Flóp, Deep Fake Flóp (Le Pli)

En marge du Superpizza Club de Kim, un groupe privé mais ouvert à tous et passionnant tant il aborde tous les aspects du métier de musicien, on a beaucoup discuté de l’initiative du propriétaire des lieux : il lançait son Patreon, une sorte d’abonnement à un artiste qui délivre, moyennant une somme mensuelle, des inédits, des albums réservés, des clips en avant-première et autres babioles au choix. C’est avec Flóp que j’ai échangé le plus sur le sujet. Je lui faisais part de mes réserves parce que je voyais le champ de la pop comme un lieu d’infidélité, d’amours éphémères, de retournements de veste honteuses ou assumées, où l’on passe de l’amour fou extravertie à la déception sourde rentrée, et inversement. Je me disais aussi que c’était plus un sujet pour les pages high tech de Sciences & Vie Micro (un peu comme quand Jacques, l’artiste ultra doué, se fend d’un cours sur les BlockChain pour introduire son nouveau single !). Peut-être qu’une relation au long cours, numérique, contractualisée, automatisée, n’est pas de mise entre un fan et son artiste. Peut-être aussi que ça n’est qu’une nouvelle forme de fanclub justement, bien pratiqué avant l’avènement de l’internet par votre serviteur, pas de quoi s’énerver. Bref, Flóp choisit de s’investir dans ce type de relation, et, peu convaincu par les solutions clé-en-mains, décide de produire son club via son ancien site et de proposer contre monnaie trébuchante une promesse de quatre albums pour l’année, et je décide, contre toute attente, de plonger avec lui.

Deep Fake Flop est le premier disque de la série à paraître cet automne. On retrouve cet univers qu’il avait accepté d’explorer pour le n°3 de Groupie : l’homme au chapeau de gendarme étale son talent d’auteur-compositeur-interprète et délivre sa poignée de chansons régulières. Entre des exercices de style fins et discrets et des expérimentations légères, il assume ce savoir encyclopédique sans en faire des tonnes, toujours avec distance et humour. Ça ne serait rien, tout ça, sans un talent certain pour l’accroche mélodique ou rythmique qui caractérise chacun de ses petits essais, concoctés dans son nouvel home-studio, Le Pli. Personnellement, je retiens plusieurs clés à ce disque : d’abord Les Beatles, 2 minutes et 30 secondes d’un petit hommage pastiche irrésistible, petit croisement qui donne l’impression de voir Beat Happening jouer Teenage Fanclub : « La barre est trop haute après les Beatles, ouh ». Il y a aussi Tout ce qui se casse la gueule, et sa déprime sociale, avec son remède formidable La société : « il y a qu’à tout recommencer »… Je pourrais citer tout l’album, tant cet album se déroule dans une atmosphère surprenante et attachante à la fois. Pour vous faire une idée du personnage, je vous invite à écouter l’enregistrement de l’émission La Souterraine, où Flóp répond en chansons à l’entretien de Laurent Bajon, un grand moment radiophonique !

Est-ce que le mode de diffusion a changé quelque chose au final ? On verra si Flóp maintient ce niveau sur trois nouveaux albums, mais à dire vrai, on ne se fait pas trop de mouron : auteur il y a à peine deux ans d’un double album, Puissance & Racine, félicité dans ces pages et dont on n’a pu épuiser la richesse, Flóp ne manque pas de fond, d’autant plus qu’il réserve d’autres surprises réjouissantes avec des collaborations diverses et attendues. Tout ça mérite bien un abonnement, pour n’en perdre aucune miette.


Deep Fake Flóp par Flóp est disponible chez Le Pli.

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