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Les amours polychromes

« Closer To Grey » des Chromatics
Impressions sur l’album et les premières dates du « Double Exposure Tour »

Chromatics
Chromatics à Anvers, mardi 29 Octobre / Photo : Thomas Bartel

A une époque lointaine où les robinets digitaux ne déversaient pas encore tous ces flots tiédasses de pop consommable et sans avenir, la sortie d’un album en bonne et due forme faisait figure d’événement. Attentes fébriles, spéculations insensées, fantasmes comblés ou déçus à replacer dans le contexte d’une discographie… Tous ces liens intimes que l’on nouait avec un artiste ou un groupe sur le temps semblaient depuis une bonne décennie totalement révolus au profit de l’instantané, du zapping accéléré, du streaming algorythmé, de la consommation jamais satisfaisante d’une musique consommée comme une fast food dont on n’est, à dessein, jamais rassasié. Avec l’éclosion de son label Italians Do It Better à la fin des années 2000, Johnny Jewel (de son vrai nom John Padget) comptait bien remettre quelques jetons dans une machinerie electro pop qui montrait de sérieux signes d’essoufflement. Naviguant alors sans boussole dans la scène underground de Portland avec ses deux groupes Chromatics et Glass Candy dont le line-up n’était pas encore fixé, Johnny Jewel rêvait de retrouver l’esprit d’indépendance, la sève artistique et l’identité graphique des labels cultes (K Records, Factory, 4AD) qui ont façonné son imaginaire musical jusqu’à l’obsession. Continuer la lecture de « Les amours polychromes »

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Playlist : Johnny Jewel

Spéciale Chromatics

Johnny Jewel

Johnny Jewel, cerveau fou derrière Chromatics et un certain nombre d’autres formations, à travers 20 titres phare piochés le long de ses vingt ans de carrière. Continuer la lecture de « Playlist : Johnny Jewel »

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Mixtape Section26 #5 : Chevalrex

Chevalier intrépide d’une pop luxuriante et précieusement ourlée, l’homme orchestre Remi Poncet œuvre sous le patronyme de Chevalrex depuis trois albums déjà. Amiral Pop, son dernier EP sorti ces jours-ci, composé de quelques brillants inédits tirés des sessions d’enregistrement d’Anti Slogan (Vietnam / Because, 2018), se situe plus que jamais « entre symphonies de poche, chansons fines, confidences et lyrisme », marquées par de belles mélodies qu’on jurerait labellisées du sceau de Lithium. Pour section26, il s’est attelé à une sélection à son image : sensible, solaire et subtil. Comme le disait un jour Sing Sing (du groupe Arlt) à son sujet : « Un idéal pop entre Boris Vian, Jonathan Richman et Andy Kaufman ». Continuer la lecture de « Mixtape Section26 #5 : Chevalrex »

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Froth : L’esprit clair

Froth
Joo Joo Ashworth, Jeremy Katz et Cameron Allen / Photo : Jeff Fribourg

En juin dernier, alors que Froth récidivait avec son quatrième album Duress, je tentais d’expliquer dans une chronique apologique pourquoi la musique du trio californien dépassait, une fois de plus, mes plus hautes espérances. C’est à la fin de l’été que j’ai eu la chance de retrouver Joo Joo Ashworth, Jeremy Katz et Cameron Allen pour une interview montre en main– 10 minutes, ni plus ni moins –, dans les loges du Point Ephémère. Dans l’assourdissement de cet espace confiné, accolé à la salle de concert de laquelle suintait le son des guitares slacker d’Hoorsees (première partie de choix ce soir-là), Joo Joo Ashworth a confirmé son penchant geek pour les synthétiseurs, accepté de discuter un peu de mon auteur préféré, et éclairci le mystère du tag Bandcamp.

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Yolande Bashing, Yolande et l’amour (Bruit Blanc)

Yolande BashingIl y aurait un arbre généalogique à dessiner de ces descendances de garçons solitaires qui s’entourent de peu pour délivrer au monde leurs sentiments, souvent dans un geste d’apparence crue et frontale : peu de mots, peu d’instruments, peu d’espoir pour peu de musique ? Peut-être. Mais depuis le début du siècle, des fins fonds des squats de zones industrielles (Noir Boy George) aux journaux à la page (Thousand), une vague froide déboule (et tabasse tout ce qui bouge) avec une musique à leur image, qui a de quoi affoler le territoire et qui s’appuie sur quelques basiques identifiés.  Continuer la lecture de « Yolande Bashing, Yolande et l’amour (Bruit Blanc) »

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Selectorama : Théo / La Veillée Pop

Théo / La Veillée Pop
Théo / La Veillée Pop

La Veillée Pop est une nos associations d’organisation de concerts favorites. Depuis quelques temps, elle souffle un vent frais et pop dans des salles comme l’Espace B, la Boule Noire ou au QG Le Motel. Grâce à ses membres, nous avons pu voir à Paris des groupes comme Triptides, Sugar Candy Mountain, Ojard, Astrobal, Jonathan Personne, Lemon Swell, La HouleBiche, Levitation Room, Good Morning TV ou encore Mauskovic Dance Band. Demander un Selectorama à Théo, co-fondateur et disc-jockey de La Veillée Pop était une évidence, ses goûts  – de l’indie en passant par la house ou les curiosités funky chinées en brocantes – éclectiques, pointus et subtils ne pouvaient qu’attirer notre attention. Continuer la lecture de « Selectorama : Théo / La Veillée Pop »

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De l’importance d’être prétentieux

Combien d’auteurs énoncés dans « The Booklovers » de The Divine Comedy avez-vous réellement lu ?

The Divine Comedy
Illustration : Mathieu Persan pour https://www.theretrocomedy.com/

Aussi incroyable que cela puisse paraître, fût une époque où apparaître cultivé, voire franchement prétentieux, était une arme de séduction, aussi bien chez les filles que chez les garçons. Conséquence directe d’une adolescence solitaire (et d’un physique parfois ingrat), passée à lire Oscar Wilde, Salinger ou Françoise Sagan, à regarder des classiques hollywoodiens ou des films de la Nouvelle Vague, cette revanche des « eggheads » initiée en partie par Morrissey trouva pleinement écho dans la musique de nombreux groupes des années 90, qui de Pulp (« We learned too much at school », Mis-Shapes) aux Manic Street Preachers (« Libraries gave us power », A Design For a Life) en passant par Belle & Sebastian, revendiquèrent pleinement ce snobisme intellectuel et firent du droit à la culture une revendication quasi-politique, avec une naïveté parfois touchante.

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Migala : Chanter les langues

Migala
A Mojácar, pendant l’enregistrement de « Asi Duele Un Verano » de Migala / Photo : Diego Yturriaga

Quand on constate qu’un groupe qui a touché notre cœur a su en toucher d’autres, on se réjouit. Parfois, un groupe touche beaucoup de cœurs, et on craint alors, parfois, qu’il en touche trop, parce qu’on serait alors, peut-être, un peu moins soi, un peu plus anonyme. Peut-être, pourtant, que ce groupe a su toucher quelques universaux plus partagés que d’autres universaux, ou plus d’universaux qui font somme, et que ce n’est pas grave finalement. Continuer la lecture de « Migala : Chanter les langues »