La dernière fois que le guitariste et chanteur de Wand nous avait impressionnés, c’était avec Laughing Matter (2019), un album dans lequel la formation californienne poursuivait sa recherche, entamée avec Plum (2017), d’un son plus progressif et expérimental. Certains titres les rapprochaient alors davantage de Beak> que de Ty Segall, auquel Wand, avec un début de carrière étiqueté « garage » et un label en partage (Drag City), était souvent assimilé au milieu de la décennie dernière. Pour son second essai en solitaire, Cory Hanson reste fidèle au label de son groupe, et dévoile une pochette drôlement proche de celle de Laughing Matter. Par chance, ce n’est pas tout ce que Pale Horse Rider emprunte à cet album paru trois ans plus tôt : on y retrouve la même élégance, le même souci du détail. Certains noms y reviennent aussi : celui de l’ingénieur du son Zac Hernandez, ou du musicien Robert Cody, qui en signent ensemble l’enregistrement.
Comme le laisse deviner son titre, Pale Horse Rider explore la country, territoire où l’américain ne s’était jusqu’alors pas aventuré. La guitare steel est au rendez-vous dès la première piste, Paper Frog. La voix, toujours aussi mélodieuse, rappelle encore et inévitablement Thom Yorke, mais aussi un peu Neil Young, cette fois-ci. La ballade se dessine à la guitare, de manière assez classique, puis se complexifie, tant dans la structure de la composition que dans les arrangements : différentes parties se révèlent, laissant tour à tour entrer le piano, les synthétiseurs et quelques sons d’ambiance. Tout semble très étudié, parfaitement exécuté. Angeles, doléance aux feux ravageurs de Californie, et Pale Horse Rider, la chanson-titre, confirment cette première impression, et complètent la Sainte Trinité de l’album.
Un premier interlude aux sonorités diffuses mets fin à cet élan, avant de laisser place à la mélancolie de Bird of Paradise. Presque attristante, la chanson s’illumine à l’arrivée du refrain, lorsque les arpèges délivrent enfin cette parole : You hold me in your arms. Un clavier jazzy, inattendu, clôt la piste sur une note d’espoir et facilite le passage vers des instants plus country. Limited Hangout, ballade sans prétention, projette l’image du cowboy sur son porche, gratouillant dans sa rocking chair. Vegas Knights se fait, elle, douce comme une comptine, tout en chœurs et violons.
Un second interlude, comme une brise au milieu du désert, amène avec lui un nouveau changement d’atmosphère. Another Song From The Center of The Earth démarre très lentement, mais saisit immédiatement. Neil Young est bien parmi nous, tout particulièrement derrière cette guitare distordue qui s’enflamme au fil des mesures (façon Alabama). Pour la première fois, nous croirions presque à de l’improvisation ; un moment de laisser-aller qui, dans cet album extrêmement maîtrisé, fait du bien.
Cory Hanson est un perfectionniste, et cela s’entend. Rien ne dépasse, et c’est bien la seule chose que nous regretterons ici. Pale Horse Rider est si homogène qu’il peut en paraître, sur sa seconde moitié et malgré une conclusion parfaite, un peu redondant. Se risquer à ce genre si stigmatisé qu’est la country requérait beaucoup d’audace, et le pari n’en reste pas moins largement réussi.