Catégories fanzinesÉtiquettes , , , , ,

Papivole #11, mon histoire avec la presse musicale, 1978-2018 : le fanzine Parklife 60

Parklife 060
Parklife 060

En m’installant à Strasbourg en septembre 1989 pour y suivre des études d’Histoire, je ne me doutais pas que toute une région allait m’embrasser dans toute sa diversité et sa flamboyance rock’n’roll et dérivés. Par cercles concentriques, par ensembles proches mais disjoints, j’allais de loin en loin pouvoir me créer mes propres affinités en m’appuyant sur les épaules de mes géants à moi : les frères Danet dont le trio avec Marc Fischer, Ghetto Blaster Blues, allaient devenir Le Plus Simple Appareil et qui me traînaient aux concerts, Hervé et Elsa qui m’ouvraient les portes de leur appartement et de leur discothèque impeccable (Modern Lovers, Television Personalities pour commencer), Isabelle & Valérie avec qui on lisait le New Musical Express et les Inrockuptibles, avec qui on écoutait Bernard Lenoir, la famille Limelight (Emmanuel Abela et Bruno Chibane) qui s’occupaient du ciné club couru, pointu, populaire de l’Université, et de leur revue cinéma format italien, Karine, lumineuse, qui portait les cheveux courts et des vestes en daim d’occasion, Mathieu et Sophie dans leur Simca Aronde dans laquelle j’aimais me lover sur la banquette arrière, la nuit, la Happy Alsatian Family (les futurs Original Folks, le futur Etienne Greib), le studio Downtown de Didier, situé à Illkirch dans une ancienne usine Knorr, les magasins de disques d’occasion (la Seconde Main et sa vendeuse mystérieuse et impassible surtout), la FNAC et plus tard Babouin 1er… Et j’en oublie. Et puis il y avait cette famille régionale éloignée : d’un côté, la cité ouvrière mulhousienne pleine de morgue des Sun Plexus, et KG, réfugiés pour un temps seulement au nord, dans leur Shotgun Gallery puis à la Prison, et de l’autre, la ville plus feutrée, Colmar, tout aussi déterminée dans la pop internationale underground. C’était Hiéro, bicéphale dans la musique (Nicolas Jeanniard) et le cinéma (Jean-Damien Collin), et c’était enfin la nébuleuse Manson’s Child, derrière lequel se cachait une histoire déjà longue comme deux bras, celle de Mathieu Marmillot. Interconnectés, nous l’étions tous, sans fil, sans écran, et sans clavier, et ça prenait du temps. Il y a quelques semaines, j’ai roulé jusqu’à Mulhouse pour voir Joseph Fisher en concert, c’était organisé par Mathieu. J’y ai découvert l’existence de sa revue au numéro unique (pour le moment), Parklife 60, dont il a bien voulu me parler, en plus de tout le reste.  Continuer la lecture de « Papivole #11, mon histoire avec la presse musicale, 1978-2018 : le fanzine Parklife 60 »

Catégories chronique nouveautéÉtiquettes , , , ,

Le plus simple appareil, Instant chaviré (Scum Yr Earth)

«  La présence des autres rend tout facile, nous nous sourions entre deux rires, le brouhaha berce nos rêves et nous voulons être seuls, mais l’absence des autres rend tout fragile, nous nous évitons entre deux rires, le silence disperse nos rêves et tu voudrais rester seule »

Mesurer l’importance d’un groupe est compliqué : dans le cas d’un groupe aussi furtif que Le plus simple appareil, ça devient même un véritable casse-tête. Géographiquement, le trio, récemment ramené à son noyau familial, deux frères, est isolé. Pas simplement par le fait qu’il ne développe aucun contact avec quelque scène que ce soit, au niveau national, ni dans sa ville, Strasbourg, dont il est pourtant l’un des plus constants et fervents habitants. Isolé, L+SA l’est aussi à plus grande échelle, absent des circuits souterrains, des fanzines, de la presse. Invisible. Il fut bien question dans les années 1990 d’une rumeur de rapprochement vers un label en vue, mais le temps a passé, le label a disparu et personne n’est vraiment plus là pour témoigner. Isolée, l’entité l’est aussi du public, si ce n’est une série de concerts mémorables en appartements au tournant des années 2000, dans une époque où personne n’était vraiment équipé pour immortaliser ces moments. Isolé et réticent jusqu’à l’obsession à se voir figé à jamais sur un support qui lui échapperait, le groupe, presque malheureux, doit bien se rendre à l’évidence que ses chansons lui échappent et circulent sous le manteau. Continuer la lecture de « Le plus simple appareil, Instant chaviré (Scum Yr Earth) »

Catégories chronique nouveautéÉtiquettes , , ,

Fange, Pudeur (Throatruiner)

« On m’a connu raseur de murs, lécheur d’ordures, gicleur impur. Fuyant les fastes comme la peste. Traître à ma caste. Cafard céleste. »

Si les temps obscurs que nous traversons pouvaient trouver une bande-son à leur mesure, parions qu’ils se pencheraient avec mansuétude sur l’œuvre de ce groupe de Rennes, Fange. J’ai croisé leur route à Molodoi à Strasbourg, l’année dernière, alors qu’ils se lançaient, minuit passé, dans un concert impressionnant de tension et de maîtrise. J’ai pris le train en marche (et un peu dans la figure) avec leur album Punir sorti aussi en 2019. Pudeur, son successeur, sort en ce moment (en vinyle le mois prochain, si on est pas tous morts d’ici là) et possède ce même pouvoir à absorber la lumière, l’espoir et les sentiments, et à les réduire à de simples et douloureux stimuli corporels, des coups d’électricité dans la nuque, des palpitations du tympan, des vibrations dans le ventre, des remugles dans les intestins. Continuer la lecture de « Fange, Pudeur (Throatruiner) »

Catégories chronique nouveautéÉtiquettes , ,

Cornershop, England Is A Garden (Ample Play)

De leurs débuts tonitruants dans les années 90 où ils brûlaient une effigie de Morrissey devant sa maison de disques – et devant les photographes des tabloïds anglais, à leur adoubement par le roi de l’Oasis, Noël Gallagher, en passant par le coup d’accélérateur donné à leur carrière par Fatboy Slim qui signait un remix de Brimful Of Asha, on pouvait aisément ne retenir qu’un énorme nuage de fumée épaisse, de la poudre de perlimpinpin pour un gogo indie (comme moi), des cônes d’encens pour touristes musicaux (comme moi). Cornershop, c’était et c’est évidemment beaucoup d’autres choses qui valent bien mieux que ce parcours en pointillé. Continuer la lecture de « Cornershop, England Is A Garden (Ample Play) »

Catégories chronique nouveautéÉtiquettes , , ,

Hémisphère Sud, H.S. (Another Record)

« C’est toujours toi le meilleur, surtout quand j’suis ailleurs, t’as toujours voulu tout savoir, j’ai plus qu’à m’camer et boire »

De leur nom pourrait naître un quiproquo rigolo et handicapant. S’agit-il d’une radio libre des années 80 spécialisée dans la sono mondiale ? Ou d’un groupe culte vite oublié des profondeurs du Top 50  ? Que nenni. Hémisphère Sud est bien un groupe tourangeau actuel, bien dans son époque, de toute façon, ici, on ne se moque pas des noms, pas du physique, pas de la famille. Continuer la lecture de « Hémisphère Sud, H.S. (Another Record) »

Catégories chronique nouveautéÉtiquettes , , , , ,

La Fresto, 22 222 (autoproduction) / Superbravo, Sentinelle (Fraca)

« On efface les chroniques et le passé est vierge, de ces coups de sangs critiques, des erreurs chronologiques, des labyrinthes tectoniques, des coups de balai sur les fondations, c’est une nécessité »

« Vois, tes mots me rendent meilleure »

S’il y a des artistes qui ne se posent pas de questions quant à la nature profonde de leur métier, voire de leur être, ce sont bien les ex-pensionnaires du label Lithium. Et si l’entreprise de Vincent Chauvier a fermé ses portes il y a un peu moins de vingt ans maintenant, les jeunes pousses grandies sous son aile ont depuis embrassé des carrières dont le moindre des soucis est justement leurs débuts tonitruants. Il y avait une vie après le label à l’empreinte historique, et Superbravo et La Fresto en sont la preuve. Et peu importe le degré de reconnaissance que chacun a rencontré, la musique était un choix non négociable, qu’elles qu’en soient les conséquences. S’il était dans les compétences d’un directeur artistique de ressentir ça chez une personne en devenir, l’urgence de la passion, ce dévouement à la vie à la mort, on peut dire que Vincent Chauvier s’est peu trompé. Voire jamais. Continuer la lecture de « La Fresto, 22 222 (autoproduction) / Superbravo, Sentinelle (Fraca) »

Catégories documentaire, festivalsÉtiquettes , , , , ,

FAME 2020 : Quatorze ans de Barbara Carlotti

Quatorze ans de Barbara Carlotti
Quatorze ans de Barbara Carlotti

« On connaît tous les arrangements de tous les morceaux, on connaît tous les enchaînements du DJ, on peut même jouer au guitar hero, on sait mimer les parties de synthé « 

Le plus court chemin, la fameuse voie du désir, du musicien vers le cinéma serait donc la comédie musicale, via le court-métrage. Barbara Carlotti passe derrière le miroir en adaptant sa chanson la plus imagée, en plus d’être la plus évidemment autobiographique : Quatorze ans est présente sur mon album préféré de la dame, L’amour, l’argent, le vent (2012) et raconte son adolescence passée à danser dans des petites boîtes de nuit de Corse. Continuer la lecture de « FAME 2020 : Quatorze ans de Barbara Carlotti »

Catégories chronique nouveautéÉtiquettes , , , ,

Flóp, Puissance, Racine (Les Disques Bien) / David Lafore, Incompréhensible (autoproduction / La Triperie)

« L’anarchie ne vaincra pas, l’anarchie a déjà vaincu, elle se loge dans chaque brin de chanvre  et dans les impétueux épis dressés au bord de ma calvitie et dans le repli de chaque chambre, c’est peine perdue »

« Non, ce ne sont pas les bons mots, ce ne sont pas les bons sons, pour moi, ces mots sont incompréhensibles »

Je sais combien il est ardu et plutôt sensible de toucher à la singularité d’un artiste, j’en suis CONSCIENT. Difficile donc, d’associer deux personnalités aux parcours si différents, aux chemins qui ne se sont à ma connaissance jamais croisés, si ce n’est le temps de cette chronique finalement dérisoire (quelques minutes de lectures au total). Bon, si j’écris contre le temps, contre le rythme de folie qui s’impose devant autant de musiques produites qui me touchent, je peux bien me mettre dans la mouise, pour une fois. Vous me pardonnerez ce rapprochement, et j’espère que les deux chanteurs le feront aussi.  Continuer la lecture de « Flóp, Puissance, Racine (Les Disques Bien) / David Lafore, Incompréhensible (autoproduction / La Triperie) »