Nous gagnons New York en bus pour passer la semaine chez Stephanie et David, qui habitent un appartement modeste de Brooklyn : manger, boire, discuter, rire. Ils ont vu Bikini Kill la semaine précédente, nous nous extasions à propos du Weyes Blood récemment sorti, nous vaquons, eux à leur travail, Maggie parfois au sien, moi à la découverte de la Grosse Pomme, parfois seul donc, le plus souvent avec elle. Continuer la lecture de « Big Thief, ou comment rencontrer son groupe préféré à 38 ans (4/7) »
(You’ll be riding that train in late June / With the windows wide by your side)
Tôt le jour suivant la fin de Tinals, direction Marignane avant de monter dans un premier avion pour Paris, puis un deuxième pour Atlanta, puis enfin un troisième jusqu’à Charleston, Caroline du Sud. Nous nous rejoignons là-bas, Maggie – partie quelques jours auparavant – et moi, afin de passer une première partie de nos vacances avec sa famille, qui loue une maison dans le coin tous les ans – ils sont de l’Ohio. Continuer la lecture de « Big Thief, ou comment rencontrer son groupe préféré à 38 ans (3/7) »
Un festival est une cérémonie, car il est une occasion du sacré.
C’est très important. Pas : très sérieux. Non, très important.
Depuis les Rock au Max clermontois du siècle dernier, depuis l’an 2000 et un premier Benicàssim, chaque année sans festival constitue une année moindre, parce que la vie change alors mieux qu’ailleurs.
En tant que récent Nîmois, Tinals représente un rêve réalisé, celui de dormir dans son lit après les effusions de la meilleure programmation indie de la saison, entre confidences et têtes d’affiche. Et on retrouve des trognes de nos petites internationales du goût, on en rencontre d’autres, on sourit et on danse beaucoup, on dodeline ou on crispe la mâchoire autour d’une cigarette en traversant les plus brutaux des émois, c’est selon et à la discrétion de chacun. Continuer la lecture de « Big Thief, ou comment rencontrer son groupe préféré à 38 ans (2/7) »
Printemps 2019. Depuis quelques semaines, les trajets entre Arles et Nîmes ont définitivement remplacé ceux entre Arles et Marseille. La vie est dans la même gare, mais sur un autre quai, pour une autre direction. Et je me revois, sur ce quai, lire après une journée de travail un message de Zach : “Le nouveau Big Thief est une merveille, il me fait penser àBerlin[de Lou Reed]”, ou “En parlant de Berlin, il faut écouter le nouveau Big Thief”, je ne sais plus, ça devait être mieux tourné que ça, il tourne mieux ses phrases. Je sais cependant, je me souviens qu’il m’a d’abord vendu l’affaire, en filou, en passant par un de mes talons d’Achille, Berlin, un du genre copie cassette essorée dans les bus du collège puis du lycée. C’était il y a plus de vingt ans, et c’était à ce point. Les écoutes obsessionnelles, favorisées par l’adolescence et par ses trajets faiblement sociaux selon l’individu, son adaptation, sa chance. Et connaissant Zach, et sachant comme il me connaît, je comprends que ce disque de Big Thief est à considérer attentivement. C’est ce qui est dit dans sa phrase.
En découvrant U.F.O.F. pour la première – mais aussi pour la deuxième et la troisième fois – on est d’abord saisi de l’envie irrépressible d’en interrompre le déroulement pour trouver refuge dans l’écoute d’une une copieuse compilation d’Emmylou Harris – Anthology : The Warner/Reprise Years (2001), pour être précis. Cette impulsion ne relève évidemment pas de ces associations formelles par lesquelles les échos des œuvres passées en viennent à résonner ostensiblement dans les prolongements actuels de leur descendance assumée. Au contraire. C’est plutôt que la fréquentation prolongée des vocalises éthérées d’Adrianne Lenker suscite, par contraste, le besoin impérieux de se confronter à une version infiniment plus incarnée de l’humanité. Continuer la lecture de « Big Thief, U.F.O.F. (4AD / Beggars) »
Quand Aldous Harding mentionne le besoin d’un tatouage dans Pilot, l’avant-dernière chanson de son nouvel album Designer, c’est afin de se cacher, de se procurer un abri. L’envie est forte de lui faire parvenir une carte postale rassurante au dos de laquelle serait écrit : « Vous n’avez besoin d’aucun tatouage pour vous dissimuler, votre disque suffit. Bien amicalement. » On avait fréquenté la Néo-Zélandaise il y a deux ans grâce à Party, disque suffisamment émietté et habité – contrastes, bruits, respirations –, suffisamment bizarre et fragile pour le laisser s’insinuer durablement. Continuer la lecture de « Aldous Harding, Designer (4AD) »