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Accueille-moi paysage

L’immense Jean-Louis Murat s’en est allé ce matin.

Jean-Louis Murat
Jean-Louis Murat

Jean-Louis Murat, Jean-Louis, est mort.

Il y avait une chronique de son Best of dans les brouillons, en cours, elle y restera un moment. Le choc est trop grand.

Il est difficile d’exprimer à quel point la rencontre de son exigence artistique signalait une exigence d’être, que l’on pouvait faire sienne. Il est difficile de dire ce qu’il a pu continuer de représenter, au-delà de l’émotion absolue de sa découverte (pour moi ce fut Mustango, pour d’autres Cheyenne Autumn, Le Manteau de pluie, Vénus, Dolorès, Le Moujik et sa femme, Lilith, avant les années de moindre exposition, mais d’égale fidélité de la part de son public) : un trembleur, un passeur, un râleur, un lecteur, un immense chanteur semant le bazar dans son catalogue, un guitariste fin et pousse-au-crime, un compositeur sous-estimé capable de bouleverser dans tous les arts de la mélodie, et donc un auteur de chansons, moderne sinon contemporain, contemporain sinon moderne, attaché dans cette tension entre l’art de l’artiste et celui de l’artisan, suffisamment brûlé à l’idée de l’absolu pour que ses textes ne cessent de parler, au creux des nuits et des jours, inlassablement, au fil d’une série d’albums qui tous valaient le tour et le détour, à ce qui toujours tremble de même, de même que lui, et qui fait que nous ne sommes pas simplement nous mais aussi tout le reste.  Continuer la lecture de « Accueille-moi paysage »

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Sumos, Surfacing (Safe Suburban Home/Meritorio)

sumosDifficile de se souvenir exactement de la première fois où l’on a entendu ces guitares. Peu importe en fait puisque, si loin que l’on fasse remonter la mémoire, elles demeurent associées à des révélations importantes, presque fondatrices. L’adolescence, les premiers émois à la rencontre des groupes Creation et, plus largement, de ce que les étiquettes de l’époque renvoient encore au fourre-tout de la noisy-pop. Bien avant, même : l’intro de Ticket To Ride sur les doubles cassettes rouges des Beatles ou la première compilation des Byrds, seul trophée majeur rescapé d’un séjour prétendument linguistique dans une sinistre banlieue londonienne. Continuer la lecture de « Sumos, Surfacing (Safe Suburban Home/Meritorio) »

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Les Abranis, Amazigh Freedom Rock 1973/1983 (Les Disques Bongo Joe)

Dans les années soixante et soixante-dix, le rock touche quasi universellement le monde. Du Pérou, en passant par l’Iran, le Japon, les républiques soviétiques, le Cambodge ou l’Afrique : les guitares électriques résonnent et les cœurs vibrent au son de la pop musique. Le Maghreb n’est pas à l’écart de l’onde de choc : quelques groupes s’essayent au rock en Afrique du Nord. Par exemple, les mythiques Golden Hands au Maroc et, en Algérie, ceux qui nous intéressent aujourd’hui : les Abranis. L’histoire du groupe est fortement liée à l’hexagone. L’Algérie a pris son indépendance en 1962 de la France, cependant de nombreux Algériens continuent de venir étudier ou s’installer de l’autre coté de la Méditerranée. Continuer la lecture de « Les Abranis, Amazigh Freedom Rock 1973/1983 (Les Disques Bongo Joe) »

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J’ai été réveillé par le fantôme d’Ari

Ari Boulogne Päffgen et sa mère, Nico / Photo : Antoine Giacomoni

Il était 5h55 quand j’ai ouvert les yeux, horaire tout à fait inattendu pour un dimanche matin. Il était encore trop tôt pour me lever aussi, inspiré par l’actualité de la veille, j’ai retrouvé L’amour n’oublie jamais, l’autobiographie d’Ari parue en 2001 chez Pauvert. L’ouvrage a la particularité de n’être signé que son prénom, ce dont il s’explique en préambule : “Finalement, de Päffgen ou de Boulogne – mon nom d’adoptivité – seul celui d’Ari est resté, comme si même les noms de mes familles pouvaient résister à la corrosion de mon existence.” En page 18, j’ai lu : “Le 11 août 1962, à 5h55 du matin, je suis mis au monde par césarienne, cicatrice sur un corps parfait”. 5h55, l’heure précise de mon réveil. J’ai été réveillé par le fantôme d’Ari.  Continuer la lecture de « J’ai été réveillé par le fantôme d’Ari »

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Blur, retour vers le futur

Un nouveau single surprise, The Narcissist, moment parfait pour jeter un oeil dans le rétroviseur de la carrière du groupe

Blur
Blur, back in the days.

Voilà qui est rassurant. À l’heure des Internets tout puissants, de l’info qui circule avant même qu’il ne se soit passé quoi que ce soit, il est encore possible de garder un secret. Si l’on savait depuis le mois de novembre 2022 que Blur revenait sur le devant des scènes européennes, l’annonce de la sortie d’un nouvel album le 21 juillet prochain, The Ballad Of Darren, annoncé brillamment par le morceau The Narcissist, a à peu près surpris tout le monde. Continuer la lecture de « Blur, retour vers le futur »

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Selectorama : Bill Pritchard

Bill Pritchard / Photo : Luke Hodgkins
Bill Pritchard / Photo : Luke Hodgkins

Depuis son retour aux affaires musicales en 2014, après une pause de près d’une décennie, Bill Pritchard n’a eu de cesse d’offrir les prolongements les plus dignes et les plus émouvants à une œuvre déjà considérable, initiée au milieu des années 1980. Au fil des ans et des rencontres – Frédéric Lo, Pete Doherty et, désormais, le poète canadien Patrick Woodcock, fan de la première heure avec lequel il cosigne ce mois-ci l’excellent Sings Poems By Patrick Woodcock, 2023 – il est ainsi parvenu à confirmer son statut de songwriter majeur et d’interprète élégant. D’une voix qui ne s’embarrasse plus de fausses pudeurs juvéniles et qui dissimule moins que jamais la patine de l’âge, il confère des résonances touchantes et intimes à ces textes pourtant rédigés par un autre. Entre références fondatrices et coups de cœur encore frais, il fait preuve d’un même enthousiasme communicatif lorsqu’il s’agit de raconter les chansons des autres. Continuer la lecture de « Selectorama : Bill Pritchard »

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Bar Italia, Tracey Denim (Matador Records)

Bar Italia

Il est un nom qui ne cesse de résonner ces dernières années dans l’underground londonien : Dean Blunt. Musicien hybride aux influences rock et hip hop, producteur prolifique légitimé par des albums unanimement acclamés (notamment Black Metal, en 2014) et des collaborations au sommet (avec A$AP Rocky sur Testing, en 2018), il est aussi à la tête de World Music, un label autour duquel gravitent d’autres noms plus énigmatiques, souvent découverts en featuring des propres titres de Blunt. Parmi eux, Joanne Robertson, Inga Copeland mais aussi NINA, entendue récemment sur le mélancolique single Slur ; alias de Nina Cristante, membre avec Jezmi Tarik Fehmi et Samuel Fenton – issus du duo grunge Double Virgo – de Bar Italia, groupe couvé par World Music depuis maintenant trois ans et deux albums (Quarrel en 2020 et Bedhead en 2021). Des connexions loin d’être anecdotiques, qui s’entendent plus que jamais sur Tracey Denim, le troisième album du trio ; le premier chez les légendaires Matador Records.

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Et puis, j’ai écouté Brûlée, le nouvel album de Cabane

Ecoute de l'album "Brûlée" de Cabane aux Vinzelles à Volvic / Photo : Olivier De Banes
Ecoute de l’album « Brûlée » de Cabane aux Vinzelles à Volvic / Photo : Olivier De Banes

Ça commence par des mots, ceux de Thomas Jean Henri venu nous présenter ce qui va suivre. J’écris les mots qui me captent : la mémoire, le souvenir, la trace et puis cette phrase « les morceaux qui s’effacent » à laquelle je colle, une autre phrase, la mienne, « mais qui resteraient dans nos cœurs ». Il s’éloigne, se place derrière nous et nous laisse avec les chansons de Brulé(s) et cette question : pourquoi un disque ? Continuer la lecture de « Et puis, j’ai écouté Brûlée, le nouvel album de Cabane »