Des claques, j’en ai prises. Des virtuelles, des réelles. Des claques données par des chansons, des disques, des filles. Non, jamais par des garçons. Enfin, pas directement. Parce que, bien sûr, vous avez raison : derrière les chansons, derrière les disques, il y a souvent eu des garçons. La dernière claque en date – assez violente sur l’échelle des émotions – remonte à l’automne dernier. Un jeune homme que je connais – mais pas si bien que ça –, que j’ai croisé – mais pas si souvent que ça – envoyait les fichiers audio de son premier album à tous ses souscripteurs – via l’excellente structure Microcultures. Ce jeune homme, donc, venait de terminer un disque dont on devinait une gestation longue et parfois douloureuse – mais quand un disque raconte les morceaux d’une vie, je ne vois pas comment il pourrait en être autrement. Un disque qui parle de lui, mais qui, ai-je compris dès les (presque) premiers mots (“Moi qui fais tout pour t’épater / qui cherche ton admiration / Je passe mon temps à t’assommer / Quand je ne passe pas pour un vrai con…”), allait aussi parler un peu de moi. Et puis, tant qu’on y est, de vous également. Un disque qui ne fait pas tout à fait les choses comme les autres. Un disque ancré dans la musique d’ici – ces textes encore, comme autant de nouvelles qui pourraient exister par elles-mêmes –, mais aussi tourné de l’autre côté de l’Atlantique.
Si on le voit dériver hors du monde sur la barque instable du clip de Tempérament, le single déjà connu qui ouvre son deuxième disque et lui donne son titre (Tempéraments, au pluriel), gageons que la carrière multiple de Malik Djoudi a déjà tangué et visité des océans d’indifférence, avant que sa musique ne se fasse véritablement remarquer. Le Poitevin d’origine en a eu des projets divers, des groupes anglophiles du cru Alan Cock, Kim Tim ou Moon Pallas, à une commande pour la télé-réalité, lui permettant de déranger ses influences indies anglo-saxonnes pour trouver son style en retrouvant son chant (en français) pour dévoiler en son nom propre un premier album auto-produit Un (2017). Continuer la lecture de « Selectorama : Malik Djoudi »
Ce mardi 5 mars, se tiendra au Petit Bain à Paris une de ces revues extravagantes que nous chérissons par dessus tout, réunissant sur un même plateau trois des formations les plus originales, poétiques et joyeusement aberrantes que ce pays puisse se vanter d’avoir enfanté. Si vous devez rater ça, ratez mieux : trois disques sont disponibles : A Une Gorge d’Orgue Agnès (Three:Four Records), Rojo Vivo de Borja Flames (Les Disques du Festival permanent), et Horse In The House de Gilles Poizat (Carton Records).
Nous ne nous sommes jamais rencontrés. Mais nos routes se sont déjà croisées. Il y a plus d’une dizaine d’années. J’avais reçu au bureau un petit roman (par le nombre de pages) d’un auteur dont je n’avais jamais entendu parler mais dont le titre, Fanzine, avait suffisamment éveillé ma curiosité pour que je prenne la peine d’en lire les premières pages. J’avais été ensuite incapable de le reposer, le terminant d’une traite, emballé par tout ce qui s’en dégageait : l’histoire, le style, les références, les ascendances… Il y était question “d’émois et de mort, de regards fiévreux et de découvertes, de regrets et d’espoirs”, avec le rock et John Fante en toile de fond. Autant dire que par ici, on n’était pas loin du sur mesure.
Il y a un an, nous chroniquions dans le fanzine Mushroom l’excellente cassette des Lyonnaises de Tôle Froide. Depuis le mini-album a été réédité, il y a quelques mois, en vinyle par AB Records, Et Mon Cul C’est Du Tofu? (Stratocastors) et Le Turc Mécanique (Balladur, Oktober Lieber). Une occasion unique de redécouvrir la pop électrisante de Pauline, Morgane et Leslie, pont aussi étonnant que grisant entre post-punk et variété française. Nous sommes ravis d’avoir pu les convier à un Selectorama à leur image : précis, mêlant classiques aux hérauts de l’underground actuel. Si leur concert qui devait avoir lieu ce samedi 25 janvier est malheureusement annulé, on espère les revoir bientôt à Paris où elles sont plutôt rares, hormis une date qu’elles avaient partagé avec un autre groupe que nous adorons : En Attendant Ana.
Dans les dix premières minutes du film, pas de musique, ni de générique. Tout juste des ondes, des fréquences extrêmement basses viennent souligner le malaise. Le suicide d’un professeur, en pleine classe. Ce sont les premiers instants du film de Sébastien Marnier, L’heure de la sortie, à l’affiche dès aujourd’hui. Selon le réalisateur, la bande originale confiée au trio parisien Zombie Zombie« devait à la fois convoquer des forces telluriques, accompagner le dérèglement du monde et incarner la crise existentielle que traverse le personnage principal ». Mission accomplie. Si ce n’est de loin pas la première fois qu’ils s’adonnent aux musiques de film (Loubia Hamra de Narimane Mari, Irréprochable, premier film du même Sébastien Marnier ou encore Zombie Zombie plays John Carpenter et leur soundtrack pour Le Cuirassé Potemkine lors d’un festival la même année), ils ont cette fois eu l’idée de génie de demander à une chorale d’enfants d’interpréter Free Money et Pissing in a river de Patti Smith, et conféré à leurs synthétiseurs un climat anxiogène d’un grande beauté. Excellente raison pour leur demander de nous livrer leurs bandes originales préférées dans ce selectorama spécial.
C’était il y a onze ans. Pour le compte d’une revue dont on taira une nouvelle fois le nom, je croisais la route de l’auteur et dessinateur Hervé Bourhis à l’occasion de la sortie de son Petit Livre Rock, ouvrage à la couverture rouge et au format de 45 tours qui retraçait, par le parti-pris(me) de son auteur, l’histoire de cette musique qui ne cesse de mourir – ou de ressusciter, comme vous préférez – depuis sa naissance. Grandi à Tours, Parisien quelque temps avant de prendre la tangente pour poser ses crayons à Bordeaux, le jeune homme réunissait alors pour la première fois ses deux passions. Batteur et / ou chanteur au sein de groupes que l’histoire a vite oublié, mais dessinateur et / ou scénariste talentueux – que ce soit pour raconter des fictions ou croquer ce qui fut / est la réalité –, Hervé Bourhis avoue écrire dans le silence mais dessiner en musique. Celui qui, entre Lennon ou McCartney, choisit Brian Wilson a fait de son idée de Petit Livre une série, qui lui a permis de détailler la Ve République ou la bande dessinée, mais surtout de renforcer son image de mélomane aux goûts éclectiques (la musique noire, les Beatles). Aujourd’hui, il sort, avec l’aide de Hervé Tanquerelle, un Petit Livre de la French Pop (Dargaud), qui conte l’histoire musicale hexagonale de 1956 à nos jours. L’occasion était trop belle pour ne pas demander à Hervé Bourhis les dix chansons tricolores qui lui filent des frissons.