The Jam, In The City (Polydor, 1977)

Dans le panthéon du rock britannique, The Jam aura toujours une place de choix, quelque part entre les Kinks, les Who, Madness, XTC et Blur. Peut-on trouver plus Anglais que ceux-là ? Bien avant la Cool Britannia, The Jam ont défendu un héritage, sans non plus se faire une entorse cervicale, à force de regarder dans le rétroviseur. Ces trois-là avaient déjà tout dès leur premier album, le fantastique In The City en 1977, le début d’une carrière aussi exemplaire qu’éphémère. En six ans, The Jam publie six albums. Les 80s démarrent à peine (1982) que le groupe tire déjà sa révérence, laissant des armées d’apprentis faces inconsolables. The Jam est presque un art de vivre à lui tout seul. Cela commence par la formation du groupe, assez atypique : un power trio, comme Cream ou l’Experience de Hendrix. Cette formule aussi simple que minimaliste nécessite d’arriver à faire du boucan, avec moins de monde qu’à l’accoutumée. À la différence des deux autres groupes mentionnés, The Jam n’a aucun soliste (Jimi Hendrix, Eric Clapton) pour occuper l’espace. Paul Weller (chant/guitare), Bruce Foxton (basse) et Rick Buckler (batterie) vont à l’essentiel, sans artifice. Paul Weller utilise sa guitare de manière rageur, les accords traînent et se perdent dans des vagues de feedbacks. À trois, The Jam démarrent ; à trois, ils finissent. Dès In The City, ce groupe a quelque chose de particulier. Pas vraiment punk, ni pub rock, un peu des deux. Un peu mod revival aussi, mais tellement plus, car The Jam est unique. Art City ouvre l’album en trombe. Quelques riffs de guitares à la I Need You (The Kinks) et voilà nos Anglais lancés à très vive allure. La morgue du jeune chanteur vous saisit à la gorge. Ces gars-là ne vont pas s’écraser face à la rude concurrence. The Jam a quelque chose d’aristocratique, celle de ceux qui veulent s’extraire de leur condition, à travers l’ambition. La production de Vic Coppersmith-Heaven est impeccable. Quelques overdubs de guitares, mais rien de trop extravagant, l’album est vivant, sans tomber dans un ascétisme punitif. Le groupe s’autorise deux covers. Ils reprennent Slow Down de Larry Williams, un classique du répertoire Rock & Roll, également interprété par les Beatles, The Pirates ou les Flamin’ Groovies. Sans une once de gras, à fond les ballons, The Jam n’ont peur de rien et foncent, sans se poser de question. Ils s’attaquent aussi au thème de Batman (écrit par Neal Hefti), une touche de légèreté bienvenue dans cette profusion de guitares électriques. À peine trente-trois minutes au compteur, mais du genre à lessiver : In The City ne compte pas vous lâcher la grappe.

The Jam y propose quelques grandes chansons de leur répertoire, à commencer par le morceau titre. In The City et son riff mémorable ouvre la face B de la plus belle des manières. Le groupe a beaucoup d’autres atouts dans son jeu. Comment ne pas être séduit par les mélodies pop de I Got By In Time ou Away from the Numbers ? The Jam soigne aussi nos oreilles sur l’excellente Sounds from Street. Il y a quelques brûlots (I’ve Changed my Adress, Takin’ my love), pour les plus vindicatifs. Après In The City, The Jam fera d’autres classiques (All Mod Cons, Setting Sons et Sound Affects, entre 1978 et 1980) mais ce premier album a une saveur particulière. Il est rare d’entendre un groupe si uni et au point sur un premier album. In The City (1977) est un classique du rock britannique dans la vitalité est intacte presque cinquante ans plus tard. The Jam est éternel et il n’est pas trop tard pour le découvrir.


In The City par The Jam est sorti en 1977 chez Polydor

Une réflexion sur « The Jam, In The City (Polydor, 1977) »

  1. Cet album est un petit chef d’oeuvre que j’ai écouté de nombreuses fois en 1977 .Je suis allé à Mont de Marsan rien que pour eux ,lors du deuxième festival PUNK .Hélas, ils n’ont pas pu jouer .Une déception qui m’accompagnera toute ma vie comme un chagrin d’amour…
    Heureusement qu’il y a eu de grands moments dans ce Festival avec LBS ,le Tyla Gang Clash etc .
    J’aime beaucoup leurs deuxième album même si le disque s’est fait descendre en flammes par un critique Anglais .
    Cela ne me gênait nullement qu’il ressemble à leurs premier album !

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