Cette playlist de nouveautés du début d’automne, on y glisse comme dans un cocon groovy, à la chaleur bienveillante et aux rythmes apaisés, mais pour mieux revenir à l’électricité et à la tension. Richesse des contrastes et beauté des découvertes, c’est tout section26.
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NDLR : Les playlists Deezer et Spotify ne comportent pas l’intégralité des titres de cette sélection.
Il est des albums dont l’importance se révèle dans un contexte d’autant plus inattendu que leur beauté singulière contraste alors avec la triste banalité de l’instant. En l’occurrence un quai bondé de RER en panne, l’attente qui semble interminable et l’accablement du début de semaine qui s’ajoute aux angoisses agoraphobes. Dans ces cas-là, le désir de musique a tendance à disparaître, submergé par les envies envahissantes de circonstances : sortir, avancer, récupérer un peu de vie et ne plus être là, tout simplement. Même s’il ne saurait se réduire à cette seule dimension thérapeutique, Neither Is, Or Never Was s’est imposé comme la bande-son parfaite d’une matinée très mal engagée sur ces mauvais rails, encombrés par les débris sinistres d’un énième incident voyageur. L’un des très rares à susciter immédiatement un sentiment de tranquillité protectrice, comme une bulle apaisée au milieu de la foule trop compacte et dans laquelle résonnerait des sons qui étouffent d’emblée tous les bruits parasites aux alentours. Continuer la lecture de « Constant Follower, Neither Is, Nor Ever Was (Shimmy-Disc/Joyful Noise) »
Découverts par Michel Records sur leur terre natale québecoise, le quatuor Bleu Nuit avait sorti un premier album avant la vague en 2019, Le Jardin des Mémoires, par l’entremise des parisiens Requiem Pour Un Twister. De retour avec un second album, Metal sortira le 5 novembre chez le label strasbourgeois October Tone. Toujours en français dans le texte – saluons ce qui parait toujours comme une audace -, le single Météore atterrit en premier lieu pour planter le décor. C’est probablement, comme pour beaucoup d’artistes, les conditions d’écriture qui l’ont conditionné. L’exiguïté d’un studio minuscule en temps de pandémie a noirci le propos, toujours entre art-rock, post-punk et new wave, avec cette petite touche pop qui n’est pas pour déplaire.
Métal de Bleu Nuit sortira le 5 novembre chez October Tone.
Plus de dix ans ont passé déjà depuis ce terrible 14 janvier 2011 et Trish Keenan nous manque toujours autant. Il est fascinant de constater à quel point, à chaque chanson, que son compagnon James Cargill a l’émouvante attention de nous adresser, à elle et à nous, par les voies de l’internet, pour ses anniversaires, révèle un peu mieux la dimension ésotérique de l’œuvre de la poétesse de Birmingham. Distant Call, Where Are You ?, Tunnel View apparaissent comme autant de psalmodies médiumniques où Trish vivante semble communiquer, inconsciemment, avec son elle-même dans l’au-delà. Comme si des voix lui commandaient d’écrire ces chansons. Cette version demo de la magnifique Distant Call, enregistrée sur bande, chantée et jouée à la guitare sèche par Trish paraît surgir de la nuit des temps. Et c’est bien ce que semble avoir toujours recherché Broadcast : jouer une musique alchimique et intemporelle, spirite et fantomatique, comme jouée par des esprits ayant pris possession des corps de simples mortels. Et l’ironie morbide du sort semble avoir rendue grâce à ce projet dont on se demande parfois dans quelle mesure il relevait sérieusement du domaine de l’occulte ou si c’était un ensemble de hasards enchevêtrés, liés aux inspirations artistiques qui donnent à cette œuvre son caractère si durablement intriguant. Trish Keenan et James Cargill ont baigné dans les séries fantastiques anglaises, les films de la Hammer et The Wicker Man, de Robin Hardy, les livres de Poe, de Lewis Carroll ou de Vítězslav Nezval, et il est singulier que des influences aussi équivoques aient marqué la musique d’un groupe, leur faisant dépasser le simple statut de groupe pop. Broadcast nous a apporté plus que d’élégantes chansons, par eux notre regard sur les choses et les œuvres a changé, à travers leurs disques, leurs mixtapes ou leurs vidéos, ils nous auront fait découvrir des musiques de films tchèques oubliés signées Luboš Fišer, Zdeněk Liška ou Alexeï Rybnikov, aimer autant Bernard Parmegiani que United States of America, Ennio Morricone et The Springfield Rifle… Peu de groupes pop vous cultivent. Les relations entre le hasard, la magie noire, et les sources culturelles dans lesquelles baignaient Trish et ses camarades des West Midlands et du Worcestershire nous intrigueront encore longtemps.