Wick est un label rare. Succursale rock de la célèbre maison de disques soul/funk Daptone, elle développe un catalogue quantitativement raisonnable et de qualité depuis 2015, alternants albums et singles en 45 tours. Wick ne compte ainsi qu’une poignée de signatures parmi lesquels les excellents Ar-Kaics, Mystery Lights , Jay Vons et notre homme du jour Michael Rault. Tous ont en commun une approche vintage et organique, sans tomber dans l’excès de zèle rétro et pastiche. Michael Rault, trentenaire canadien, désormais californien, publie régulièrement des disques depuis la fin des années 2000. Sa carrière a pris un tournant en 2018 avec l’excellent It’s A New Day Tonight, son premier album pour Wick. Il y explorait le glam et la powerpop seventies avec un sens aiguisé de la mélodie. Continuer la lecture de « Michael Rault, id. (Wick Records) »
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Paul Weller, Will Of The People (UMC)
Dans les derniers jours de l’été 2018, on s’apprêtait à rédiger les ultimes chapitres de Life From A Window-Paul Weller & l’Angleterre Pop, petit bouquin consacré à l’imposante carrière du songwriter de Woking. Ce travail se faisait avec une passion inébranlable mais également avec la boule au ventre. Car il s’agissait de s’en tirer au mieux pour faire de ce premier livre en langue française un document à la hauteur du sujet. Après avoir couvert l’épopée The Jam et la singulière aventure du Style Council, on avait bifurqué sans efforts démesurés vers les premières années solo. Tout s’enclenchait avec une certaine logique, malgré les changements de cap, qu’ils soient brillants ou pas. Il fallait à présent s’attaquer à une période clé : celle qui correspond à changement d’effectif presque total dans un petit monde qui menaçait de ronronner. Ce remaniement de fond des collaborateurs historiques du songwriter, allait finalement prendre la forme d’un saut dans le vide, aussi inattendu que jubilatoire. Continuer la lecture de « Paul Weller, Will Of The People (UMC) »
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EggS, A Glitter Year (Howlin’ Banana / Safe In The Rain / Prefect Records)
Comment apprécier avec l’illusion de posséder une ouïe toute neuve une musique qui transporte –intentionnellement ou pas, ce n’est pas vraiment le problème – plusieurs décennies de références ? Un premier album d’indie-rock enregistré en anglais par un groupe français : il y avait tout à craindre des obstacles pour qui ne bénéficie plus depuis bien trop longtemps des privilèges de la virginité musicale. Les associations charriées par la mémoire surgissent en premier : on n’y peut rien. Autant les laisser affluer avant d’apprécier ce qui leur survit. L’homonymie d’abord : Eggs était demeuré pendant près de trois décennies cette éphémère formation américaine emmenée par Andrew Beaujon, co-fondateur avec Mark Robinson du label Teenbeat qui n’avait laissé comme seul testament méconnu que deux albums. Dont Exploder, 1994, un fourre-tout génial, un mini-monument à la gloire de la spontanéité bricoleuse et de la prise de risque semi-improvisée pas toujours contrôlée. On y croisait toute une série d’éléments hétéroclites : des harmonies vocales en dérapages contrôlés, des solos de synthétiseurs et des mélodies merveilleuses assemblées à la va-vite. On retrouve, par hasard, un peu de cette bizarrerie splendide sur A Glitter Year. Mais aussi beaucoup d’autres choses et c’est bien mieux. Continuer la lecture de « EggS, A Glitter Year (Howlin’ Banana / Safe In The Rain / Prefect Records) »
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That Petrol Emotion – Plein de super

En général, on hésite. On vacille un moment entre les impulsions du cœur et les réticences de la raison. À quoi bon investir dans ces copieuses rétrospectives, dans tous ces coffrets dont l’acquisition, à chaque fois ou presque, s’accompagne, au mieux, du sentiment coupable d’encombrer les étagères de supports musicaux que l’on possède déjà et dont on connaît les moindres détails et, au pire, de la sensation cruelle que la réalité de la réécoute n’est pas forcément à la hauteur des souvenirs plus ou moins précis de la découverte. Il y a heureusement des exceptions. Every Beginning Has A Future, l’intégrale des cinq albums de That Petrol Emotion accompagnée de son lot pas si dispensable de faces B, d’inédits et de versions live sort donc au mois de novembre et, inflation ou pas, on devine déjà que le craquage consumériste sera gratifiant. Continuer la lecture de « That Petrol Emotion – Plein de super »
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Selectorama : Romain de Ferron

Pour un cinquantenaire comme ouam, c’est du pain béni parce que ces sonorités sont pleines de charges mélancoliques – elles me renvoient aux sons qu’on entendait à la télé dans des programmes documentaires ou des reportages sportifs. Je me retrouve catapulté en robe de chambre dans le salon familial, baigné de lumière bleue cathodique, blotti un samedi soir d’hiver. Alors bien sûr, chacun aura sa vision des choses, selon son âge, mais les sons sont très beaux, amples et ces mélodies peuvent simplement accompagner vos vagues à l’âme du dimanche matin quand vous rentrez d’une fête ou du dimanche soir, avant de retrouver le boulot. Du blues du XXe siècle, quoi. Romain nous envoie huit musiques qu’il écoute en ce moment, autant de clés à sa cassette magique (comme on dirait d’une Dictée Texas Instrument).Catégories chronique nouveauté
Twain, Noon (Keeled Scales)
On one short stretch of burn the ear may distinguish a dozen different notes at once.
Nan Shepherd
Parfois on se rend compte qu’on a vécu des années en compagnie d’un livre sagement rangé dans les rayonnages d’une bibliothèque sagement rangée, plus ou moins, et que l’on n’a jamais pensé à mettre ledit livre dans les mains de la personne qui devait le lire – qui peut être soi ou une autre, ça n’a pas forcément d’importance –, puis on y pense comme par hasard, sans réel hasard, puis on le met dans les mains de ladite personne, et elle le lit, et ça tremble – ou pas. Continuer la lecture de « Twain, Noon (Keeled Scales) »
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L’onirisme cotonneux des franciscains Children Maybe Later

San Francisco a toujours su faire émerger le meilleur en matière de rock et ses satellites, des Thee Oh Sees des débuts, en passant par les Fresh and Onlys et Sonny Smith, jusqu’aux plus récents joyaux pop chez Paisley Shirt Records. Children Maybe Later, trio Franciscain, c’est l’histoire d’une colocation entre trois féru.es de voix féminines éthérées, de pop paisley et d’art psychédélique. Stanley, Staizsh (colocataires dans la vie) et Britta (entendue dans les groupes Rays, The World, Cindy, Violent Change, Famous Mammals, Non Plus Temps et Galore), ont utilisé leur temps confiné pour créer, s’amuser et jouer à la guitare ensemble. Continuer la lecture de « L’onirisme cotonneux des franciscains Children Maybe Later »
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Elvis Costello & The Attractions, Imperial Bedroom (F-Beat / Columbia, 1982)
« Masterpiece ? », c’est la question que pose la campagne publicitaire fomentée aux Etats-Unis par le label Columbia à l’été 1982 quand sort le septième album de leur représentant britannique favori : Elvis Costello. On a fait plus discret.
Coup de bol, néanmoins : Imperial Bedroom n’est pas une daube. Loin de là. Donc, le marketeux a quand même écouté la pièce montée. Au pire, il a lu en amont la chronique du alors tout puissant magazine Rolling Stone signée Parke Puterbaugh : « Après des années à avoir furieusement affronté ses obsessions à travers des psychodrames punk trempés dans l’arsenic ou bien des mélos de bars country & western, Elvis Costello a enfin accompli son chef-d’œuvre ». Même pas besoin d’un virement, à l’époque Costello est la poupée gonflante de tous les rock-critics (vous voulez la citation apocryphe de David Lee Roth qui dit, de mémoire, que « Les rock-critics aiment tous Costello, parce qu’il leur ressemble » ? Eh ben voilà). Continuer la lecture de « Elvis Costello & The Attractions, Imperial Bedroom (F-Beat / Columbia, 1982) »