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Blindtest : Steve Gunn

Steve Gunn / Photo : DR
Steve Gunn / Photo : DR

Dans la liste des choses qui mériteraient d’être enseignées dans les écoles de journalisme, l’interview blindtest à distance en visio via google meet figure assez bas. Chaotique dans sa mise en place, douloureuse à retranscrire, elle ne délivrera un résultat publiable qu’à la seule condition de trouver un candidat exceptionnellement érudit, motivé et patient. Quelqu’un comme Steve Gunn – et si possible Steve Gunn lui-même. Contacté quelques heures avant son concert la St Matthias Church de Londres, étape de sa tournée automnale (qui a évité la France), l’Américain a pendant près d’une heure fait honneur à sa réputation de mélomane sans foi ni loi, qu’aucun obstacle – ni la chaîne des compressions digitales, ni la piètre connexion due à l’épaisseur des murs paroissiaux, ni l’éclectisme piégeux d’une sélection comprenant Hermeto Pascoal et les Dead Milkmen – n’a pu décourager. Une fois échauffé, il a même formulé quelques jolies pensées sur la musique qu’il aime, la musique qu’il joue et les dialogues qui se nouent entre l’une et l’autre, depuis son adolescence hardcore jusqu’à l’ascèse ambient-folk de ses deux derniers albums (l’instrumental Music for Writers paru le 15 août 2025 et Daylight Daylight le 7 novembre). Parfois, une interview mal préparée ne fait pas un mauvais papier. Continuer la lecture de « Blindtest : Steve Gunn »

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« S/He Is Still Her/e » de David Charles Rodrigues

Genesis P-Orridge / Photo : DR
Genesis P-Orridge / Photo : DR

Musical écran #11 Bordeaux Rock 2025Le film sur la musique est un genre singulier, tant il est délicat de discerner ce qui constitue ses spécificités. Déterminer un langage formel qui lui serait propre est souvent une tâche complexe. Par exemple, les travaux d’Anton Corbijn ou de Marie Losier réinvestissent à leur manière les codes du documentaire, en réinterrogeant ce qui constitue son matériau – le réel, en l’occurrence ici la musique, est saisi par une logique de mise à distance et via un détour par la fiction notamment. Autrement dit : une pratique qui s’assume comme un art de l’image, avec ses codes et son esthétique spécifiques. Mais les limites de ce type de film apparaissent aussi très souvent, cantonnant nombre de propositions dans le domaine du traitement journalistique, dans celui du reportage. Continuer la lecture de « « S/He Is Still Her/e » de David Charles Rodrigues »

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« Paul Di Anno, Iron Maiden’s Lost Singer » de Wes Orshoski

Paul di Anno / Photo : DR
Paul di Anno / Photo : DR

Musical écran #11 Bordeaux Rock 2025En de nombreuses occasions, un peu pour le plaisir de faire chier mais surtout parce que je le pense vraiment et sincèrement, il m’arrive d’inclure une ou deux saillies d’Iron Maiden première période dans ma liste des meilleurs morceaux post punk de tout l’étang. Prowler, Running Free, Women In Uniform, Iron Maiden, Drifter, Wratchild (une ligne de basse introductive à faire caguer JJ Burnel et Peter Hook de concert), Killers (chédeuvrabsolu, dans le genre les Allemands ont essayé de tuer nos parents pendant quatre longues années, seul le Section 25 de The Beast – Matrixmix —, sorti 6 mois plus tard, est à niveau), Purgatory, n’en jetez plus. Continuer la lecture de « « Paul Di Anno, Iron Maiden’s Lost Singer » de Wes Orshoski »

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« Vivre et laisser vivre : la voix de Jackie Shane » de Michael Mabbott et Lucah Rosenberg-Lee

Jackie Shane / Photo : DR
Jackie Shane / Photo : DR

Musical écran #11 Bordeaux Rock 2025Le téléphone retentit, une femme réagit incrédule : « …but who is Jackie Shane ? »cut — dans l’effervescence obscure d’un cabaret de Toronto des années 1960, une voix chante, s’éraille et harangue au milieu des clameurs du public… le décor est planté, la question est désormais brûlante : qui est donc la belle inconnue ? C’est Jackie Shane, chanteuse noire transgenre dont l’existence constitue une intrigue fascinante pour certain·es et un véritable culte d’adoration pour d’autres — « I opened for Etta James, The Drifters, Marvin Gaye, The Temptations… » — qui crève l’écran dans Vivre et laisser vivre : la voix de Jackie Shane, signé Michael Mabbott et Lucah Rosenberg-Lee, un documentaire-biopic qui tente de la ressusciter par fragments, par invention nécessaire, transformant une absence en une présence qui demeure, spectrale. Continuer la lecture de « « Vivre et laisser vivre : la voix de Jackie Shane » de Michael Mabbott et Lucah Rosenberg-Lee »

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« Butthole Surfers, The Hole Truth and Nothing Butt » de Tom Stern

Butthole Surfers, 1985 / Photo : DR
Butthole Surfers, 1985 / Photo : DR

Musical écran #11 Bordeaux Rock 2025Bien avant Primal Scream et un peu au même moment que New Order, le groupe Texan ZZ Top a su lui aussi faire un salutaire rapprochement entre la musique rock et la techno. J’espère que tu as bien de l’urticaire à lire ceci. Sauf que c’est rigoureusement vrai. Eliminator est sorti le 23 mars 1983, soit à peine 4 mois après Thriller de Jacko et précisément 16 jours après Blue Monday. Mais tu dois foncièrement te dire que le Texas c’est sympa comme tout et que ces sympathiques chantres du heavy blues aux systèmes pileux revendiqués ne sont finalement que la partie un peu fun d’un état rétrograde et miné par un conservatisme rural arriéré. Je pense, mon petit bonhomme que tu n’es pas au bout de tes peines. Continuer la lecture de « « Butthole Surfers, The Hole Truth and Nothing Butt » de Tom Stern »

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The Autumn Defense, Here And Nowhere (Yep Roc Records)

The Autumn DefenseIl y a ces deux albums publiés à quelques semaines d’intervalle, coup sur coup, mais tellement différents. Difficile pourtant de résister à la tentation comparative puisqu’ils apparaissent simultanément comme deux surgeons d’un des groupes américains les plus importants du début de ce siècle. Twilight Override de Jeff Tweedy est un triple album – ce seul constat factuel pourrait fort bien suffire à écluser le sujet –  rempli jusqu’à saturation des fragment d’introspection sur l’état dramatique de l’époque et d’ébauches musicales capturées sur le vif, dans une forme de profusion éclectique et d’inachèvement spontané qui n’exclut ni les coups de génie, ni les fausses pistes. Here And Nowhere de The Autumn Defense – ce groupe formé il y a vingt-cinq ans par John Stirratt et Pat Sansone, en marge de leurs activités d’instrumentistes au sein de Wilco – contient tout simplement onze chansons douces, mélodieuses, arrangées avec soin et classicisme, qui parlent le plus souvent de l’amour et du temps qui passe. Toute honte bue, je crois que j’éprouve davantage de plaisir à écouter – et même réécouter trois fois de suite, pour rééquilibrer la balance – le second. Continuer la lecture de « The Autumn Defense, Here And Nowhere (Yep Roc Records) »

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Alex G, Headlights (RCA Records)

Deux mois, c’est le temps qu’il m’aura fallu pour digérer le nouvel album de celui dont je pensais ne jamais pouvoir être déçue ; car je crois que c’est de la déception que j’ai ressentie cet été en écoutant le reste de Headlights. Les singles parus les semaines précédentes Afterlife et June Guitar en particulier m’avaient fait l’effet habituel lorsqu’il s’agit d’Alex G : déroutants d’abord, puis obsédants ensuite. Mandoline, banjo, accordéon, le folklore organique de Rocket (2017) était là, les effets de voix et autres bizarreries de House of Sugar (2019) ou God Save the Animals (2022) aussi, le tout dans une énergie accrocheuse.

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Robert Robinson & The Connecticut River Band, Albemarle Station (Silver Jews cover) 

Robert Robinson / Photo : bandcamp
Robert Robinson / Photo : bandcamp

Lorsqu’en 2019, avec l’ami Baptiste Fick, nous avons mis en chantier la compilation-hommage à David Berman, je me suis rappelé de Robert Robinson, connu alors sous le nom de Sore Eros et dont j’avais jadis chroniqué (pour un mensuel dont seul le nom a subsisté) le magnifique Second Chants (2009). Je n’avais alors aucune crainte quant à la proximité spirituelle de Sore Eros avec son aïeul, mais je demeurais bien curieux de connaître le résultat, car si on peut évidemment parler d’indie rock et de folk pour qualifier les productions de Robert Robinson, il est tout aussi certain que son art s’éloigne très souvent du minimalisme de Silver Jews.

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