Collage sauvage et de mauvaise foi de l’actualité culturelle de la semaine
Elle portait deux tatous sur chaque cheville, un croissant de lune et un soleil. Des tatouages que je retrouverais par pur hasard, des années plus tard, portés par une jeune libraire. La vie est une éternelle métamorphose. Noël 2001, un peu à l’écart d’Aix en Provence, dans un vieux mas décati aux tuiles rongées de soleil, j’allais passer d’étranges fêtes. Elle venait de me faire écouter Abd El Halim Hafez, au petit matin. Les cordes tragiques et orientales semblaient serpenter entre les oliviers. Au loin, une brume mauve rasait l’horizon des plaines. Elle me disait que c’était une brume similaire au Caire, mais là-bas, les vapeurs venaient matin comme soir. Continuer la lecture de « Rien sur Noël – Drab City, Pascal Bonitzer, Sarah Chiche »
Il y a ceux qui brillent en haut avec l’insolence d’une tête de gondole, très souvent malgré eux (The Apartments, c’est quand même pas le disque le plus frime de l’année, on peut l’admettre) et ceux que l’on ne cite pas assez pour qu’ils parviennent à se hisser au sommet. Nos petits pref’ à nous, les trop ou les pas assez, les obscurs ni d’Eve ni d’Adam, les un seul single brillant sur un album passable, ou ceux qu’on a écouté, oubliés, retrouvés. Les voici, dans le désordre, avec peu de cohérence stylistique, mais pas mal d’amour derrière leur sélection.
Mon Top 6 des bonnes raisons de s’intéresser cette année aux palmarès de Section26 : 1/ Parce que le contexte. Un choix évident, inutile de broder davantage. Même si, à titre très personnel, je reste une peu surpris que ce que j’ai toujours considéré comme mon style de vie habituel, d’autres appellent ça un confinement… Passons. La musique demeure plus que jamais une valeur refuge et il en est beaucoup question ici. 2/ Parce que c’est déjà la troisième fois, la troisième année et que, franchement, aucun d’entre nous n’aurait jamais misé sur une régularité aussi durable. 3/ Parce qu’on peut y retrouver à la fois le résultat du consensus collectif ET les orientations très singulières de chacun. Et que c’est donc un résumé pas si mauvais de ce que nous essayons de présenter tout le reste de l’année. 4/ Parce que, pour ce qui est justement des tocades individuelles, souvent les plus passionnantes, beaucoup des œuvres citées me laissent d’un froid quasi-polaire – c’est comme ça pour tout le monde, non ? – alors que je me souviens très précisément du plaisir éprouvé à la première lecture des comptes rendus enthousiastes rédigés par mes camarades. Et je crois que c’est bon signe. 5/ Parce qu’il y a des anciens et des nouveaux – bienvenus, toujours. 6/ Parce que, contrairement à ce que déplorent parfois les esprits chagrins – «Et la musique, c’est pas un concours ! » ; « Et puis les albums qui sortent le 23 décembre, vous en faites quoi alors ? », et autres jérémiades inégalement pertinentes – ces listes n’ont aucune vocation à refléter une quelconque vérité objective et définitive. Et que le plaisir de les faire et de les défaire est, à chaque fois, étalé dans l’inachevé : excitation de l’incomplétude, saveur du regret instantané, inévitable. Le meilleur album est toujours celui qu’on oublie ou celui qui s’impose au dernier moment. Tout le reste est secondaire.
Collage sauvage et de mauvaise foi de l’actualité culturelle de la semaine
« Tout homme qui se considère comme indispensable est un salaud. » Belle journée d’automne, Claude de Givray pense à cette citation de Sartre pour dire adieu à son cher ami, François Truffaut. Il ne prononcera pas cette phrase lors de son oraison funèbre. Cette vérité éclatante étant trop dure à dire lors de cette cérémonie feutrée de murmures, de regards bouffés de larmes, Givray la gardera pour lui. Je n’ai jamais pu comprendre ces personnes qui, dans une relation amicale, amoureuse ou encore sur leur lieu de travail se pensent indispensables. Vanité sèche, sans imagination. Hier matin, je beurrais mes tartines avec mon fils en écoutant I’m Your Man de Leonard Cohen. Cette musique de dandysme et de bricole, ajoutée à ma maladresse à beurrer les tartines ont fini par créer une certaine observation de mon fils à mon égard. Je me suis mis à penser sérieusement – en ces temps de cloisonnements merdiques – à lui rendre le goût de la vie indispensable. Continuer la lecture de « L’indispendable – Nanni Moretti, Pool Holograph, Laurent Mauvignier »
Vous connaissez la chanson : tous les derniers dimanches du mois, nos rédacteurs mettent en commun leurs coups de cœur respectifs parmi les nouveautés. La playlist, ou plutôt le patchwork qui en découle, est plus ou moins harmonieux selon les cas, mais a le mérite de refléter ce que nous avons véritablement écouté et aimé au cours des dernières semaines. Cette fois-ci, force est de constater que les femmes manquent à l’appel (et la présence de La Femme dans le cru de novembre ne saurait compenser ce regret). Un manque de parité qui reflète malheureusement sans doute l’état des scènes musicales que nous aimons défendre dans ces pages. Écoutons donc avec attention Katy J Pearson, Laetitia Shériff, Vanille ou Ana Roxanne en attendant la playlist de décembre qui, nous l’espérons, sera plus féminine. (Coralie Gardet)
Écoutez cette playlist sur votre plateforme favorite : YouTube, Deezer ou Spotify.
NDLR : Les playlists sur Deezer et Spotify ne comportent pas l’intégralité des 38 titres de cette sélection.
Alors que les affres du doute flottaient encore il y a quelques semaines — pour les quelques centralistes urbanisés dont je suis —, maintenant nous le savons : nous reprendrons le train pour le solstice d’hiver, nous en aller revenir dans nos proches régions passer quelques jours avec ceux qui nous sont chers. Prendre le train, cette singulière invention de l’ère industrielle, c’est par le corps tout entier emprunter tout un cheminement historique et poétique, se laisser cahoter en rythme les yeux pris dans le défilement infini du paysage et partager collectivement ce moment de transport fait de destinées individuelles. Passer les gares qui ne servent plus et s’arrêter dans celles qui subsistent encore, se remémorer à chaque étape tous les trajets arpentés dans sa vie.
Il semblerait que la rentrée musicale ait eu un mois de retard, cette année. Pour preuve, une roborative livraison mensuelle de nouveautés, avec près de 40 titres qui se sont glissés dans la playlist du mois d’octobre. Et pourtant, nous avons fait l’impasse sur quelques évidences, du joli album de reprises de Yo La Tengo au dernier Kevin Morby. Autant de nouveautés qui nous ont accompagnés ce mois-ci et qui, si elles vous ont échappées, trouveront peut-être aussi leur place chez vous. Pour que cet automne enfermé soit plus doux… (Coralie Gardet)
–
Écoutez cette playlist sur votre plateforme favorite : YouTube, Deezer ou Spotify.
NDLR : Les playlists sur Spotify et Deezer ne comportent pas l’intégralité des 38 titres de cette sélection.
Collage sauvage et de mauvaise foi de l’actualité culturelle de la semaine
Il m’aura fallu faucher les blés Apprendre à manier la fourche Pour retrouver le vrai Faire table rase du passé… Alain Bashung
Un sentiment étrange nous vient parfois. On peut ainsi avoir adoré un disque, l’écouter plus qu’il ne le faut – épuiser ses amis à force de références incessantes à son propos – et puis, plus rien. Le vide. J’ai, pour ma part, ce sentiment avec un disque, OK Computer de Radiohead. C’est un album qui m’a accompagné durant des années mais que je n’écoute plus aujourd’hui… J’irai plus loin : cette musique, je crois, je ne l’écouterai plus. Le sentiment esthétique est proche souvent, sans que l’on s’en rende véritablement compte, du sentiment amoureux. Il s’éteint parfois brutalement. Continuer la lecture de « Tabula Rasa – Cynthia Fleury, Christophe Granger et Neil Young »