966, réédition Pop Supérette)

recto.w1PxzZ7yvr

Si vous avez bien suivi, c’est un peu la suite du Mardi Oldie de la semaine dernière, parce que chez Pop Supérette, on a de la suite dans les idées. On vous avait quitté avec les fabuleux Boots et la réédition de leur super (là c’est pas un superlatif, c’est juste le nom du format d’époque) 45t, Vingt ans. Sur ce disque, il y a une chanson qui m’a bien plu (je l’ai même fait rentrer dans le hit parade de l’arrière-magasin), c’est Les gens sont méchants, imparable : eh bien, il est écrit par Eric Charden. Et Eric Charden, à la même époque, il écrivait des chansons et il rencontrait Stone, de son vrai nom Annie Gautrat. Ils ont un coup de foudre et ils se marient et vont voguer sur les vagues du succès. Continuer la lecture de « Stone face à Charden, Fuzz-ci, fuzz-ça ! (1966, réédition Pop Supérette) »

Catégories interviewÉtiquettes , , , ,

Tonn3rr3/Bikaye, partie n°2 : Bony Bikaye

Bony Bikaye
Bony Bikaye

Se retrouver à deux poignées de main (et d’un uppercut, sans doute) de Mohamed Ali, j’avoue que ça m’a troublé. Mohamed Ali, donc, qui s’entrainait en rythme avec Big Black, le percussionniste – pas le joueur de poker – qui lui-même rejoignait faire le bœuf avec le groupe dans lequel Bony Bikaye jouait à l’Intercontinental de Kinshasa en cette fiévreuse année 1974. Que de légendes. Une légende, ce « Monsieur Bony », parce qu’il avait marqué le début des années 80 avec une pierre angulaire des musiques de l’ailleurs, Noir et blanc (Crammed, 1983), disque où, en compagnie d’Hector Zazou et du binôme mystérieux CY1, il redéfinissait le périmètre des musiques africaines, ou plus précisément il amenait sa voix, porteuse de sa culture congolaise et de son admiration pour Cluster, à se brûler au froid des synthés et des ordis balbutiants. Quarante ans plus tard, une éternité, on le retrouve, en compagnie de Guillaume Gilles avec lequel on s’entretenait la semaine dernière, à la proue du navire Tonn3rr3 pour un disque étonnant de fraîcheur et de profondeur, It’s a Bomb paru chez Born Bad Records. Continuer la lecture de « Tonn3rr3/Bikaye, partie n°2 : Bony Bikaye »

Catégories mardi oldieÉtiquettes , , , ,

Les Boots, Vingt Ans (1966, réédition Pop Supérette)

« On doit me prendre pour Pompidou,
je ne lui ressemble pas du tout »

Il y a quelques années dans les commentaires d’un blog, j’avais croisé le fer avec quelqu’un, lui affirmant que le disque chroniqué sur ce site me semblait difficilement crédible : tout était trop parfait, il s’agissait d’une compilation d’un groupe de Lyon des années 1980, inconnu dont l’esthétique était tellement parfaite et la musique tellement dans son jus que ça m’avait rendu parano au point que j’imaginais une entourloupe : des gens de maintenant avaient tout recréé, avec bon goût, et une connaissance fine et pointue des codes de l’époque (musique synthétique parfaite, polaroids délavés…). Tout sonnait tellement de façon incroyable que j’avais été troublé au point de faire part de mon effarement en public. J’avais été remis en place fermement, comme tout bon troll relou : tout cela existait vraiment, le pays n’avait pas déterré tous ses trésors. Et on n’était pas encore envahi de ce nuage radioactif au pouvoir divin (Satan !) qu’est le fameux IA et son corolaire des fameux fakes, vous imaginez mon état actuel de méfiance. Non, rassurez-vous, je me un peu suis assoup(l)i) : la preuve, à aucun moment, je n’ai douté de l’existence des Boots. Continuer la lecture de « Les Boots, Vingt Ans (1966, réédition Pop Supérette) »

Catégories interviewÉtiquettes , , , , , ,

Tonn3rr3/Bikaye, partie n°1 : Guillaume Gilles (Tonn3rr3)

Tonn3rr3/Bikaye, de gauche à droite : Guillaume Gilles, Olivier Viadero, Bony Bikaye, Yoann Dubaud, Gaëlle Salomon et Guillaume Loizillon / Photo : François Griooix
Tonn3rr3/Bikaye, de gauche à droite : Guillaume Gilles, Olivier Viadero, Bony Bikaye, Yoann Dubaud, Gaëlle Salomon et Guillaume Loizillon / Photo : Sylvain Gripoix

Le disque It’s A Bomb paru en fin d’année dernière chez Born Bad Records montre qu’il est toujours possible d’imaginer une musique du présent (pour le futur, on verra) en faisant fi des barrières : celles des générations – il lie le groupe actuel Tonn3rr3 à un des personnages emblématiques de la musique électronique des années 1980, Bony Bikaye (connu pour son alliance avec Hector Zazou, et CY1, on en reparle), celles des styles – un psychédélisme qui naît d’une passerelle tendue entre les musiques africaines qui dansent et les machines qui font la fête. On n’est ni dans la sono mondiale, slogan 1980 qui a sans doute fait son temps, ni dans la World, étiquette plus ou moins publicitaire des années 1990 – notez que ces deux tentatives d’étiquetage maladroit, parfois moqué, parfois décrié, avaient la vertu de l’ouverture au monde (et pas qu’à sa composante anglo-saxonne) – on est dans quelque chose du nouveau siècle de l’information qui tient de la vitesse des échanges et des cultures musicales, quelque chose qui nous lie au-delà des frontières, dans les plans discrets de musiciens punk d’ici qui vont jouer avec les bluesmen du Sahara, de jeunes musiciennes béninoises qui se retrouvent têtes d’affiche sur la BBC, ou d’un poète crooner australien qui échoue en région parisienne sur la banquette de fans du Velvet. Une histoire de rencontres et de voyages (l’agence de voyage Born Bad) qui forment la jeunesse (et tout le monde dans son sillage), tout simplement. Rencontre avec Guillaume Gilles, architecte et penseur du son chez Tonn3rr3/Bikaye. Partie 1. Continuer la lecture de « Tonn3rr3/Bikaye, partie n°1 : Guillaume Gilles (Tonn3rr3) »