Que pleure-t-on avec la disparition de Tom Verlaine ? Ce qui frappe, pour une légende de cette stature, c’est qu’il brillait d’abord par des qualités négatives : pas une grande voix, même si l’empreinte vocale est reconnaissable entre mille, au point d’avoir déterminé des vocations de non-chanteurs aussi notoires que Lloyd Cole ou Lawrence. Un jour, ce dernier débarque à New York, appelle Verlaine. Qui se souvient, narquois : « Je n’ai pas très bien compris ce qu’il voulait. Peut-être des leçons de chant ? (rires)… ». Ces deux-là ne se rencontreront jamais, mais il suffit d’écouter Days, du premier, pour mesurer tout ce que le second lui doit. Continuer la lecture de « Torn Verlaine »
Catégories playlist
LA PLAYLIST DES NOUVEAUTÉS DE JANVIER 2023
Que faire lorsque les plus grands s’en vont les uns après les autres, nous laissant un sentiment implacable de devoir pleurer chaque jour nos idoles ? David Crosby, Tom Verlaine, ces pères fondateurs deviennent des astres éternels et nous obligent à passer par la phase du deuil et des hommages. Malgré nos peines, nous avons choisi de perpétuer cette petite mission que nous nous sommes donnés, la découverte et le partage. Voici quelques ouvertures vers l’avenir de la pop moderne, trente-cinq petits cailloux blancs qui dessinent un futur que l’on espère pas si sombre.
Écoutez cette playlist sur votre plateforme favorite : YouTube, Deezer, Spotify ou (à venir) en version mixée sur Mixcloud. Et aussi, sur agnès b. radio.
NDLR : Les playlists Deezer et Spotify ne comportent pas l’intégralité des titres de cette sélection.
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Catégories interview
Peel Dream Magazine : « Je suis un poppeux dans l’âme »
Voilà trois semaines que Joe Stevens a quitté Los Angeles pour Londres. En résidence dans la capitale anglaise, il s’est produit chaque mercredi de janvier auprès d’invités de (son) choix, Sean O’Hagan [The High Llamas, Microdisney, Stereolab] ou Jack Cooper [Mazes, Ultimate Painting], pour ne citer qu’eux. Après quelques autres villes anglaises, c’est demain qu’il traversera la Manche pour entamer la première tournée européenne de Peel Dream Magazine, avec un premier arrêt à Paris. Un concert qui fera date, aussi parce que tant attendu par ceux qui avaient, comme nous, adoré Agitprop Alterna [chroniqué ici], paru en avril 2020, en plein confinement. Deux ans et demi plus tard, Stevens surprend avec le bien-nommé Pad, un album-concept cotonneux, fait de sonorités synthétiques et vintage, au fil desquelles évolue un personnage imaginaire. Dans un long entretien, le musicien nous explique ce virage esthétique, du shoegaze à ce qu’il nomme la « pop baroque », en évoquant évidemment ses plus grandes influences : les High Llamas, Stereolab et les Beach Boys.
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Catégories selectorama
Selectorama : Sierra Manhattan
On avait déjà évoqué le retour de l’équipée sauvage savoyarde Sierra Manhattan en début de semaine dans une borne d’écoute, mais au vu de la qualité tout à fait attachante de leur ouvrage pop et de l’album à venir (Which Life, The Friends sortira le 17 février sur AB Records, Fun Club Records et Another Record), nous avons eu envie d’en savoir un peu plus sur les musiques qui traînent dans les recoins des cerveaux de ces quatre vaillants jeunes hommes. En guise d’apéritif à leur concert au MOFO Festival ce soir à Mains d’Oeuvres auquel nous vous conseillons chaleureusement de vous y rendre toutes affaires cessantes, voici dix morceaux qu’ils écoutent en boucle, ou juste de temps en temps. Continuer la lecture de « Selectorama : Sierra Manhattan »
Catégories hommage
C’était David Crosby (1941-2023)
Dans Harvest Time, le documentaire fourni en DVD avec la version du 50e anniversaire d’Harvest parue pour la Noël, il se joue une scène assez révélatrice. On y voit Neil Young avoir toutes les peines — certes relatives, en buvant des bières et en se marrant comme une baleine — à mettre une touche finale aux harmonies de Words avec Nash et Stills, alors que quelques temps auparavant, il y parvient presque sans peine aucune sur Alabama avec Nash et Crosby. Stills est là encore, et à trois ils ont la plus belle collection de sous-pulls au monde, avec un niveau de zouaverie paradoxalement revu à la baisse. En trois nuances un peu exagérées, Crosby trouve le ton juste pour les chœurs, civilise paradoxalement ce motet brutaliste : les autres n’ont plus qu’à se coller dessus. Mettre (tout) le monde à l’unisson par le seul fil de sa voix, comme par magie, peut-être était-ce là, bien au-delà de ses frasques, le plus grand talent de David Crosby. Et ce génie absolu à harmoniser les sons et les autres venait de loin. Et repartira plus loin encore, en devenant un véritable vétéran du chaos. Continuer la lecture de « C’était David Crosby (1941-2023) »
Catégories mardi oldie
The dB’s, Stands For Decibels (Albion, 1981)
The dB’s tracent les hésitations de la période charnière entre new wave et indie-pop. Sur le sol nord-américain, comme ailleurs, une génération de groupes s’imprègne de l’héritage sixties, sans foncer dans la parodie et le pastiche. Dunedin Sound en Nouvelle Zélande, Paisley Underground en Californie (Rain Parade, Bangles, Dream Syndicate etc.), les dB’s sont, eux, aux avant-postes de la transition à New York, au coté de formations comme The Bongos ou The Individuals. Originaire de Winston-Salem, en Caroline du Nord, les membres des dB’s se connaissent depuis l’enfance et jouent souvent ensemble depuis les années soixante dans leur ville d’origine. Continuer la lecture de « The dB’s, Stands For Decibels (Albion, 1981) »
Catégories sunday archive
Air décroche la lune
L’une de mes grandes spécialités, c’est de perdre de vue des gens bien / cool / sympas / (sur)doués… Parfois, la chance me rattrape, et je les retrouve (avant bien sûr de les reperdre à nouveau de vue, mais c’est une autre histoire). Comme d’autres, j’ai découvert Air en 1995 avec la compilation Source Lab-, qui bien sûr avec le recul, fait figure d’acte de naissance de cette scène que les Britanniques baptiseront french touch. C’était aussi le début du hip-hop abstrait (beaucoup plus classe que le trip-hop) et le proche retour du easy listening (mais nous savions déjà que Burt Bacharach était à lui seul supérieur à quatre Beatles) et dans ce contexte-là, je me souviens avoir beaucoup aimé j’ai aimé les six minutes alanguies de Modulor Mix. Et puis, un an plus tard (à peu près) j’ai adoré le maxi Casanova 70, sa pochette discrètement sortie des années 1970, la ligne de basse entêtante du morceau éponyme, les claviers crépusculaires sur lesquels se prélassaient Les Professionnels. Je n’en suis plus très sûr mais je crois que c’est pour ce disque que Les Inrocks ont publié une photo du groupe. Une photo qui… Continuer la lecture de « Air décroche la lune »
Catégories borne d'écoute
Sierra Manhattan, une bouffée d’air frais pop
Depuis 2018 et l’excellent Are U Single, No I’m Album, la pop cotonneuse de Sierra Manhattan est restée silencieuse. La formation éparpillée entre Lyon, Paris et la campagne de la Loire ne s’était jamais arrêtée, juste ensommeillée : « On avait aussi envie de prendre le temps de fabriquer un nouveau set, ça faisait un moment qu’on jouait certains morceaux et on avait envie de se remettre un peu en danger à nouveau. » Sans aucune urgence, chacun s’est exprimé à travers d’autres entités solo ou collectives : Olbio s’amuse tout seul dans Bravo Tounky, Florian avec Neptune Football Club, Satellite Jockey et a rejoint Fontanarosa. Rémi joue dans Satellite Jockey, Phat Dat et Alex Van Pelt dans son projet éponyme ainsi que dans Coming Soon et Mont Analogue. Tout ce beau monde gravite autour du label AB Records à Saint Etienne, qui signe la plupart des groupes. Continuer la lecture de « Sierra Manhattan, une bouffée d’air frais pop »