Avant-hier soir, à 18 heures précises, Ela Orleans partageait ce Christmas Fell Away accompagné d’un clip de montages d’archives en noir et blanc, véritable mise en images de la puissance évocatrice de sa musique. Dans ce Noël d’après-guerre, au cœur d’un paysage de ruines, l’année que nous venons de passer s’y superposerait presque. Sur ce morceau chanté, joué et enregistré par elle-même sur des paroles de Paul Rayson, elle nous dit : « En Pologne, la veillée de Noël est le jour le plus important, c’est le moment où l’on reçoit les cadeaux. J’ai conçu cette vidéo la nuit dernière pour tous ceux qui ont été particulièrement bons envers moi. Joyeux Noël à tous. »
Collage sauvage et de mauvaise foi de l’actualité culturelle de la semaine
Abd El Halim Hafez
Elle portait deux tatous sur chaque cheville, un croissant de lune et un soleil. Des tatouages que je retrouverais par pur hasard, des années plus tard, portés par une jeune libraire. La vie est une éternelle métamorphose. Noël 2001, un peu à l’écart d’Aix en Provence, dans un vieux mas décati aux tuiles rongées de soleil, j’allais passer d’étranges fêtes. Elle venait de me faire écouter Abd El Halim Hafez, au petit matin. Les cordes tragiques et orientales semblaient serpenter entre les oliviers. Au loin, une brume mauve rasait l’horizon des plaines. Elle me disait que c’était une brume similaire au Caire, mais là-bas, les vapeurs venaient matin comme soir. Continuer la lecture de « Rien sur Noël – Drab City, Pascal Bonitzer, Sarah Chiche »
Renard Empaillé est une formation essonnienne dont on ne sait que peu de choses, mais que certain.es ont vus en première partie de concerts relativement sportifs. En cette soirée placée sous le signe de la nativité, ils célèbrent Noël à leur manière, avec cette cover de la scie saisonnière la plus poncée du village, l’inusable All I Want For Christmas Is You de la diva Mariah Carey, produite par le hitmaker Walter Afanasieff en 1994. Ici pas d’eau de rose, pas d’histoire d’amour impossible pendant les fêtes, pas de chéri.e retenu.e à l’aéroport mais simplement un réveillon qui dégénérait en prise d’acide collective.
Fait notable en cette période de cadeaux, ils viennent de sortir une cassette six titres chez Buddy Records disponible ici sur leur Bandcamp.
Le rapport de chacun à la foi est une affaire individuelle, elle se niche parfois dans les circonvolutions les plus intimes. Vous pouvez d’ailleurs n’en revendiquer absolument aucune, personne ici ne s’en formalisera. Même si je fuis les papistes comme le virus, jamais je n’irais m’abandonner au moindre prosélytisme pour mettre en avant la religion dans laquelle j’ai été éduquée. Lorsque j’ai rencontré Philippe François, via un réseau social, il y a déjà quelques temps, je n’avais pas idée que pourtant, en dehors d’histoires communes liées à notre région d’origine, nous évoquerions un peu la foi mais beaucoup plus notre rapport à la musique, qui en contient une dose salutaire. J’ignorais aussi qu’il était le géniteur d’un des membres d’un groupe dont la foi, justement, nous a fait tresser plus d’un laurier en ces pages. La parution de cette Anthologie Protestante de la poésie française (et non d’une Anthologie française de la poésie protestante, la nuance est de taille) nous donne donc l’occasion de lui demander un Selectorama, exercice où il s’est livré, au delà même de mes attentes légitimes, nos conversations étant rarement lénifiantes, à une petite leçon de choses en accéléré et où il tisse admirablement les liens qui abondent entre la foi et le binaire, la théologie et le caractère définitivement sacré des génies qu’il évoque. Et je doute que même la frange la plus laïque de notre lectorat n’y trouve pas un intérêt tout particulier en cette veille de Noël. Continuer la lecture de « Selectorama : Philippe François »
Ce que j’ai toujours préféré chez Patrick Bateman, c’est le critique musical. J’ai, bien sûr, conservé de mon unique – et très lointaine – tentative de lecture intégrale d’American Psycho quelques souvenirs marquants et horrifiés des turpitudes yuppo-sado de son anti-héros. Mais, bloc W.C nappé au chocolat et rongeurs mis à part, ce sont encore les quelques pages consacrées par Brett Easton Ellis aux passions musicales du golden boy/tueur en série qui m’ont toujours semblé les plus puissantes et les plus pertinentes. Au-delà de ce qu’elles expriment du goût particulier d’une époque et du personnage qui l’incarne pour des produits culturels aisément consommables et dépourvus de toute aspérité morale ou politique, ces chroniques exhaustives et pointues de la discographie de Genesis, Whitney Houston ou Huey Lewis interrogent de toute leur ironie vigoureuse, presque indétectable, le sens commun et les normes convenues sur lesquelles se reposent presque inévitablement tous ceux qui ont, un jour, tenté de partager leur enthousiasme pour les chansons pop. Continuer la lecture de « Arnaud Choutet, Soft Rock – Yacht Vibes & California Grooves (Le Mot Et Le Reste) »
Drums Along The Hudson, premier album de The Bongos, raconte en filigrane les tâtonnements de la scène indépendante américaine des années quatre-vingt. Si Murmurde R.E.M., publié en 1983, est généralement considéré comme l’an zéro de l’indie-pop étasunienne, de nombreux groupes développent, en marge du punk ou de la new-wave, les fondations de l’indie au début de la décennie, notamment de ce son jangle-pop, compilé récemment par Captured Tracks (Strum & Thrum: The American Jangle Underground 1983-1987). Menés par Richard Barone et originaires d’Hoboken dans le New Jersey, The Bongos relient en effet les dBs aux Feelies. Les trois groupes déploient une certaine idée de la pop à guitare au son clair, un peu sèche et sans fioriture.
Pour clore dignement cette effusion de classements tous azimuts, voici celui des disquaires indépendants, que nous avions célébré ces dernières semaines dans notre série Première Nécessité. Histoire de célébrer une fois encore ces vaillantes échoppes sans qui nous ne serions rien, voici leurs disques préférés de cette année cauchemardesque. Continuer la lecture de « 2020, les choix des disquaires »