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Les Boots, Vingt Ans (1966, réédition Pop Supérette)

« On doit me prendre pour Pompidou,
je ne lui ressemble pas du tout »

Il y a quelques années dans les commentaires d’un blog, j’avais croisé le fer avec quelqu’un, lui affirmant que le disque chroniqué sur ce site me semblait difficilement crédible : tout était trop parfait, il s’agissait d’une compilation d’un groupe de Lyon des années 1980, inconnu dont l’esthétique était tellement parfaite et la musique tellement dans son jus que ça m’avait rendu parano au point que j’imaginais une entourloupe : des gens de maintenant avaient tout recréé, avec bon goût, et une connaissance fine et pointue des codes de l’époque (musique synthétique parfaite, polaroids délavés…). Tout sonnait tellement de façon incroyable que j’avais été troublé au point de faire part de mon effarement en public. J’avais été remis en place fermement, comme tout bon troll relou : tout cela existait vraiment, le pays n’avait pas déterré tous ses trésors. Et on n’était pas encore envahi de ce nuage radioactif au pouvoir divin (Satan !) qu’est le fameux IA et son corolaire des fameux fakes, vous imaginez mon état actuel de méfiance. Non, rassurez-vous, je me un peu suis assoup(l)i) : la preuve, à aucun moment, je n’ai douté de l’existence des Boots. Continuer la lecture de « Les Boots, Vingt Ans (1966, réédition Pop Supérette) »

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Tonn3rr3/Bikaye, partie n°1 : Guillaume Gilles (Tonn3rr3)

Tonn3rr3/Bikaye, de gauche à droite : Guillaume Gilles, Olivier Viadero, Bony Bikaye, Yoann Dubaud, Gaëlle Salomon et Guillaume Loizillon / Photo : François Griooix
Tonn3rr3/Bikaye, de gauche à droite : Guillaume Gilles, Olivier Viadero, Bony Bikaye, Yoann Dubaud, Gaëlle Salomon et Guillaume Loizillon / Photo : Sylvain Gripoix

Le disque It’s A Bomb paru en fin d’année dernière chez Born Bad Records montre qu’il est toujours possible d’imaginer une musique du présent (pour le futur, on verra) en faisant fi des barrières : celles des générations – il lie le groupe actuel Tonn3rr3 à un des personnages emblématiques de la musique électronique des années 1980, Bony Bikaye (connu pour son alliance avec Hector Zazou, et CY1, on en reparle), celles des styles – un psychédélisme qui naît d’une passerelle tendue entre les musiques africaines qui dansent et les machines qui font la fête. On n’est ni dans la sono mondiale, slogan 1980 qui a sans doute fait son temps, ni dans la World, étiquette plus ou moins publicitaire des années 1990 – notez que ces deux tentatives d’étiquetage maladroit, parfois moqué, parfois décrié, avaient la vertu de l’ouverture au monde (et pas qu’à sa composante anglo-saxonne) – on est dans quelque chose du nouveau siècle de l’information qui tient de la vitesse des échanges et des cultures musicales, quelque chose qui nous lie au-delà des frontières, dans les plans discrets de musiciens punk d’ici qui vont jouer avec les bluesmen du Sahara, de jeunes musiciennes béninoises qui se retrouvent têtes d’affiche sur la BBC, ou d’un poète crooner australien qui échoue en région parisienne sur la banquette de fans du Velvet. Une histoire de rencontres et de voyages (l’agence de voyage Born Bad) qui forment la jeunesse (et tout le monde dans son sillage), tout simplement. Rencontre avec Guillaume Gilles, architecte et penseur du son chez Tonn3rr3/Bikaye. Partie 1. Continuer la lecture de « Tonn3rr3/Bikaye, partie n°1 : Guillaume Gilles (Tonn3rr3) »

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Selectorama : Nicolas Paugam

Dans le vortex des sorties musicales à la micro seconde – comme les opérations financières, tiens -, on est comme dans une boîte de nuit, frôlé par les corps qui bougent, saturé par le son et aveuglé par le lumières, on se cogne, on trouve son chemin tant bien que mal, on regarde des corps fuselés qui nous attirent l’œil, des sirènes qui nous font tourner la tête, on ne sait plus où donner de l’attention. Nicolas Paugam, dans ce bordel, c’est un peu le gars mal peigné, en pull de ski, qui est tranquille, un petit verre à la main, il ne transpire pas, il observe. Au début, on se dit, c’est qui ce mytho ? Et puis au fil de la soirée, on est attiré, on se retrouve à l’écouter raconter sa life, il a des bonnes phrases, on se marre, on est ému et lui, il reste frais malgré l’heure qui tourne (GIF animé d’une horloge avec les aiguilles qui bougent de ouf). Après on sait pas ce qui s’est passé, mais on se retrouve dans son chalet, à l’air pur (enfin ce qu’il en reste, on va pas délirer), il y a un brasero dans le jardin, on entend les oiseaux, et puis il joue de la guitare, il chante et c’est bien. Cette année, Nicolas Paugam a sorti son 6e album, La Délicatesse, dans lequel il propose une relecture de chansons choisies dans son répertoire, comme une belle introduction à ceux qui auraient manqué le début. On a demandé à Nicolas ce qu’il écoutait en ce moment. Continuer la lecture de « Selectorama : Nicolas Paugam »

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Stéphane Milochévitch : « L’important est de rester soi-même à tout prix »

Stéphane Milochévitch / Photo : Philippe Mazzoni
Stéphane Milochévitch / Photo : Philippe Mazzoni

Si vous lisez Section26, vous savez combien on a adoré l’arrivée de Stéphane Milochévitch dans le paysage francophone de la chanson d’ici, sous le nom de Thousand bien sûr, avec deux disques Le tunnel végétal (2018) et Au paradis (2020) et cette suite qui en est une sans l’être, La bonne aventure, sous son propre nom. C’est toujours sur le label Talitres, fidèle refuge bordelais de cette aventure qui prend des proportions inespérées (un article du journal Le Monde, des passages sur France Inter…), mais compréhensibles tant l’ex-Thousand donne le vertige avec sa chanson incroyablement personnelle et sa façon d’écrire kaleïdoscopique : télescopage d’images, d’expressions, de mots, de couleurs, sans cesse en mouvement, toujours différent d’une écoute à l’autre. On avait évidemment envie de lui poser quelques questions, avant son premier concert parisien au Point Ephémère  sous son nouveau patronyme, jeudi 23 novembre. Continuer la lecture de « Stéphane Milochévitch : « L’important est de rester soi-même à tout prix » »

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Charlene Darling, La porte (Disciples)

« Des regards tout mous de demi hommes, d’enfants de 30 ans, de demi hommes, pas comme les hommes d’avant, ceux dont on parlait dans les films »

Là où il semblait que son précédent effort Saint Guidon, paru en 2019, cherchait à arrondir les angles en trouvant une hypothétique et fantasmée voie de sortie vers une sorte de variété apaisée, La porte s’ouvre vers un territoire moins balisé et pas moins intéressant. Clairement défini par son introduction comme un disque de rupture amoureuse, il permet une catharsis âpre à son auteure qui – on s’en doutait – n’est pas là pour jouer les demoiselles en détresse. Continuer la lecture de « Charlene Darling, La porte (Disciples) »

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Le collectif TRUC lance sur orbite une Golden Cassette !

Guido Möbius
Guido Möbius

Le collectif TRUC continue son petit bonhomme de chemin dans les marges des marges, en toute discrétion, comme s’ils sortaient d’une aventure d’une série inédite de Franquin, genre des aventuriers à la Spirou et Fantasio à la recherche d’enregistrements perdus d’un gaffophone oublié. C’est ce qui nous vient en tête quand on échange avec eux à propos de ce numéro nouveau de leur série de compilations cassette. Ce coup-ci, ils se sont mis en tête de sortir une Golden Cassette, tentative humble et fauchée de donner une suite, sinon une alternative à ce disque en or envoyé par la NASA par les sondes Voyager dans les années 1970, et contenant des enregistrements sonores de notre planète. Ceux qui lisaient Pif Gadget quand ils étaient petits ont sans doute garder précieusement une petite plaque de métal doré avec un homme et une femme à poil faisant un salut poli et distant à destination de nos amis extraterrestres. Bref, TRUC a réuni des artistes du monde entier pour faire le point sur notre époque, un petit polaroid qui se développera en partie au Cirque électrique le 10 novembre à Paris. Ne manquez pas le lancer de la cassette dans le ciel, à l’aide de ballon gonflé à l’hélium, c’est tellement plus poétique que des lanceurs à carburants. Continuer la lecture de « Le collectif TRUC lance sur orbite une Golden Cassette ! »

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Stéphane Milochevitch, La bonne aventure (Talitres)

« J’ai enregistré ce CD
pour qu’un jour tu l’entendes par hasard
en coup de vent en coup d’un soir
en coup de poignard »

D’abord faire le deuil, celui de Thousand, entité floue aux deux albums sortis de nulle part, passionnant, touchant, en diptyque – passion critique rock , passion assemblage – du portrait en tissu (Le tunnel végétal, 2018) à celui en céramique (Au paradis, 2020), deux disques dont on ne s’est toujours pas remis, qui vieillissent avec nous tranquillement, avec deux trois écoutes mensuelles, des chansons qui jouent à prendre ou perdre des places dans notre top 50 mental (en ce moment l’obsession est portée sur Narval et Le bâton ivre). D’ailleurs, on attendait de pied ferme le troisième volet (le fameux triptyque, on sait aussi compter jusqu’à trois, ou un retable, tiens, si on pense aux obsessions spirituelles du chanteur), avec un portrait en coquillage, ou en statue de bois, on ne saura pas, peut-être qu’il viendra plus tard, ou jamais, peut-être qu’on le fantasmera et que ça sera mieux. On était prévenu, ceci dit, il y avait cette prédiction dans le dernier : « Appelle moi demain, demain Milochevitch ». On aurait dû comprendre, ce  message aux exégètes, cette annonce d’une fin et d’une résurrection. Continuer la lecture de « Stéphane Milochevitch, La bonne aventure (Talitres) »

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Selectorama : Pierre Rousseau

Pierre Rousseau / Photo : Charles Negre
Pierre Rousseau / Photo : Charles Negre

Auteur récent du très élégant Mémoire de forme, Pierre Rousseau élabore des mondes électroniques qui tiennent plus de l’architecture ou du travail plastique que de la pop, même si jamais n’est délaissée l’accroche mélodique : d’ailleurs, l’approche générale laisse place entière aux émotions, les plages dégageant une charge mélancolique évidente, éloignée d’une abstraction froide qui parfois guette ce genre d’initiative. Les rythmiques plutôt agitées mais douces ancrent les compositions dans une modernité toute actuelle, mais des traces d’utopies du passé résistent dans le fond, une époque de croyance en un futur où sciences et raison se marieraient pour le bonheur de tous : dirigeables lents et silencieux dérivant dans le ciel, champs de blé traversés par les aérotrains, exploration spatiale internationale, exploration intérieure aussi, en douceur grâce à de belles musiques fonctionnelles nous amenant à une extase des synapses. Un peu le résumé du programme de Mémoire de forme, en quelque sorte. Continuer la lecture de « Selectorama : Pierre Rousseau »