Les Playboys traversent les décennies avec une grâce que beaucoup doivent leur envier. Le groupe de Nice est fidèle au poste depuis plus de quarante ans. Mieux, les Playboys gardent le cap et creusent le même sillon, celui des 45 tours de garage-rock des sixties. Plus que les Nuggets ou les Back from the Grave, nos Français rendent hommage aux mythiques Pebbles ! Garagisme propose ainsi treize interprétations, piochées dans le répertoire nord-américain des années soixante, et un de leurs propres titres originaux. L’exercice de la reprise est souvent casse-gueule : l’équilibre est délicat, et peut facilement osciller entre l’hommage pénible et le contre-pied qui tombe à plat. Beaucoup de groupes garage revival s’y sont d’ailleurs cassé les dents ! Heureusement, la proposition des Playboys évoque plus (qualitativement) le premier album culte des Crawdaddys que beaucoup de tentatives plus hasardeuses.
Il faut dire que nos Niçois ont une arme secrète : le français. Chaque titre a ainsi été passé à la moulinette par Michel Nègre (guitare) ou Frank Durban (basse). Il en résulte un disque très cohérent et réjouissant. Les Playboys se font plaisir et cela s’entend. Garagisme ne va pas bousculer la discographie du groupe ou même la scène actuelle rock mais l’important est ailleurs. L’album est un cadeau à tous les fans du groupe et aux fidèles, contre vents et marées, du rock sixties. Nous avons ainsi l’impression de retrouver de vieux amis. Les voix sont un peu plus marquées mais l’enthousiasme est intact. Les Playboys sont des passionnés. Vouloir faire la tournée des SMAC pour avoir le statut d’intermittence : très peu pour eux. Actifs depuis les années 70, d’abord sous le nom de Dentist, les Playboys ont, dans les années 80, écrit une petite mais belle page de l’histoire du rock français. Aux cotés de formations comme les Snipers, Calamités, Coronados, Ticket ou les Rythmeurs, ils ont conjugué l’élégance des années soixante avec le français. Avec Garagisme, les Niçois déroulent leur savoir faire avec modestie et sans chichis. Le groupe désormais composé de François Albertini (voix), Michel Nègre (guitare), Frank Durban (basse), Marc Galliani (guitare) et Gilles Guizol (batterie) sortent les orgues farfisa, guitares fuzz et tout le toutim. Si l’ensemble s’écoute d’une traite, volume à fond, certains moments sont particulièrement mémorables. J’étais mal des Beaux Jens (She Was Mine) est une plongée dans le meilleur du garage moody tandis que Frustration (des Painted Ships) offre un crescendo frénétique. Je suis en retard de The Chob rend hommage aux Fuzztones. L’excellente Makin’ Deals des Satans (aussi reprise par les Cynics) devient Je Suis Fou lorsque Parle Loin de Moi (des Bedforde Set) sonne presque comme du Spencer Davis Group. En treize chansons, cet album, publié par Dangerhouse Skylab (le label du disquaire de Lyon), réjouit autant qu’il entretient la flamme.
Garagisme par Les Playboys est disponible sur le label Dangerhouse Skylab. Quelques titres sont écoutables sur la page YouTube de Bruno Dangerhouse.