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Michel Cloup, Backflip au-dessus du chaos (Ici d’ailleurs)

« Agite la tête tel un télécran,
secoue, secoue,
le sable pisse par tes oreilles,
secoue, secoue et efface tout »

On sait gré à Michel Cloup de ne jamais avoir menti sur la marchandise. Patient soutier des musiques d’ici, entre énervement et introspection, révolution intérieure et constat général alarmant, sa ligne de conduite ne souffre d’aucune pose. Pour ceux qui le suivent sur les réseaux sociaux, on a devant nous un gars normal, qui ne cache ni ses défauts ni sa passion. Il est même affûté quand il s’agit de définir les grands axes de son métier, entre quotidien routier (quand il faut se farcir des milliers de kilomètres en camion), déménagement constant (quand il faut porter les amplis) et flashs scéniques, intenses, qui laissent des traces. Mais aucune plainte à l’horizon, juste un constat lucide sur l’état d’un musicien « underground », « indé », tous ces mots balancés en rafale tous les jours et qui ne veulent plus dire grand-chose, tant ils ont eu un sens un jour. Continuer la lecture de « Michel Cloup, Backflip au-dessus du chaos (Ici d’ailleurs) »

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Duke Garwood, Rogues Gospel (God Unknown Records)

En 2018, l’anglais Duke Garwood publia en avec son complice Mark Lanegan l’album With Animals via Heavenly Recordings. Aussi sombre que la poix, ce disque eut le mérite d’illuminer nos soirées d’hiver et surtout d’éclairer la carrière de Garwood, musicien londonien proche des Archie Bronson Outfit. Un type bien donc. Depuis la sortie de ce disque, Mark Lanegan a cassé sa pipe, non pas à cause de ses errements passés, mais à cause de la pandémie de Covid 19. Du fléau, il en est question dans ce disque car il fut enregistré par Garwood lors du confinement de 2020 avec le batteur Paul May (déjà présent sur les disques de la période Heavenly Recordings). Rogues Gospel quitte les atmosphères sombres dessinées par la route commune tracée avec feu Mark Lanegan. Garwood repart à l’assaut de ses obsessions sonores, à savoir ces mélopées shamaniques qui avaient séduit un certain James Nicholls alors tout jeune patron du label Fire Records. Continuer la lecture de « Duke Garwood, Rogues Gospel (God Unknown Records) »

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Collectif, Beatriz MMXXI (Le Paradoxe du singe savant)

A chantar m’er de so qu’eu no volria
Je chante ce que je préfèrerais taire

Tout commence par une statue.

Aucune statue n’est anodine, on le sait depuis longtemps, on le sait aussi depuis Bronze de Bertrand Belin, une chanson pas anodine sur la vanité de qui érige.

Sur la place de l’Évêché de Die, plus souvent appelée par les habitants “place de la Comtesse”, se trouve un buste à l’origine de ce nom d’usage, érigé par des occitanistes du XIXe siècle. Il représente Beatriz, comtesse de Die.

Il est facile, comme partout, de passer à côté, et c’est ce que longtemps peut-être Kate Fletcher, résidente du pays diois qui a notamment publié le formidable Theories of Entanglement l’an passé, a fait : passer à côté, jusqu’à ce que Sofia Neves attire son œil et/ou son oreille sur la comtesse. C’était en 2015. Continuer la lecture de « Collectif, Beatriz MMXXI (Le Paradoxe du singe savant) »

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Michael Rault, id. (Wick Records)

Wick est un label rare. Succursale rock de la célèbre maison de disques soul/funk Daptone, elle développe un catalogue quantitativement raisonnable et de qualité depuis 2015, alternants albums et singles en 45 tours. Wick ne compte ainsi qu’une poignée de signatures parmi lesquels les excellents Ar-Kaics, Mystery Lights , Jay Vons et notre homme du jour Michael Rault. Tous ont en commun une approche vintage et organique, sans tomber dans l’excès de zèle rétro et pastiche. Michael Rault, trentenaire canadien, désormais californien, publie régulièrement des disques depuis la fin des années 2000. Sa carrière a pris un tournant en 2018 avec l’excellent It’s A New Day Tonight, son premier album pour Wick. Il y explorait le glam et la powerpop seventies avec un sens aiguisé de la mélodie. Continuer la lecture de « Michael Rault, id. (Wick Records) »

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EggS, A Glitter Year (Howlin’ Banana / Safe In The Rain / Prefect Records)

Comment apprécier avec l’illusion de posséder une ouïe toute neuve une musique qui transporte –intentionnellement ou pas, ce n’est pas vraiment le problème – plusieurs décennies de références ? Un premier album d’indie-rock enregistré en anglais par un groupe français : il y avait tout à craindre des obstacles pour qui ne bénéficie plus depuis bien trop longtemps des privilèges de la virginité musicale. Les associations charriées par la mémoire surgissent en premier : on n’y peut rien. Autant les laisser affluer avant d’apprécier ce qui leur survit. L’homonymie d’abord : Eggs était demeuré pendant près de trois décennies cette éphémère formation américaine emmenée par Andrew Beaujon, co-fondateur avec Mark Robinson du label Teenbeat qui n’avait laissé comme seul testament méconnu que deux albums. Dont Exploder, 1994, un fourre-tout génial, un mini-monument à la gloire de la spontanéité bricoleuse et de la prise de risque semi-improvisée pas toujours contrôlée. On y croisait toute une série d’éléments hétéroclites : des harmonies vocales en dérapages contrôlés, des solos de synthétiseurs et des mélodies merveilleuses assemblées à la va-vite. On retrouve, par hasard, un peu de cette bizarrerie splendide sur A Glitter Year. Mais aussi beaucoup d’autres choses et c’est bien mieux. Continuer la lecture de « EggS, A Glitter Year (Howlin’ Banana / Safe In The Rain / Prefect Records) »

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Twain, Noon (Keeled Scales)

On one short stretch of burn the ear may distinguish a dozen different notes at once.

Nan Shepherd

Parfois on se rend compte qu’on a vécu des années en compagnie d’un livre sagement rangé dans les rayonnages d’une bibliothèque sagement rangée, plus ou moins, et que l’on n’a jamais pensé à mettre ledit livre dans les mains de la personne qui devait le lire – qui peut être soi ou une autre, ça n’a pas forcément d’importance –, puis on y pense comme par hasard, sans réel hasard, puis on le met dans les mains de ladite personne, et elle le lit, et ça tremble – ou pas. Continuer la lecture de « Twain, Noon (Keeled Scales) »

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Ruth Radelet, The Other Side EP (autoproduit)

Il m’a dit, tu devrais écrire sur The Other Side et j’ai dit oui, sans vraiment hésiter, et puis j’ai écrit. J’ai commencé d’écrire sans même avoir écouté les chansons. Je les avais entendues, comme on le fait toutes et tous, mais je ne les avais pas écoutées. Ces quelques lignes que j’avais écrites, elles disaient que Chromatics, c’était une certaine idée des 80’s mais en mieux et puis qu’il y avait cette voix qui nous faisait penser que Ruth Radelet, la chanteuse, n’existait pas réellement, que c’était un ange tombé du ciel. Je trouvais que c’était cliché mais parfois il n’y a que les clichés qui peuvent décrire parfaitement ce que l’on ressent. J’avais écrit d’autres choses, une théorie fumeuse cette fois, que les disques de Chromatics s’étaient succédés et que cette voix avait pris de plus en plus de place – moins de plages instrumentales, moins de vocoder – ce qui a fait dire à certains que l’avant-dernier album de Chromatics, Closer To Grey, était en fait le premier album solo de Ruth Radelet. Continuer la lecture de « Ruth Radelet, The Other Side EP (autoproduit) »

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Marlon Williams, My Boy (Dead Oceans)

Au rayon Marlon Williams, on ne connaissait, jusqu’à il y a peu, que le grand Marley Marl, strict homonyme de l’homme qui nous intéresse ici. Mais on ne va pas jouer au malin et prétendre avoir été alerté il y a déjà dix ans par une poignée de disques réalisés en duo avec son compatriote Delaney Davidson, il n’en est rien ! Comme ce dernier, Marlon Williams est Néo-Zélandais et les deux musiciens ont œuvré communément, à l’abri de la hype, dans un domaine assez peu exposé sur nos terres : la country. Et pour intituler une série de disques Sad But True-The Secret History Of Country Music Songwriting, mieux vaut en avoir sous le pied. Continuer la lecture de « Marlon Williams, My Boy (Dead Oceans) »