Loin de moi l’idée de venir piétiner les plates-bandes de mes petits camarades mais quand je tombe en pâmoison devant certaines mixtapes labelisées I Like 2 Stay Home, je ne résiste pas toujours à venir m’ancrer, telle une vilaine tique, sur la bande sonore. D’autant que ça me dédouane totalement de trouver un quelconque lien entre confinement et 45 tours sélectionné. Ce fut le cas avec les Zarjaz (cf #14), et après m’être délecté de cet indispensable The Godlike Genius of Mayo Thompson, je réitère en ajoutant un tout petit caillou à l’édifice. Continuer la lecture de « #38 : The Red Crayola, Born In Flames (Rough Trade, 1980) »
Un mix thématique par jour à écouter en temps de confinement.
Le post-disco est un terme quelque peu fourre-tout pour évoquer la dance music (boogie, italo, electro-funk…) émergeant dans le sillon de la disco déclinante. Période aux contours flous, trait d’union avec le R&B ou la House, le post-disco abandonne les certains traits de la disco (les arrangements mielleux de cordes, les tempos en surrégime) pour se recentrer (dans la partie d’aujourd’hui) sur les fondamentaux de la soul et du funk : (un peu) plus lent, plus sensuel, des instrumentations plus épurées. Les musiciens expérimentent également avec les synthétiseurs et boîtes à rythmes sont omniprésents à mesure que la décennie progresse, aboutissant (avec quelques autres genres comme l’Italo) à la House quelques années plus tard. Continuer la lecture de « I Like 2 Stay Home #35 : A Night To Remember – Post Disco (1980 / 1984) »
Le batave siffle tard. Je ne sais plus qui de Thierry Roland ou de Jean-Mimi Larqué en est l’auteur (ou même si la citation n’est pas, qui sait, apocryphe). Encore moins de quel match il s’agissait, s’il concernait l’équipe de France ou un grand d’Europe. Qu’importe (je gage que Christophe B. saura nous éclairer). De la formule de nos duettistes, Bouvard et Pécuchet de la lucarne, de ce fragment d’un discours amoureux sur le football où, avec un sens inné du raccourci (et du tacle à la carotide), le génie le dispute à l’idiotie, on retiendra essentiellement que l’arbitre était néerlandais et avait une conception toute personnelle du temps additionnel. Mais rien ne nous empêche d’exfiltrer cet immortel aphorisme de l’aire de jeu et de le malaxer pour mieux l’appliquer à la politique de nos homologues hollandais en matière de stratégie sanitaire. D’abord partisan d’un calcul délicat, la fameuse « immunité collective » un temps chère à BoJo, le gouvernement néerlandais préconise désormais, plutôt qu’un confinement généralisé et contrôlé, un « lockdown intelligent » – une façon de jouer sur les mots ou de pointer poliment le manque de jugement du voisin. Aux pays des polders, on peut vivre comme avant, ou presque. Si les bars, les musées ou les salles de gym sont fermés, la plupart des magasins restent ouverts, ainsi que les coffee-shops (mais attention, uniquement pour la vente à emporter !). On peut donc, en relative liberté, continuer à rouler – et pas seulement à bicyclette – ou subtiliser des Van Gogh. Maintenant, reste à savoir si le batave est versatile. La barre des 1500 décès ayant été atteinte (puis allègrement dépassée après la rédaction de ce post) aux Pays-Bas, il n’est pas exclu que l’arbitre siffle rapidement la fin de la récré, laissant seule la Suède jouer les prolongations (et Virna Lindt me faire du pied sous la table pour passer sur la platine). Continuer la lecture de « #18 : Orange Disaster, Something’s Got To Give (Neuter Records, 1980 / Vogue, 1981) »
A force depuis plus de dix jours de vivre ainsi les uns sur les autres du matin au soir (mais Dieu ou Marx merci, pas du soir au matin !), il fallait bien que les questions qui fâchent ressurgissent, malgré nos perspectives d’avenir émoussées. « Anton, tu sais ce que tu veux faire plus tard ? – Je sais pas moi, genre ornithologue. – Tu veux dire le truc avec les oiseaux ? T’es sûr ? – Ou alors océanographe. Sinon, paléontologue c’est bien aussi, l’étude des fossiles et tout. – Tu ne veux pas plutôt faire prof de lettres ? Ou bibliothécaire, comme tonton Jeanphi et la Karen des Go-Betweens ? Bibliothécaire, mon grand, peut-être le plus beau des métiers du monde. – Non, ça c’est tout cramé. Une chose qui est certaine c’est que ça sera un métier scientifique, on voit bien qu’on en manque en ce moment, avec le virus et tout ». La conversation tenta de se prolonger en claudiquant, avant de s’embourber dans un fatras inextricable convoquant chloroquine, masques FFP2, vaccins et chercheurs manquants – ou en manque, je ne sais plus. Faute de crédibilité et de bagage (quel ascendant peut-on prendre sur un enfant de 14 ans quand on se targue d’avoir obtenu un Bac littéraire et quasi rien derrière ?), je n’eus bientôt plus voix au chapitre. Avant que tout – le désir, le vin, le temps, la mauvaise foi – ne vienne à manquer, je rapatriais l’unique 45 tours des Missing Scientists, considérant qu’il pouvait faire office d’honnête appendice au post de la veille. Continuer la lecture de « #10 : Missing Scientists, Big City Bright Lights (Rough Trade, 1980) »
Alors que je tendais mon Ausweis dûment coché à la case « courses » à Rémi, l’unique policier municipal de la commune, qui officiait à la sortie du village, je ne pus me retenir de lâcher un discret « Je ne suis pas un numéro. Je suis un homme libre ! ». Pas de réaction, pas l’esquisse d’un sourire, je crus même qu’il allait m’en coller une, de prune à 135 euros. Comme il n’y avait à la ronde pas non plus l’ombre d’un chat et encore moins celle d’un contrevenant, je tentais d’établir un semblant de dialogue, demandant à Rémi s’il voyait passer beaucoup de véhicules – Trop. -, s’il regardait Netflix – A fond ! -, s’il connaissait Le Prisonnier– Non, trop pas, c’est quoi ?. La conversation en restera là, n’oublions pas que j’avais un caddie à remplir. Continuer la lecture de « #9 : Teenage Filmstars, I Helped Patrick McGoohan Escape (Fab Listening, 1980) »
A l’instar d’un Syd Barrett (« I know where he lives and I visit him / In a little hut in Cambridge », chantaient en 1981 les Television Personalities), Robert Wyatt est passé maître dans l’art du confinement, à son corps défendant. Wyatt, batteur de Soft Machine, exclu par ses petits camarades après l’album Fourth (1971), puis fondateur de Matching Mole, traduction pataphysicienne du précédent. Wyatt, défenestré par l’éthylisme en juin 1973, Lazare un an plus tard par la grâce de Rock Bottom, un des plus beaux disques de non-rock au monde. Wyatt, en mobilité réduite depuis plus de 45 ans, paralysé des deux jambes. Continuer la lecture de « #3 : Robert Wyatt, At Last I Am Free (Rough Trade, 1980) »