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The Autumn Defense, Here And Nowhere (Yep Roc Records)

The Autumn DefenseIl y a ces deux albums publiés à quelques semaines d’intervalle, coup sur coup, mais tellement différents. Difficile pourtant de résister à la tentation comparative puisqu’ils apparaissent simultanément comme deux surgeons d’un des groupes américains les plus importants du début de ce siècle. Twilight Override de Jeff Tweedy est un triple album – ce seul constat factuel pourrait fort bien suffire à écluser le sujet –  rempli jusqu’à saturation des fragment d’introspection sur l’état dramatique de l’époque et d’ébauches musicales capturées sur le vif, dans une forme de profusion éclectique et d’inachèvement spontané qui n’exclut ni les coups de génie, ni les fausses pistes. Here And Nowhere de The Autumn Defense – ce groupe formé il y a vingt-cinq ans par John Stirratt et Pat Sansone, en marge de leurs activités d’instrumentistes au sein de Wilco – contient tout simplement onze chansons douces, mélodieuses, arrangées avec soin et classicisme, qui parlent le plus souvent de l’amour et du temps qui passe. Toute honte bue, je crois que j’éprouve davantage de plaisir à écouter – et même réécouter trois fois de suite, pour rééquilibrer la balance – le second. Continuer la lecture de « The Autumn Defense, Here And Nowhere (Yep Roc Records) »

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Alex G, Headlights (RCA Records)

Deux mois, c’est le temps qu’il m’aura fallu pour digérer le nouvel album de celui dont je pensais ne jamais pouvoir être déçue ; car je crois que c’est de la déception que j’ai ressentie cet été en écoutant le reste de Headlights. Les singles parus les semaines précédentes Afterlife et June Guitar en particulier m’avaient fait l’effet habituel lorsqu’il s’agit d’Alex G : déroutants d’abord, puis obsédants ensuite. Mandoline, banjo, accordéon, le folklore organique de Rocket (2017) était là, les effets de voix et autres bizarreries de House of Sugar (2019) ou God Save the Animals (2022) aussi, le tout dans une énergie accrocheuse.

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Robert Robinson & The Connecticut River Band, Albemarle Station (Silver Jews cover) 

Robert Robinson / Photo : bandcamp
Robert Robinson / Photo : bandcamp

Lorsqu’en 2019, avec l’ami Baptiste Fick, nous avons mis en chantier la compilation-hommage à David Berman, je me suis rappelé de Robert Robinson, connu alors sous le nom de Sore Eros et dont j’avais jadis chroniqué (pour un mensuel dont seul le nom a subsisté) le magnifique Second Chants (2009). Je n’avais alors aucune crainte quant à la proximité spirituelle de Sore Eros avec son aïeul, mais je demeurais bien curieux de connaître le résultat, car si on peut évidemment parler d’indie rock et de folk pour qualifier les productions de Robert Robinson, il est tout aussi certain que son art s’éloigne très souvent du minimalisme de Silver Jews.

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Jimmy Webb, A Life In Words And Music (Cherry Red)

Jimmy Webb A life in words and music cherry redVingt ans après la première publication de cette rétrospective par Rhino Handmade, épuisée depuis bien longtemps – The Moon’s A Harsh Mistress, Jimmy Webb In The Seventies (2004) – ce coffret rassemble donc les cinq premiers albums solo de Jimmy Webb accompagnés d’un live enregistré à Londres en 1972 et d’un septième CD de démos et d’inédits. Soit le meilleur rapport qualité-prix de l’été, haut la main. S’y trouve en effet condensée une partie de l’histoire de la pop américaine d’autant plus captivante qu’elle commence alors même que le premier chapitre – le plus glorieux – s’est déjà achevé. Cela lui confère un charme tragique et la teinte d’un mystère que la répétition ravissante des écoutes ne dissipera sans doute jamais complètement. Continuer la lecture de « Jimmy Webb, A Life In Words And Music (Cherry Red) »

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Panda Bear, Sinister Grift (Domino)

Animal Collective a très brièvement été considéré comme un sommet musical inégalable (entre 2006 et 2009) avant de devenir complètement has been, emporté par le naufrage de l’indie rock, des voix haut perchées et des pseudonymes se référant à la faune. Bien à tort. Ce qu’a fait Panda Bear / Noah Lennox est d’intérêt et, parfois, sublime. Bien avant 2006, sa discographie avec Avey Tare / David Porter est un recueil de psychédélisme foisonnant et lyrique. Lyrique : ce mot est important. Ils n’ont pas (ou rarement) fait de la musique pour de la musique, pour s’émerveiller de leur propre inventivité (ils auraient pu). Ils ont cherché l’émotion. Continuer la lecture de « Panda Bear, Sinister Grift (Domino) »

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Lifeguard, Ripped and Torn (Matador)

Cinq après leurs débuts, deux ans après leur signature chez Matador (Interpol, Guided By Voices, Pavement, Yo La Tengo, Car Seat Headrest…), le trio de Chicago Lifeguard sort Ripped and Torn, son premier album. Affilié à un prestigieux label indépendant étatsunien, Lifeguard affiche pourtant à peine vingt ans de moyenne d’âge en moyenne. Composé d’Asher Case, Isaac Lowenstein et Kai Slater, ces jeunes musiciens sont solidement implantés dans la scène underground locale. Les deux premiers ont ainsi joué dans le backing band de Horsegirl (avec la sœur d’Isaac, Penelope Lowenstein) à ses débuts, tandis que le dernier a son propre projet, l’excellent groupe powerpop The Sharp Pins. Accompagné par Randy Randall (No Age) à la production, Lifeguard n’a pas renâclé à la tâche. Ripped and Torn est un coup de poing dans le plexus, un disque intense et sans concession. Bruyant, agressif, Lifeguard ne cherche pas à plaire à tout le monde. Continuer la lecture de « Lifeguard, Ripped and Torn (Matador) »

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Pavements d’Alex Ross Perry

Pavements d'Alex Ross Perry (Mubi)
Pavements d’Alex Ross Perry (Mubi)

On en parlait depuis des mois, des années. Maintenant, il était question d’un biopic et ça provoquait un peu l’hilarité chez ceux qui connaissaient le groupe, le doudou américain des années grunge, surtout de ceux qui avaient envie de chemins bizarres pour traverser ces années où le punk rock avait broké. Un biopic de Pavement, pourquoi pas un pour les Pastels (avec Jesse Eisenberg en Stephen) même si on l’avait eu par la bande avec le film de Stuart Murdoch (God Help The Girl, curiosité de 2014 et ode à Glasgow), mais très romancé alors. Mais je m’égare, revenons à la bande à Stephen Malkmus. Continuer la lecture de « Pavements d’Alex Ross Perry »

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Jeffrey Foskett et Nelson Bragg, garçons de plage

Deux rétrospectives de musiciens dans la lignée des Beach Boys sortent en cette période de deuil de Brian Wilson.

C’est étrange mais le travail du deuil a ceci de commun avec celui de la découverte qu’il s’opère souvent par à-coups successifs. Depuis le 11 juin, les souvenirs resurgissent ainsi, de temps à autre, par grappes agglomérées, au gré des ramifications de la mémoire, semblables en cela à la manière dont s’entrebaillaient, il y a longtemps, les portes des premiers émerveillements. En effet, si les Beach Boys ont été si importants dans notre éducation musicale, c’est notamment parce qu’ils ont été le premier groupe, dont la grandeur s’est révélée comme on perce progressivement une succession de mystères et de secrets concentriques. Celui pour lequel – plus que pour tous ses concurrents contemporains – la passion musicale grandissante s’est apparentée à une expédition spéléologique au cœur d’un réseau galeries dont il s’agissait d’identifier, étape par étape, les connections enfouies. Derrière la face émergée et saillante – ces tubes charmants mais un peu désuets qui baignaient déjà l’enfance – on commençait ainsi par apercevoir Pet Sounds (1966) puis, au moment de la publication de ce fameux coffret rétrospectif de 1992 (Good Vibrations –Thirty Years Of The Beach Boys, le premier objet discographique de cette importance acquis avec le tout premier salaire d’adulte), les bribes du naufrage admirable et tragique de Smile (1967). De là, il devenait possible de cheminer plus loin, vers les lueurs de Sunflower (1970) ou de Surf’s Up (1971) et d’y deviner, au-delà des obscurités intermittentes du génie à éclipse de Brian Wilson, l’éclat parfois tout aussi éblouissant du talent de ses frères.

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