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Gary Canino / Dark Tea : « La plupart des groupes ne réfléchissent pas assez à ce qu’ils font »

Gary Canino / Dark Tea
Gary Canino / Dark Tea

Les deux albums de Dark Tea – sobrement intitulés Dark Tea et publiés en 2019 puis en 2021 – font partie de ceux que l’on a découvert au fil des hasards et des clics intempestifs, comme on croise une silhouette inconnue mais curieusement familière. Une première impression de fraternité musicale qui s’est peu à peu confirmée au fils des écoutes – nombreuses, de plus en plus. Seul maître à bord, mais toujours bien accompagné – une bonne vingtaine de musiciens a participé à l’élaboration du second album – Gary Canino offre en partage ses pop songs toujours richement référencées, souvent un peu bancales et qui semblent investir de leur charme poisseux une sorte d’entre-deux musical aux multiples dimensions : un pied dans le classicisme passé, l’autre dans la modernité bricolée mais aussi à la recherche d’un équilibre transatlantique entre les continents où s’entremêlent racines américaines et britanniques. On en savait trop peu sur ce jeune auteur érudit – journaliste musical à ses heures pas si perdues – mais sincère, qui semble vaciller gracieusement à côté de ses chansons. D’où ces quelques questions auxquelles il a eu l’amabilité de bien vouloir répondre. Continuer la lecture de « Gary Canino / Dark Tea : « La plupart des groupes ne réfléchissent pas assez à ce qu’ils font » »

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Low, HEY WHAT (Sub Pop)

Dans mon quartier, enfin là où j’habite parfois, il y a une femme qui crie souvent, presque tous les soirs entre 21 heures et 23 heures, elle fait son apparition. On ne sait jamais si elle engueule quelqu’un en particulier ou l’humanité toute entière. Personne ne s’occupe d’elle, personne ne la rassure, personne, pas même la personne à qui elle semble s’adresser, personne ne fait plus attention à elle. Elle fait désormais partie du décor. Un décor permanent d’indifférence. Les raisons existent. On n’a pas à suppléer à la psychiatrie. On ne peut plus rien faire pour elle. Pis, on en a de moins en moins l’idée, ni le désir. En plus, les deux tiers de ce qu’elle émet est un sabir inintelligible que la colère n’arrange en rien. Continuer la lecture de « Low, HEY WHAT (Sub Pop) »

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Flowertown, « Time Trials » (Paisley Shirt Records)

Flowertown
Flowertown

Chez Flowertown, comme chez Cindy, les chansons tiennent d’un habile jeu d’équilibriste, à la limite entre la sensiblerie et la pure magie. Et il s’en faudrait peu que ces chansons « psychédélicates » (comme dirait Slumber Party) ne tombent du mauvais côté. Ce sont presque les mêmes qualités que l’on retrouve chez les deux formations de Karina Gill – ici pour la deuxième fois aux côtés de Mike Ramos de Tony Jay. Un filet de voix se marie idéalement à des reverb’ de guitares lo-fi et des mélodies s’insinuent dans les songes comme un souffle. Nombreux sont les groupes qui tentent cette alchimie en apparence évidente, où le peu qui est présenté se doit d’être irréprochable et où la moindre maladresse peut abattre entier le léger édifice… Pour tout dire, si peu y parviennent qu’on en oublie presque aussitôt tout ce qu’on écouté dans le genre depuis des années. Parfois, ce qui semble le plus fragile se révèle d’une solidité durable. Et surtout qu’on se méprenne pas, les dix titres de ce Time Trials paru le mois dernier chez nos amis Paisley Shirt Records sont bien plus qu’un aimable dérivatif dans l’attente du nouvel album de Cindy – dont on murmure déjà qu’il s’agit (aussi) d’un classique.

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New York, début septembre.

La valse des commémorations, de la tragédie du 11-septembre 2001 à la renaissance du 19 septembre 1981, lors du concert de Simon & Garfunkel à Central Park.

Paul Simon et Art Garfunkel à Central Park, le samedi 19 septembre 1981.
Paul Simon et Art Garfunkel à Central Park, le samedi 19 septembre 1981.

Cette semaine, inévitablement, commémore l’anniversaire des vingt ans des attentats du 11 septembre, et l’entrée dans un XXIè siècle qui, à bien des égards, ne tient que bien peu de promesses. Mais comme à New York, rien n’est jamais complètement gris, la ville célèbre également les quarante ans d’une forme de renaissance, personnifiée par un duo folk local reformé pour l’occasion, lors du concert de Paul Simon et Art Garfunkel à Central Park, le samedi 19 septembre 1981. Continuer la lecture de « New York, début septembre. »

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MUSICAL ÉCRAN 2021 : « Talking like her » de Natacha Giler & Adam Briscoe

Le destin de la poétesse folk américaine méconnue Connie Converse mis à jour dans un documentaire.

Connie Converse
Connie Converse

Pour les amateurs acharnés de folk lumineux et d’histoires de l’obscur, l’enquête est plutôt connue. Il y a plus de dix maintenant sortait d’un placard oublié How Sad, How Lovely de Connie Converse, une compilation de démos savoureuses et étranges enregistrées au mitan des années 1950 par l’illustrateur américain et collectionneur invétéré de disques de jazz Gene Deitch, qui, avant d’entamer une longue carrière dans les studios d’animation, s’était épris du talent singulier de Converse, rencontrée, presque par accident, par l’entremise d’un ami tête chercheuse de nouveaux talents. La sortie du disque près de 40 années plus tard eut un retentissement certain dû à la fois au charme incontestable des compositions de Converse, mais également à la découverte de son destin tragique. Déçue par son chemin de vie et par l’impossibilité de poursuivre ses passions, elle décida un beau jour de 1974 de disparaître complètement de la société des hommes. Continuer la lecture de « MUSICAL ÉCRAN 2021 : « Talking like her » de Natacha Giler & Adam Briscoe »

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MUSICAL ÉCRAN 2021 : « Freak Scene, the story of Dinosaur Jr » de Philipp Reichenheim

J. Mascis / Dinosaur Jr.
J. Mascis / Dinosaur Jr.

Dans le cas Dinosaur Jr., il y a ce que l’on sait, ce que l’on a entendu mais qu’il ne faut pas répéter (il est des choses qu’il vaut mieux conserver dans la sphère privée et merci bien), quelques légendes urbaines* qui n’entacheront jamais, au grand jamais, notre amour absolu pour l’un des groupes américains parmi les plus importants (voire nécessaire) de ces quarante dernières années. Ce documentaire assez complet n’aborde néanmoins qu’en filigrane les sujets qui fâchent, et tant mieux. La stature des trois compères y trouve enfin sa juste mesure, celle d’un groupe à la croisée des chemins. Car tout commence par la rencontre, au début des 80s de trois très jeunes nerds au front (souvent bas) du hardcore. Continuer la lecture de « MUSICAL ÉCRAN 2021 : « Freak Scene, the story of Dinosaur Jr » de Philipp Reichenheim »

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Arpanet, Wireless Internet/Inertial Frame (Record Makers/Bigwax)

Dans More Brilliant than the Sun (1), livre considéré comme culte et étude définitive sur l’afrofuturisme, le théoricien et critique Kodwo Eshun élabore la catégorie de « Sonic Fiction » pour rendre compte du potentiel narratif et fictionnel de tout un pan de la musique afro/anglo-saxonne. Du jazz à la Jungle, en passant par le Dub, le Hip Hop et bien évidemment la techno, autant de courants qui ont en effet pu participer à la configuration d’un continuum esthétique marqué par une grande tonalité SF et futuriste. Que l’on évoque les fantasmagories cosmiques et l’imaginaire spatial de Sun Ra, ou les assauts militaro-cyberpunks et militants du label Underground Resistance, la puissance de configuration fictionnelle portée par ces musiques apparaît comme l’une de leur caractéristiques essentielles. Continuer la lecture de « Arpanet, Wireless Internet/Inertial Frame (Record Makers/Bigwax) »

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The Strokes, Is This It (Rough Trade, 2001)

Il y a 20 ans jour pour jour sortait le premier album des new-yorkais.

Eté 2001, retour du classico Benicassim/Route du Rock pour rédiger un mémoire de DEA (MTV : Reflet ou création d’une jeunesse américaine ?) sur mon Imac turquoise, un an de travail délaissé pour la table du Pop In ou le dancefloor du Pulp à effectuer en trois semaines. Les affiches des deux festivals reflètent parfaitement l’époque, un mélange de passé et de présent, rarement de futur. Il y a des groupes « britpop » qui essaient coûte que coûte de se débarrasser de cette étiquette gênante, venus présenter sans enthousiasme « l’album de la maturité » (Pulp, The Divine Comedy), des routiers (Mogwai, Ash, James, Belle & Sebastian), des américains cultes (Big Star, Frank Black, Low, The Flaming Lips), des artistes « dépressifs » (Clinic, I Am Kloot pour les britanniques, Yann Tiersen et Françoiz Breut pour les bretons) et de sympathiques groupes électro-pop que les vingt dernières années auront presque effacé de la mémoire collective (Superheroes, Ladytron, Zoot Woman). L’excitation est plus à chercher du côté de la scène « électronique » (Basement Jaxx, The Avalanches, Freestylers) ou pour les amateurs du genre, des groupes rétro-pop espagnols qui ont le mérite de ne pas se prendre au sérieux et de s’habiller correctement. Les seuls non-ibères à cocher ces deux dernières cases sont les New-Yorkais d’Interpol, ravis d’être là alors qu’ils n’ont pas encore sorti d’album.
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