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Sextile : « Depeche Mode a sauvé ma vie »

Sextile
Sextile

Sur papier, Sextile semblait promis à un bel avenir. Fondé en 2015 à la suite d’une rencontre en rehab, le quatuor avait enfin trouvé la bonne formule avec leur single Current Affair et leur EP 3 sortis en 2018. Résumer leur son de l’époque à de l’EBM serait un peu réducteur tant leurs influences semblent dépasser les étiquettes. Si le projet était avant tout celui de Melissa Scutado et de Brady Kheen, le décès en 2019 d’Eddie Wuebben, membre fondateur, guitariste et joueur de synthé, a entraîné le split du groupe. Mais aussi sa reformation en 2022, comme le racontent de façon très touchante Melissa et Brady dans cette interview. De retour avec Push, énorme album en forme de déclaration d’amour à la musique qui les a construits (électro, punk, rave etc), le groupe réussit l’exploit de retranscrire en studio l’énergie qui fait d’eux l’un des meilleurs groupes de scène actuels. Continuer la lecture de « Sextile : « Depeche Mode a sauvé ma vie » »

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Anika : La fin des compromis

Anika
Anika / Photo : Coralie Gardet

En juillet dernier, Annika Henderson faisait son retour avec un second album, Change, onze ans après celui qui avait fait connaître son nom en 2010, Anika. Alors journaliste politique entre Londres et Berlin, où elle vit désormais, l’Anglaise de Surrey avait répondu à l’appel de Geoff Barrow, membre fondateur de Portishead, à la recherche d’une chanteuse pour un projet encore jeune à l’époque, BEAK>. Neuf titres, dont sept reprises, de Bob Dylan, Ray Davies ou Yoko Ono, étaient nés de cette rencontre. La voix grave et sépulcrale d’Anika, souvent comparée à celle de Nico, assortie d’arrangements entre post-punk et dub, avait soufflé un vent froid mémorable sur ces grands classiques des années 1960. C’est sans surprise qu’on la retrouvait, en 2016, signée sur le plus sombre des labels indés, Sacred Bones, en meneuse du groupe Exploded View. Aujourd’hui, ce sont ces deux maisons, Sacred Bones et Invada, le label de Barrow, que la chanteuse a choisies pour publier son dernier album, son plus personnel et intime. Elle nous parle de son processus de création et de sa manière de le diriger, sans compromis, dans un entretien accordé fin septembre à Angers, quelques heures avant sa performance au Levitation France.

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Indigo Sparke, Echo (Sacred Bones)

Si vous avez déjà entendu le nom d’Indigo Sparke, alors il y a de grandes chances pour que vous ayez connu et apprécié la musique d’Adrianne Lenker et de son projet Big Thief. Dès 2017, la complicité intime et artistique partagée par l’Australienne et l’Américaine conduit Indigo Sparke à assurer les premières parties de Big Thief en Australie. Elle joue alors les titres de Nightbloom, son premier EP, dont le secret reste d’abord gardé de son côté de l’océan. C’est en 2019, invitée au festival texan SXSW, qu’elle se fait repérer par NPR : le Tiny Desk Concert qui en résulte, début 2020, lui augure une belle année ; avant que l’univers n’en décide autrement.

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Caleb Landry Jones, The Mother Stone (Sacred Bones Records)

Il y avait de l’impatience à écouter ce disque, depuis six mois que je voyais les photos de promo de Sacred Bones Records sur mon fil Facebook. En les apercevant d’abord, ces drôles de photos de Caleb Landry Jones fardé et tout en perruque, je m’y étais reprise à deux fois avant de reconnaître ce visage fascinant, entre l’enfance et l’âge adulte. C.L. Jones est acteur avant d’être musicien – ce qui se discute, tant du point de vue de l’artiste lorsqu’il s’explique, que de ce premier disque. Ce visage, c’est celui du jeune cocaïnomane de Twin Peaks The Return, l’incarnation du désespoir et d’une Amérique au bord du gouffre à travers son personnage, Steven Burnett. Si l’on éprouve une passion pour Twin Peaks, le copinage entre Sacred Bones – dont une bonne partie du catalogue est digne d’être adulée – et David Lynch n’est pas pour déplaire. Continuer la lecture de « Caleb Landry Jones, The Mother Stone (Sacred Bones Records) »

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Moon Duo : Révolution disco

Sanae Yamada Ripley Johnson Moon Duo
Sanae Yamada et Ripley Johnson, Moon Duo

Deux ans après le remarquable Occult Architecture, diptyque aussi fascinant que bizarrement clivant, Sanae Yamada et Ripley Johnson, les deux cerveaux de Moon Duo, reviennent aujourd’hui avec Stars Are the Light, un sixième album très réussi qui, tout en faisant tourner les boules à facettes d’une disco universelle largement fantasmée, élargit spectaculairement le champ du nouveau rock psychédélique que le duo façonne patiemment depuis 2010. Pour cela, Moon Duo a choisi de prendre un surprenant virage électro-pop, délaissant d’un coup les références appuyées à Suicide et Spacemen 3 pour mieux se rapprocher de sonorités discoïdes qui tranchent singulièrement avec tout ce que le groupe a pu produire jusque-là. Continuer la lecture de « Moon Duo : Révolution disco »

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Jenny Hval, The Practice of Love (Sacred Bones)

Jenny HvalJ’avais laissé Jenny Hval, écrivaine et compositrice norvégienne de 39 ans, dans un rêve. C’était lors de son EP tout en digressions et reflets The Long Sleep. Projet tout à fait conscientisé de s’adresser au corps de son auditeur, Hval y théorisait un flux de sensations et de mots pour détruire les codes du capitalisme numérique – son sujet était alors de déjouer les cadres du streaming. Revenue de cette expérience à même le rêve, la Norvégienne propose cette fois-ci un album qui n’a rien de digressif. The Long Sleep était un objet accueillant et relativement simple d’accès considérant le reste de la discographie de la compositrice, The Practice of Love sorti chez Sacred Bones, confirme et accentue cette orientation. Continuer la lecture de « Jenny Hval, The Practice of Love (Sacred Bones) »

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Spellling, Mazy Fly (Sacred Bones)

Spellling Mazy Fly Sacred BonesJ’écoute ce disque et ça me donne l’envie de crier cette chose certes pas très originale mais pourtant vraie : « Attention OVNI ! ». Car il faut malgré tout encore et toujours le répéter — contre le lieu commun justement –, la science-fiction peut tout à fait être l’apanage du féminin. Faut-il encore rappeler l’existence fondamentale de l’œuvre d’Octavia E. Butler et de ses cyborgs, ou encore celle d’Ursula K. Le Guin qui transcende à elle-seule Tolkien et George Bernard Shaw combinés (faut-il rappeler, donc, qu’il faut absolument écouter son Music and Poetry of the Kesh sorti l’an dernier chez Freedom To Spend)? Et j’utilise le terme « apanage » à dessein pour célébrer la lecture et la performance tout à fait matriarcale de cette littérature de genre que nous offre Chrystia Cabral, dite Spellling, dans son nouvel album intitulé Mazy Fly. Car il faut au moins la littérature pour « nous permettre de voir le pire et savoir lui faire face », disait Georges Bataille, et c’est dans une prospective toute futurologiste qu’il nous est proposé à travers les 12 titres de cet enthousiasmant Mazy Fly d’observer l’ampleur du désastre à venir tout en invoquant la sorcellerie nécessaire pour s’en défaire et ressortir transformé des traumas dus à ce monde-labyrinthe là. Continuer la lecture de « Spellling, Mazy Fly (Sacred Bones) »

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The Men, Drift (Sacred Bones)

The MenMaybe I’m Crazy”, martèle Mark Perro, leader des frénétiques The Men, sur le titre d’ouverture de Drift. Le spectre de The Soft Moon est là : nous sommes bien chez Sacred Bones Records, la maison-mère. En 2016, après cinq albums sur le label new-yorkais (au rythme d’un par an entre 2010 et 2014), le groupe s’auto-produit et enregistre en un week-end l’abrasif Devil Music, une régression punk-rock DIY, semblable à une vieille maquette exhumée du grenier. Il ne s’agissait que d’une incartade : Drift, par son éclectisme, s’inscrit dans la lignée du chaleureux Open Your Heart (2012).  Continuer la lecture de « The Men, Drift (Sacred Bones) »