Hier soir, j’ai décidé que You Might Be Happy Someday était le plus beau disque de l’année. Il fallait bien que quelqu’un la prenne, cette décision. Je n’ai pas eu à me forcer et je ne vois pas comment je pourrais me dédire au cours des trois prochains mois. Avec toute l’objectivité de jugement que me laissent ces huit chansons, une fois le cœur transpercé en plein dans le mille, il ne peut pas en être autrement, car ce disque est une merveilleuse évidence. Du « sur-mesure », pour ceux qui aiment Sarah Records.
A peine ai-je eu le temps de me remettre de l’écoute de l’album de Vacant Gardens (lire ici), du dernier disque de Horrid Red (sorte de Neue Kalifornische Welle) et du 45 tours de The Reds, Pinks & Purples paru cet été, que l’inusable Glenn Donaldson vient se rappeler à mon souvenir avec sa plus émouvante collection de chansons – et de The Skygreen Leopards à Vacant Gardens en passant par Art Museums, on sait qu’il y en a. Même si il ne l’arbore pas sur un sticker rouge (ou rose, ou poupre), You Might Be Happy Someday est un disque de confinement. Toutes les chansons de The Reds, Pinks & Purples sont des chansons de confinement. Ce sont les chansons de l’intime et de la confidence, des peines et des regrets. On imagine aisément le Glenn Donaldson de The Reds, Pinks & Purples en un spécimen d’ermite, un genre de taiseux qui ne quitte sa guitare, sa mélancolie et ses disques de The Orchids que pour capturer les photos des rues dépeuplées de San Francisco qui serviront à illustrer ses chansons.
D’abord, il y a cette pochette épurée, aux couleurs pastel, ces volets baissés, le contraste saisissant entre la clarté et la tristesse. Ce qui est donné à voir correspond exactement à ce que l’on écoute dès la merveilleuse Last Summer In A Rented Room. Simple, mais essentiel, You Might Be Happy Someday joue d’une gamme de moyens limitée et ménage ses effets. On peut dresser l’inventaire minimaliste des artifices. Outre une guitare et le chant comme essence de ces chansons cristallines, on compte une boîte à rythmes pour les structurer, une basse pour les mettre en relief, un clavier ou une voix féminine pour les souligner, une réverbération pour voiler toute cette clarté, la seconde personne du singulier et des histoires pour tenter de cacher qu’on ne parle toujours, immanquablement que de soi. Soit, c’est très bien ainsi. Car c’est bien connu, seul le singulier mène à l’universel. Qu’ils soient d’une richesse symphonique ou conçus dans le dénuement d’une chambre, ces disques auxquels on se saurait rien ajouter ni retirer sont rares et demeurent sans doute les plus précieux. Alors, il peut bien s’agir de regrets (Last Summer In A Rented Room), de désillusions (Worst Side Of Town), de Sex, Lies & Therapies, dans ces conditions, l’impudeur laisse toujours la place à l’élégance. Même ce qu’on pourrait prendre pour du sentimentalisme est dit avec une telle simplicité, sans fard, qu’on ne saurait douter plus longtemps que le cœur est ouvert, là, juste à côté.
Hello,
Merci pour cette belle decouverte, en effet, c’est parfait pour un confinement, un couvre feu ou un reconfinement.
Un bel album qui donne envie d’en decouvir plus, je vais essayer de le trouver, en vinyle bien sur.
Bravo pour toutes vos chroniques et tout ce que vous nous faites decouvrir. Une version papier de Section-26 serait le reve mais le website c’est deja tres bien.
A bientot!