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Single, El Roce (Elefant Records)

¡ Elefant 30 !

Il existe des groupes, des artistes – oh, quelques-uns, ils ne sont pas très nombreux – dont on a la sensation qu’ils écrivent sans le savoir l’histoire de nos vies. Pas à chaque fois peut-être, mais au moins le temps d’une, deux ou trois chansons par disque. Je suis les aventures musicales des deux membres de Single depuis vingt-cinq ans maintenant, depuis la découverte de leur groupe précédent, Le Mans, qui en même pas une décennie a enregistré quatre albums et une poignée de… singles inédits, autant de références frôlant la perfection si jamais on aime quand la pop fait de la mélancolie et la délicatesse ses raisons d’être. J’ai d’ailleurs déjà écrit par ici tout le bien que je pense de cette formation née à San Sebastian au début des années 1990, après une première aventure sous le nom de Las Aventuras de Kirlian – oui, une référence à Cabaret Voltaire pour ceux qui suivent, même si la musique minimaliste et espiègle avait plus à voir avec la génération C86 (et la scène écossaise) qu’avec la formation de Sheffield. J’ai donc déjà écrit maintes fois toute mon admiration face à cette intelligence mélodique, à ces chansons qui brossent le quotidien avec une élégance et universalité rares. Continuer la lecture de « Single, El Roce (Elefant Records) »

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Les mystères musicaux de mister Gainsbourg

« Le Gainsbook » n’est pas qu’un ouvrage de plus sur le grand Serge.

Encore un livre sur la pierre de touche, incontournable au point d’en devenir parfois encombrante, de la chanson française, enfin pop plus encore que populaire. Certes, mais c’est le troisième par ordre d’importance, après la biographie imposante de référence, Gainsbourg, publiée l’année qui a suivi la disparition du grand Serge en 1991 par feu le journaliste belge Gilles Verlant, et le Gainsbourg Sans Filtre de Marie-Dominique Lelièvre, contrefeu admirable en 1994 sous la plume acérée de la future biographe de Coco Chanel, Françoise Sagan, Brigitte Bardot et Yves Saint-Laurent. Continuer la lecture de « Les mystères musicaux de mister Gainsbourg »

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Ariel Pink’s Haunted Graffiti : Le pot aux roses

Ariel Marcus Rosenberg Pink
Ariel Marcus Rosenberg

« L’avenir de la musique !? Le passé est tout ce que nous avons. Le futur est tellement ennuyeux… » Je me souviens que cette réponse du génial Ariel Rosenberg m’avait soufflé, alors que je réalisais ma première véritable interview — qui plus est avec l’idole qui m’avait donné envie d’écrire sur la pop moderne. Cette assertion inattendue, évidemment provocatrice, était bien aux antipodes du cool tel qu’il était défini en cette année 2010 alors que le monde connecté faisait encore mine de croire, chaque mois, à l’embryon d’une nouvelle révolution musicale. Continuer la lecture de « Ariel Pink’s Haunted Graffiti : Le pot aux roses »

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Grouper, A I A : Dream Loss / Alien Observer (Kranky)

 

La fin de la décennie annonce le temps de la rétrospection et des bilans. La réédition d’A I A, composé d’Alien Observer et de Dream Loss tombe donc à point… Depuis dix ans (probablement quinze), à l’exception de Mount Eerie et Sore Eros, les seuls artistes folk dont j’ai aimé les disques de façon durable ont été composés par des femmes œuvrant en solo. Il est même curieux de parler de folk pour qualifier la musique créée par ces musiciennes tant celle-ci est mutante, faite de drone, d’ambient, de couches de réverbérations et de vapeurs tout en demeurant si évidente et limpide. Liz Harris, comme sa compatriote Tara Burke (Fursaxa) et la Finlandaise Lau Nau, appartient à ce petit groupe de musiciennes dont l’esthétique musicale est marquée par une forme de panthéisme et une approche très expérimentale du plus intime et dépouillé des genres musicaux.

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Luke Temple, Both-And (Native Cat Recordings)

Luke Temple Both AndJ’ai une affection toute particulière pour les âmes qui ne débarquent jamais à l’endroit où elles sont attendues. J’ai une affection toute particulière pour ces amitiés au long cours qui se font et se défont au gré d’un hasard qui semble fort étonnement déterminé par l’Univers. Ce n’est plus le goût du cœur qui parle, mais quelque chose de plus grand que soi quand tout à coup débarque dans votre vie une figure qui fut loin pendant un temps, mais dont le visage apparaissant soudain vous rappelle à quel point votre amour pour elle a été d’une constance absolue. Ce bel-ami s’appelle Luke Temple.

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Kit Sebastian, Mantra Moderne (Mr Bongo)

Un dimanche après-midi sur la nationale 118, après un repas dominical aux saveurs vénitiennes, j’écoute Radio Nova. Un chant dans une langue inconnue, émerge sur les ondes, d’un grand et éclectique mix. Le nom de Kit Sebastian apparaît au fil de mes recherches à la découverte de leur discographie. À ma grande surprise, ils n’ont sorti qu’un seul album en juillet dernier sur Mr Bongo, connu depuis plus de trente ans pour ses rééditions d’albums et single oubliés d’artistes du monde entier et de genres très divers (MPB, Tropicàlia, Afro-beat, Soul…) Sensible aux musiques du monde, Mantra Moderne s’inscrit dans la lignée de ces trouvailles et raretés de musiques pop étrangères et exotiques que réédite le label anglais. Continuer la lecture de « Kit Sebastian, Mantra Moderne (Mr Bongo) »

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Les amours polychromes

« Closer To Grey » des Chromatics
Impressions sur l’album et les premières dates du « Double Exposure Tour »

Chromatics
Chromatics à Anvers, mardi 29 Octobre / Photo : Thomas Bartel

A une époque lointaine où les robinets digitaux ne déversaient pas encore tous ces flots tiédasses de pop consommable et sans avenir, la sortie d’un album en bonne et due forme faisait figure d’événement. Attentes fébriles, spéculations insensées, fantasmes comblés ou déçus à replacer dans le contexte d’une discographie… Tous ces liens intimes que l’on nouait avec un artiste ou un groupe sur le temps semblaient depuis une bonne décennie totalement révolus au profit de l’instantané, du zapping accéléré, du streaming algorythmé, de la consommation jamais satisfaisante d’une musique consommée comme une fast food dont on n’est, à dessein, jamais rassasié. Avec l’éclosion de son label Italians Do It Better à la fin des années 2000, Johnny Jewel (de son vrai nom John Padget) comptait bien remettre quelques jetons dans une machinerie electro pop qui montrait de sérieux signes d’essoufflement. Naviguant alors sans boussole dans la scène underground de Portland avec ses deux groupes Chromatics et Glass Candy dont le line-up n’était pas encore fixé, Johnny Jewel rêvait de retrouver l’esprit d’indépendance, la sève artistique et l’identité graphique des labels cultes (K Records, Factory, 4AD) qui ont façonné son imaginaire musical jusqu’à l’obsession. Continuer la lecture de « Les amours polychromes »

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Yolande Bashing, Yolande et l’amour (Bruit Blanc)

Yolande BashingIl y aurait un arbre généalogique à dessiner de ces descendances de garçons solitaires qui s’entourent de peu pour délivrer au monde leurs sentiments, souvent dans un geste d’apparence crue et frontale : peu de mots, peu d’instruments, peu d’espoir pour peu de musique ? Peut-être. Mais depuis le début du siècle, des fins fonds des squats de zones industrielles (Noir Boy George) aux journaux à la page (Thousand), une vague froide déboule (et tabasse tout ce qui bouge) avec une musique à leur image, qui a de quoi affoler le territoire et qui s’appuie sur quelques basiques identifiés.  Continuer la lecture de « Yolande Bashing, Yolande et l’amour (Bruit Blanc) »