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Daniel Wylie (Cosmic Rough Riders) : « J’ai l’impression que j’ai toujours su écrire des chansons. »

Daniel Wylie
Daniel Wylie

Il y a tous ceux qui commencent tôt et s’épuisent vite. On pourrait aussi recenser quelques exemples – plus rares, il est vrai – de débutants tardifs, qui conquièrent moins précocement une forme de reconnaissance associée à la maturité. Leonard Cohen bien sûr. Guy Chadwick aussi. Et puis, il y a Daniel Wylie. Classé hors-catégorie depuis presque trente ans, ce songwriter écossais ultra-doué n’est jamais vraiment rentré dans les cases de ces parcours balisés. Ces quelques mois de gloire, il les a connus à quarante ans, alors que le groupe dont il était le pilote principal et presque unique, Cosmic Rough Riders, signait sur l’éphémère label Poptones, lubie fin de siècle d’un Alan McGee sorti rincé de l’aventure Creation. Un hit – Revolution In The Summertime – et même un passage à Top Of The Pops à l’âge presque canonique où les superstars adolescentes sont déjà en préretraite. Un petit tour devant les projecteurs et puis c’est tout. Pour ce qui est de la notoriété, les plats ne sont passés qu’une seule fois. Pour ce qui est des chansons, il en va tout autrement. Depuis 2006, Wylie a construit à un rythme soutenu – un albums tous les deux ans environ – une œuvre d’une qualité exceptionnelle, où les références à ses idoles américaines de toujours (Neil Young, R.E.M. pour les plus évidentes) n’excluent jamais la recherche de tonalités plus personnelles. Figure discrète mais centrale de la scène musicale de Glasgow, il vient de publier Atoms And Energy et raconte quelques-uns des jalons d’une trajectoire musicale atypique et essentielle. Continuer la lecture de « Daniel Wylie (Cosmic Rough Riders) : « J’ai l’impression que j’ai toujours su écrire des chansons. » »

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Pandore – Lamia Ziadé, Female Species, Paul Verhoeven

Collage sauvage et de mauvaise foi de l’actualité culturelle de la semaine

Female Species
Female Species

J’ai toujours été fasciné par cette scène d’explosion dans le Zabriskie Point de Michelangelo Antonioni. La violence et son aspect soudain, le montage méticuleux d’Antonioni pour livrer chaque détail, chaque minuscule élément embarqués dans les flammes et ce final terrible. Je ne sais pas si Lamia Ziadé a pensé à ce film en apprenant la nouvelle de la dévastation du port de Beyrouth. Continuer la lecture de « Pandore – Lamia Ziadé, Female Species, Paul Verhoeven »

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Selectorama : Louis Forster, The Goon Sax

The Goon Sax
The Goon Sax

Il n’y a pas de loup sous le tapis, ni dans la bergerie. Ce genre de choses n’existe pas.
Si les formidables Goon Sax ont su nous étourdir dès leur premier album par les qualités de ce qu’on appelle faute de mieux “la pop” – paroles et musique –, le deuxième posait une question : y avait-il formule ? Les chansons étaient toujours formidables, mais des pointes d’arrangements délicieux de cordes soulignaient en creux la persistance de l’axe rustique-et-claudication. De quoi se demander avant l’écoute circonspecte de ce troisième album tout nouveau – nouveau label, nouveau producteur (John Parish), nouvelles vies et side-projects – si ça partirait enfin et dans la joie dans tous les sens, ou si on assisterait au nouvel épisode de la carrière d’un groupe toujours formidable, donc, mais un rien confortable.
Bonne nouvelle : ça part encore plus loin que dans tous les sens, les textes sont encore plus incroyables (quand ils ne sont pas en allemand), les mélodies s’étalonnent selon deux axes Kate Bush/Syd Barrett, entre le champêtre et l’urbain, le synthétique et le rustique, il y en a partout et pourtant tout est épuré : The Goon Sax a simplement beaucoup d’idées.
Et, à l’image de Mirror II, dont la pochette n’est pas sans évoquer une idée de Roxy Music, Louis Forster révèle dans son Selectorama à découvrir ci-après un éclectisme salvateur, capable de débusquer ce qui est chanson dans chaque recoin de musique. Continuer la lecture de « Selectorama : Louis Forster, The Goon Sax »

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Le nouvel album de Jaromil Sabor, « Mount Vision » (Howlin’ Banana Records / Permanent Freak / Safe In The Rain) en écoute exclu

Jaromil Sabor
Jaromil Sabor

En bon artisan pop, Jaromil Sabor définit depuis maintenant dix ans les contours d’une musique qui embrasse autant folk, pop baroque, indie rock, jangle pop, garage rock que twee pop. Il s’exprime dans tous les dialectes de la langue qu’il chérit, et façonne le résultat jusqu’au moindre arrangement et à la production. Mount Vision est tout cela, de belles chansons pop finement ciselées, où ses instruments s’invitent tour à tour : claviers, cordes, cuivres, percussions… Trois ans de pause n’auront pas été de trop pour finaliser ce nouvel album qui sortira ce vendredi 9 juillet chez Howlin’Banana, Permanent Freak et Safe In The Rain Records, avec une petite surprise en cerise sur le gâteau : une version vinyle illustrée par Inaniel Swims accompagnée d’un tarot divinatoire spécialement créé pour l’occasion.

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N0V3L, Non-Fiction (Meat Machine)

N0V3L, Non-Fiction (Meat Machine)Après NOVEL, EP de 8 morceaux, paru en 2019 chez Flemish Eye/Meat Machine, Le groupe/collectif canadien N0V3L publie enfin son véritable premier album, Non-Fiction (Meat Machine). Le groupe, issu de la riche scène de la Colombie Britannique / Vancouver partage plusieurs membres (Bryce Cloghesy, Jon Varley et Noah Varley) avec Crack Cloud. Si les deux formations embrassaient, à leurs débuts, cette même appétence pour un post-punk désarticulé, leurs destins semblent s’être éloignés avec la sortie de leurs albums respectifs. Pain Olympics était une tentative, pas toujours réussie, de s’écarter de cette matière première, tandis que Non-Fiction en revendique la filiation à travers tout son être. Continuer la lecture de « N0V3L, Non-Fiction (Meat Machine) »

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New Order (A Life), #6

Ou comment la musique de New Order infuse dans nos vies.

Andy Wahrol, Lips (1975)
Andy Wahrol, Lips (1975), courtesy of Danziger Gallery

L’histoire se referme. 1987, 1988 et une renaissance contrariée : celle de New Order, sous le soleil d’Ibiza, lors de l’enregistrement de Technique. Décalage horaire permanent et paradis artificiels. Vanishing Point. C’est l’ombre de Nico, qui apparaît au détour d’une route escarpée, quelques semaines avant son décès accidentel. C’est le temps des fractures, de toutes les tensions intestines qui auront provisoirement la peau du groupe et de son unité, à jamais bancale désormais. C’est la fin d’une décennie pendant laquelle la légende et l’œuvre de New Order se seront construites sur les cendres de Joy Division, à l’aide des guitares autant que des machines, accompagnées d’une bonne dose d’inconscience et d’impréparation. Continuer la lecture de « New Order (A Life), #6 »

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Willie Dunn, Creation Never Sleeps, Creation Never Dies – The Willie Dunn Anthology (Light In The Attic)

Willie DunnLes convictions politiques les plus profondément ancrées ont ceci de commun avec les sentiments amoureux qu’elles se partagent difficilement en chanson. Les certitudes, si intenses soient-elles, ne se transposent pas aisément lorsque l’esthétisation risque de les affadir. En matière de folk ou de protest-songs, la sincérité ne fait pas tout. Pour survivre au contexte, il faut quelque chose de plus. Un surcroît incarné, presque une possession. Défenseur militant de la cause amérindienne dont il fit la matière principale d’une œuvre aussi confidentielle que magistrale, Willie Dunn s’est presque entièrement confondu, tout au long de son existence, avec ses chansons. L’une des multiples anecdotes éclairantes relatée dans le livret qui accompagne cette première rétrospective amplement méritée – 22 titres choisis parmi les quatre albums enregistrés entre 1971 et 1984 – en témoigne : alors que, quelques mois avant sa mort en 2013, on le sollicitait pour réinterpréter l’une de ses meilleures compositions – Charlie, une dénonciation des mauvais traitements infligés aux descendants de son peuple par le système quasi-carcéral des pensionnats canadiens et racontant la fugue puis le décès d’un jeune homme de douze ans – il préféra décliner l’invitation promotionnelle sous le plus simple des prétextes :  » C’est vraiment trop triste. » Continuer la lecture de « Willie Dunn, Creation Never Sleeps, Creation Never Dies – The Willie Dunn Anthology (Light In The Attic) »

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Vinyle, l’amour vache

La musique, telle que nous l’aimons, vit une drôle d’époque. Deux nouvelles, guère réjouissantes, annoncent des mois compliqués pour les disques vinyles et ceux qui les défendent (disquaires, labels, distributeurs, etc). Tout d’abord, cette augmentation de prix vertigineuse de certaines références, notamment en major. La hausse actuelle générale a une origine légitime : avec le COVID, les sources d’approvisionnement en matière première n’ont pas produit à la hauteur de la demande actuelle, entraînant de fait une légère revalorisation des prix. Vous vous doutez cependant que l’impact de la matière plastique sur le prix final est un peu anecdotique, vraisemblablement de l’ordre de un ou deux euros sur le prix final chez votre crèmerie favorite, si les labels jouent le jeu. Le communiqué du GREDIN (le syndicat des disquaires indépendants) du 22 juin dernier alerte cependant sur une stratégie mise en place par certaines maisons de disques, utilisant le prétexte de la hausse des matières premières (vrai phénomène) pour revoir complètement les grilles de tarifs. Continuer la lecture de « Vinyle, l’amour vache »