En cette fin d’année, nous sommes ravis de retrouver Young Gun Silver Fox, le duo formé par le multi-instrumentiste étasunien Shawn Lee et le chanteur britannique Andy Platts. Nous les avions quittés, en très bon terme, en 2020 avec Canyons, ils ont publié, en octobre dernier, Ticket To Shangri-Las , leur quatrième album depuis 2015, toujours chez Légère Recordings. Ces derniers ont aussi accueilli, un peu plus tôt, toujours en 2022, Cure The Jones, septième album des Mamas Gun, un groupe dans lequel officie également Andy Platts. Un label, un chanteur, les deux albums partagent, en outre, un amour pour la musique organique soulful. En effet, Young Gun Silver Fox défendent leur passion pour le yacht rock tandis que les Mamas Gun se nourrissent de la substance soul et funk. Dans les deux cas, la voix d’Andy Platts fait merveille. Maitrisée, sans être clinique ou plate, elle insuffle vie et dévotion aux compositions des deux formations, souvent signées ou co-signées de sa main. Sur Ticket To Shangri-La, le duo ne souffre d’ailleurs d’aucune baisse de régime de ce coté-là. Ce nouvel album brille par la qualité de ses chansons et le raffinement apporté aux arrangements. S’il y aura toujours des mauvais esprits pour trouver cela classique et ennuyeux, qu’il est plaisant d’entendre de la musique aussi bien fichue ! Charme aussi charnel qu’intellectuel, les chansons du duo sont intemporelles. Elles s’insinuent dans le cerveau et sont sûres de déclencher quelques pas de danse (Winners). Un ton au-dessus de Canyons (qui n’en est pas moins excellent), Ticket To Shangri-La est un hommage ardent au meilleur des groupes soft-rock des seventies. Ainsi, Michael McDonald des Doobie Broothers aurait pu donner de la voix dans les chœurs de Rolling Back tandis que Starting Wars sonne comme un inédit de Todd Rundgren avec ou sans Utopia. Enfin, Sierra Nights invoque les fantômes d’America.
Cure The Jones est notre première rencontre avec l’autre groupes d’Andy Platts : les Mamas Guns. Looking For Moses affiche une décontraction à la Bill Withers des plus réjouissantes. Le groove détendu de la superbe Good Love a tout des classiques de la Chicago Soul, chère à Curtis Mayfield et aux Impressions. Party For One absorbe élégamment des influences hip hop. Winner’s Eyes nous saisit par la qualité de ses mélodies et arrangements. Son solo de guitare, inspiré des Isley Brothers, propulse la chanson dans un trip psychédélique. L’album se conclut sur la fabuleuse Daffodils et son pont gospel file la chair de poule. Cure The Jones comme Ticket To Shangri-La assument un certain référentiel mais l’humilité des musiciens ici impliqués ne doit pas faire oublier à quel point ces derniers sont doués. Les deux albums débordent ainsi de chansons à raviver et nourrir les âmes ; du moins, de celles et ceux qui ont su rester fidèles et sensibles à une certaine idée de la musique, où mélodie et écriture sont des talismans à perpétuer précieusement.