Toutes les occasions sont excellentes. Celle-ci tout autant que les précédentes – l’exploration d’un fragment de discothèque confinée pour célébrer, quand même, le retour du printemps en réécoutant At Last I’m Free (1980) ; la republication pour le Disquaire Day automnal de Summer Into Winter (1982) cosigné avec le jeune Ben Watt, évoqué il y a peu ici. Plus que toute autre – en tous cas, davantage que beaucoup – l’œuvre de Robert Wyatt est de celle qui se prête volontiers aux plaisirs de la redécouverte, vierge de toute balise trop convenue tant elle semble, à chaque fois, s’échapper de toute part vers l’Inouï. Et force est de constater qu’elle confère encore l’envie d’écouter et d’écrire. Continuer la lecture de « Robert Wyatt, His Greatest Misses (Domino) »
Catégories chronique nouveauté
Odessey & Oracle, Crocorama (Another Record)
« Prise au piège
D’un manège
La tête enveloppée de papier chiffonné / Les nouvelles
Bien trop cruelles
Vitrifiant les cœurs d’impuissants spectateurs / Des sourires ébréchés qu’on ne peut plus consoler / Mais ressaisis-toi ! Faut pas pleurer comme ça »
Après avoir vu, il y a quelques mois, un concert ébouriffant des Lemon Twigs à la Laiterie à Strasbourg, j’étais resté sur le flanc. Pour tout vous dire, je ne suis pas spécialement intéressé par la virtuosité, la maîtrise instrumentale étant très éloignée de mes préoccupations. Je peux même vous dire, et ça n’est sans doute pas une surprise si vous me lisez plus ou moins régulièrement ici, que je suis souvent plus attiré vers l’inverse, ce qui « sonne plus humain » (comme on dit en studio quand on n’a pas envie de refaire une énième prise imparfaite), quelque chose qui se met en place, qui coince, qui couine, qui peine et qui galère. Continuer la lecture de « Odessey & Oracle, Crocorama (Another Record) »
Catégories transmission
TRANSMISSION #46 avec Sinaïve
Catégories mixtape
Le club du samedi soir #20 : Autechre
Sign, le quatorzième album d’Autechre, marque le retour à un certain «classicisme» IDM. Celui des années 1993-1998, de Tri Repetae ou du fameux LP5, avec ses breakbeats déconstruits et ses longues plages ambient. Un disque magnifique, plus abordable que l’abstraction expérimentale et fascinante de Exai ou des NTS Sessions par exemple, qui réconciliera peut être avec Autechre ceux qui (à tort selon nous) se sont détachés d’un travail jugé trop hermétique. L’occasion avec cette mixtape de revenir sur une œuvre capitale, en en proposant une traversée chronologique : de leurs premières tentatives électro sous le nom de Lego Feet à la radicalité de elseq, en passant par l’Anti EP ou certains remixes de tout premier ordre (Dalcan, Seefeel, Merzbow).
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Catégories selectorama
Selectorama : Dead Famous People

Les Néo-Zélandais de Dead Famous People viennent de sortir Harry, leur troisième album en plus de trente ans de carrière. Si le nom du groupe ne parlera sans doute qu’aux amoureux de pop moderne les plus pointus, le parcours de Dons Savage, unique rescapée du line-up d’origine, réveillera de vieux souvenirs. Dead Famous People figure par exemple au générique de l’m Your Fan, hommage à Leonard Cohen sorti par les Inrockuptibles en 1991. On retrouve également Dons Savage au chant sur Kiss And Make Up, reprise des Field Mice par Saint Etienne. Rien que pour ça, nous lui devons une reconnaissance éternelle. De leurs débuts chez Flying Nun Records à leur récente signature chez Fire, les perles pop “option guitare cristalline” de Dead Famous People semblent toutes avoir été composées et produites dans la deuxième moitié des années 80. Ce n’est sans doute pas pour rien que ce Selectorama regarde dans le rétroviseur. Avec dix titres entre classiques absolus (Nick Drake, Joy Division) et choix plus discutables (Gilberto Nunes Orchestra), Dons Savage affiche clairement la couleur : “Malheureusement aucun titre moderne car la majorité d’entre eux sont ignobles”. Continuer la lecture de « Selectorama : Dead Famous People »
Catégories affichage libre
Le grand saut – The Replacements, Lisa Fittko, Lewis Trondheim & Alfred
Collage sauvage et de mauvaise foi de l’actualité culturelle de la semaine
Longtemps, j’ai fait mes choix de livres ou de disques par une sorte de saut, comme un risque à prendre. Je me souviens, sans rien en connaître, acheter avec empressement Premier Amour de Samuel Beckett. Inutile de préciser que je fus surpris par ce texte aride et prodigieux à la fois, bien loin de mes attentes, suscitées par le titre du livre. Jolie confusion qui nous surprend et nous guide ailleurs. C’est comme regarder, non stop et toute une journée, plusieurs films de Claude Sautet – bruits de bistrots, ambiances lourdes de tabac et corps collés contre le zinc – puis sortir le soir dans les rues de Paris, tiens au hasard la rue de Ménilmontant et ne voir que haute solitude. Incroyable ravissement que ces situations que l’on vit tous, où l’on chemine un peu au hasard droit devant – ainsi le réel semble nous voler un peu de nos mémoires. On en oublierait presque notre dernier amour merdique. Continuer la lecture de « Le grand saut – The Replacements, Lisa Fittko, Lewis Trondheim & Alfred »
Catégories cover
Manson’s Child reprend « I Know Where Syd Barrett Lives » des Television Personalities (inédit)
J’ai découvert les Television Personalities dans l’appartement étroit d’un couple d’amis, Elsa et Hervé, début 1990, place de Zurich. Un peu perdu à Strasbourg, j’aimais passer du temps dans ce minuscule endroit, sous prétexte de garder le chat pendant que ses maîtres vivaient des moments que j’imaginais fous et intenses (ils l’étaient) dans des endroits interlopes. En première année d’histoire (enfin, en première année d’histoire des Inrockuptibles), je préférais ma vie de rat de discothèque, écoutant pour la première fois les Modern Lovers, les Vaselines, et donc les 45t et les premiers albums des TVPs. Continuer la lecture de « Manson’s Child reprend « I Know Where Syd Barrett Lives » des Television Personalities (inédit) »
Catégories sous surveillance
Sous surveillance : Molto Morbidi

Qui ?
Une jeune femme prénommée Swan, qui rêvait enfant de devenir compositrice de musiques de film et déjà croisée il y a quelque temps au sein de Shadow Motel, un trio mixte défendant à mains nues un rock abrasif et sous tension – l’album Ausfahrt Nach, paru en 2013 chez Cranes Records, en témoigne. Désormais, elle jongle (presque) seule entre ses synthés – dont un clavier midi pour les rythmiques – et sa basse. Mais quand même, elle précise : “Le projet est solo mais pas complètement solitaire, parce que je suis bien entourée par des amis qui, même s’ils ne prennent pas part à la composition, s’impliquent de plein de manières différentes – en me trouvant des dates, en créant des visuels, en écoutant mes mix et mes expérimentations”. Continuer la lecture de « Sous surveillance : Molto Morbidi »