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Steely Dan, Aja (1977, ABC)

Détesté ou adoré, tout le monde, ou presque, a son avis sur Aja (1977) de Steely Dan. Disque par excellence pour tester sa chaîne hi-fi haut de gamme, l’album synthétise son époque, dans ses excès, ses folies mais aussi sa grandeur. Il marque le zénith d’une approche perfectionniste jusqu’à la maniaquerie du studio, devenu principal médium d’expression pour Walter Becker et Donald Fagen. Aja de Steely Dan est, en effet, aux années soixante-dix ce que Pet Sounds des Beach Boys est à la décennie précédente : un remarquable concentré de savoir-faire condensé en moins de quarante minutes par des musiciens aussi doués qu’obsédés. Continuer la lecture de « Steely Dan, Aja (1977, ABC) »

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Delphine Dora, L’inattingible (Three:Four)

« Comment décrire
ce qui ne nous est jamais apparu ? »

Il est des disques – L’inattingible est sorti l’hiver dernier, une éternité – qui mettent du temps à se révéler, auxquels on s’accroche sans trop savoir pourquoi, puis qui tombent comme une évidence quand on pense à nos satanés bilans de l’année. Il est des disques qui ne se présentent pas avec le mode d’emploi, qui ne sont pas là pour vous prendre par la main. Ou plutôt si, pour vous amener en pleine forêt et vous y abandonner, comme un Petit Poucet, privé de cailloux et d’encyclopédie du rock. L’inattingible est de ceux-là, et si comme moi, votre vocabulaire est légèrement allergique aux termes à la mode, genre sorcière, il va falloir creuser un peu pour décrire ce qui vous met en joie en cette fin d’année magnifique par la densité en propositions musicales d’ici hors du commun. Continuer la lecture de « Delphine Dora, L’inattingible (Three:Four) »

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Une brève histoire du Shoegaze

Shoegaze

Le terme Shoegaze vient d’une pique de journaliste constatant que les groupes d’alors regardaient plus l’étrange ballet de leur pieds sur leurs pédales d’effet que leur public. Ou comment en plusieurs décennies, on est passé de la science des effets à l’effet de mode d’un revival constant. Il y a les incontournables (My Bloody Valentine, Ride, Slowdive) et puis il y a les autres, ceux de l’époque dont l’histoire a vaguement retenu les qualités (Swervedriver, Lush) ou qu’elle a préféré jeter, souvent à raison, aux oubliettes (Chapterhouse, Catherine Wheel, Adorable). Et puis il y a ceux qu’il faut en toute subjectivité, redécouvrir. Continuer la lecture de « Une brève histoire du Shoegaze »

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Le club du samedi soir #29 : Le Japon, l’autre pays du shoegaze (2003 – 2020)

Je me souviens de la première fois que j’entendais ces vagues de riffs évanescents, sonnant comme une sirène d’alerte au tsunami, et cette batterie qui arrive au moment où l’on s’y attend peut-être le moins. C’était à la fin du mois de février 2019. Encore inscrit sur cette célèbre application de dating infernale jusque dans son logo, j’accueillais ce soir-là dans mon petit appartement à deux pas de la Maroquinerie une charmante jeune fille. Après avoir dégusté les falafels décevants du Libanais d’en face, nous en venons naturellement, au regard de la décoration dudit appartement faite de piles de vinyles, de setlists collées au mur et de guitares qui prennent la poussière, à causer musique. C’est ainsi qu’on entame mon activité de rendez-vous galant favorite : un son par personne, et on alterne. L’invitée étant reine en mon domaine, je la laisse inaugurer l’exercice.


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Année Zéro – Vladimir Maïakovski, Julien Gasc, Joseph L. Mankiewicz

Collage sauvage et de mauvaise foi de l’actualité culturelle de la semaine

Gene Tierney
Gene Tierney dans « The Ghost and Mrs. Muir » de Joseph L. Mankiewicz (1947)

Le compte à rebours des années s’est donc brutalement arrêté. 2020, année zéro. On aura tous notre rapport intime avec cette pelletée de mois obscurs et indomptables. À contre courant, ce fut pour moi l’année d’une naissance – mon fils – et celle d’une renaissance, la mienne. Et derrière les volets clos et autres enfermements involontaires, au fil de ces jours où il a bien fallu se réinventer, j’ai réappris à connaitre la joie. Année zéro, celle d’un nouveau départ et d’un nouvel horizon. Cet affichage libre sera celui d’un bilan. Continuer la lecture de « Année Zéro – Vladimir Maïakovski, Julien Gasc, Joseph L. Mankiewicz »

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Nos reprises inédites du jeudi, un florilège.

Visuel : Pauline Nuñez
Visuel : Pauline Nuñez

Série à la périodicité (parfois) hasardeuse, notre Jeudi Cover nous tient beaucoup à cœur. Elle nous a paru comme une évidence à la suite de Approaching Perfection, l’album hommage que nous avons spontanément initié à la mémoire de David Berman. Ainsi, chaque semaine, nous tentons de publier une reprise inédite d’un artiste que nous aimons en lui laissant un choix total sur l’objet, la fin et les moyens. Étonnamment, et malgré la somme de travail que cela représente, de nombreux musiciens se sont déjà pliés au jeu en rendant leur version d’une chanson qu’ils admirent – probablement parce que ces derniers, comme nous tous, ont découvert des artistes par l’intermédiaire d’adaptations de chansons méconnues. Cette chaine nous semble l’une des plus belles qu’a offerte la pop depuis ses début et demeure à nos yeux un perpétuel sujet d’émerveillement. Voici donc quelques exemples de notre modeste contribution à cette grande histoire de transmission en 22 morceaux choisis.

Avec Matt Fishbeck (Joy Division), Christian Quermalet / Matthieu Malon / Nicolas Falez (Silver Jews), Joseph Fisher (Dame Vera Lynn), The Reds, Pinks & Purples (Monkees), Bill Baird (Gainsbourg), Ela Orleans (Jacno), Radio Hito (Brigitte Fontaine), eGGs (Television Personalities), Matt Fishbeck (Durutti Column), Sinaïve (Curtis Mayfield), Elg (Jim O’Rourke), The Stroopies (Wire), Julien Gasc (The Moments), Manson’s Child (Television Personalities), Herman Düne (Valerie June), R E Seraphin (Wipers), Vika Orline (Etienne Daho), Kim (Section 25), Bernardino Femminelli (Régine), Samara Lubelski (Love), Renard Empaillé (Mariah Carey).

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Porteuse d’eau

Anne Sylvestre
Anne Sylvestre, mars 1963.

Celle qui a chanté, deux ans avant la loi Veil, l’absence de mots pour dire la chair, avait un nom. Le nom des bois et des choses sauvages. Elle avait aussi un nez « trop » grand, une frange « trop » longue et portait de larges robes afghanes. Elle était de celles qui refusent le jeu de la séduction et la soumission aux codes masculins. Elle était aussi une des premières autrices-compositrices-interprètes dans un paysage essentiellement moustachu. Éduquée au maniement de la voile, au respect des éléments, timide mais tenace, Anne Sylvestre écrivait pour les gens qui écoutent leur cœur se balancer au rythme de leurs sensations, de leurs émotions. Elle composait pour ceux qui comprennent les bruits infimes des grelots, elle était une femme, amoureuse, désirante, gémissante, ensorceleuse, une femme qui cherche un mur pour pleurer et finalement une mère fabuleuse. Continuer la lecture de « Porteuse d’eau »