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The Jesus And Mary Chain, Glasgow Eyes (Fuzz Club)

Il était grand temps de s’en rendre compte, malgré leur classicisme avoué, les frères Reid n’ont jamais trop été à la traine d’une certaine modernité. Si les saillies de soudards de Psychocandy définissent aujourd’hui un continent entier avec ses réussites (le seul plot MBV fera à lui seul une assez belle guerre coloniale) et ses aberrations, soit tout ce qui en découle depuis le nouveau siècle, peu ou prou, les plus rétrogrades étant paradoxalement les moins couillons. En 1986, alors que le monde faisait mine ou semblent de découvrir que le hip hop et le binaire n’étaient pas forcement antinomiques (Walk This Way), les deux têtes de mort prenaient des notes, utilisant déjà, quand nécessité faisait loi, la beat box sur Darklands et allaient recracher la leçon façon foutre et ciment sur l’excellent Sidewalking (1988) puis tenter, en pure perte (vraiment ?) de faire un clin d’œil glorieux mais tardif à Public Enemy avec Reverence (1992). Continuer la lecture de « The Jesus And Mary Chain, Glasgow Eyes (Fuzz Club) »

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Adrianne Lenker, Bright Future (4AD)

Is this what you wanted ?
To live in a house that is haunted
By the ghost of you and me

Un grain de sel, jamais sur les plaies.

Qui publie donc entre deux tours de Terre en 2024 un disque enregistré en 2022, si vraisemblablement brut que l’on pourrait oublier de se cogner dedans, glisser entre des ondes, pleurer des fantômes. Lenker en est à plus d’une demi-douzaine de merveilles de disques, seule ou avec Big Thief, et l’on craint pour elle, chaque nouvelle fois, pour nous : sera-t-on déçu·e ? Continuer la lecture de « Adrianne Lenker, Bright Future (4AD) »

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Camille Bénâtre, Dommage (Hidden Bay / Idol)

« Je n’étais qu’à l’ombre de toi,
l’ombre de moi
»

Dans les interstices du métier de chansonnier se glissent régulièrement des personnalités discrètes animées par la passion, et l’amour du travail bien fait. La musique, non comme un chemin vers la reconnaissance ou le succès – s’il arrive, on ne dira pas non, mais plus comme un défi personnel. Camille Bénâtre qui définit lui-même, dans l’entretien donné à l’arrière-magasin il y a quelques semaines, ce « petit artisanat », semble fait de ce bois dont sont faites ses guitares : acoustiques, ou légèrement électriques, elles dominent Dommage, un bel album de songwriter dans une tradition intime que l’on tendrait de Paul Simon à Lilac Time par exemple ou par ici du côté de Maxime Le Forestier, Yves Simon ou Julien Baer. Continuer la lecture de « Camille Bénâtre, Dommage (Hidden Bay / Idol) »

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The Tyde, Season 5 (Spiritual Pajamas)

The Tyde Season 5Trois points de Mellotron et une cascade, que dis-je, une myriade d’arpèges spleenétiques, ce petit motif imparable, cette chanson de rupture, de renonciation, de colère rentrée, de cœur en morceaux. All My Bastards Children, en ouverture de Once, premier album de The Tyde paru en l’an 2000 sur Track & Field. Il ne s’en est pas fallu beaucoup plus pour que le grand* Darren Rademaker devienne immédiatement un ami. Et infuse par la suite des évènements que ce soit sous l’alias matrimonial Frausdots ou une proximité de fait (de Felt ?) avec les faux jeunes de Girls, une présence discrète mais effective dans les grands moments de la RPM. The Tyde, en outre, fera à maintes occasions une sorte d’unanimité écrasante dans nos cœurs, d’une façon rarement aussi unanime, une trop rare collégialité rédactionnelle. Continuer la lecture de « The Tyde, Season 5 (Spiritual Pajamas) »

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Gilles Poizat, Trouvé Perdu (La République des Granges / Carton Records)

« La première fois que je vous ai vue,
je me suis trouvé, je me suis trouvé,
et perdu, et perdu, et perdu » 

Quand la musique tient à une sorte de révélation, ou disons qu’elle se révèle sans besoin d’autre chose que d’elle-même. A l’heure où l’on demande aux musiciens d’assurer leur promotion à travers une omniprésence sur les réseaux, de produire la théorie et le mode d’emploi qui vont avec leurs productions, de se construire une image si ce n’est un look (ce mot des années 80) pour se faire remarquer, que certains s’y prêtent à contrecœur ou avec beaucoup d’allant, d’autres semblent ne pas trop s’intéresser à la question. C’est le cas de Gilles Poizat qui déboule sans crier gare avec une proposition radicale, mais tout à fait amicale. Continuer la lecture de « Gilles Poizat, Trouvé Perdu (La République des Granges / Carton Records) »

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Real Estate, Daniel (Domino)

La magie ne se décrète pas. La preuve avec les premiers extraits du disque de Liam Gallagher (Oasis) et de John Squire (The Stone Roses)… Prenez le meilleur chanteur anglais des années 90, mettez le en studio avec l’un des meilleurs guitaristes anglais et vous obtiendrez des chansons convenues et d’un ennui considérable. Une autre preuve de cette vérité avec le nouveau disque des Real Estate. Ce groupe, originaire de Ridgewood (New Jersey) et signé au départ chez Woodsist, faisait depuis des années une musique d’agence immobilière. Martin Courtney et Alex Bleeker, le duo à la tête du groupe, ne prenait aucun risque et avait pour hobbie de réciter poliment les leçons données par des ainés adulés. Continuer la lecture de « Real Estate, Daniel (Domino) »

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Gwendoline, C’est à moi ça (Born Bad Records)

« Merci la Ville, je m’ennuierai plus jamais »

Un premier rendez-vous manqué :  Gwendoline est à l’affiche d’une soirée pas loin de chez moi, je m’y rends, je regarde le premier groupe puis m’enfuis pour me rendre un peu plus loin pour voir les Oi Boys enflammer la plaine des Bouchers. Peu inspiré par le patronyme des Brestois qui me rappelait juste ce film d’aventure vaguement SM et un peu guez de Just Jaeckin avec Zabou (salut la génération Starfix), j’ai préféré opter pour l’autre duo, donc. Second rendez-vous : l’hiver dernier, Gwendoline se produit à nouveau près de chez moi, et je me dis que c’est un signe, je vais rattraper le temps perdu. Enfin perdu, pas pour tout le monde, puisqu’ils ont depuis enchaîné des centaines de dates dans toute la France, se sont construit un public acquis à leur cause, et ont signé chez Born Bad, excusez du peu. J’allais voir ce que je j’allais voir. Continuer la lecture de « Gwendoline, C’est à moi ça (Born Bad Records) »

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Satellite Jockey… Plays Music ! (Another Record)

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« Descend la route jusqu’au crucifix« 

Là où d’autres semblent chercher l’inspiration outre Manche / Atlantique, quitte à marier un peu de force leurs influences musicales avec notre idiome exotique – et souvent, ça fonctionne – Satellite Jockey se cherche plus dans les recoins du patrimoine européen des années 1960 à 1980 : ses intermèdes un peu space pour la télévision, des accroches de génériques pour les émissions enfantines ou des chansons oubliées de bandes originales de films chelous (ce genre). Dans une sorte de psychédélisme domestique, assagi mais pas moins rêveur, le groupe travaille les timbres en jouant sur les contrastes de leurs sonorités acoustiques / électriques / électroniques, toujours au service d’une écriture simple et efficace. Car le savoir faire de Satellite Jockey ne trouve son aboutissement que dans l’exploration de la mélodie. Ou comment garder la foi en ce territoire plus ou moins abandonné ces temps-ci au profit du rythme, de la palabre et de l’image. Continuer la lecture de « Satellite Jockey… Plays Music ! (Another Record) »