On ne sait pas toujours de quoi est faite la réalité. Lorsque cet album sort, le 16 juin 1997, l’ouverture de son packaging médicamenteux et le décollement de l’opercule en alu du blister laissent planer dans toute la pièce l’aura opiacée de Jason Pierce et l’arbre généalogique chargé du groupe. Ladies and Gentlemen We Are Floating in Space est le troisième album studio de Spiritualized. A la fois vaporeux et terriblement ancré dans la matérialité physique de la musique, on y trouve des apparitions du Balanescu Quartet et du London Community Gospel Choir. Qualifié d’album space rock psychédélique, il atteindra pourtant la quatrième place des charts britanniques, au plus fort de la période Britpop. Continuer la lecture de « Spiritualized, Ladies and gentlemen we are floating in space (Fat Possum) »
Catégories borne d'écoute
Smirk éléctrise L.A. avec leur nouvel EP

Fondé à Los Angeles autour de Nic Vicario des regrettés Autistic Youth ainsi que de Public Eye et Crisis Man, Smirk nous envoie dans les cordes après un premier long format rassemblant deux cassettes éditées aux quatre coins du monde par des labels comme Twintoe Records à Berlin, Drunken Sailor pour l’Europe et Feel It pour les États-Unis. Paru en début de semaine dernière chez l’excellent Total Punk Records, cet EP présente sept morceaux tout neufs, aux guitares saillantes et rythmiquement très efficaces, un combo basse/ batterie groovy et une voix qui enveloppe le tout d’une couche d’anxiété. Amateurs.trices des Spits et autres Minneapolis Uranium Club, cet EP agité est fait pour vous.
Catégories sunday archive
Hüsker Dü, Savage Young Dü (Numero Group / Differ-Ant)
Ce fut d’abord une simple annonce de type strictement commerciale il y a quelques saisons, pour un site proposant à nouveau des t shirts officiels, des badges et des planches de skate, pas grand chose en fait mais l’espoir d’une reformation inespérée pointait alors et agita pendant une semaine ou deux le landerneau. On connaissait désormais tout des circonstances (suicide du manager, inévitables problèmes de substances) du sabotage d’un des groupe les plus influent de tous les temps, on savait aussi l’impossibilité chronique des trois anciens compères à se mettre d’accord depuis sur quoi que ce soit. Il aura donc fallu toute la passion, la prévenance, la diplomatie et la pugnacité des gens de chez Numero Group, pour parvenir enfin à réaliser après plus d’une décennie de recherches et de tractations parfois houleuses, cette anthologie des premiers enregistrements de la formation de St Paul, ville natale de F. Scott Fitzgerald, capitale de l’état située à l’Est de Minneapolis, Minnesota et dont les contemporains furent à l’échelle locale furent The Replacements et Prince, excusez du peu. Soit la réédition de Metal Circus (1983), Land Speed Record (1982) et Everything Falls Apart (1983) et des deux singles attenants Statues (1980), In A Free Land (1982). Soit quatre LP ou trois CD sous la forme d’un coffret comprenant pas moins de soixante neuf morceaux dont quarante sept jamais publiés à ce jour. Sans toutefois savoir si ce traitement d’archives d’un luxe certain concerne également et légalement la suite de la discographie, encore plus passionnante d’Hüsker Dü parue à l’époque sur le label SST. (update septembre 2021, pas de news) Continuer la lecture de « Hüsker Dü, Savage Young Dü (Numero Group / Differ-Ant) »
Catégories interview
Gary Canino / Dark Tea : « La plupart des groupes ne réfléchissent pas assez à ce qu’ils font »

Les deux albums de Dark Tea – sobrement intitulés Dark Tea et publiés en 2019 puis en 2021 – font partie de ceux que l’on a découvert au fil des hasards et des clics intempestifs, comme on croise une silhouette inconnue mais curieusement familière. Une première impression de fraternité musicale qui s’est peu à peu confirmée au fils des écoutes – nombreuses, de plus en plus. Seul maître à bord, mais toujours bien accompagné – une bonne vingtaine de musiciens a participé à l’élaboration du second album – Gary Canino offre en partage ses pop songs toujours richement référencées, souvent un peu bancales et qui semblent investir de leur charme poisseux une sorte d’entre-deux musical aux multiples dimensions : un pied dans le classicisme passé, l’autre dans la modernité bricolée mais aussi à la recherche d’un équilibre transatlantique entre les continents où s’entremêlent racines américaines et britanniques. On en savait trop peu sur ce jeune auteur érudit – journaliste musical à ses heures pas si perdues – mais sincère, qui semble vaciller gracieusement à côté de ses chansons. D’où ces quelques questions auxquelles il a eu l’amabilité de bien vouloir répondre. Continuer la lecture de « Gary Canino / Dark Tea : « La plupart des groupes ne réfléchissent pas assez à ce qu’ils font » »
Catégories selectorama
Selectorama : Don Idiot

Il y a quelques années avec Dream Loser, Don Idiot sortait un premier album, parsemé de titres accrocheurs et inspirés, chantés en anglais dans un registre vocal à la Richard Hell ou Johnny Thunders – l’accent frenchy en plus -, se mariant avec une musique garage rock urgente et râpeuse proche de l’univers de Gun Club. On avait pu apprécier la construction des morceaux, souvent basés sur une alternance habile entre moments de calme et de tempête, ainsi que la qualité des riffs de guitares bien affûtés, ne cédant jamais la place à l’exigence mélodique. Depuis cette première expérience, Pierre Donadio, tête pensante de Don Idiot – si le paradoxe m’est permis – a opté pour la langue française, choix très heureux qui a ajouté une nouvelle dimension à son univers. Si l’ambiance musicale reste globalement proche de celle de son premier disque, les textes en français apportent une sensibilité particulière, un côté lunaire, décalé, souvent drôle, qui se conjugue très bien avec un chant un brin nonchalant et désabusé mais touchant. On se laisse facilement emporter par ses histoires d’amour inabouties, de procrastination, d’errance nocturne et alcoolisée dans des lieux interlopes, à dériver sans but sur le bateau ivre du hasard, à chercher Dieu sait qui Dieu sait quoi. Voici les morceaux que Pierre/ Don Idiot a choisis pour Section26, chansons dont il pense qu’il « les écoutera sûrement toute sa vie. » Continuer la lecture de « Selectorama : Don Idiot »
Catégories sous surveillance
Sous Surveillance : Moleskine

Qui ?
Où ?
Catégories chronique nouveauté
Low, HEY WHAT (Sub Pop)
Dans mon quartier, enfin là où j’habite parfois, il y a une femme qui crie souvent, presque tous les soirs entre 21 heures et 23 heures, elle fait son apparition. On ne sait jamais si elle engueule quelqu’un en particulier ou l’humanité toute entière. Personne ne s’occupe d’elle, personne ne la rassure, personne, pas même la personne à qui elle semble s’adresser, personne ne fait plus attention à elle. Elle fait désormais partie du décor. Un décor permanent d’indifférence. Les raisons existent. On n’a pas à suppléer à la psychiatrie. On ne peut plus rien faire pour elle. Pis, on en a de moins en moins l’idée, ni le désir. En plus, les deux tiers de ce qu’elle émet est un sabir inintelligible que la colère n’arrange en rien. Continuer la lecture de « Low, HEY WHAT (Sub Pop) »
Catégories borne d'écoute
Flowertown, « Time Trials » (Paisley Shirt Records)

Chez Flowertown, comme chez Cindy, les chansons tiennent d’un habile jeu d’équilibriste, à la limite entre la sensiblerie et la pure magie. Et il s’en faudrait peu que ces chansons « psychédélicates » (comme dirait Slumber Party) ne tombent du mauvais côté. Ce sont presque les mêmes qualités que l’on retrouve chez les deux formations de Karina Gill – ici pour la deuxième fois aux côtés de Mike Ramos de Tony Jay. Un filet de voix se marie idéalement à des reverb’ de guitares lo-fi et des mélodies s’insinuent dans les songes comme un souffle. Nombreux sont les groupes qui tentent cette alchimie en apparence évidente, où le peu qui est présenté se doit d’être irréprochable et où la moindre maladresse peut abattre entier le léger édifice… Pour tout dire, si peu y parviennent qu’on en oublie presque aussitôt tout ce qu’on écouté dans le genre depuis des années. Parfois, ce qui semble le plus fragile se révèle d’une solidité durable. Et surtout qu’on se méprenne pas, les dix titres de ce Time Trials paru le mois dernier chez nos amis Paisley Shirt Records sont bien plus qu’un aimable dérivatif dans l’attente du nouvel album de Cindy – dont on murmure déjà qu’il s’agit (aussi) d’un classique.