Quelques semaines avant la sortie de son nouvel album, Inferno (Tapete/Differ-Ant), et au lendemain de la diffusion d’un programme radiophonique entièrement consacré à son oeuvre, il est temps de ressortir de nos archives l’interview de Robert Forster réalisée en septembre 2015, quelques heures à peine avant que l’ancien co-leader de The Go-Betweens assiste au grand retour sur une scène parisienne de son compère de jadis, Peter Milton Walsh. En cette occasion mémorable, nous avions fait le point avec lui, sous forme de mots-clefs, sur une carrière qui s’étale désormais sur cinq décennies et dont les récents prolongements ne cessent de surprendre agréablement.
Grandir sans renoncer tout à fait à être soi. Pas facile, tout particulièrement lorsque l’on a connu la reconnaissance publique avant même d’atteindre sa majorité et que l’on a publié ses meilleurs albums – Meltdown, 2004 et Twilight Of The Innocents, 2007 – alors que fans et critiques les accueillaient avec une indifférence croissante. Il a fallu presque huit ans pour que Tim Wheeler et Ash parviennent enfin à inventer la meilleure manière de vieillir sans se laisser flotter sur l’air du temps. Huit ans de tâtonnements plus ou moins approximatifs – une flopée de singles numérique inégaux enregistrés en 2010 puis, en 2014, pour le chanteur, un album solo à la Tchao Pantin, ambitieux mais inabouti consacré au décès de son père – avant de renaître, presque à l’identique. Brutalement interrompue en 2007, pour ce qui concerne les albums, la discographie du trio irlandais a donc fini par retrouver une nouvelle jeunesse, sonique et fougueuse, avec le détonnant, Kablammo ! (2015) suivi cette année par l’excellent Islands. Désormais exilé aux USA, Ash semble avoir accepté son identité en enregistrant encore une fois un LP qui ressemble à s’y méprendre au rêve le plus fou de ses admirateurs : un condensé de power pop ultra-efficace, regorgeant de mélodies imparables et de refrains bébêtes à souhait, et où les guitares métalliques – Flying V en tête – rivalisent d’intensité. Mais c’est encore sur scène que le groupe sait le mieux nous faire partager sa joie insouciante du jeu collectif. Et réapparaître, pour notre grand bonheur, sous les traits inaltérables de l’éternel adolescent qu’il n’aurait jamais du cesser d’être. Continuer la lecture de « Les (bons) coups de Ash »
En matière de musique comme en toute chose, l’évidence ne s’impose pas toujours avec la brutalité instantanée du coup de foudre. Elle finit parfois par surgir au terme d’un cheminement tortueux, parsemé d’erreurs et de doutes. En l’occurrence, tout a commencé par une première rencontre manquée lorsque, sollicité pour chroniquer à sa sortie Casting Nets (2014), le premier album de Distance, Light & Sky, j’avais choisi de décliner. Continuer la lecture de « Distance, Light & Sky, Gold Coast (Glitterhouse) »
Ils racontent que leur histoire commune est née d’une rencontre fortuite dans le hall d’un studio canadien. Difficile pourtant de retenir la thèse du simple aléa tant, pour l’occasion, c’est bien le destin qui semble avoir pris les traits du hasard. Elle, on la connaissait surtout pour sa participation au super-groupe de son oncle, Carl Newman, au sein duquel elle était d’abord apparue en remplaçante de luxe de Neko Case, avant d’affirmer de plus en plus nettement son statut de titulaire indispensable. Quant à lui, les six albums publiés de manière trop souvent confidentielle par la formation protéiforme dont il assure depuis 2006 la direction exclusive n’ont cessé de révéler ses talents hors du commun de songwriter et d’arrangeur. Continuer la lecture de « Frontperson, Frontrunner (Oscar St. Records) »
À l’échelle de notre petit monde, la nouvelle a presque fait figure d’événement : onze ans après avoir mis un premier terme à leur fructueuse collaboration, Sam Genders et Mike Lindsay sont enfin parvenus à se rabibocher et à publier conjointement le premier album de Tunng arborant leur double signature depuis l’inusable Good Arrows (2007). Et même si les deux compères avaient su, tout au long de leurs années divergentes, développer chacun de leur côté deux carrières également passionnantes, la sortie en fin d’été de Songs You Make At Night(2018) est venu nous rappeler à quel point leur apport demeure essentiel dans un registre qu’ils ont plus que largement contribué à défricher, et où les structures folk traditionnelles se mêlent harmonieusement aux explorations électroniques contemporaines. À la veille d’un concert parisien scellant cette réconciliation longtemps espérée, on leur a demandé de revisiter les souvenirs, parfois aigres-doux, des cinq jalons discographiques de leur union musicale. Continuer la lecture de « Tunng – Secondes noces »
Le terme de perfection pop figure depuis trop longtemps au registre des poncifs de la critique musicale pour que l’on songe à l’utiliser sans quelques précautions réticentes. D’autant plus que, la plupart du temps, il en est venu à qualifier des œuvres où la recherche pointilleuse de la reconstitution historique et le respect compassé des formats canoniques de la chanson finissent par étouffer les velléités d’expression personnelle et spontanée. Nulle trace de ce type de dévotion stérile à un âge d’or supposé sur ce premier album de The Last Detail, porté par le souffle combiné de deux inspirations complémentaires et profondément vivaces. Continuer la lecture de « The Last Detail, The Last Detail (Elefant Records) »
Inconscience ou provocation ? Culot pur et simple ou plutôt absence presque totale de sens du timing et des modes ? Difficile, un quart de siècle après les événements, de rendre compte de la curieuse combinaison d’ingrédients susceptible d’expliquer la naissance d’un groupe au patronyme de chochottes – les bouquets de fleurs, sérieusement ! – et aux accents résolument pop à Seattle, alors même que les premiers frémissements du grunge commencent tout juste à s’y faire sentir. Continuer la lecture de « The Posies, Failure (Omnivore Recordings) »
Après avoir savouré un repos bien mérité pendant la première partie des années 2010, The Coral a repris le cours de ses activités musicales en 2015 avec un succès mitigé. Mais, si Distance Inbetween (2016) ne nous avait laissé qu’une impression ambivalente, la publication en cette fin d’été de Move Through The Dawn vient rappeler à quel point le groupe de Liverpool demeure l’une des valeurs les plus sures et les plus stables de la pop britannique de ce siècle. Plus flamboyantes et chatoyantes que jamais, les mélodies composées par James Skelly et ses camarades renouent avec les moments les plus marquants de leur longue discographie. Deux des membres historiques du groupe apportent leurs lumières sur les raisons de ce retour de flamme. Continuer la lecture de « The Coral : « On voulait composer un allume-barbecue psychédélique. » »