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Leonard Cohen, Various Positions (CBS, 1984)

If it be your will.
« Si telle est ta volonté. »

C’est ainsi que Leonard Cohen conclut la difficile deuxième période de sa carrière dite « des désamours », qui a succédé à la lune de miel entre le poète et son public, à sa bohème élégante mais sincère, inattaquable géographiquement — le Chelsea Hotel et Hydra avant l’arrivée de l’électricité sur l’île, qui dit mieux ? — et artistiquement — les recueils, le roman, puis les trois premiers albums, inattaquables — trop noirs ? Inattaquables.

Ces fameux trois albums inauguraux qui captivent d’emblée l’Europe alors que ce sont ceux qui rêvent encore d’Amérique, qui deviennent des tables de la Loi, des mesures de toute chose folk, de tout arrangement – et très vite, dès Songs of Leonard Cohen, qui deviennent des prisons. Cohen lors de ses premières tournées, malgré toutes ses tentatives de sabotage — concerts sous LSD, chevaux, impréparation, empathie —, peine sous le poids des mots ravivant soir après soir les passés et les morts — père, amours, etc. —, sous le poids des attentes, sous le poids de la perfection qu’il atteint quand il fait sans essayer d’être. Un poids sous lequel Bob Dylan, d’un cuir plus solide, a déjà craqué et s’est enfui avant de réapparaître autre, tout autre. Continuer la lecture de « Leonard Cohen, Various Positions (CBS, 1984) »

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The Long Ryders, Native Sons (1984, Frontier Records / réédition Cherry Red)

On en est persuadé depuis longtemps : la transmission de témoin peut devenir parfois, en matière de musique, un art à part entière. Et même une forme majeure pour tous ceux qui bénéficie de l’expertise transitionnelle des passeurs les plus doués et les plus convaincus de la nécessité impérieuse de défendre une cause presque perdue. En 1984, The Long Ryders font partie de ceux-là. Depuis quelques années, les membres du groupe gravitent alors autour de cette scène californienne au sein de laquelle des connections de plus en plus directes s’établissent entre la spontanéité crue et brutale du punk contemporain et la fascination légèrement teintée de nostalgie pour le rock garage des années 1960. Continuer la lecture de « The Long Ryders, Native Sons (1984, Frontier Records / réédition Cherry Red) »

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Guilty Pleasure : « Toute Première Fois » par Jeanne Mas (1984)

La Jeanne Mas / Photo : Chan Masson
La Jeanne Mas / Photo : Chan Masson

Mais qu’est-ce donc qu’un guilty pleasure ? Notion éminemment variable selon les goûts, l’éducation, l’époque – ce qui passait pour un guilty pleasure dans les 80s sera peut-être considéré comme un tube quarante ans plus tard. La musique suit les aléas de la mode : qui aurait parié sur le retour de la coupe mulet ou de la moustache façon acteur porno des 70s, hein ?

Suivant le principe qu’il n’y a jamais de mal à se faire du bien, la notion « guilty » ne m’est donc pas familière et j’ai longuement cherchée. Avant de fixer mon choix sur Jeanne Mas et sa Toute Première Fois. Pourquoi ? Oui, il y a une histoire derrière ce choix. Mais déjà, quelques mots pour re-situer la chanson. Continuer la lecture de « Guilty Pleasure : « Toute Première Fois » par Jeanne Mas (1984) »

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Stranger Teens #13bis : « When Doves Cry » par Prince

Tout l’été, les morceaux qui ont sauvé notre adolescence.

Bon, si chacun arrive avec sa petite histoire perso, je ne me débinerai pas pour une fois. Lorsque Xavier, lors d’une soirée fortement houblonnée au Motel, a eu l’idée de cette série, trois morceaux me sont arrivés quasi instantanément en tête. Les deux premiers sont liés à ma grand-mère maternelle, in memoriam Alice Bach, Alsacienne pur cru au tempérament revêche mais au bon cœur. Chaque mercredi pendant une période assez longue de mon enfance, elle m’offrait un 45 tours. Hasard des présentoirs de grande surface et peut-être, goûts personnels de mon aïeule (ce que j’ignore, car nous n’en avons jamais vraiment parlé), les disques reflétaient leur époque, entre variété française kitsch, pop mainstream et disco déferlante. Continuer la lecture de « Stranger Teens #13bis : « When Doves Cry » par Prince »

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Stranger Teens #13 : « When Doves Cry » par Prince

Tout l’été, les morceaux qui ont sauvé notre adolescence.

1984, j’ai douze ans. Plutôt solitaire, je passe ma vie à écouter Radio Contact et Radio Source, les meilleures stations locales de Saint Brieuc et des alentours. Pourquoi ces deux radios ? Parce que mon tonton Philippe y était dj et qu’il m’emmenait parfois en studio lorsqu’il était en direct à l’antenne. Mais aussi parce qu’on y entendait pas mal de funk et de musique synthétique, styles que j’appréciais tout particulièrement à l’époque. A l’affût devant la sono de mon père, l’index et le majeur posé sur les touches play et record, je guettais, pendant des heures, mes chansons préférées pour les enregistrer sur cassette. Je customisais ensuite les jaquettes en y ajoutant les noms de Kool & The Gang, Cheri, Chaka Khan, Righeira, Kajagoogoo, ou de Moon Ray. Continuer la lecture de « Stranger Teens #13 : « When Doves Cry » par Prince »

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The Trypes, Music For Neighbors (Pravda Records)

The Trypes Music For NeighborsUn album oublié ? Même pas, au départ. Tout juste une poignée de titres – les quatre qui composent le seul et unique Ep de The Trypes, The Explorers Hold, 1984 – à laquelle s’ajoutent ici une douzaine d’autres demeurés, à l’époque dans les cartons. Comme le suggère le titre de cette réédition commémorative, c’est surtout une histoire de voisinage et de rencontres presque fortuites. L’origine relève à la fois de l’anecdote et du défi. A Haledon, dans le New Jersey, à la fin de 1981, deux jeunes musiciens locaux, Elbrus Kelemet et Marc Francia, conçoivent un de ces projets de fin de nuit exaltée, brillant et farfelu – souvent les meilleurs lorsque on parvient à les mener à leur terme inattendu : composer une seule chanson à quatre mains et l’enregistrer à compte d’auteur, uniquement pour installer l’un des rares exemplaires pressés dans le jukebox de leur bar de prédilection. Continuer la lecture de « The Trypes, Music For Neighbors (Pravda Records) »

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The Cure, toute première fois

Robert Smith, The Cure
Robert Smith, The Cure – 15/05/84 à Paris / Photo via Une vie de concerts

Le mardi 15 mai 1984, alors que la Curemania n’est pas encore-là, The Cure retrouvait le public parisien. Parmi les présents entassés dans un Zénith surbondé, certains allaient vivre leur première fois…

“You’re the noisiest audience we’ve ever had”“Vous êtes le public le plus bruyant qu’on n’ait jamais eu”, le temps d’une traduction approximative… Malgré les clameurs, malgré les larsens d’un ultime morceau pas tout à fait dissipés, ces mots prononcés par l’homme au centre de la scène, chemise blanche immaculée et chapelet autour du cou, semblent résonner avec une parfaite netteté et suscitent une pointe de fierté – celle un peu nigaude de se dire « J’ai donc participé à ça » –, même si, dans le dernier RER C attrapé de justesse, on se demande si on ne les a pas tout bonnement fantasmés, ces mots-là, si cette déclaration en guise de ponctuation finale ne disait finalement pas tout à fait ça… Mais quelques mois plus tard, Concert, le premier album live du groupe dans sa version cassette venait confirmer que non, nous n’avions pas rêvé : la face B constituée de versions scéniques enregistrées au fil des années s’achevait sur le Forever du Zénith et ces mots désormais passés à la postérité – au moins la nôtre… Continuer la lecture de « The Cure, toute première fois »

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The Bangles, All Over The Place (1984, Columbia)

Dans le milieu des années quatre-vingt, poser avec une Ricken’ sur une pochette de disque a tout d’une déclaration d’intention, particulièrement sur une major. Pensez donc, la gratte des Beatles, Byrds, Creedence Clearwater Revival et des Who ! Deux ans avant All Over The Place des Bangles, nos Dogs s’y étaient essayés sur Too Much Class For The Neighbourhood dans une photo à l’esprit très similaire. Quelques années plus tôt c’était Tom Petty qui posait avec sa guitare fièrement, devant un fond rouge. Les temps ont cependant changé entre Damn The Torpedoes (1979) et All Over The Place (1984). Cinq ans peuvent sembler une infime fraction de temps, mais à l’échelle du rock, c’était alors un tourbillon. Continuer la lecture de « The Bangles, All Over The Place (1984, Columbia) »