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Jeffrey Foskett et Nelson Bragg, garçons de plage

Deux rétrospectives de musiciens dans la lignée des Beach Boys sortent en cette période de deuil de Brian Wilson.

C’est étrange mais le travail du deuil a ceci de commun avec celui de la découverte qu’il s’opère souvent par à-coups successifs. Depuis le 11 juin, les souvenirs resurgissent ainsi, de temps à autre, par grappes agglomérées, au gré des ramifications de la mémoire, semblables en cela à la manière dont s’entrebaillaient, il y a longtemps, les portes des premiers émerveillements. En effet, si les Beach Boys ont été si importants dans notre éducation musicale, c’est notamment parce qu’ils ont été le premier groupe, dont la grandeur s’est révélée comme on perce progressivement une succession de mystères et de secrets concentriques. Celui pour lequel – plus que pour tous ses concurrents contemporains – la passion musicale grandissante s’est apparentée à une expédition spéléologique au cœur d’un réseau galeries dont il s’agissait d’identifier, étape par étape, les connections enfouies. Derrière la face émergée et saillante – ces tubes charmants mais un peu désuets qui baignaient déjà l’enfance – on commençait ainsi par apercevoir Pet Sounds (1966) puis, au moment de la publication de ce fameux coffret rétrospectif de 1992 (Good Vibrations –Thirty Years Of The Beach Boys, le premier objet discographique de cette importance acquis avec le tout premier salaire d’adulte), les bribes du naufrage admirable et tragique de Smile (1967). De là, il devenait possible de cheminer plus loin, vers les lueurs de Sunflower (1970) ou de Surf’s Up (1971) et d’y deviner, au-delà des obscurités intermittentes du génie à éclipse de Brian Wilson, l’éclat parfois tout aussi éblouissant du talent de ses frères.

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Brian Wilson (1942-2025), le jour le plus triste de l’histoire de notre musique

Brian Wilson / Photo : DR
Brian Wilson / Photo : DR

De quelle façon aborder un tel monument ? C’est une question qu’on s’est posée ici. C’était perdu d’avance, presque tout a été écrit, et parfois même en avance, mais on s’est dit qu’on allait faire comme ça : s’appuyer sur les petites histoires qui nous ont touchés sur les réseaux, libérées dans la foulée de la disparition de Brian Wilson la semaine dernière, avec des interludes, réminiscences de nos obsessions, regroupés sous le titre trouvé dans une folle inspiration par notre confrère Etienne Greib. Des grains de sable qui jonchent la plage de légende que foule dorénavant quelque part le musicien californien, pour l’éternité. (RS)

Titre : Etienne Greib

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Grain Noir – André Hardellet, Annie Ernaux, The Beach Boys

Collage sauvage et de mauvaise foi de l’actualité culturelle de la semaine

Laetitia Dosch et Sergei Polunin dans "Passion Simple" de Danielle Arbid, basé sur le livre de Annie Ernaux
Laetitia Dosch et Sergei Polunin dans « Passion Simple » de Danielle Arbid, basé sur le livre de Annie Ernaux

Je me sentais, ces derniers jours, comme dans ce fameux clip de Depeche Mode, Behind the Wheel. Un monde en ambiance grain noir, me retrouvant en béquille et imperturbablement amoché sur le bord d’une route. Et puis, au loin sur le dos rond d’une route perdue, la petite vespa de l’espérance arrive. Ce n’est pas rien une petite vespa de l’espérance, parfois c’est une vie. Continuer la lecture de « Grain Noir – André Hardellet, Annie Ernaux, The Beach Boys »

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« He went in the piano » : note sur l’obsession, note sur une démo de « Surf’s Up »

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Brian et son piano, 1971.

Grâce au mode aléatoire qui agite le quotidien — rencontres impromptues de telle heure et telle œuvre —, il se trouve que je découvrais pour la première fois la démo de la piste des Beach Boys, Surf’s Up, dite « solo version » — ce qualificatif…  — alors que je tournais les dernières pages de l’essai Pierre Sky l’Enchanté de Sébastien Smirou (Marest Éditeur). Le soleil se posait en fines bandes sur le gazon en filant dans la dentelle des frondaisons. C’était le Jardin du Luxembourg et au loin, les sifflets des gardiens du Sénat résonnaient. C’était un soir d’été. J’ai voulu pleurer. Je n’y suis pas parvenu. C’est resté à l’intérieur. La voix, qui ressemble à la voix que j’avais dû avoir avant de muer, terminait : « a children song… » Il s’en suivait des vocalises qui assuraient ensuite l’intégralité de la mélodie. Le piano, sur Surf’s Up, n’offre qu’une variation d’accords en boucle, une stricte modulation qui constitue le cercueil de la chanson. Un nuage fin passe dans le ciel de Paris, c’est quasiment du répit. Et enfin, Brian, qui dit, penaud, let’s hear that : l’accident est gravé sur les sillons du studio. Continuer la lecture de « « He went in the piano » : note sur l’obsession, note sur une démo de « Surf’s Up » »