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Stevie Wonder, Innervisions (Motown, 1973)

Au milieu des années soixante-dix, en une demi-décennie, Stevie Wonder publie cinq classiques. La série constitue l’une des plus remarquables de l’histoire de la musique populaire d’après-guerre. Elle place indéniablement Stevie Wonder parmi les génies de la pop, au coté des Beatles, Beach Boys ou de Kraftwerk. Cette affirmation n’a rien de péremptoire. Tout au long de sa carrière, le musicien afro-américain développe un style de composition unique, au point qu’une oreille (un peu) exercée peut identifier distinctement l’une de ses œuvres, y compris quand il les confie aux autres (The Spinners, Syreeta, Sergio Mendes, Minnie Riperton, Dionne Warwick…). Né prématuré (d’où sa cécité) en 1950, le jeune prodige rejoint la Motown en 1962 à l’âge de 11 ans. Il est déjà un musicien accompli sur de nombreux instruments (piano, batterie, harmonica…) Malgré le relatif échec commercial de ses premiers disques, il s’impose dans les années soixante comme une des valeurs sûres de l’écurie de Detroit. Continuer la lecture de « Stevie Wonder, Innervisions (Motown, 1973) »

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Jellyfish, Bellybutton & Spilt Milk, (1990 & 1993, Charisma)

C’est la question que l’on redoute par-dessus tout et qui finit tôt ou tard par resurgir. Souvent en plein dîner de famille, parfois dès les premières minutes d’une nouvelle rencontre. Qu’il s’agisse de justifier l’irrationalité inflationniste d’une collection envahissante de quelques milliers de disques ou d’expliquer au profane le contenu exact de ce mystérieux webzine auquel on consacre du temps depuis un bon moment. Immanquablement, elle sera posée avec la naïveté déroutante et involontairement cruelle du Petit Prince face à l’aviateur : “Mais enfin, c’est quoi le genre de musique que tu écoutes ? ” Depuis quelques années, plutôt que de creuser davantage le fossé qui nous sépare de l’interlocuteur curieux en tentant d’échafauder une définition complexe ou en exhibant une liste de noms et de références trop rarement partagées, et qui finissent par éteindre les dernières lueurs de compréhension dans son regard, on préfère opter pour une pédagogie par l’exemple. Et ce sont presque toujours ces deux albums que l’on commence par ressortir. Continuer la lecture de « Jellyfish, Bellybutton & Spilt Milk, (1990 & 1993, Charisma) »

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Leon Ware, Rockin’ You Eternally (Elektra, 1981), Marcos Valle, Vontade de Rever Você (Som Livre, 1981)

Leon WareLe coup de foudre artistique entre Leon Ware et Marcos Valle est peut-être une des rencontres musicales les plus méconnues de la musique populaire moderne. À la toute fin des seventies, le duo écrit ensemble une quinzaine de chansons. Celles-ci sont enregistrées (pour certaines) sur les albums respectifs des deux musiciens de l’époque, plus particulièrement sur Rockin’ You Eternally et Vontade de Rever Vocêtous les deux publiés en 1981. Les deux disques suivants, Leon Ware (1982) et Marcos Valle (1983), accueillent également plusieurs compositions réalisées à quatre mains. Rien ne prédestinait ces deux là à collaborer. Leon Ware, afro-américain, né à Détroit en 1940, démarre sa carrière de compositeur à la Motown en 1967 écrivant pour les Isley Brothers, Jackson Five ou Martha and the Vandellas. Dans les années soixante-dix, il devient un producteur et arrangeur demandé. Continuer la lecture de « Leon Ware, Rockin’ You Eternally (Elektra, 1981), Marcos Valle, Vontade de Rever Você (Som Livre, 1981) »

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Spiritualized, Ladies and gentlemen we are floating in space (Fat Possum)

On ne sait pas toujours de quoi est faite la réalité. Lorsque cet album sort, le 16 juin 1997, l’ouverture de son packaging médicamenteux et le décollement de l’opercule en alu du blister laissent planer dans toute la pièce l’aura opiacée de Jason Pierce et l’arbre généalogique chargé du groupe. Ladies and Gentlemen We Are Floating in Space est le troisième album studio de Spiritualized. A la fois vaporeux et terriblement ancré dans la matérialité physique de la musique, on y trouve des apparitions du Balanescu Quartet et du London Community Gospel Choir. Qualifié d’album space rock psychédélique, il atteindra pourtant la quatrième place des charts britanniques, au plus fort de la période Britpop. Continuer la lecture de « Spiritualized, Ladies and gentlemen we are floating in space (Fat Possum) »

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Aztec Camera, Backwards And Forwards – The WEA Recordings 1984-1995 (Cherry Red)

Il faut compter ici pas moins de neuf disques – tous les albums originaux avec leurs bonus respectifs, de Knife (1984) à Frestonia (1995)- accompagnés de deux volumes d’enregistrements live et une autre paire de fourre-tout, hétéroclites mais précieux, consacrés aux remixes et autres titres rares – pour parvenir à restituer l’intégralité de cette histoire passionnante. De ces histoires plutôt, tant l’épopée de Roddy Frame et d’Aztec Camera au cours des deux dernières décennies du siècle passé comporte d’éléments riches et contrastés qu’un recul apaisé tend, une fois encore, à réévaluer. Continuer la lecture de « Aztec Camera, Backwards And Forwards – The WEA Recordings 1984-1995 (Cherry Red) »

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Arpanet, Wireless Internet/Inertial Frame (Record Makers/Bigwax)

Dans More Brilliant than the Sun (1), livre considéré comme culte et étude définitive sur l’afrofuturisme, le théoricien et critique Kodwo Eshun élabore la catégorie de « Sonic Fiction » pour rendre compte du potentiel narratif et fictionnel de tout un pan de la musique afro/anglo-saxonne. Du jazz à la Jungle, en passant par le Dub, le Hip Hop et bien évidemment la techno, autant de courants qui ont en effet pu participer à la configuration d’un continuum esthétique marqué par une grande tonalité SF et futuriste. Que l’on évoque les fantasmagories cosmiques et l’imaginaire spatial de Sun Ra, ou les assauts militaro-cyberpunks et militants du label Underground Resistance, la puissance de configuration fictionnelle portée par ces musiques apparaît comme l’une de leur caractéristiques essentielles. Continuer la lecture de « Arpanet, Wireless Internet/Inertial Frame (Record Makers/Bigwax) »

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The Cure, Play For Today (The Swingin’Pig, 1990)

The Cure, Play For Today (The Swingin'Pig)

Simon Gallup a décidé de quitter The Cure, après plus de quarante ans passés aux côtés de son frère d’armes Robert Smith. On a beau savoir que tout finit par finir, on ne peut pas s’empêcher d’avoir le cœur serré. Le mythique bassiste était, selon les mots de Robert Smith, son « meilleur  ami » et le « cœur du groupe en live ». On imagine donc difficilement The Cure continuer sans lui sans perdre une partie de son âme. On se consolera en se disant qu’après une carrière aussi bien remplie, ce départ tardif n’est pas la fin du monde. On peut même se réjouir d’avoir pu profiter aussi longtemps du talent d’un musicien de l’envergure de Gallup. Les morceaux sur lesquels il se sera distingué sont innombrables, mais pour ma part, si je ne devais garder qu’un seul disque de The Cure pour la qualité exceptionnelle des performances de Simon Gallup à la basse, ce serait le live Play For Today. Pour tout dire, même s’il ne s’agit d’un disque non-officiel, je trouve que c’est l’enregistrement le plus impressionnant du groupe, à tout point de vue. Continuer la lecture de « The Cure, Play For Today (The Swingin’Pig, 1990) »

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Rain Parade, Emergency Third Rail Power Trip (1983, Enigma)

1983 est une année importante pour la musique pop. La sortie du synthétiseur DX7 contribue à drastiquement changer le son de la pop mainstream. Les synthétiseurs font certes de régulières apparitions dans les charts depuis les années soixante dix, mais ils sont souvent utilisés dans un contexte organique. Au début des années quatre-vingt, le paradigme change. Il est possible d’envisager des productions réalisées à 100% avec des outils électroniques, comme des boîtes à rythmes, des samplers (pour ceux qui en ont les moyens), des séquenceurs. La bascule est radicale. Au zénith de la culture yuppie et de la célébration de la réussite, tout le monde adopte ce nouveau son. Signe de modernité triomphante, il ringardise instantanément le reste. Un village gaulois résiste cependant dans l’ombre. Continuer la lecture de « Rain Parade, Emergency Third Rail Power Trip (1983, Enigma) »