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Ollie Halsall, Lovers Leaping (1979, Think Like A Key Records)

Ollie Halsall – Lovers LeapingS’évanouir pour mieux revenir. C’est curieux comme les fantômes qui nous hantent le plus intensément sont ceux qui pratiquaient déjà, lors de leur passage terrestre, une forme d’effacement préliminaire. La disparition progressive avant la mort, comme pour ménager une phase de transition aux vivants, mieux les préparer à être hantés sur le long terme. « Barrett, Walker, Drake«  énumérait autrefois Martin Phillips de The ChillsSong For Randy Newman (1992). Chacun poursuivra l’inventaire comme il lui convient. Lorsque Ollie Halsall est mort à Madrid, le 29 mai 1992, il n’avait évidemment laissé derrière lui aucun testament musical qui lui permette de prétendre accéder à la dimension mythologique des figures susmentionnées. A quarante-trois ans, il est sans doute déjà trop tard pour abandonner aux embaumeurs de légende un cadavre vraiment présentable. Et pourtant, il subsiste dans les jalons hétéroclites de la non-carrière de ce guitariste anglais sous-estimé – cité en référence à la fois par Rick Nielsen de Cheap Trick ET par Andy Partridge de XTC : voilà qui vous pose une momie, et pas qu’un peu –  suffisamment de matière pour entretenir bien davantage que les souvenirs nostalgiques ou les regrets rétrospectifs d’une poignée d’érudits. C’est ce que confirment en ce début d’année deux rééditions simultanées et bienvenues. Continuer la lecture de « Ollie Halsall, Lovers Leaping (1979, Think Like A Key Records) »

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The Cure, Three Imaginary Boys (Fiction Records, réédition Polydor/Universal)

En 2005, la prestigieuse série de rééditions DeLuxe s’attaquait à la prestigieuse discographie d’un des groupes les plus importants de sa génération – voire même un peu plus que ça. La faute à un tracklisting légèrement bancal, Three Imaginery Boys (1979), sa pochette rose et son clin d’œil électroménager n’annonçaient pas complètement la décennie qui se dessinait alors, au cours de laquelle le groupe mené par Robert Smith allait incarner, parfois sur fond de légèreté pop, une certaine idée du spleen idéal et de la mélancolie imaginaire. Mais ce disque devenu légendaire offrait quand même quelques indices de toute beauté… Continuer la lecture de « The Cure, Three Imaginary Boys (Fiction Records, réédition Polydor/Universal) »

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« Oasis ou la Revanche des ploucs » de Benjamin Durand & Nico Prat (Editions Playlist Society)

Oasis Playlist SocietyY a-t-il encore quelque chose à écrire sur Oasis ? Tout et n’importe quoi a déjà été raconté à leur sujet. Surtout n’importe quoi d’ailleurs. Premier manager, premier batteur, grand frère, amis plus ou moins proches, beaucoup ont déjà tenté de raconter l’histoire des Gallagher dans les livres sentant souvent l’opportunisme. Souvent remplis d’anecdotes et de fables en tout genre sur les frasques et disputes de ces deux fils d’immigrés Irlandais, presque aucun ouvrage ne réussit à cerner avec intelligence le phénomène mondial qu’a été Oasis et l’importance du contexte politique, social et culturel sur son ascension météorique. Continuer la lecture de « « Oasis ou la Revanche des ploucs » de Benjamin Durand & Nico Prat (Editions Playlist Society) »

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New Order (A Life), #4

Ou comment la musique de New Order infuse dans nos vies.

"Blow Up" de Michelangelo Antonioni (1967)
« Blow Up » de Michelangelo Antonioni (1967)

Je pose le CD sur la platine. La tiédeur du soir entre dans l’appartement. Les premières notes m’emportent toujours vers un autre espace, un autre temps. L’adolescence, oui, sûrement, mais sans que je puisse préciser les contours d’un instant précis. Nul objet ou souvenirs tangibles. Rien sinon l’intensité de la musique. I like walking in the park when it gets late at night. C’est Sub-culture et sa boucle synthétique. C’est Sub-culture et Low-Life, depuis toujours mon disque préféré de New Order, sans doute parce qu’il a été le premier à m’avoir vraiment bouleversé. La chronologie fait parfois toute la différence. Je ne sais pas pourquoi mais j’ai toujours eu l’impression de n’avoir jamais retrouvé, dans aucun autre album du groupe, cet équilibre précaire et miraculeux à la fois, entre l’énergie rock de ses origines et les sonorités électroniques devenues sa principale signature. Sans doute aussi, jamais depuis Movement un disque de New Order n’a jamais été autant habité par la figure de l’absent, celle de Ian Curtis, de la vague puissante de Sunrise au sommet d’émotion que constitue Elegia. Continuer la lecture de « New Order (A Life), #4 »

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Spearmint, A Week Away (hitBACK, 1999)

Le premier contact avec ce disque est une phrase. “Ça devrait te plaire”, m’avait prévenu mon ami Nicolas P. en me tendant le CD – et quand je repense à cet emploi du conditionnel, je ne peux m’empêcher de sourire. Je me souviens bien de ces mots-là, et pourtant, je ne me souviens pas de la période, ni de l’année exacte – mais c’est bien sûr 1999, il suffit aujourd’hui parfois d’un clic pour étayer sa mémoire. Et puis, je me souviens aussi du lieu, les bureaux de la RPM du boulevard Ménilmontant, ceux d’un septennat qui aura vu l’arrivée de la couleur, du rythme mensuel, des piges enfin payées et des salaires au lance-pierre, l’époque de l’âge de la déraison où l’avenir semblait appartenir à ceux qui se couchaient (plutôt) tard.
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Anita Lane reprend « Sexual Healing » de Marvin Gaye (1993)

Anita Lane
Anita Lane / Photo : Courtesy Mute

Anita Lane* n’avait pas le référencement naturel et ancré. Fondatrice des Bad Seeds aux côtés de Nick Cave, on ne sait que peu de choses d’elle, si ce n’est sa traversée du milieu post-punk australien, via Londres et Berlin. Et quelques hommes. Plus qu’inspirés en la regardant et, pourquoi pas, en l’écoutant. Ils brillent dans le chemin d’Anita, comme on sème des petits cailloux blancs pour ne pas trop se perdre en route. « La plus talentueuse d’entre nous », dira Nick Cave. Peut-être s’est-elle finalement perdue à donner aux Bad Seeds ses plus grands morceaux, entre autres From Her to Eternity et Stranger Than Kindness, ainsi que plusieurs chansons pour le groupe The Birthday Party.

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New Order (A Life), #3

Ou comment la musique de New Order infuse dans nos vies.

Christine Floating in the Sea, St Barth’s, 1999 / Photo : Nan Goldin

Juin 1987, le simple True Faith / 1963 précède de quelques semaines la publication de Substance, compilation qui referme la première partie de l’histoire de New Order. 1987, même en cherchant bien, je n’ai que peu de souvenirs de cette année-là, hormis ceux parcellaires qui accompagnaient nos vies adolescentes. Des heures perdues, à écouter quelques disques et à rêver de l’une de ces jeunes filles qui m’échappait déjà, pour m’échapper toujours. Des heures perdues et New Order comme bande son idéale pour accompagner, déjà, la mélancolie. Continuer la lecture de « New Order (A Life), #3 »

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Gruff Rhys – Que la montagne est belle !

Gruff Rhys
Gruff Rhys

Habitué des projets ambitieux et farfelus depuis ses premières armes discographiques fourbies à la tête de Super Furry Animals, celui qui demeure avant tout l’un des grands maîtres incontestés de la composition pop a décidé de consacrer son nouvel album – le dixième en solo environ, selon les décomptes officiels – à la biographie du mont Paektu, au sommet duquel, apprend-on au passage, se trouve le point culminant de la Corée. Tout autre que le génie gallois se serait sans doute pris les pieds dans cet improbable tapis géographico-conceptuel dont on pouvait a priori, redouter les inévitables pesanteurs. Mais pas lui. Dense, lumineux, fascinant de bout en bout, Seeking New Gods apparaît – au-delà du prétexte et de l’argument, pas si loufoques au demeurant – comme une réussite majeure de plus à verser au crédit d’un artiste toujours aussi déroutant. Et qui a consenti à nous éclairer autant que faire se peut sur les méandres tortueux de ce nouveau périple. Continuer la lecture de « Gruff Rhys – Que la montagne est belle ! »