SuperBravo

Julie Gasnier / Michel Peteau / Armelle Pioline

Alors qu’on célèbre en grande pompe franchouillarde la disparition du rock à papa viriliste, penchons-nous plutôt sur le cas SuperBravo : artisans d’une pop intimiste qui revendique l’esprit d’aventure, le trio emmené au départ par Armelle Pioline (ex Holden) déploie désormais des trésors d’inventivité sur un album qui porte bien son nom. L’Angle vivant nous sauve définitivement de l’ennui en prenant une voie singulière, différente d’une chanson française toujours plus nostalgique et balisée. Laissant libre cours aux associations poétiques et à l’intuition, SuperBravo évolue à la marge bien qu’il mérite tous les honneurs. Pour ne pas les oublier dans un brouhaha médiatique où les grosses pointures roulent des mécaniques, donnons-leur la parole… Et rappelons-nous à cette occasion les vertus créatrices du DIY.

Espaces

Julie

Quand j’ai rencontré Armelle, il y avait un endroit de moi qui était déjà connecté à elle ! C’est un peu mystérieux tout ça. On a des espaces d’écriture communs, et en même temps on écrit d’une manière dissymétrique. Mais on peut dire qu’il y a la rencontre sensuelle de nos deux voix qui vibrent ensemble. C’est surprenant de trouver une évidence, une justesse, une simplicité pour habiter nos chansons. Armelle s’est toujours entourée de musiciens qui aiment tenir l’espace, comme Mocke (Holden, Arlt) et Michel (Cheval Fou, Nyl), qui ont un rapport au mouvement et à l’improvisation. Moi je suis danseuse parallèlement, donc je suis beaucoup dans ces histoires d’espace et de recherche. Pour moi SuperBravo c’est une petite constellation. Michel c’est la terre qui rend les choses possibles. Le soleil, c’est Armelle qui éclaire tout de sa puissance lumineuse, et je serai la lune avec tout ce qu’elle de profond et de caché.

Armelle

Faire vivre l’espace dans les chansons, c’est ce qu’il y a de plus dur à faire. Laisser la place au silence, donner de la largeur aux choses… Avoir un musicien comme Michel, qui n’a aucune velléités d’écriture, qui est très instinctif et sauvage, ça nous donne du recul et j’adore ça. Quand on fait les chansons ensemble Michel perçoit les textes comme une musique ou le solo d’un instrument…

Michel

Moi j’ai beaucoup de mal avec les textes. C’est comme les clips, ça empêche de rêver. Mais j’y prends beaucoup de plaisir, et avec l’écriture de SuperBravo, je rêve totalement. Mais c’est vrai que je ne fais pas beaucoup d’efforts pour vous aider…

Chanson

Armelle

J’adore chanter en anglais, j’ai passé beaucoup de temps à Dublin et aux Etats-Unis, et j’avais une fixette pour la pop anglo-saxonne depuis l’adolescence. Avec Holden on a très vite voulu écrire en français, parce que quand tu chantes en anglais tu te retrouves à sortir des pauvres formules. Quand on est revenu de Dublin avec Mocke, on s’est dit qu’il y avait plein de choses à creuser avec le français. C’était l’époque de La Fossette (1992) de Dominique A et des premiers Katerine, tout ça c’était très excitant…

Maison de disques

Michel

La maison de disque ce n’est qu’un outil. Et quoi qu’il arrive, on n’arrêtera jamais de faire la musique. Si j’ai construit mon propre studio à Romainville, c’est parce que j’ai passé une dizaine d’années chez Sony, et le disque que tu fais ne t’appartient plus. Là on a une liberté totale… Autrement t’as un chef de produit et tu es un produit !

Armelle

Le grand luxe d’avoir un studio à domicile dans lequel tu peux travailler et t’enregistrer, c’est génial ! T’es plus du tout sous pression. J’ai connu le confort des maisons de disques… Mais elles ne perdent pas de vue le rapport économique des choses qui exigent que tu enregistres vite tes morceaux. C’est hyper frustrant. Pour l’Angle vivant, on a pris le temps nécessaire. Quand on a été signé sur Lithium en 98 avec Dominique A, Françoiz Breut, Diabologum et Mendelson, c’était un gant parfait pour nous. C’était des gens vraiment classes. Comme si ce mec nous avait donné un petit atelier où on pouvait faire ce qu’on voulait. Puis l’atelier a fermé… mais on a continué !

Photos : Thomas Bartel.

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