Figure essentielle de la scène boogie/post-disco américaine des années 80, Patrice Rushen connaît pourtant un parcours atypique. Après avoir gagné un concours de jazz au Monterey Jazz Festival à 17 ans avec son groupe, la pianiste signe avec le label Prestige. Au début de sa vingtaine, Patrice Rushen publie ainsi trois albums sur le label entre 1974 et 1977. La musicienne opère un virage à 180 degrés un an plus tard lorsqu’elle signe chez Elektra. Label mythique dans les années 60 (The Doors, The Stooges, Love…), la structure est rachetée par Warner au début des seventies. Elektra contribue alors à développer un certain son californien (Leon Ware, Bread, Lee Ritenour, Carly Simon) aux cotés de leurs collègues d’Asylum également chapeautés par WEA. Dans cet environnement moins puriste, Patrice Rushen s’épanouit et ose aller vers une production plus funky, dansante et surtout pop, ce qui est vécu comme une trahison par les amateurs de jazz. Continuer la lecture de « Patrice Rushen, Straight From The Heart (Elektra, 1982) »
Étiquette : Lieu : Etats Unis
Catégories sunday archive
The War On Drugs, Slave Ambient (Secretly Canadian, 2011)
A l’automne 2011, soit 10 ans tout juste ou presque, je restais plein d’espoir sur les premières facéties d’Adam Glanduciel. Je vous expliquerais demain et avec quelques détails, pourquoi, j’avais vu juste mais j’avais, en fait, tout faux.
Forcement à l’ombre du phénoménal deuxième album de Girls, véritable soleil sombre de cette rentrée pop moderne, la deuxième incursion de The War On Drugs mérite tout de même une attention soutenue. Car s’il on reparlera à foison pour les premiers d’un son mercuriel inauguré par Bob Dylan et achevé à Birmingham au mitan des 80’s (Lawrence et Felt, pour ne pas les nommer), on saisira l’importance capitale de ce même songwriting Dylanien sur celui d’Adam Granduciel, lui-même rejoint par quelques obsessions britanniques. Continuer la lecture de « The War On Drugs, Slave Ambient (Secretly Canadian, 2011) »
Catégories chronique nouveauté
Aimee Mann, Queens Of The Summer Hotel (SuperEgo Records)
Début de la chanson, début de la consultation, le docteur dit :
Give me fifteen, give me fifteen, give me fifteen minutes
That is all I need to make the call
Give me fifteen, give me fifteen, give me fifteen minutes
Women are so simple after all.
Et hop : hôpital psychiatrique.
Pont :
You’re feminine, you’re crazy
Et hop, et fin de la chanson : le docteur ne demande pas plus de quinze minutes pour se prononcer, et prononcer sa sentence, et en reste là :
Give me fifteen.
Aimee Mann sort un nouvel album, et ce devrait être un événement – dans un monde meilleur – et c’est un événement. Continuer la lecture de « Aimee Mann, Queens Of The Summer Hotel (SuperEgo Records) »
Catégories interview
Shannon Lay : « J’assume mon super pouvoir : tenir une salle rien qu’avec ma guitare et ma voix. »
“Ainsi, l’apparition de Shannon Lay apparut”, aurait-on pu transcrire, un peu pataud.
Une silhouette bleue arc-boutée, recroquevillée sur un bitume en bordure de grève, des mèches rousses dissimulant les traits d’un visage enfoui, l’océan ne faisant qu’un avec le ciel grisâtre. C’était l’image de Living Water, il y a presque cinq ans, déjà. On y entendait un oranger, une lune lésée, un soleil précieux. Et puis ce Recording 15 comme extrait de la mémoire d’une boîte vocale, une confession qu’elle n’avait pas pris le temps de titrer tant il y avait urgence à chanter ce qu’elle préférait ne pas ressentir. Sa voix désarmait à ne pas vouloir trop en faire non plus, elle visait toujours juste dans le désir et la mélancolie. Comme d’autres avant elle, elle semblait situer la bonne distance entre l’intime et le mystère, la candeur et la noirceur. Continuer la lecture de « Shannon Lay : « J’assume mon super pouvoir : tenir une salle rien qu’avec ma guitare et ma voix. » »
Catégories borne d'écoute
The Reds Pinks & Purples, Don’t Come Home Too Soon (Tough Love Records)
Il y a des groupes comme ça. Des groupes qui sont comme taillés sur mesure, des groupes dont on sait déjà qu’ils ne nous décevront pas – et entre nous, il n’y a que des groupes pour réussir ça. Xavier, l’ami qui m’a fait écouter les chansons de ce type-là pour la première fois (parce que oui, pour celles et ceux qui n’auraient vraiment pas suivi, cette histoire, c’est avant tout l’histoire d’un homme seul, Glenn Donaldson), aurait sans doute résumé tout cela mieux que moi, aurait bien mieux dit la fausse légèreté de ces mélodies qu’on connait par cœur avant même de les avoir écoutées… Mais voilà, Xavier n’est pas là et c’est à moi de rappeler que justement, en matière de cœur, The Reds, Pinks & Purples ne fait jamais les choses à moitié, comme sur ce nouveau single à peu près parfait pour ponctuer l’été indien et annonciateur d’un quatrième album à paraitre le 4 février 2022.
Alors, en trois minutes et treize secondes (environ), quand bien même on s’était juré qu’on ne se laisserait plus prendre, Don’t Come Home Too Soon (ce titre, une fois encore) porte haut les couleurs de la mélancolie en donnant une idée assez précise de comment auraient pu sonner certaines des plus belles chansons de The Field Mice (toutes, donc) reprises par St. Christopher. C’est vous dire la splendeur des ébats.
Don’t Come Home Too Soon par The Reds Pinks & Purples, premier single du nouvel album Summer at Land’s End, sortie le 4 février 2022 chez Tough Love Records.
Catégories mardi oldie
Yma Sumac, Mambo ! (1954, Capitol)
Pour beaucoup d’entre nous, les années cinquante ressemblent à un continent éloigné, une terre perdue dans la brume. La faute à ces maudites années soixante ! Essentielles dans la construction de la musique que nous aimons (Beatles, Beach Boys, Velvet Underground, Byrds…), elles relèguent la décennie précédente dans les limbes. Tout au mieux, nous savons qu’il y avait les pionniers Rock & Roll, de Chuck Berry en passant par Buddy Holly ou Little Richard et du Jazz bien sûr, énormément de Jazz. Les fifties furent pourtant fort variées : Doo Wop, Exotica, danses de salon (Mambo, Cha-Cha-Cha…) Mambo! d’Yma Sumac, paru en 1954 sur Capitol, témoigne de l’excitation qu’il régnait après guerre dans les foyers américains. Au léger répond l’étrange. L’album fascine par sa capacité à faire entrer la personnalité singulière d’Yma Sumac, dans le registre connoté du mambo. Continuer la lecture de « Yma Sumac, Mambo ! (1954, Capitol) »
Catégories chronique nouveauté
The Brothers Steve, Dose (Big Stir Records)
C’est l’une des nombreuses vertus de la somme imposante que Simon Reynolds a consacrée à ce genre musical – Shock And Awe (2016, traduction française publiée chez Audimat l’an dernier) – que de souligner à quel point le Glam s’articule, dans bon nombre de ses embranchements foisonnants, avec le monde de l’enfance et les plaisirs encore naïfs de l’imaginaire. Les trois minutes réglementaires de la chanson pop comme point d’accès privilégié à un arrière-monde plus lumineux, plus coloré et dont l’inauthenticité même garantit la valeur toute particulière. C’est un peu de cette quête passionnée des artifices insouciants que l’on retrouve dans le second album de The Brothers Steve. Continuer la lecture de « The Brothers Steve, Dose (Big Stir Records) »
Catégories mardi oldie
Marie et les Garçons, id. (Celluloid, 1980)
Comme de nombreux autres groupes français des années 60/70, Marie et les Garçons a publié peu de disques. Deux EPs de son vivant pour être exact : l’album Marie et les Garçons (1980) est sorti à titre posthume. Cette modeste discographie ne permet guère de mesurer l’influence du groupe lyonnais sur le rock francophone. Aux côtés des Olivensteins ou d’Asphalt Jungle, Marie et les Garçons représentent une idée du punk, esthète et ouverte. Cela leur a valu certaines inimitiés et réactions très négatives de la part du public, mais aussi une place dans nos cœurs aujourd’hui. Formé en 1975, au Lycée Saint-Exupéry, le groupe s’appelle initialement Femme Fatale, nom trouvé en urgence pour assurer la première partie des futurs Starshooter au concert de fin d’année du bahut. Leur blase définitif leur est suggéré quelques mois plus tard par Marc Zermati de Skydog. Il fait référence à la batteuse du groupe, Marie Girard, ossature de la formation aux côtés d’Erik Fitoussi et Patrick Vidal, guitaristes et compositeurs principaux. Continuer la lecture de « Marie et les Garçons, id. (Celluloid, 1980) »