KCIDY, Les Gens Heureux (Vietnam)

L’histoire de KCIDY et celle de Section26 se croisent décidément souvent. En décembre 2019, nous organisions un concert à feu l’Espace B au lendemain de l’annonce de sa signature sur le label Vietnam (H-Burns, O, Chevalrex). Passée par Tôle Froide, membre de Satellite Jockey, la musicienne lyonnaise Pauline Le Caignec construit patiemment une solide discographie en solo. Après un premier album chez AB Records en 2017, elle publie, deux ans plus tard, Kcidy a dit, un passionnant projet collectif accompagné de la salle de spectacle du Confort ModerneLes Gens Heureux, nouvel album de l’intéressée, prouve qu’il est encore possible de découvrir de la musique selon le rite immémorial d’un passage chez le disquaire.

KCIDY
KCIDY

En deux-trois chansons, j’en savais suffisamment pour repartir avec le vinyle. À l’époque du tout dématérialisé, il est rafraichissant de pouvoir encore découvrir, de temps en temps, des albums parce qu’ils sont joués dans une boutique ! La bonne impression s’est muée en révélation après plusieurs écoutes. Les Gens Heureux est un disque de pop enthousiasmant. Malines et élégantes, les compositions de KCIDY embrassent le français avec naturel, sans jamais forcer le trait. Surtout, la musicienne aborde la pop spontanément, sans se poser de questions, en y allant avec ses tripes. Il en résulte un disque sincère, puissant et profond. À l’opposé de l’eau tiède parfois déversée ailleurs, Les Gens Heureux est un torrent qui vous saisit. L’album s’immisce en catimini dans les méandres de votre cerveau. Les influences sont pourtant assez lisibles. Elles comptent, entres autres, Broadcast et Stereolab. Les Gens Heureux a aussi une évidente appétence pour les années soixante et soixante dix. L’omniprésence de mellotron, clavecin, orgue à transistor, donne une touche très pop psychédélique britannique (The Zombies, Pink Floyd, The Pretty Things, The Beatles etc.) à l’ensemble. Les Gens Heureux croisent aussi le chemin distingué de Wendy Carlos (l’introduction des Rigolos), des Doors (le solo d’orgue de Souterrains) ou d’Ennio Morricone (Les Gens Heureux Dansent, Larmes de Croco). KCIDY se sert de toutes ces références comme autant de couleurs. Sa proposition dépasse en effet l’exercice de style stérile. Ici tout est incarné, juste, sans aucune déférence compassée vis à vis des aînés. Les clins d’œil amènent un soupçon de fantaisie sans nous éloigner du propos, tout à fait moderne, lui. Le coté rétro n’a alors rien de passéiste, Les Gens Heureux est au contraire une célébration de la puissance de la musique pop, de son art éternel. Pauline Le Caignec oscille ainsi entre l’intime et l’universel, la beauté des mélodies et la richesse des arrangements. Accompagné de musiciens qu’elle connaît bien (Rémi Richarme, Mathias Chirpaz, Florian Adrien, François Virot et Amélie Lambert), KCIDY signe un des plus beaux albums de pop française de l’année, un vrai souffle de vie dans cette période troublée. Cela fait du bien.


Les Gens Heureux de KCIDY est disponible chez Vietnam.

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