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Shannon Lay, Covers Vol. 1 (Sub Pop)

Covers Vol. 1 Shannon LayGémir n’est pas de mise aux Marquises.

Découvrir ces mots de Brel à l’orée de l’adolescence donnait le vertige, déjà, alors même que la gangue de jugement que l’on pouvait avoir pour un temps fermée autour de ses disques, de sa figure, parce qu’il s’agissait toujours de trier afin de s’y retrouver, et de se trouver si possible, n’était plus de mise. Si Scott Walker et David Bowie reprenaient Brel, ça pouvait signifier ceci : Brel était, et est, important, et les totems vivent.

Il y avait leçon, qui servira pour la suite : sous notre nez ne s’agite pas autre chose que de bonnes chansons. Dont, donc, Les Marquises et cet énoncé vertigineux, coupant une brume de pizzicati, de ce qui échappe pourtant aux mots mais que l’on peut dessiner ainsi : enlevez tout, rien ne manque. Le jour s’écoule au cœur de l’océan, et les vagues suffisent, arbres, rochers, amitiés, amours, un peu de souffle. Gémir n’est pas de mise aux Marquises. Continuer la lecture de « Shannon Lay, Covers Vol. 1 (Sub Pop) »

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Shannon Lay : « J’assume mon super pouvoir : tenir une salle rien qu’avec ma guitare et ma voix. »

Shannon Lay
Shannon Lay / Photo : Denee Segall

“Ainsi, l’apparition de Shannon Lay apparut”, aurait-on pu transcrire, un peu pataud.

Une silhouette bleue arc-boutée, recroquevillée sur un bitume en bordure de grève, des mèches rousses dissimulant les traits d’un visage enfoui, l’océan ne faisant qu’un avec le ciel grisâtre. C’était l’image de Living Water, il y a presque cinq ans, déjà. On y entendait un oranger, une lune lésée, un soleil précieux. Et puis ce Recording 15 comme extrait de la mémoire d’une boîte vocale, une confession qu’elle n’avait pas pris le temps de titrer tant il y avait urgence à chanter ce qu’elle préférait ne pas ressentir. Sa voix désarmait à ne pas vouloir trop en faire non plus, elle visait toujours juste dans le désir et la mélancolie. Comme d’autres avant elle, elle semblait situer la bonne distance entre l’intime et le mystère, la candeur et la noirceur. Continuer la lecture de « Shannon Lay : « J’assume mon super pouvoir : tenir une salle rien qu’avec ma guitare et ma voix. » »

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Shannon Lay, Geist (Sub Pop)

J’aurais pas dû apprendre à parler
Un monde sans mots
Comme j’aurais préféré
Vivre dans un monde où le sens ne prend pas de sens

Tamura Ryûichi

Le vieux Tamura n’a pas trouvé le monde sans les mots, même s’il l’a un peu vu.

C’est une légère nuance.

C’est une joie d’apprendre à fermer son claque-merde. C’est une joie de dire, de s’exprimer, de créer, en fermant son claque-merde. Ou en le laissant s’ouvrir, en le laissant se refermer, en se laissant être inaudible, sans situation, sans direction. Invisible, ou visible dans l’invisible. De l’eau dans de l’eau.

Ploc.

Et parfois un courant, une fluctuation. Plus forte que les autres. Mais comme on est bien peu de choses, comme on n’est pas grand-chose de plus que de la flotte dans des milliards d’hectolitres de flotte, on peut couler tranquillement, épouser le courant, voir du pays avec lui.

Puis constater qu’on s’est laissé attraper par un autre, et un autre, et un autre, et ainsi de suite.

Et donc se laisser attraper d’abord par la voix de Shannon Lay. Continuer la lecture de « Shannon Lay, Geist (Sub Pop) »

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La roue de l’enthousiasme

Quatre singles signés Big Thief, Aimee Mann, Hand Habits et Shannon Lay dans la moulinette des sorties

"Sparrow", Big Thief.
« Sparrow », Big Thief.

Vous vous en sortez avec les réseaux ?

Moi, non, d’ailleurs j’ai arrêté. C’est impossible. Ce n’est pas tenable. Ce n’est pas possible de s’en tenir à – je regarde – les cerveaux brûler – les cerveaux brûler.

J’ai passé des lustres à contempler et à me contempler, moi, ou des idées de moi, ou des idées d’un moi, dans les réseaux, sans parvenir à apercevoir toujours les chansons, ni qui les écrit. Pas toujours ne veut pas dire – jamais – pas toujours veut dire – pas toujours.

On y trouve de belles amitiés, beaucoup de chevaliers blancs – et le plus grand des chevaliers blancs, le moi, qu’il se tienne au-dessus de la bataille, le fier, ou qu’il y plonge – comme s’il y avait une bataille. Comme s’il y avait toujours quelque chose à rectifier. Continuer la lecture de « La roue de l’enthousiasme »