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Karen Dalton : La vie à contretemps

L’immense voix du folk vue par des témoignages de ses proches.

Karen Dalton
Karen Dalton

Figure incontournable de la scène folk de Greenwich Village au début des années soixante, Karen Dalton aura attendu près de neuf ans avant de finalement se décider à enregistrer son premier album. Sorti à la fin de 1969, quand plus personne ne l’attendait vraiment, It’s So Hard to Tell Who’s Going to Love You the Best, le disque en question, mettra lui près de trente ans à trouver son public. Désormais, alors que cinquante ans se sont écoulés depuis sa sortie, cet album magistral, étrange alchimie de folk, de blues, de jazz et de country, est enfin considéré comme un véritable classique, mais demeure curieusement aussi mystérieux et insaisissable que la vie de cette chanteuse née en Oklahoma et dont la voix unique, éreintée par l’alcool, la vie et les drogues, a été saluée par des artistes aussi illustres que Bob Dylan, Nick Cave et The Band. Continuer la lecture de « Karen Dalton : La vie à contretemps »

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Ariel Pink’s Haunted Graffiti : Le pot aux roses

Ariel Marcus Rosenberg Pink
Ariel Marcus Rosenberg

« L’avenir de la musique !? Le passé est tout ce que nous avons. Le futur est tellement ennuyeux… » Je me souviens que cette réponse du génial Ariel Rosenberg m’avait soufflé, alors que je réalisais ma première véritable interview — qui plus est avec l’idole qui m’avait donné envie d’écrire sur la pop moderne. Cette assertion inattendue, évidemment provocatrice, était bien aux antipodes du cool tel qu’il était défini en cette année 2010 alors que le monde connecté faisait encore mine de croire, chaque mois, à l’embryon d’une nouvelle révolution musicale. Continuer la lecture de « Ariel Pink’s Haunted Graffiti : Le pot aux roses »

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Playlist Lee Hazlewood

Lee Hazlewood

Philippe Dumez raconte dans son délectable Je me souviens que les membres du groupe Hefner vendaient autrefois à la fin de leurs concerts des badges avec l’injonction « You should buy more Beach Boys albums », ce en quoi ils avaient mille fois raison. J’espère que je pourrai, avec la présente mixtape, persuader ceux qui ne seraient pas déjà acquis à sa cause de courir acheter des disques de Lee Hazlewood. En complément à l’article paru hier, voici, en deux possibilités d’écoute (playlist ci-dessus ou commentée ci-dessous), un petit parcours de mes chansons préférées du cow-boy à la voix d’or. David Kamp et Steven Daly n’ont qu’à bien se tenir ! Continuer la lecture de « Playlist Lee Hazlewood »

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Lee Hazlewood, cow-boy pop

Lee Hazlewood
Lee Hazlewood

Avez-vous lu l’hilarant et très instructif Dictionnaire snob du Rock de David Kamp, critique rock à Vanity Fair, et Steven Daly, ancien membre d’Orange Juice ? On y trouve pléthore d’anecdotes savoureuses et de listes en tout genre, ainsi que maints classements éminemment polémiques et subjectifs, supposés établir de manière irrévocable quelques « vérités » esthétiques définitives. Si les auteurs au goût très sûr se trompent plutôt rarement dans leurs jugements, certains classements inadmissibles peuvent inévitablement mettre en rage le lecteur. Ainsi, dans la catégorie « dix instances douteuses revendiquées par les rockologues », on trouve… Lee Hazlewood en solo ! Continuer la lecture de « Lee Hazlewood, cow-boy pop »

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Orville Peck, tête à masques

Orville Peck
Orville Peck

Orville Peck, chanteur canadien notoirement masqué et discret sur sa biographie, a sorti en début d’année son premier album sur Sub Pop. Auparavant, ce personnage masqué n’avait jamais existé, pas même un EP. Comme une idole opportune, la légende raconte qu’il est arrivé chez son label avec un album fin prêt sous le coude. Ce Ponyqui lui permet d’être aujourd’hui en tournée européenne et de passage au Pitchfork Music Festival, est un assemblage de chansons d’inspiration country qui s’encanaillent beaucoup sur du post-punk, comme pour y trouver une fraîcheur et une crédibilité nouvelle. Continuer la lecture de « Orville Peck, tête à masques »

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Luke Temple, Both-And (Native Cat Recordings)

Luke Temple Both AndJ’ai une affection toute particulière pour les âmes qui ne débarquent jamais à l’endroit où elles sont attendues. J’ai une affection toute particulière pour ces amitiés au long cours qui se font et se défont au gré d’un hasard qui semble fort étonnement déterminé par l’Univers. Ce n’est plus le goût du cœur qui parle, mais quelque chose de plus grand que soi quand tout à coup débarque dans votre vie une figure qui fut loin pendant un temps, mais dont le visage apparaissant soudain vous rappelle à quel point votre amour pour elle a été d’une constance absolue. Ce bel-ami s’appelle Luke Temple.

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Closer to grey

Ruth Radelet / Chromatics
Ruth Radelet / Chromatics
2 octobre 2019

Le matin, assez tôt, il m’écrit que l’album des Chromatics est en ligne. Il me parle de la reprise de The sound of silence, me dit « je sais que c’est une chanson que tu aimes », il me connaît depuis peu de temps finalement mais il sait déjà ce qui est important.

Je télécharge rapidement l’application Spotify sur mon iphone, mais je m’agace toute seule, je ne parviens à écouter que quelques secondes de chaque morceau, c’est frustrant, je reprends un autre café, en m’énervant. Je ne suis pas quelqu’un de très patient. Il m’envoie un message : « Surveille tes mails, ce sera dans ta boite dans trois minutes ». Continuer la lecture de « Closer to grey »

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Les amours polychromes

« Closer To Grey » des Chromatics
Impressions sur l’album et les premières dates du « Double Exposure Tour »

Chromatics
Chromatics à Anvers, mardi 29 Octobre / Photo : Thomas Bartel

A une époque lointaine où les robinets digitaux ne déversaient pas encore tous ces flots tiédasses de pop consommable et sans avenir, la sortie d’un album en bonne et due forme faisait figure d’événement. Attentes fébriles, spéculations insensées, fantasmes comblés ou déçus à replacer dans le contexte d’une discographie… Tous ces liens intimes que l’on nouait avec un artiste ou un groupe sur le temps semblaient depuis une bonne décennie totalement révolus au profit de l’instantané, du zapping accéléré, du streaming algorythmé, de la consommation jamais satisfaisante d’une musique consommée comme une fast food dont on n’est, à dessein, jamais rassasié. Avec l’éclosion de son label Italians Do It Better à la fin des années 2000, Johnny Jewel (de son vrai nom John Padget) comptait bien remettre quelques jetons dans une machinerie electro pop qui montrait de sérieux signes d’essoufflement. Naviguant alors sans boussole dans la scène underground de Portland avec ses deux groupes Chromatics et Glass Candy dont le line-up n’était pas encore fixé, Johnny Jewel rêvait de retrouver l’esprit d’indépendance, la sève artistique et l’identité graphique des labels cultes (K Records, Factory, 4AD) qui ont façonné son imaginaire musical jusqu’à l’obsession. Continuer la lecture de « Les amours polychromes »