Franz Ferdinand, darts entertainment !

Franz Ferdinand
Franz Ferdinand

Je me souviens du choc. Un matin d’automne avec les rues encore noires, à l’époque parisienne où la cigarette précédait le plus souvent le café, à l’époque de la télé qu’on allumait parce que M6 (je crois que bien que c’était M6) diffusait des clips de groupes indie – enfin, à peu près – avant de partir travailler – enfin, travailler… Ce matin-là donc, j’ai entendu la guitare avant de voir les images et je suis resté interdit. Parce que tout est venu se bousculer et les souvenirs se sont succédés en flash – pêle-mêle, l’école Postcard Records, les montagnes russes rythmiques chères à Orange Juice, à Josef K, l’adolescence dans la Résidence, les cassettes vierges, les échanges de disques achetés à Paris – grâce à une mélodie en caoutchouc et un refrain suffisamment obsédant pour qu’on veuille réécouter la chose. En boucle. La suite de l’histoire, qu’on découvre vitesse grand V, est comme parfaite : Glasgow, Domino, une ribambelle de chansons fulgurantes en mode Dorian Gray, l’influence du constructivisme russe et même le passé d’Alex Kapranos – qu’on découvrira sur le tard — n’a pas freiné l’excitation accompagnant cette découverte qui rappelait – déjà à l’époque – qu’on n’était toujours pas prêt / près de ne plus avoir 20 ans – ça n’a toujours pas changé depuis, pour le meilleur et pour le pire…

Ensuite, sans doute dans le désordre, il y a eu un concert au festival des Inrocks en novembre 2003 et puis une soirée sur une péniche parisienne où le groupe devait faire office de DJ mais avait oublié ses disques – alors, Christophe et / ou Mathieu du label français Domino m’avait demandé si je pouvais piocher dans les miens, ce que j’avais bien sûr accepté non sans une petite pointe de fierté (je crois que j’avais pris du Elvis, du Blondie, du Orange Juice, du Altered Images, parmi quelques autres)… Franz Ferdinand est devenu une des marottes de la rédaction de la RPM et Auf Achse, sans doute l’un des titres qui a le plus tourné dans les locaux – il semble me souvenir que nous avions une fâcheuse tendance à l’obsession avec certaines chansons. En l’espace de quelques mois, en 2004, nous avions même réalisé deux couves avec le groupe, mais pas pour les mêmes raisons. On a aimé la francophilie du batteur Paul Thomson, sa passion pour Poni Hoax, son label New!, les projets parallèles (Box Codax de Nic Mc Carthy, parfait !), on  les a suivis à la trace au moins jusqu’au troisième album, pour lequel, sur l’insistance pertinente de Faustine K., on a réalisé un hors-série parce qu’on aimait raconter des histoires et que les histoires de Franz Ferdinand étaient vraiment chouettes – en plus de leurs chansons qui quand même, faisaient rarement le déplacement pour rien : Eleanor Put Your Boots On, Can’t Stop Feeling et quelques autres.

Et puis sans raison – ou pour trop de raisons –, j’ai perdu un peu le fil, appris le départ de Nick McCarthy, entendu des nouvelles chansons ici et là, trouvé chouette la collaboration avec Sparks – bien des années après Lio et les Mitsouko mais avant Leos Carax, hein – et même vu un chouette concert dans la fournaise du mois de juin 2019, à Europavox… Vendredi 11 mars dernier, (18 ans sans doute presque jour pour jour après la sortie du n° 78 de la RPM), Franz Ferdinand devenu quintette, mixte et avec deux de ses membres originaux (Alex Kapranos et le bassiste discret Bob Hardy) a sorti une compilation, qui résume un peu tout ça et revient forcément sur les débuts tonitruants. Des débuts qu’on avait raconté comme ça…


La mission pourrait sembler d’une simplicité absolue. Mais, en fait, elle est d’une terrifiante complexité. “Faire une musique qui donne l’envie aux filles de danser”. Tel est l’objectif que se sont fixé les quatre membres de Franz Ferdinand, il y a à peine deux ans. Aujourd’hui, ces drôles de gars sont pourtant bel et bien en passe de rafler la mise. Sexy, groovy, excitantes, flamboyantes, référencées, insensées, telles sont les chansons du premier album de ce quatuor improbable, investi, presque malgré lui, d’une mission fondamentale : redonner à la pop ses lettres noblesses. Plus doués que les Strokes, plus fédérateurs que les Doves, plus vicieux que Kylie Minogue et Beyoncé réunis, Alex Kapranos, Nicholas McCarthy, Bob Hardy et Paul Thomson arrivent à point nommé pour tenter l’impossible : redonner tout son lustre au statut de star, sauver une industrie qui décrépit. Ils forment le groupe de toutes les générations, ils sont la raison, définitive, pour tomber en pâmoison. Franz Ferdinand : la seule bonne raison qui donne, pour une fois, une très sérieuse envie de réécrire l’Histoire.

Franz Ferdinand
Franz Ferdinand

Au Royaume-Uni, ils sont déjà stars. Ou peu s’en faut. Mais, comme chacun sait, la vérité d’un pays n’est pas celle de son voisin. En France, les quatre jeunes hommes de Franz Ferdinand ne font même pas figure d’outsiders. Ce sont seulement des inconnus. Pourtant, avant même la sortie de son premier album, et alors que ses deux singles, Darts Of Pleasure et Take Me Out, ont été distribués ici en catimini, le groupe a été convié à participer à Trafic Musique, l’émission animée par Guillaume Durand, aux côtés de, excusez du peu, Placebo, Jean-Louis Murat et Étienne Daho !

Le genre de nouvelles qui auraient tendance à nous réconcilier avec le service public, à laisser espérer que – enfin –il renoue avec son esprit de découverte, laisse une (aussi petite soit-elle) place à de “vrais” artistes en devenir, fasse preuve de curiosité, de culot et de classe. En résumé : qu’il fasse son putain de boulot. Et puis… Et puis, on arrive dans ces immenses studios nichés à la Plaine Saint Denis, où sont produites peu ou prou tous les programmes de variété – et autres – qui monopolisent le petit écran. Et l’on déchante. Un peu. Mais on rigole, aussi. Beaucoup. Énormément même. Une hilarité qui se métamorphose bientôt en un fou-rire inextinguible… Pourquoi ? Parce que nos quatre citoyens Britanniques bénéficient, pour pouvoir se détendre entre leur balance et le tournage de l’émission, non pas d’une, mais bien de deux (2 !) loges. Un vrai luxe, d’ordinaire réservé aux grosses pointures. Aux vraies vedettes. Un luxe, surtout, qu’ils n’auraient jamais dû goûter. Pour élucider un tel mystère, il suffit alors de jeter un coup d’œil sur les bandeaux en papier scotchés à la va-vite sur les deux portes rouges. Sur le premier, on peut lire : “Franz Ferdinand”. Sur le second : “Les musiciens de Franz Ferdinand”. Rien à ajouter, si ce n’est peut-être un soupir désabusé. Certes, cette petite erreur n’a rien de grave en soi… Mais elle vient juste démontrer deux choses : un désintéressement total de la chose historique, et des événements liés à la Grande Guerre en particulier, et surtout, un manque de professionnalisme ahurissant, démontré par le fait que personne n’a été fichu de prendre les renseignements les plus élémentaires au sujet de ces invités-surprise. Mais ces derniers sont loin de s’en formaliser, questions d’éducation et de mentalité obligent. Le chanteur-guitariste Alex Kapranos – mèche impeccablement peignée, visage anguleux, faux-air d’aristocrate déchu – et son acolyte Nicholas McCarthy – frange brune, amateur de chemises rayées, de mocassins bicolores et sourire permanent accroché aux lèvres – sont vraiment loin d’en tenir rigueur à leurs hôtes d’un jour. “De toute façon, nous avons usurpé cette identité”, explique le premier, malgré une voix fragilisée par une récente tournée britannique. “D’ailleurs, un jour, peut-être qu’en entendant ce nom, les gens ne penseront plus à cet Archiduc dont le meurtre fut le détonateur de la Première Guerre Mondiale (ndlr. François-Ferdinand, successeur au trône d’Autriche, a été assassiné le 28 juin 1914, lors d’un voyage à Sarajevo, par une organisation secrète serbe, La Main Noire), mais à quatre types qui se sont rencontrés à Glasgow et ont formé un putain de groupe. Je sais, c’est un sacré objectif, mais il faut bien s’en fixer… Et plus ils sont hauts, plus ils sont intéressants à relever”. Il sourit. Ses yeux pétillent. Visiblement, pas la peine d’être fin psychologue pour comprendre qu’Alex Kapranos n’est pas homme à baisser les bras devant l’ampleur d’une tâche…

Il y a encore dix-huit mois, le nom de Franz Ferdinand n’apparaissait que dans les manuels d’Histoire britannique. Aujourd’hui, il orne les pages et unes des journaux spécialisés, des magazines branchés, des quotidiens. Il est sur toutes les lèvres. Take Me Out, deuxième single aventureux et déstructuré, vicieuse alliance entre rythmique groovy et rock plaintif, a fait une entrée fracassante à la deuxième place des charts nationaux. Partout où il se produit, le groupe remplit les salles, doit rajouter des dates pour faire face à la demande. Encore un peu et la Prude Albion va plonger tête la première dans la Ferdinandmania. “Tu vas un peu vite en besogne, non ?”, relativise Alex. “En fait, on ne s’en rend même pas compte. Enfin, pas vraiment. Je ne lis pas la presse, ou très peu… Ce sont mes parents qui me tiennent au courant. D’ailleurs, ça devient même surréaliste : un jour, mon père m’appelle et commence à me parler de… post-punk parce qu’il avait vu ce terme utilisé pour décrire notre musique !” Nic se marre dans son coin. Son collègue reprend. “Par rapport à ce qui se passe actuellement, on a l’impression que tout arrive naturellement, graduellement même”. Ah bon ? Rapidement serait un terme sans doute plus approprié. Son premier concert, Franz Ferdinand l’a donné le 22 mai 2002 dans le salon d’une de ses copines, Celia Hempton, désormais condamnée à passer à la postérité. “On n’avait que quatre morceaux”, explique Nic. “Mais les gens ont tellement bien réagi qu’on a dû les rejouer. Cela dit, c’est vrai qu’ils n’étaient pas mal, puisqu’ils se retrouvent tous sur l’album !. Le groupe existait depuis à peine quatre mois. Alex a d’abord dû convaincre Bob Hardy, visage poupon et alors étudiant aux beaux-arts de Glasgow, d’apprendre à se servir de la basse que lui avait passé l’un de ses copains, un certain Mick Cooke de Belle & Sebastian. “En fait, lui voulait ne se consacrer qu’à la peinture. J’ai donc dû le persuader que la musique aussi était une forme d’art, que l’art n’est rien d’autre qu’une manière de s’exprimer”. Seul Écossais de souche, Paul Thomson – fine moustache et une tête à tenir l’un des premiers rôles dans une nouvelle version de l’inquiétant long métrage Delivrance – avait une envie énorme de montrer enfin au monde son agilité derrière une batterie. Enfin, Nic. Après une enfance et une adolescence passées à Munich – où il a étudié la musique classique –, il décide un beau jour de s’installer à Glasgow car “un ami allemand m’a juré que c’était une ville très amusante”. Il a rencontré Alex en tentant de lui subtiliser une bouteille de vodka lors d’une soirée. “D’abord, on a failli en venir aux mains. Et puis, nous avons décidé de rester civilisés, nous avons discuté et l’on s’est vite rendu compte que l’on avait quelques goûts en commun. Alors, on a fini par partager la bouteille…”

Franz Ferdinand
Franz Ferdinand

De la bouteille, ces quatre jeunes gens ont dû en prendre en l’espace de quelques mois. Avec peu de moyens mais beaucoup d’idées, ils se sont d’abord appliqué à se tailler une belle réputation à Glasgow, en investissant une sorte d’entrepôt désaffecté, qu’ils vont dans un premier temps utiliser comme local de répétition puis comme lieu de “spectacle”. À l’instar de la Factory new yorkaise – Nico et Edie Sedgwick en moins –, cet endroit sobrement baptisé The Chateau se transforme en salle de concert, d’expo, de projection. Le bouche-à-oreille fonctionne à merveille, Franz Ferdinand (ré)suscite de plus en plus de curiosité, apprend sur le tas, et devient la nouvelle sensation locale. Puis viennent les prestations à Londres. Une première. Une seconde. Une troisième… “Et un jour, on s’est retrouvé sur scène à jouer devant quarante directeurs artistiques… On n’a rien compris ! Certains tenaient leur portable à bout de bras, pour faire écouter à leur boss en même temps. On avait l’impression d’assister à une vente aux enchères… Le problème, c’était que nous étions les objets mis à prix”, se rappelle Alex, décidément très loquace. C’est finalement l’indépendant Domino qui remporte le morceau. “Lawrence Bell est le seul qui n’a pas essayé de nous impressionner en nous emmenant dans un restaurant ultrachic. En fait, il nous a préparé à dîner chez lui, son attitude et son discours nous a plu, nous avons compris que nous partagions beaucoup de choses. Il n’en fallait pas plus”.

Franz Ferdinand est un drôle de groupe, doté d’un talent ahurissant et animé d’une philosophie élémentaire. Oui, ces quatre garçons ont fixé des règles. Et ils entendent bien les respecter. “Oh, ce n’est pas grand-chose”, laisse entendre Nic. “Mais, il faut que l’on s’y tienne”, reprend Alex qui, s’il aime à insister sur l’aspect démocratique permettant au groupe de fonctionner, prend de plus en plus les traits d’un leader. “D’abord, on s’astreint à se poser toujours la même question avant d’accepter ou de réaliser quelque chose : ‘Est que l’on s’amuse en faisant ça ?’ Jouer un solo de guitare de vingt minutes, on ne trouve pas ça fun. Enregistrer une prise voix pour la centième fois, idem. Donc, ce n’est pas à notre programme. Voilà, c’est aussi simple que cela. Notre but était d’arriver à faire une musique qui donne l’envie aux filles de danser ! Je n’ai jamais supporté ces concerts où les gens arborent cet air désespérément sérieux, se tiennent le menton, applaudissent avant de se prendre la tête à deux mains… C’est une véritable tragédie”. M. Kapranos – qui ne fait pas mystère de ses origines grecques mais refusent en revanche de donner les noms des groupes dans lesquels il évoluait auparavant – se recoiffe. Puis le débit s’accélère.  “Il y a trois choses qui me répugnent en musique. Tout d’abord, les groupes progressifs : on peut aimer le classique sans essayer de le recréer dans un format rock, pompeux et au final, ridicule. Ensuite, tous ces trucs préfabriqués, nés de l’imagination malade de gens qui feraient mieux de quitter ce milieu et n’ont qu’un seul but : s’en mettre plein les poches. Enfin, et même si ça me désole de le dire, ces formations qui se complaisent dans le milieu indie et arty. Je trouve très prétentieux de penser que ta musique ne peut pas être comprise par certains. Je hais toute forme d’exclusion. Personnellement, je crois, et telle est notre ambition, qu’il est possible d’écrire des chansons intelligentes et directes, qui s’adressent au plus grand nombre”.

En fait, c’est exactement ce qu’est parvenu à réaliser Franz Ferdinand sur son premier album. Jacqueline, Take Me Out, Auf Acshe ou Come On Home sont autant de chansons jouissives et contagieuses destinées à devenir des rengaines populaires, ce sont des excitants bien plus efficaces que n’importe quel produit interdit. La formule n’est peut-être pas neuve, mais on s’en contrefiche. De toute façon, les responsables de ce qui va sans doute devenir – à l’unanimité – le disque de l’année 2004 n’en font aucun mystère. Les Smiths“comme eux, on essaye de tout contrôler, car il est impossible de dissocier l’image de la musique, ce sont deux choses intimement liées !” –, le premier album des Stone Roses, les Roxy Music du début, Pulp et le charisme de Jarvis Cocker, The Fall“on a essayé de reprendre Totally Wired – viennent ainsi émailler la conversation. Sans sourciller, Alex explique que Prokofiev, c’est aussi puissant que Black Sabbath. Nic acquiesce, plutôt deux fois qu’une. “Et puis, nous sommes conscients et fiers de poursuivre une tradition qui existe à Glasgow. Le label Postcard, des gens comme Orange Juice ou Josef K sont des exemples pour nous. Depuis vingt-cinq ans, cette ville n’a pas arrêté de produire une scène passionnante et foisonnante… Jesus And Mary Chain, Primal Scream, Teenage Fanclub. Ou Belle & Sebastian plus récemment. Eux, ils nous ont montré la voie, ils nous ont prouvé que l’on pouvait former un groupe, ne pas trahir ses aspirations et réussir quelque chose. En ce sens, ils nous ont énormément inspirés”. Bientôt, ce sera certainement au tour de Franz Ferdinand de susciter des vocations. De montrer qu’il est encore possible d’avoir certaines ambitions artistiques et de les accompagner d’un succès public. Ces quatre jeunes hommes ont presque réalisé le plus difficile. Et ils n’ont pas envie de s’arrêter en si bon chemin. “Quand Take Me Out est arrivé aussi haut dans les charts, j’ai été surpris, mais pas plus que ça quelque part”, explique Alex. “Chez nous, parmi les dix premiers, tu ne trouves plus que des reprises de tubes du passé… Mais je sais que des gens ont envie d’écouter des nouvelles chansons, des trucs bien ficelés. Moi, c’est ce qui m’excite ! Même la scène dance, la plus créative ces dernières années, est rentrée dans le rang. Ce sont les énormes clubs style Cream ou Ministry Of Sound qui font la loi. On est arrivé à un tel point de médiocrité qu’il ne peut que se passer quelque chose. C’est impossible autrement… Tu vois, ce qui m’attriste avec les émissions comme Popstars ou Star Academy, c’est que l’on parvient à nous faire croire que, la seule façon de rentrer dans les charts, c’est par ce biais là… Sur notre site, on peut trouver les accords de nos chansons, juste pour montrer aux jeunes que ce n’est vraiment pas sorcier. Au moment du punk, un fanzine comme Sniffin’ Glue faisait la même chose : ‘Regardez les gars, il n’y a que trois accords, c’est facile, à vous de jouer !’ Non mais franchement, Star Academy… Il faut arrêter de délirer : on n’apprend pas à être une star, on le devient ! Voilà ce que je trouve répugnant. Là, c’est le monde à l’envers, on ne peut pas laisser croire ça, merde !” Attention : Franz Ferdinand est en mission. Et il compte bien l’accomplir avec succès.


Cet article a été originalement été publié dans la RPM #78 en mars 2004, signé par Christophe Basterra.
La compilation Hits To The Head par Franz Ferdinand vient de sortir chez Domino.

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