Anton avait téléchargé le nouvel album des Strokes. L’étape attendue d’une affection discrète mais tenace dont l’origine, le quand comme le comment, restait à déterminer. Sa mère et moi n’y étions pour rien, ni apparemment aucun de ses camarades de classes (on dit bro, contre-attaqua son frère). Bon. Pas de quoi en développer un zona, ça valait toujours mieux que Darkthrone ou Phil Collins. Notre aîné était coutumier des engouements improbables. A six ans il s’était mis en tête de supporter le Valenciennes FC. Depuis plus de deux ans, il bloquait sur l’Ouganda. Sa chambre était constellée de drapeaux à six bandes avec une grue royale en son centre, il maîtrisait parfaitement la bio d’Idi Amin Dada et nous tannait pour qu’on prenne un vol à destination d’Entebbe. Continuer la lecture de « #24 : The Dentists, Strawberries Are Growing In My Garden (And It’s Wintertime) (Spruck Records, 1985) »
Étiquette : Lieu : Angleterre
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I Like 2 Stay Home #23 : Terry Hall
Un mix thématique par jour à écouter en temps de confinement.
Paris, automne ou hiver 1992/1993. Il y a du monde dans le magasin. C’est un magasin de disques, un magasin de disques dit indépendant. Pourtant, il n’est pas situé dans un quartier très rock’n’roll, à l’ombre du Panthéon, à quelques encablures de la place de la Contre-Escarpe. Il y a un peu de monde dans la boutique, deux garçons derrière l’immense comptoir, une cafetière qui fume et des gobelets posés dessus – c’est une tradition du samedi après-midi. L’un des clients affiche la vingtaine, tient un fanzine sous le bras et s’avance vers l’un des vendeurs. Il ouvre le journal et pointe du doigt une brève, en demandant : “C’est quoi, la résidence Champs – Lagarde ?” C’est amusant comme on garde en mémoire des flashes tellement précis qu’on a l’impression qu’on pourrait revivre les scènes. Dans ce cas précis, je le sais d’autant plus que je suis le vendeur en question, que le fanzine s’appelle magic mushroom, que le jeune homme est aujourd’hui un ami de presque trente ans, que la résidence est celle où j’ai grandi et que la brève concerne Terry Hall et annonce la sortie prochaine d’une compilation retraçant son parcours assez dingue (il s’agit de The Collection) en commençant par ces mots : “À Versailles, résidence Champs-Lagarde, Terry Hall est une star…” Continuer la lecture de « I Like 2 Stay Home #23 : Terry Hall »
Catégories 45 tours de confinement
#23 : Momus, The Thunderclown (Tona Serenad, 2011)
Histoire de l’œil (parts 17-24)
Regardant, en 2D et en miroir à mes mésaventures oculaires, la pochette de ce Thunderclown, je m’avouais qu’à tout prendre le chapeau pointu m’irait mieux. Quid du bonnet d’âne ?, me glissa-t-elle, vacharde.
Cette nuit, une lointaine collègue allemande, pas croisée depuis des lustres, m’accusait dans un micro reportage d’avoir fantasmé, à défaut de réellement les perpétrer, 180 féminicides. Je tempêtais au sein de la rédaction, m’indignais qu’on puisse diffuser de pareilles divagations, et m’extirpais du cauchemar avant d’avoir pu me défendre. J’avais la veille au soir négligemment parcouru la discographie de Momus – c’était ça ou relire la biographie d’André De Toth par Philippe Garnier. Ou Raoul Walsh et moi, de Louis Skorecki. – et me rendais compte au réveil que le songe avait ainsi croisé deux chansons de son premier EP pour Creation en 1986, Murderers, The Hope Of Women – qui oserait désormais s’avancer paré d’un tel titre ? – et la longue énumération What Will Death Be Like ? – Death will be unlike the dreams of the young man who sang Love will tear us apart, parmi une cinquantaine d’autres du même acabit. Continuer la lecture de « #23 : Momus, The Thunderclown (Tona Serenad, 2011) »
Catégories 45 tours de confinement
#22 : The Sugargliders, Ahprahran (Sarah Records, 1993)
Alors que l’Académie de médecine préconise le port du masque obligatoire, me voilà affublé d’un cache-œil du plus bel effet.
Satanée tondeuse à gazon.
A l’heure exagérément matinale où d’habitude je me mets à taper sur ce clavier, j’étais encore aux urgences ophtalmologiques de l’hôpital Cochin. Moi qui n’avais plus mis les pieds à Paris depuis plus de trois semaines et cet exquis dîner chez Thomas B., je n’imaginais pas y effectuer mon piteux retour, escarbille en tête, sous de tels auspices. J’ai le plus souvent associé le terme de projection à son acceptation cinématographique, et donc à un plaisir certain de l’œil. Depuis hier je sais qu’on peut aussi plus prosaïquement la prendre de plein fouet dans la cornée. Si subsistait en moi ce vieux fond janséniste, je dirai que mes vilaines pulsions scopiques trouvaient là leur châtiment – certes moins pénible que celui subi par Abélard. Pour ma femme, tout cela relevait plutôt de l’acte manqué, et de mon peu d’empressement à tondre la pelouse – ce qui est totalement faux, j’ai toujours considéré cette activité – pas pire qu’une autre – comme un moment privilégié où me venaient les idées les meilleures, et le plus justement exprimé. Inutile de dire que pour aujourd’hui, on repassera. Car me voilà contraint, pour quelques jours au moins, à passer entre les gouttes et ne plus écrire que d’un œil – déjà que je tapais à deux doigts. Continuer la lecture de « #22 : The Sugargliders, Ahprahran (Sarah Records, 1993) »
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Selectorama : NZCA Lines
La vidéo de Pure Luxury, premier single extrait du troisième album de NZCA Lines, sort aujourd’hui. Derrière ce nom se cache Michael Lovett, cerveau unique de ce projet, membre de Metronomy et musicien de session réputé (présent dès les débuts de Christine & The Queens). Pour son Selectorama, il s’est focalisé sur ses découvertes récentes et ses influences. Ses choix sont en parfaite cohérence avec l’univers pop et électronique de ses albums, où les mélodies accrocheuses dissimulent toujours une noirceur sous-jacente. A l’image de Pure Luxury, qui met en parallèle l’obsession du paraître et le futur incertain de notre planète. Totalement d’actualité.
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Catégories mixtape
I Like 2 Stay Home #21 : UK Garage, Grime & Dubstep (2000 – 2020)
Un mix thématique par jour à écouter en temps de confinement.
En 2002, si depuis deux ou trois ans le UK Garage (genre né au milieu des 90s comme une réinterprétion toute britannique de la Garage House américaine y injectant influences RnB et Jungle) est en train de vivre son climax plaçant dans les charts locaux des tubes, parfois issus de l’underground, comme ceux de The Streets, Craig David, Daniel Bedingfield, Wookie, Zed Bias ou MJ Cole, cela commence à sentir le sapin car comme toujours la récupération commerciale guette. Lassés de cette marchandisation, de nombreux producteurs continuent d’œuvrer en souterrain et le genre mute vers des territoires plus sombres et expérimentaux, deux courants essentiels de la musique contemporaine vont en naître : le Grime et le Dubstep. Continuer la lecture de « I Like 2 Stay Home #21 : UK Garage, Grime & Dubstep (2000 – 2020) »
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Hugues Blineau, Le jour où les Beatles se sont séparés (Mediapop Editions)
Le 10 avril 1970, je ne suis pas née. Je ne suis même pas encore à l’état de projet pour mon père et ma mère qui, par ailleurs, ne se sont pas encore rencontrés. En avril 1970, ma mère fait l’amour pour la première fois, je le sais car j’ai retrouvé son journal d’adolescente lorsque j’ai vidé son appartement après sa disparition. Le 10 avril 1970, les Beatles se séparent et si je ne suis pas sûre que cette nouvelle perturbe beaucoup ma mère, je suis en revanche certaine que mon père, ses cheveux longs et sa guitare en sont assez peinés, lui qui adorait George Harrison à qui il ressemblait vaguement. Mais de tout cela, je me fiche pas mal, je n’ai jamais été très fan des Beatles, même si comme tout le monde je peux citer un certain nombre de leurs chansons. Il y a celles que je déteste comme Ob-La-Di, Ob-La-Da ou Let It Be, et celles que j’aime beaucoup comme Sexy Sadie ou Come Together, mais il faut bien avouer que je ne me relève pas la nuit pour les écouter. Je me souviens d’avoir entendu les démos du White Album avec un garçon et d’avoir trouvé que Happiness is a warm gun était meilleure ainsi. Mais j’ai aussi souvent discuté avec un autre garçon qui qualifie les Four Guys de baltringues. Et, comme il est du genre persuasif, il a fini par m’en convaincre. Continuer la lecture de « Hugues Blineau, Le jour où les Beatles se sont séparés (Mediapop Editions) »
Catégories mixtape
I Like 2 Stay Home #20 : Mute early years (1978-1988)
Un mix thématique par jour à écouter en temps de confinement.
Daniel Miller n’avait qu’une seule ambition en créant Mute Records en 1978 : sortir un single de son projet solo The Normal. S’il a par la suite signé Depeche Mode, Nick Cave & The Bad Seeds ou plus récemment New Order, cette partie immergée de l’iceberg a souvent fait de l’ombre à des sorties plus expérimentales. La passion de Miller pour la scène allemande des années 70 (Kraftwerk, Can, Neu! et consorts), a marqué au fer rouge les premières années du label. C’est cette facette que nous avons décidé d’explorer avec playlist qui montre également à quel point Mute était une histoire de famille. Les membre de Depeche Mode, Wire, Fad Gadget ont par exemple créé d’autres groupes, collaboré avec des artistes Mute ou bien sorti des projets solos. Les grosses pointures de l’époque ont depuis quitté le navire, mais quarante-deux années après sa création, Mute Records est encore un formidable laboratoire de recherche. Continuer la lecture de « I Like 2 Stay Home #20 : Mute early years (1978-1988) »