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Jeffrey Lewis & The Voltage, Bad Wiring (Don Giovanni Records / Moshi Moshi Records)

Jeffrey Lewis & the VoltageAprès bientôt 20 ans passés à écrire des chansons, à bourlinguer à travers le monde dans une sorte de « neverending tour », mais aussi à réaliser incessamment dessins et B.D., Jeffrey Lewis aurait pu se lasser, s’émousser ou tout simplement se ranger des voitures. Pourtant, à l’écoute de son nouvel album, on constate que l’éternel adolescent new-yorkais déborde toujours autant d’inspiration et de créativité. Depuis ses débuts avec The Bundles en 2001 – groupe dont faisait partie la légendaire Kimya Dawson des Moldy Peaches – jamais Jeffrey ne paraît avoir baissé le niveau d’exigence de ses textes et de sa musique, ni renoncé à son éthique anti-folk faite d’absence de compromis, de complète sincérité et de coolitude. Continuer la lecture de « Jeffrey Lewis & The Voltage, Bad Wiring (Don Giovanni Records / Moshi Moshi Records) »

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3776, 歳時記 [Saijiki] (Natural Make)

Pochette de Saijiki de 3776En japonais, le terme 歳時記 [Saijiki, littéralement chronique d’une année] désigne une liste réunissant un ensemble de kigo, des mots ou phrases associées aux saisons et utilisés dans les haïkus. À chaque période et mois de l’année est associé un corpus de termes correspondants, systématiquement inclus pour préciser la temporalité du poème. Fin avril, on évoquera ainsi les fleurs de cerisiers (sakura), comme dans ce haïku de Bashō datant du 17e siècle :

tant et tant de choses  /  samazama no

me reviennent à l’esprit  /  koto omoidasu

fleurs de cerisiers  /  sakura kana

Les cigales occupent le mois de juillet tandis que les grenouilles sont l’apanage de février et mars. La lune symbolise elle l’automne tout entier. Le saijiki forme ainsi une sorte de dictionnaire du temps qui passe et de ce cycle en perpétuel mouvement. Un calendrier d’idées. Le fourmillement de la nature en quelques lieux communs. Continuer la lecture de « 3776, 歳時記 [Saijiki] (Natural Make) »

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Foliage, Take (Z Tapes)

FoliageAprès trois albums, une poignée de singles et de EPs (dont un split avec Andrew Younker), Foliage publie en cette fin septembre son dernier ouvrage, Take. Formé dans la banlieue de San Bernadino, à 100 km à l’Est de Los Angeles, il s’agit avant tout du projet solo de sa tête pensante, Manuel Joseph Walker. Ce teenager fanatique de Johnny Marr et du rap US nous partage depuis 2015, avec l’aide d’une guitare et d’un ordinateur, sa vision de l’indie pop lo-fi. Continuer la lecture de « Foliage, Take (Z Tapes) »

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The Feelies, Higher Ground (A&M Records)

On peut être heureux dans la vie sans écouter les Feelies. J’en connais qui y parviennent. Pour des raisons qui m’appartiennent, je les vois rarement, pour ne pas dire jamais. Et puis il y a les autres, qu’avec le temps j’identifie d’un regard. Ceux à qui la simple évocation du groupe file la banane doublée en peau de velours. À me lire, on pourrait croire que j’évoque un club souterrain pour initiés frustrés, donc difficile d’accès. Il n’en est rien. Les disques des Feelies sont en vente libre. On ne parle pas là de free jazz, de musique concrète, sérielle ou post-industrielle. Comme tous les groupes audibles après l’invention du phonographe, le quatuor du New Jersey oscille sans se soucier du temps et des modes qui passent entre rock, pop et folk depuis 1980. Continuer la lecture de « The Feelies, Higher Ground (A&M Records) »

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Glass Beach, The First Glass Beach Record (autoproduit)

Pochette de The First Glass Beach AlbumFace à la virtuosité d’artistes en plein étalage de leurs facultés, deux réactions peuvent sauter à la gorge : une viscérale crispation, trouvant son origine dans une sorte de mépris vaguement jaloux face à tant d’esbroufe mains-dans-les-poches, ou une bien plus sereine envie d’ouvrir grand les tympans pour ne rien louper de ce perpétuel bouquet final. La frontière est mince entre l’une et l’autre, tenant bien souvent à des pas-grand-chose, des attitudes imperceptibles, des jugements sans doute superficiels. Et c’est ainsi qu’à l’opposé d’autres projets pompiers et agaçants avec lesquels ils partagent pourtant la passion des grandes fresques indie-rock épiques et doucement indulgentes (Car Seat Headrest, entre autres), les américains de Glass Beach restent profondément attachants malgré leur tendance maladive à vouloir être trente groupes à la fois. Continuer la lecture de « Glass Beach, The First Glass Beach Record (autoproduit) »

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Studio Electrophonique, Buxton Palace Hotel (Violette Records)

Studio ElectrophoniqueC’est très précisément au moment où l’on se dit qu’on ne nous y reprendra plus que ça nous tombe sur le coin de la gueule. C’est très précisément au moment où l’on se dit : « ouf, finies les histoires improbables qui foutent la vie sens dessus dessous » qu’en commence une nouvelle – dont bien sûr, on ne connait pas la fin. C’est très précisément au moment où l’on sait que, de toute façon, on a déjà tout vu, tout entendu, que se pointe un jeune type à la gueule d’ange, la mèche négligée et le look impeccable (comprendre un peu sixties) qui en dit long sur les ambitions. Même pas trente ans au compteur et pourtant. Et pourtant, ce garçon écrit des chansons qui bouleversent les habitudes. Des chansons dont on tombe amoureux en un claquement de doigt – parce qu’on est d’accord, hein, c’est bien de cela qu’il s’agit quand on écoute un disque ? – à cause d’un changement d’accord, d’une note d’orgue haïku qui se pointe au détour d’un refrain, d’un mot comme murmuré du bout des lèvres. Continuer la lecture de « Studio Electrophonique, Buxton Palace Hotel (Violette Records) »

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Jean-Louis Murat, Mustango (PIAS)

Jean-Louis MuratIl pleut, j’ai presque froid et c’est bon en ces temps caniculaires. L’ordinateur effectue péniblement ses mises à jour, manière de dire qu’il va bientôt me lâcher. Pour autant, l’obsolescence programmée n’attaquera pas ma quiétude dominicale. Tout est prêt dans la cuisine pour le retour de Zoé : le riz et le vinaigre japonais, le sucre et le sel, le soja et la coriandre, la soupe Miso, les avocats et le saumon. Ne manque plus que mon binôme culinaire pour attaquer les sashimis. Dans un mois pile, elle aura dix-huit ans. Forcément, je la vois de moins en moins. Mon oiseau prend son envol et ça m’émeut davantage que je ne le laisse paraitre. Pas de raison de se plaindre pour autant : nous partons encore en vacances ensemble, écoutons des vinyles, échangeons sur les trucs à ne pas manquer sur Netflix tout en mangeant japonais donc, assis en tailleur dans le salon. Autour de moi, peu de parents partagent encore ce genre de choses avec leur(s) enfant(s). Ce soir, si ça la tente et qu’elle ne s’est pas couchée trop tard hier – ce qui m’étonnerait –, on ira voir le film sur Daniel Darc. Faut dire que ma chérie aime la plupart des zouaves que j’écoute. Alors vraiment, oui, je m’en sors bien. Oserai-je affirmer que depuis que ma fille en devient une, je comprends mieux les femmes ? Allez savoir. Le travail de toute une vie, cette affaire. Continuer la lecture de « Jean-Louis Murat, Mustango (PIAS) »

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Bonnes feuilles : Christophe Brault, « Power Pop : Mélodie, Choeurs et Rock’n’Roll » (Le Mot Et Le Reste)

Power Pop Christophe Brault“Innocente, mais fatale. ” C’est une fois encore à cette double qualification, introduite en 1974 dans les pages de Phonograph Record Magazine pour évoquer les impressions ressenties à l’écoute de September Gurls de Big Star, que l’on finit par revenir lorsque les définitions génériques ne cessent de se dérober. Née au début des années 1970, de la volonté nostalgique de quelques adolescents américains de prolonger la concision mélodique des pionniers de la British Invasion – Beatles et Who en tête – dans une époque de dérives progressives et de stridences métalliques, la power pop n’a cessé de se développer dans de multiples directions au cours des cinq décennies suivantes. Aucun bilan de ces métamorphoses protéiformes n’existait encore en langue française. Un manque que vient combler l’ouvrage de Christophe Brault, Power Pop : Mélodie, chœurs et rock’n’roll. Continuer la lecture de « Bonnes feuilles : Christophe Brault, « Power Pop : Mélodie, Choeurs et Rock’n’Roll » (Le Mot Et Le Reste) »