Échappant plutôt par le haut au narratif du renouveau de la pop italienne coincé entre San Remo et Sorrentino, Andrea Laszlo de Simone est suivi par quelques-uns de ce côté des Alpes depuis son Uomo Donna, album ample, gras et pourtant merveilleux qui s’imposait comme neuf malgré l’évidence de son ambition anachronique. Plutôt que de ciseler, potentialiser et photocopier son talent mélodique, le chanteur turinois délayait, aérait et laissait filer, entre les chansons, des longues plages de vie aux accents pastoraux. Je fus ainsi surpris un jour par le mode aléatoire qui fit se superposer Questo non è amore et Heart of the Country de Paul et Linda McCartney comme une naturelle association d’idées, un raccord cinématographique. Il y avait un romantisme archaïque dans Uoma Donna qui faisait revenir des images du Heureux comme Lazzaro d’Alice Rohrwacher (2018), des prolétaires des premiers Visconti, ou encore, plus récemment, du cinéma de Pietro Marcello. Une filiation paysanne et romantique qui, par son contre-point anachronique, rend le monde plus vrai. Continuer la lecture de « Andrea Laszlo de Simone, Immensità (42 Records) »
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Fin du monde : la bande originale
L’apocalypse zombie n’est pas encore là mais rien ne nous empêche d’écouter, de réécouter ou de faire découvrir Odessey And Oracle (des Zombies, justement), un disque de circonstance (une dernière merveille avant la fin) dont rigoureusement aucun extrait n’a été choisi pour cette mixtape à la fois paniquée et apaisante. Aux montagnes russes de l’incertitude, adaptons nos souvenirs, n’oublions pas de sourire, rendons hommage à Genesis P-Orridge, prophète des chaos passés et à venir qui nous a judicieusement quitté hier, et réécoutons, angoissés et amusés, tous les disques que nous aimons en prenant soin de nous. On va tous crever ? Et puis après, on verra bien.
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Maria McKee : La Chamade
Maria McKee n’avait plus donné de nouvelles depuis près de treize ans. Retirée de la musique pour se consacrer au cinéma et, plus précisément, aux films de son mari, Jim Akin, la chanteuse n’avait donc plus rien sorti depuis Late December en 2007, jugeant notamment que sa carrière ne lui ressemblait plus et que son heure était sans doute aussi un peu passée. Pourtant, cette pionnière de la scène néo-country, encensée depuis ses débuts au sein des éphémères Lone Justice, a toujours été une femme de tête et demeure une figure difficilement contournable du rock américain de ces quarante dernières années. Dans les années 90, elle avait ainsi réussi à s’imposer comme une véritable artiste solo, signant quelques albums de haute tenue, parmi lesquels le remarquable You Gotta Sin to Get Saved (1), un classique de l’americana produit par George Drakoulias et pour lequel elle avait embrigadé des membres des Jayhawks, des Posies et des Heartbreakers de Tom Petty. Continuer la lecture de « Maria McKee : La Chamade »
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Dropkick, The Scenic Route (Sound Asleep/Bobo Integral)
C’est sans doute Nick Hornby qui l’a exprimé de la manière la plus claire et la plus pertinente en évoquant, dans les pages de 31 Songs (2003), son attachement passionnel, au-delà de toute considération esthétique, à Thunder Road de Springsteen. Il arrive parfois – rarement – que nous croisions le chemin d’un artiste ou d’une œuvre – une simple chanson peut suffire – qui exprime intégralement et parfaitement ce que nous sommes. Il ne s’agit pas d’une identification ponctuelle aux sentiments évoqués, aux situations décrites ni même aux personnages mais d’une adhésion plus complexe et plus complète aux moindres inflexions mélodiques, de cette conviction profonde, renforcée à chaque écoute, de partager avec l’auteur chacune de ses décisions artistiques et de saisir avec la puissance inégalée de l’intuition ce qu’il exprime par une voix qui semble se confondre avec la nôtre. Continuer la lecture de « Dropkick, The Scenic Route (Sound Asleep/Bobo Integral) »
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Sous Surveillance : Dragnet
Qui ?
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Selectorama : Lesneu
Lesneu, c’est :
1/ le projet de Victor Gobbé qui officie par ailleurs avec The Slow Sliders.
2/ une abréviation de Lesneven, petite ville proche de Brest.
À 4 ans, Victor veut faire de la batterie. Il devra attendre un an pour avoir l’âge requis. Et ma foi, depuis il n’a jamais lâché l’affaire. Batterie, guitare, clavier, il touche à tout avec la même évidence nonchalante. Rajoutez sa voix au timbre ample et si particulier et vous aurez un disque qui ne ressemble à aucun autre. Des chansons mélancoliques sans tomber dans le pathos, des mélodies qui collent à la peau, des chansons d’amour intemporelles. Continuer la lecture de « Selectorama : Lesneu »
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V/A, Born Bad Record Shop – 20 years Anniversary (Les Disques Les Mauvais Garçons)
En 2019, le disquaire Born Bad fêtait ses vingt ans d’existence, une petite performance en soi compte tenu du contexte économique difficile de la musique sur support physique. Pour marquer le coup, le disquaire a organisé des concerts en septembre dernier et sort ces derniers jours une compilation vinyle uniquement disponible rue Saint Sabin à Paris et chez quelques collègues émérites (Total Heaven, Dangerhouse etc.). Nous avons rarement l’occasion de mettre en avant ici les disquaires, ils sont pourtant un maillon important de la musique que nous aimons. Born Bad fait partie de ces endroits de vie, point névralgique de scènes qu’il faut chérir et valoriser. Continuer la lecture de « V/A, Born Bad Record Shop – 20 years Anniversary (Les Disques Les Mauvais Garçons) »
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Cornershop, England Is A Garden (Ample Play)
De leurs débuts tonitruants dans les années 90 où ils brûlaient une effigie de Morrissey devant sa maison de disques – et devant les photographes des tabloïds anglais, à leur adoubement par le roi de l’Oasis, Noël Gallagher, en passant par le coup d’accélérateur donné à leur carrière par Fatboy Slim qui signait un remix de Brimful Of Asha, on pouvait aisément ne retenir qu’un énorme nuage de fumée épaisse, de la poudre de perlimpinpin pour un gogo indie (comme moi), des cônes d’encens pour touristes musicaux (comme moi). Cornershop, c’était et c’est évidemment beaucoup d’autres choses qui valent bien mieux que ce parcours en pointillé. Continuer la lecture de « Cornershop, England Is A Garden (Ample Play) »