Dilettante. Le mot est lâché. Comme un paradoxe, si on entend par là l’incapacité d’accomplir, par défaut de volonté ou de ténacité, le travail artistique jusqu’à son terme. Quatre albums – et même un peu plus – en cinq ans : Mo Troper n’est manifestement pas de ceux qui rechignent à l’effort. Généralement adepte de la basse fidélité, le musicien de Portland s’était même risqué pour son précédent album – Natural Beauty (2020) – à gommer quelques aspérités sonores et à peigner quelques-unes des mèches rebelles de ses chansons ébouriffées. Le résultat était en tout point remarquable – du Jellyfish en cure d’austérité budgétaire, pour résumer – mais était passé à peu près totalement inaperçu en plein printemps confiné. Déçu et sans doute un tantinet frustré, Troper s’en est retourné à ses premières passions bricolées. En Dilettante, donc, au sens le plus noble du terme, puisqu’il s’agit ici de vivre plusieurs vies pour composer plusieurs albums à la fois. S’engager dans l’impulsion du moment, accompagner en amateur la sensation isolée ou l’impression éphémère qui s’élèvent au rang d’expérience artistique. Et ce vingt-huit fois de suite. Vingt-huit, c’est bien le nombre de morceaux enregistrés à domicile en moins d’une semaine qui composent donc ce kaléidoscope musical touffu et fascinant. Continuer la lecture de « Mo Troper, Dilettante (Bobo Integral) »
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The Prodigy, The Fat of the Land (XL Recordings, 1997)
Décrié par les puristes, le big beat fut un choc esthétique pour beaucoup d’adolescents à la fin des années 90. Si certains groupes frisent la blague potache, d’autres ont démontré que le genre en avait sous la semelle. Parmi eux les Chemical Brothers, Fatboy Slim et The Prodigy auront toujours une place particulière dans notre chair. The Fat of the Land (1997), de ces derniers, fut un pain dans la gueule de ceux qui l’écoutèrent, à la fin des années quatre-vingt-dix. La sainte trinité qu’il forme avec Dig Your Own Hole (1997) et You’ve Come a Long Way, Baby (1998) fut une machine à convertir les teenagers à la musique électronique. Omniprésents dans les bandes originales de jeux vidéos comme Wipeout 2097 (1996) ou Fifa 99 (1998) et de films comme Spawn (1997) ou Matrix (1999), les morceaux de ces groupes ont amené les machines des clubs jusqu’aux chambres des adolescents. Continuer la lecture de « The Prodigy, The Fat of the Land (XL Recordings, 1997) »
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Borne d’écoute : « Portrait de l’artiste en pop star », le clip de Bière Noire
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Nicolas Paugam, Padre Padrone (autoproduction)
« Il est temps de dresser des temples
aux ouvriers où les pyramides sont nées,
le chantier patenté exige révérence,
à la lueur des bougies d’Esope
et de Manufrance, en France, en France »
Parce que Nicolas Paugam a approché deux fortes têtes des affaires de la musique, Vincent Chauvier et son label Lithium quand il officiait avec son frère dans l’entreprise familiale Da Capo ou plus tard Bertrand Burgalat qui le mit à l’honneur de sa très scrutée chronique de Rock’n’Folk, on se dit qu’il en est lui-même une : une tête de pioche, un empêcheur de tourner en rond, un original. Pas grave s’il n’ira pas (pour le moment) imposer le tricot orange et le chapeau de paille dans les armoires impeccables (tendance costume de velours et synthétiques pastel) du label Tricatel, la collusion eut eût du chien. Continuer la lecture de « Nicolas Paugam, Padre Padrone (autoproduction) »
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LA PLAYLIST DES NOUVEAUTÉS DE DÉCEMBRE 2021
Feu d’artifice final pour une année résolument compliquée. Alignés comme une configuration astrale prometteuse, nos hérauts (Spiritualized, Dean Wareham, Jarvis), ceux en passe de le devenir (Cate Le Bon, Exek) et ceux qui les côtoient avec grandeur et style dans cette fournée hivernale à écouter au chaud, le temps que tout cela passe.
Écoutez cette playlist sur votre plateforme favorite : YouTube, Deezer ou Spotify et en version mixée sur Mixcloud. Et aussi, sur agnès b. radio.
NDLR : Les playlists Deezer et Spotify ne comportent pas l’intégralité des titres de cette sélection.
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Borne d’écoute : Le Chemin de la Honte
Lors d’un rude hiver Drômois, Le Chemin de la Honte, formation au son froid et caverneux, voit le jour lors de répétitions communes hebdomadaires entre Seb Normal, Liliane Chansard, Olivier Lanthlem et Stéphane Calin entrecoupées de discussions, de clopes fumées et de canettes vidées. Des chansons s’esquissent : « Les morceaux parlaient alors d’amour (amical et familial), d’addiction, de non-travail, du temps qui passe« . Au départ de Stéphane, Danièle Venoux rejoint l’aventure, happé par le son si singulier du groupe qu’il voit à leur premier concert. Le premier album éponyme sort en 2015 chez Danger et c’est un succès, un son rond mais rugueux.
Chacun s’affairant à d’autres activités, Le Chemin de La Honte est un point de rencontre de plusieurs personnes qui ont besoin de se retrouver après des temps d’absences plus ou moins longs pour être et composer ensemble.
Leur deuxième album Un Château Perpétuel est prêt dès 2019, mais reste dans le flou du temps qui s’arrête pour les raisons que l’on connaît. Sa sortie est donc retardée mais il n’en demeure pas moins très actuel, au vu des sujets abordés dans les textes de Liliane : « Les thèmes sont d’actualité, des thématiques individuelles qui sont des reflets plus généraux de l’état du monde et des êtres humains.« . Leurs compositions sont glaçantes, tendues et anguleuses avec néanmoins un côté plus expérimental comme sur Toute Distance et ses douze minutes façon autoroute qui clôturent l’album.
Un Château Perpetuel est disponible dès aujourd’hui en digital sur 24H/Jamais.
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Selectorama : Nick Drunken Broken Arms & His False Dylan Cobb
Originaire de Sheffield où il jouait au sein de son premier groupe garage-psych-country-soul The Jesus Loves Heroin Band, Nick Wheeldon débarque à Paris en 2012, et à depuis su montrer son talent et son hyperactivité auprès de Os Noctàmbulos, Sex Sux, Necessary Separation et autres 39th and the Nortons. Il compose également en solo de magnifiques balades pop qu’il a sorti récemment sur l’album Communication Problems (Mauvaise Foi / Le Pop Club Records). Parallèlement, Nick organise également des concerts sous le nom de Silence Kills à la Pointe Lafayette à Paris ou tout un essaim de groupes ont pu jouer dans cette cave microscopique où les murs suintent déjà de souvenirs mémorables. Durant le premier confinement, Nick à composé seul une série d’albums dont Everybody’s Trying To Fuck, I Just Want To Make Love est le premier à voir le jour. Il s’entoure de quatre compères Bordelais : Stéphane Gillet (Bootchy Temple), Chop (Prêcheur Loup) et Jules (Cockpit) pour l’enregistrement, et décident collectivement du grain à donner à l’ensemble. Ils forment dans la foulée Nick Drunken Broken Arms And His False Dylan Cobb et accouchent de ce brûlot urgent et incandescent qui sent bon l’Angleterre de Billy Childish comme sur Do You, mais aussi la ballade mélodique (Window Shopping) dont lui seul à le secret de composition. Le groupe prévoit de jouer live début 2022, et ne s’interdit pas de composer ensemble… encore un nouvel album. Pour ce Selectorama , Nick et Stéphane nous livrent leurs influences sur dix titres qu’ils ont choisi ensemble. Continuer la lecture de « Selectorama : Nick Drunken Broken Arms & His False Dylan Cobb »
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Andrew Taylor And The Harmonizers, Andrew Taylor And The Harmonizers (Rock Indiana)
Écouter les mêmes notes ; ressasser les mêmes mots : depuis vingt ans, Andrew Taylor compose des chansons magnifiques et trop peu de gens s’en soucient. Le résumé des épisodes précédents tient donc en une seule sentence lapidaire et ce n’est sans doute la publication de ce nouvel album, vendredi prochain, qui infléchira radicalement la suite du récit. Rien ici n’est fait pour déjouer l’implacable réalisme des prévisions ni même les attentes des rares impatients, déjà séduits par l’œuvre considérable du petit maître écossais et de tous ses alias – Dropkick, The Boy With The Perpetual Nervousness. Continuer la lecture de « Andrew Taylor And The Harmonizers, Andrew Taylor And The Harmonizers (Rock Indiana) »