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Le duo suédois pop psyché Astral Brain donne des couleurs à la grisaille de l’automne.

Astral Brain
Astral Brain

Dans nos temps post-traumatiques, Astral Brain, groupe Suédois originaire de Stockholm, diffuse un air de fraicheur et d’innocence retrouvée qui n’est pas sans nous rappeler l’âge d’or de nos soirées pop endiablées à danser au son de Stereolab ou autres compilations du DJ anglais Gilles Peterson. Somme de la production musicale d’Einar Ekström et du travail vocal de Siri af Burén, Astral Brain vient de sortir The Bewildered Mind, un premier album aux couleurs pop-psychédéliques, sur le label américain indépendant Shelflife Records. Let’s dream !

Astral Brain
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Astral Brain, c’est qui ?

Einar : J’ai rencontré Siri en 2015, elle était dans un groupe, Testbild!, que j’écoutais depuis des années. On s’est rendu compte qu’on avait un terrain et des influences musicales commun et on a vite décidé d’unir nos forces. Aujourd’hui, Siri façonne des paroles et des mélodies pour les pièces instrumentales que j’écris. Astral Brain a ainsi sorti quelques singles en 2019 et 2020 jusqu’à ce que le groupe entame des discussions avec Shelflife Records qui a abouti à la sortie de notre premier album The bewildered mind.

L’album contient une grande variété d’influences, jazz, électro pop, rock psychédélique et transmet aussi beaucoup de joie, êtes-vous comme ça tous les jours ?

Je dirais que notre musique s’étend sur de nombreux genres et décennies. C’est un condensé d’un large éventail d’idées qui sont canalisées dans des chansons qui, nous l’espérons, susciteront une certaine forme de réaction chez l’auditeur. Les histoires contenues dans les chansons ne sont pas toujours joyeuses, mais je pense que la musique sert de contrepoids aux paroles. J’aime la tension que cela crée, et si le résultat final est de donner beaucoup de joie à l’auditeur, c’est une bonne réussite. Mais dans mon esprit, nos chansons sont toujours en équilibre sur le point de bascule entre la joie et la mélancolie.

Peux-tu me parler de ton parcours au pays de la musique ?

Je viens d’une famille assez musicale, mon grand-père était luthier, ma sœur et mon père jouaient de beaucoup d’instruments différents. À la maison, nous avions des guitares, des violons, un piano à queue, un trombone et d’autres instruments, donc il y en avait toujours beaucoup qui traînaient. Mon premier souvenir de jeu musical est lorsque que j’essayais de composer une mélodie simple sur le piano à queue, j’avais peut-être six ou sept ans. Plus tard, je grattais la guitare de temps en temps. La véritable explosion s’est produite lorsque j’ai entendu Nirvana pour la première fois à la radio. J’ai été totalement soufflé par le son brut du groupe, et je pense que c’est à ce moment-là que j’ai su que la musique serait toujours quelque chose de très important pour moi. J’ai eu ma première guitare électrique en 1992 et à partir de ce moment-là, j’ai joué dans différents groupes, en commençant par le punk rock, le noise rock et en passant à des sons plus raffinés.

Siri et toi avez chacun une famille et un travail, comment organisez-vous les sessions d’enregistrement, les concerts ?

Mon premier enfant sur deux est né à peu près au même moment où Astral Brain a commencé, c’était donc une période très intense dans ma vie. Essayer d’équilibrer la vie de famille, le travail et la musique est assez difficile, j’ai donc fait beaucoup d’efforts pour résoudre cette équation. Afin de me concentrer davantage sur les choses que j’aime, j’ai changé de direction et j’ai supprimé les activités qui prenaient beaucoup de temps sans apporter de valeur ajoutée à ma vie. J’ai également construit un studio d’enregistrement compact dans notre appartement afin de pouvoir me faufiler et travailler sur de la musique dès que les enfants sont endormis. J’y ai tout ce dont j’ai besoin en termes d’instruments et d’équipements, c’est un studio d’enregistrement autosuffisant… C’est essentiel, car le temps est compté et je dois pouvoir saisir tous les instants qui se présentent. La plupart du temps, Siri et moi nous envoyons des fichiers l’un à l’autre, plutôt que de nous asseoir et de jouer ensemble. Je travaille sur la musique dans mon studio et elle fait ses parties vocales à la maison, quand elle trouve le temps. De temps en temps, nous avons des sessions d’enregistrement ensemble, et c’est là que nous réglons tous les petits détails. Jusqu’à présent, nous n’avons pas pu jouer en live. Monter un groupe en live est un vrai défi si on veut le faire correctement, donc pour l’instant nous sommes heureux d’être un projet de studio. Mais ce serait merveilleux de jouer en live, donc si l’occasion se présente, nous aimerions beaucoup le faire.

On pense beaucoup à Stereolab, Broadcast ou même aux Pale Saints en vous écoutant…

C’est une comparaison juste. J’ai découvert Stereolab et Broadcast à la fin des années 90, à une période où je m’intéressais à la musique brésilienne. C’était à une époque où je cherchais quelque chose de plus que le genre de groupes indie à guitares que j’avais connu auparavant. J’étais fasciné par la façon dont ils mélangeaient les genres, les instruments et les rythmes pour créer une toile sonore totalement nouvelle. Cette façon de travailler me plaît et je réalise qu’il y a des similitudes dans notre façon de sonner, mais ce n’est certainement pas un effort conscient pour sonner comme un groupe spécifique. Le psychédélisme des années 60 est aussi une partie de mes influences mais il y a d’autres éléments tout aussi importants qui façonnent notre musique. J’ai beaucoup écouté les bandes sonores de films des années 50 à 70, les débuts de la musique électronique ainsi que la musique de bibliothèque comme Basil Kirchin et d’autres. Aujourd’hui il y a aussi cette nouvelle scène avec des groupes comme Vanishing Twin ou Beautify Junkyards. Je pense que nous avons beaucoup de références similaires, mais au final, la musique qui sort est le résultat d’un flux inconscient. Ces dernières années, j’ai aussi creusé plus profondément dans la musique New Age comme Iasos, Joanna Brouk et d’autres, et d’une certaine manière, je considère cette musique comme une extension des paysages de contes de fées abstraits que le psychédélisme des années 60 a introduits. Je pense qu’elle sert de toile de fond à un univers encore plus profond et plus introspectif, porté par l’imagerie synesthésique que cette musique peut vous présenter.

Le monde d’aujourd’hui est plutôt triste et pas très brillant ; comment parvenez-vous à naviguer sur cet optimisme dans le merveilleux pays d’Alice ?

Pour moi, la musique, tout comme l’art et le cinéma, a toujours été synonyme d’évasion. C’est un monde différent dans lequel j’entre, dès que je m’assois au piano pour composer. Le titre de notre album, The Bewildered Mind, fait référence à la vie intérieure de notre cerveau. L’étincelle initiale d’une chanson est généralement déclenchée par quelque chose entendu au hasard, quelque chose qui est passé à la radio, une publicité, une chanson pop grand public ou n’importe quoi d’autre. Il s’agit généralement d’un détail mineur, comme un son spécifique, un changement d’accord ou une mélodie. Lorsque vous ajoutez des couches et des textures à une chanson, les influences vous guident d’une manière ou d’une autre. C’est comme une bibliothèque mentale d’idées, que vous avez construite tout au long de votre vie, que vous pouvez utiliser comme blocs de construction pour votre création. Les paroles sont généralement issues de l’esprit de la piste instrumentale. Il y a toujours des images qui surgissent, quelque chose que l’on peut relier à une expérience personnelle, et puis ça se développe à partir de là. Je dirais que la plupart des textes sont enracinés dans la vie de tous les jours, mais les sujets choisis sont ceux qui ont une sorte de dualité, quelque chose qui peut être vu de deux perspectives différentes, quelque chose qui n’est pas purement bon ou mauvais mais plutôt un résultat complexe entrelacé. Il s’agit de regarder la vie à travers un microscope, à l’intérieur de nos têtes plutôt qu’à l’extérieur. C’est ce qui s’attache aux sonorités que nous créons, malgré le triste état dans lequel se trouve le monde.


The Bewildered Mind par Astral Brain est sorti sur le label américain indépendant Shelflife Records.

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