Alors vous, ça faisait combien de temps que vous n’aviez pas été obsédé par un morceau ?
Un simple morceau.
Au point de l’écouter en repeat ?
Au point de l’écouter tout le temps, hagard, au taquet, interdit ? Plus de 100 fois en deux semaines ? Au point d’en esquisser des remixages absurdes à vos moments perdus parce qu’il est tellement inspirant qu’il vous retourne les tripes à ce point ? Non, franchement, avouez.
Moi ça faisait un moment. Et Rose Mercie, Witching, c’est la 9 sur le disque, franchement c’est plus que notable. Le disque s’intitule ¿Kieres Agua?. Tu veux de l’eau ? Non mais ça ne me ferait pas de mal.
C’est un disque qu’il faut prendre par la fin. Quel coup de génie, tu le crois ou à peine. Personne ne se permettrait autant d’inconscience. Mettre le tube à la fin du disque. Idée un peu débile ou totalement géniale. Comme un antidote secret au cauchemar national. Je vais chercher d’autres exemples et je reviens.
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Selectorama : Olivier Rocabois
Après des années injustement passées dans l’ombre malgré un talent d’écriture indéniable, Olivier Rocabois avait deux options : capitaliser sur le succès de son récent album …Goes Too Far, ou bien l’absence totale de calcul. N’étant pas du genre à se reposer sur ses lauriers, il sort aujourd’hui The Pleasure Is Goldmine, son nouvel EP. Si la structure des chansons est toujours aussi aventureuse et ambitieuse, l’ensemble est plus direct et épuré. Ce relatif dépouillement lui va aussi bien que ses costumes italiens et a le mérite de mettre en avant l’aspect le plus expérimental de sa musique. Sous une apparente fluidité, on devine à quel point chaque titre a été travaillé, des pistes écartées pour trouver celle qui mènera à l’extase. On sent que Rocabois vit “musique” du matin au soir, et que le mot approximatif a été rayé de son vocabulaire. La principale force du disque est de laisser le temps aux compositions de s’épanouir et de respirer sur la longueur, parfois sur plus de cinq minutes. On a déjà beaucoup parlé de la jeunesse bretonne de Rocabois marquée au fer rouge par les Beatles, les Beach Boys, Bowie ou la britpop naissante. Pour avoir écouté chez lui un bout de playlist qui doit durer plus d’une semaine, je peux vous assurer qu’il serait réducteur de résumer sa culture musicale à ces quelques piliers. Ce Selectorama en est la preuve, et il nous l’explique en détail. Ne le remerciez pas, tout le plaisir est pour lui.
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Selectorama : Tess Parks
Il est facile de douter de la sincérité de certains artistes. Prenons le cas de Tess Parks par exemple. De l’extérieur, on ne la sent pas vraiment à sa place, un peu paumée et détachée. Devenue la muse d’Anton Newcombe le temps de deux sympathiques albums sortis en duo et de nombreux featurings, on doutait de voir arriver la suite de son premier LP solo sorti en 2013. Nos impressions n’étaient pas totalement fausses puisque Tess a elle-même choisi d’arrêter la musique pendant plus d’un an pour se consacrer à la peinture. Jusqu’au déclic qui nous amène à la sortie de l’épatant And Those Who Were Seen Dancing, nouvel album au psychédélisme microdosé et aux mélodies subtiles. Le travail sur le son est particulièrement réussi, vous enveloppant sans permettre de lâcher prise, jusqu’à ce que la voix de Tess vous pénètre pour vous asséner le coup final. En ce sens, c’est un disque de communion avec l’auditeur, celui qui permettra certainement de comprendre qui est Tess Parks. Le Selectorama qu’elle nous propose est le compagnon parfait de l’album. Entre perles pop, psychédélisme moderne et morceaux dépouillés jusqu’à l’os, il offre une bonne vision de sa palette artistique. Promis juré Tess, on ne doutera plus jamais de ta sincérité. Continuer la lecture de « Selectorama : Tess Parks »
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Selectorama : Confidence Man
Ok, il a fallu un petit temps de réflexion pour décider si Confidence Man avait sa place ici, tant le quatuor de Melbourne s’illustre dans une dance pop totalement exaltée à la limite de la poule sans tête. Quelques signaux sont toutefois passés au vert : en premier lieu, ils sont signés sur Heavenly Recordings, que l’on suit depuis trois décades, de East Village à Saint Etienne, en passant par Beth Orton, The Magic Numbers ou Doves, jusqu’à plus récemment Working Men’s Club, Baxter Dury et tant d’autres. Puis, dans les playlists de A Certain Radio, on les retrouve autant chez le vétéran éclairé Daniel Dauxerre que chez Pipi de Frèche, notre onde sensible. Soit. Mais qu’en est-il de cet album si justement nommé Tilt ? Sorti il y a quinze jours à peine, ils ont apparemment balancé dans pèle-mêle dans la marmite breaks mancuniens, pianos house, basses stéroïdées, lyrics aussi joyeusement crétins que back in the days dans les 90s (Push It Up, KIss N’Tell, ce genre), allant radicalement à contre-courant d’une ère totalement anxiogène. Alors, soit on l’admet et on considère que Holiday est le meilleur hymne après moi le déluge, soit on retourne chouiner en écoutant des choses tristes. Vous êtes prévenus, et pour mieux comprendre leur confidence, voici les neuf titres qu’ils ont choisis pour ce selectorama absolument pas sérieux. Continuer la lecture de « Selectorama : Confidence Man »
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Selectorama : Destroyer
Survivre à un disque qui a marqué au fer blanc une génération de fans de musique indépendantes n’est pas une tâche facile. Kaputt, sorti seize ans après les débuts de Destroyer, était alors considéré comme un étalon du cool et l’est resté depuis. Car Dan Bejar était déjà en dehors de tout calcul et des courants musicaux éphémères. S’ensuivit un changement de cap moins lyrique, musicalement toujours passionnant, mais en pente douce. D’où la surprise créée par Labyrinthitis, quinzième album de Destroyer, une œuvre de haute volée. New Order faisant partie de l’ADN du groupe, les influences ont beau rester les mêmes, Bejar n’hésite pas à les triturer, à les emmener sur le dancefloor avec une ambition que l’on ne soupçonnait pas jusqu’à aujourd’hui. Labyrinthisis est son disque le plus aventureux car il allie avec classe une évidence pop à une expérimentation sonore un peu crasse. Soit un condensé du meilleur de Destroyer depuis Poison Season, mais qui laisse entrer suffisamment de lumière pour vous donner envie de bouger plutôt que de déprimer au bout du troisième morceau. A l’occasion de ce nouvel album, Dan Bejar nous présente dix titres qui l’obsèdent. De Bill Evans, Fiver à Loscil, tous sont à l’opposé de la densité de ses propres morceaux, mais ils donnent une bonne idée de la quête émotionnelle qu’il cherche à retranscrire. Continuer la lecture de « Selectorama : Destroyer »
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Selectorama : Josephine Foster
Il est rare que vingt ans après ses débuts, un artiste continue de passionner et surprendre. Réussir à accrocher et bouleverser l’auditeur avec un premier titre joué sur une guitare désaccordée accompagnée de discrètes nappes de synthés rétrofuturistes relève du défi. Ce défi, Josephine Foster le tiendra tout au long de Godmother, album hanté par une nostalgie cotonneuse. Ne pas sombrer dans des références musicales d‘une époque chérie donne justement toute sa force au disque. Les neuf titres de Godmother transportent dans un univers sonore singulier, entre baroque, folk et science-fiction. Ce selectorama apporte les clés de ce changement de cap, parfois avec humour. Les dix titres sont illustrés d’histoires qui remontent souvent l’enfance de Josephine Foster et les souvenirs qu’elle engendre. Cela explique certainement pourquoi Godmother sonne comme une vision distordue et parallèle du passé. Continuer la lecture de « Selectorama : Josephine Foster »
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Selectorama : Midlake
La résilience en deux temps. Midlake avait déjà survécu au départ de son leader originel, Tim Smith, après la publication de son troisième album en 2010. Après dix ans de silence presque complet, c’est un deuil plus intime qu’il s’agit ici de surmonter. Le père du claviériste Jesse Chandler, décédé en 2018, lui serait apparu en rêve pour l’encourager à prolonger l’aventure collective. Une impulsion d’outre-tombe qui confère à For The Sake Of Bethel Woods une résonance dramatique, amplifiée par la mise en son très ambitieuse, confiée pour la première fois à un producteur extérieur, John Congleton en l’occurrence. Sans oublier d’écrire des chansons, Midlake y redonne ses lettre de noblesse à une forme de musique progressive, réhabilitant au passage un mysticisme élégant et des arrangements amples et complexes. Un hommage aussi à une époque et un lieu – Bethel, dans l’état de New-York, où ont longtemps résidé Chandler et sa famille et où s’est tenu le festival de Woodstock – qui marquent cette sélection de dix titres. C’est donc lui qui se charge de la visite guidée du patrimoine local. Continuer la lecture de « Selectorama : Midlake »
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Selectorama : Kristine Leschper
Il y a un sentiment de l’ordre de la tendresse lorsque l’on observe — ou plutôt, dans ce cas-ci, écoute — un individu naître à lui-même. Kristine Leschper, après avoir œuvré pour quelques disques avec le groupe Mothers, nous offre avec beaucoup de grâce et justement, à l’orée du printemps, The Opening, Or Closing Of A Door. Un album d’éclosion intime, subtil et complexe, et dont les mélodies soignées et les instrumentations oniriques raviront les amateurs de musique intérieure paradoxalement épique. On ressent avec beaucoup d’émotion la sincérité non-feinte d’une véritable proposition de réponse à la problématique audacieuse d’être-soi où même le plus lisse des sons qui en résulte se laisse aller sans crainte aucune aux pointes les plus fragiles de la vulnérabilité. Guidée par les tourments du monde et par la voix-guide de la poétesse June Jordan, Leschper fait glisser avec beaucoup de talent et en treize titres ciselés la mise en scène d’un théâtre miniature en forme de cœur humain, que l’on vous conseille ardemment d’y aller jeter une oreille ou deux. Continuer la lecture de « Selectorama : Kristine Leschper »